Désormais tu sauras
130 pages
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Description

Les enfants viennent de partir. Je vis seule et j'ai la chance d'être autonome. Je suis heureuse de les voir chez moi, tous rassemblés, mais le dérangement et le bruit que génèrent les plus jeunes me fatiguent vite. Nous venons de fêter mes quatre-vingt-quinze ans ! Depuis le décès de mon mari, il y a un quart de siècle, ma vie s'est peu à peu réglée d'habitudes, d'horaires établis et de vieilles manies, ce qui la rend aujourd'hui rigide et quasi monacale. Alors, tout ce tohu-bohu me fait tourner la tête. Pourtant ce fut une belle journée ! Géraud, mon garçon, y est allé d'un petit compliment qui devait résumer mon parcours. Il m'a fort émue. Je perçus en l'écoutant les nombreuses lacunes et l'ignorance de ma progéniture concernant ce lourd passé qui, en silence, accompagne mon existence. Jusqu'à ce jour, je n'ai jamais éprouvé le besoin de me confier. Une certaine pudeur et peut-être une trop grande estime de ma pauvre famille et de mes proches m'en ont empêché. Aujourd'hui, arrivée au terme de ma vie, c'est différent.


Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 13 décembre 2013
Nombre de lectures 15
EAN13 9782365752343
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0056€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

André Boudon-Delmas


Désormais tu sauras


Roman






À Victorine et Henri Delmas, mes grands-parents maternels.

Je leur dédie cet ouvrage en souvenir de mes premières années scolaires passées chez eux, dans la maison du bonheur.

André BOUDON-DELMAS


Avertissement : ce que vous allez lire est une fiction placée dans le cadre de la ville de Saint-Flour et de sa région. Aussi, toute ressemblance avec des personnes, des commerces existants ou ayant existé, serait purement fortuite.


Prélude

Les enfants viennent de partir. Je vis seule et j’ai la chance d’être autonome. Je suis heureuse de les voir chez moi, tous rassemblés, mais le dérangement et le bruit que génèrent les plus jeunes me fatiguent vite.
Nous venons de fêter mes quatre-vingt-quinze ans ! Depuis le décès de mon mari, il y a un quart de siècle, ma vie s’est peu à peu réglée d’habitudes, d’horaires établis et de vieilles manies, ce qui la rend aujourd’hui rigide et quasi monacale. Alors, tout ce tohubohu me fait tourner la tête. Pourtant ce fut une belle journée !
Géraud, mon garçon, y est allé d’un petit compliment qui devait résumer mon parcours. Il m’a fort émue. Je perçus en l’écoutant les nombreuses lacunes et l’ignorance de ma progéniture concernant ce lourd passé qui, en silence, accompagne mon existence. Jusqu’à ce jour, je n’ai jamais éprouvé le besoin de me confier. Une certaine pudeur et peut-être une trop grande estime de ma pauvre famille et de mes proches m’en ont empêchée.
Aujourd’hui, arrivée au terme de ma vie, c’est différent…


PREMIÈRE PARTIE


I

Ma mère, Anastasie Andelas est née en 1 894 à Margeride, village haut perché du département du Cantal. Seconde d’une fratrie de six enfants, elle n’alla à l’école que lorsque les travaux de la ferme ou de la maison n’imposaient pas sa présence. Ce qui laisse à penser qu’elle la fréquenta peu, obtenant tout de même à l’issue de sa scolarité le précieux certificat d’études, sésame tant et tant convoité à l’époque.
Dès l’été qui suivit, elle fut engagée comme bonne à tout faire chez des pharmaciens de la ville de Saint-Flour. Dans cette grande maison, le travail ne manquait pas ! Cohabitaient les grands-parents paternels, fondateurs de
l’officine, les parents et trois enfants : deux garçons jumeaux de neuf ans et une petite fille de six. Les débuts furent très difficiles. Il fut exigé d’elle de parler en bon français, Madame Dupuy, l’épouse du jeune pharmacien, la reprenait à chaque erreur de langage, ce qui la rendait timide au point de ne plus oser dire un mot. Sa belle-mère, femme froide et imposante, lui parut d’emblée plus tolérante malgré les apparences. Elle commença, sous la houlette de cette dernière, un apprentissage de cuisine et de service compliqué. Les emplettes quotidiennes, parfois de produits inconnus, lui étaient dévolues. Enfin, elle devait se vêtir avec une présentation impeccable, à la mode des employées de maison, robe noire, coiffe et tablier blancs.
Elle n’avait que quatorze ans !
Durant les jours et les semaines qui suivirent, Anastasie prit ses repères en répétant inlassablement les mêmes tâches, le même labeur. Elle ne ménagea pas sa peine, et son énergie fit miracle ! Devant tant de progrès, Madame mère manifestait sa satisfaction. Au début, Monsieur Pierre, ainsi que ses deux garçons, moquèrent un peu son langage et ses façons de paysanne. Au lieu d’en prendre ombrage, elle essaya tant bien que mal de se corriger, ce qui n’alla pas toujours d’évidence malgré une grande volonté. Les j’y suis été ou c’est ça de la petiote n’abandonnèrent pas son vocabulaire à la première remontrance.
Lorsque le temps le permettait, Anastasie quittait Saint-Flour, toutes les trois semaines, du samedi après-midi au dimanche soir. Elle se rendait chez elle par la diligence de Védrines-Saint-Loup. Arrivée dans cette commune, il lui restait trois kilomètres à parcourir à pied afin d’atteindre Margeride. L’ensemble du trajet lui prenait en général trois bonnes heures. Attendue comme le Messie par ses parents et ses jeunes frères et sœurs la drôle devenait, de mois en mois, un personnage qui au contact de la ville et de ses patrons changeait de statut. À présent, elle en connait des choses, elle se lave même les dents et elle parle comme le maître d’école ! disait sa mère en patois.
– Fi de lou ! la fille est un peu bien tombée ! constatait son père, fier de sa grande.
Anastasie changea. Son corps se transforma. Elle devint en trois ans une vraie petite demoiselle pourvue de rondeurs et de manières d’une ravissante féminité. Elle prit peu à peu conscience de ses atouts physiques par les regards insistants de certains garçons de la ville, par quelques compliments reçus ici ou là. Les dimanches où elle restait à Saint-Flour, disposant de l’après-midi, elle fit connaissance d’une certaine Huguette Clamadier, issue d’une famille de paysans de la planèze et employée de maison, comme elle. Les deux filles devinrent très vite inséparables et leur connivence s’établit solidement au gré de petites sorties et de dévolus jetés sur tel ou tel.
Anastasie remarqua les stratagèmes dont usait Monsieur Pierre afin de rester seul avec elle. Au début, ces attentions furent prises pour de la sympathie, la jeune fille très sensible n’y vit aucune malice. Elle répondait par des sourires. Ce jeu s’installa, parfois au nez et à la barbe de la famille, sans que personne s’en trouva choqué. D’ailleurs qui pouvait avoir l’outrecuidance de penser qu’un fils de bonne famille, docteur en pharmacie, marié à une épouse issue du même rang que lui, père de trois magnifiques bambins, pouvait avoir une histoire d’amour avec la première bonne venue, fut-elle jolie ? Il y avait des limites à l’imagination ! À la réflexion, Anastasie faisait la même analyse.
– Que crois-tu pauvre fille, tu n’es pas de son monde. Arrête de rêver ! se disait-elle.
Pierre était un homme longiligne, de tempérament sportif, il portait une petite moustache et des rouflaquettes brunes sur un visage fin à l’œil vif. Toujours élégant, il se montrait rarement sans veston et portait une montre qu’il tirait de son gousset par une magnifique chaîne. Son intérêt pour la jeune employée allait croissant. Il la frôlait, la prenait par l’épaule pour lui parler, la saluait par de longues et équivoques poignées de mains… Sensible à ce jeu, Anastasie sentait son cœur s’emballer à sa simple vue. Devant lui, par timidité, par amour peut-être, elle devenait subitement gauche, tétanisée dans ses gestes et paroles. Cette situation amusait Pierre qui, fier de lui, en connaissait l’origine.
C’était le lendemain de Noël 1 912. La fête religieuse et gastronomique s’avéra excellente cette année-là, les cadeaux ne manquèrent pas, Anastasie reçut pour l’occasion une belle paire de souliers et un sac à main du dernier chic. Elle s’activait seule à la cuisine devant une vaisselle d’assiettes, de casseroles et de plats contenant encore, pour certains, les reliefs du grand repas de la veille. Il restait une bouteille de vin de Champagne entamée. Les femmes et les enfants à la messe, son père à l’officine, Pierre entra, surprenant la jeune fille.
– Je viens trinquer à la fête de Noël avec vous, dit-il
– Bonjour Monsieur Pierre ! répondit-elle, se sentant rougir.
– Bonjour Anastasie, nous pouvons nous embrasser aujourd’hui, c’est un jour particulier.
Il lui fit face et, la prenant par la taille l’attira vers lui. Ne rencontrant aucune résistance, il plaqua sa bouche sur la sienne. Suite à cette longue et fougueuse étreinte, elle balbutia quelque chose d’inaudible avant de retrouver le même bonheur en y mettant un peu du sien cette fois.
Pierre prit deux coupes dans l’office, les remplit du précieux liquide et en tendit une à Anastasie qui d’emblée refusa :
– Non monsieur, je n’en ai jamais bu.
– Vous n’allez pas me refuser en un si joli jour. Il est nécessaire d’arroser notre complicité. Notre grand et merveilleux secret !
Il enjoliva son insistance de son radieux sourire et de façons si romantiques, qu’elle céda en restant interdite… mais heureuse. Monsieur Pierre était si beau et sentait si bon : ses vêtements, son visage, sa bouche embaumèrent ses pensées et ses rêves les plus fous. Ils trinquèrent. Pierre lui posa un baiser sur le front et la fixa. Ne pouvant soutenir ce regard, Anastasie baissa les yeux. Elle avala sa coupe de champagne par petites lampées trouvant au breuvage ce côté pétillant fort agréable. Pierre lui caressait la joue en dispensant de doux mots.
Ils entendirent la porte du couloir s’ouvrir.
– La messe e

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