Les Sciences de l Information et de la Communication à la rencontre des Cultural Studies
255 pages
Français

Les Sciences de l'Information et de la Communication à la rencontre des Cultural Studies , livre ebook

-

255 pages
Français

Description

Cultural studies (CS) et sciences de l'information et de la communication (SIC) : un rendez-vous manqué entre deux traditions scientifiques ? En France, les SIC se sont constituées dans un contexte de mise à distance des CS anglo-saxonnes. Ce phénomène mérite de faire l'objet d'un éclaircissement, tant les sources d'inspiration ont pu paraître voisines, voire identiques. Les contributeurs de cet ouvrage posent les lieux de convergences et de divergences théoriques, voire méthodologiques entre ces deux traditions.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2010
Nombre de lectures 208
EAN13 9782296244474
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Préface

Cultural Studieset SIC : des rendez-vous
manquésetdesconcordancesdifficilesàtrouver


Bernard Miège

Un certain nombre de connexionsouderapprochements
sontactuellementenvisagés,tentés, ou recherchésentre lescultural
studies(CS) etles sciencesde l’information etde la
communication (SIC), dansplusieurspayseuropéenset
particulièrementen France;le phénomène interroge etil importe
en effetdese demanderpourquoi cela intervientmaintenantetnon
pas voici dix,vingtoumêmetrente ans. Le pointdevue dominant,
le plus souventavancé, metl’accent surles résistances
particulières, forteset spécifiquesque lesystèmeuniversitaire
(ainsi que lasphère intellectuelle) opposentà ce courant théorique,
pararroganceuniversaliste et visionrépublicaine du savoir. Il ne
me paraîtpasque cettevisionsoit satisfaisante, pourle moinsne
prend-elle pasen comptetouslesélémentsen jeu ;elle mesemble
laisserde côté à la foisdesquestionnementsetdes réalisationsqui
ontmarqué les universitésfrançaisesdansla période post-mai
1968.
Mon approchesera
délibérémentd’ordresocioinstitutionnelle, maisil mesera difficile de ne pasévoquerl’aspect
socio-cognitif, d’autantque celui-ci estévolutif etdiversifié, et
que, comme on peut s’yattendre, il gagne progressivementen
importance dansl’édification desSIC. Mais surtout, contrairement
à ce que laissentcroire certainsauteurscontemporainsquise font
lespromoteursdesCS, on peutconsidérerqu’on esten présence
d’aumoins trois versions trèsdifférentesetmêmesuccessivesdu
« domaine » :


Professeurhonoraire ensciencesde l’information etde la communication,
Gresec (EA608), Université Stendhal Grenoble3.

9

- lesCultural Studiestellesqu’elles sesontforméespuis
développéesen Grande-Bretagne etauxÉtats-Unis,tellesqu’elles
essaimentactuellementdanscertaines universitéscontinentales ;
- lesÉtudesculturelles, d’inspiration post-moderniste etqui
ontété candidatesàs’insérerdansdescursus universitaires, parfois
comme «humanitésmodernes» (surtout versla fin desannées
1980);
- plus
récemmentlesÉtudesculturellesentantqu’interdiscipline.

Il neva donc pasdesoi de positionnerlesSIC, elles-mêmes
évolutives, par rapportà ces trois versions ;de fait, elles sesont
toujours trouvéesplusen interaction avec lesÉtudesculturelles
qu’avec lesCultural Studies.
Maréflexion participe des travauxd’histoire
épistémologique desSIC, menésà l’initiative de RobertBoure
1
(voiren particulierBoure,2006), maisjetiensà préciserque ma
contributionseveutavant toutcelle d’untémoin etnon d’un
historien oud’un épistémologue.

Des rendez-vous manqués

Entroisoccasionsaumoins, à desmomentsclé des
mutations universitaires, on peuteffectivement se demander
pourquoi lesCS, pourtantdisponiblesetproposéesçà etlà, n’ont
pas réussi às’imposerdanslesprogrammes universitaires, ouplus
exactementdanslesprogrammesdes universitésetdépartements
relevantdeshumanités. Lescontextesétaient trèsdifférents
puisqu’ils’agissait:
- danslesannées1970, quand lesSIC portées surtoutpar
desfilièreslittéraires réunissaienten elles, nonsansambiguïtés,
(presque)toutce qui ne participaitpasdesfilièresen place etdes

1
Boure, Robert,2006L, «’histoire des sciencesde l’information etde la
communication. Entre gratuité et réflexivité »,Questions de communication, 10,
pp.277-295.

1

0

formations reconnues,ycomprislesplus récentescomme la
sociologie, etc.;
- danslesannées1990, à proposdudevenirdespremiers
cycles« Culture & Communication »;ilyeutalors un conflit réel,
etmême public, puisquerelayé parla presse nationale. L’élément
décisif estalorslerefusde la majorité desdépartements
d’Information-Communication d’accueillirdeseffectifsmassifs
d’étudiantsfortementattirésparl’imagevalorisée de la
communication. Il ne faudraitpourtantpasen conclure que la
minorité d’entre eux, qui ontpoursuiviune offre de formationtrès
ouverte en premiercycle avaient un projetcommun etclairement
orientéverslesCS oulesÉtudesCulturelles ;ils’agissait surtout
de projetslocauxetderéponsesaucoup parcoup à l’afflux
ème
d’étudiants, parfois sansperspectivesen2cycle;etlà oùles
propositions relevaienteffectivementdesCS oudesÉtudes
Culturelles,rien n’assure quetelle étaitl’attente desétudiants,
celle-ci concernant surtoutdesétudesprofessionnalisées ;
- lorsde la mise en place duLMD. À partirde2003, les
conditionsétaient réuniespourintroduire dansdifférentscursusdes
CS oudesÉtudesCulturelles. Maisprécipitamment, ons’est
souventcontenté detranscrire dansle nouveau système des
programmesanciens. De fait, letempsde l’expérimentation était
terminé eton a le plus souvent repris, à quelquesmodifications
près, descursusquisemblaientavoirfaitleurspreuves. Lescartes
n’ontpasétéredistribuées, ouguère, ce qui auraitpupermettre
d’introduire plusd’interdisciplinarité oudetransversalité. Il est vrai
que donnerla possibilité auxétudiantsde choisirdes« menusà la
carte »supposait, outre desmoyens,uneremise en cause de
l’organisation de l’enseignementpardisciplines ;etévidemment,
cellesquis’y seraientprêtéesauraientprisde gros risques.

Des concordances peuévidentes

Pourquoi ceséchecs, ouplutôt, cette mise à l’écartdes
Étudesculturelles? A ma connaissance, ilyeut rarementdes
conflits, oppositionsou rejets. Le plus souvent, le projetdesÉtudes

1

1

Culturelles, età plusforteraison desCS, n’a pasété défendu,
lorsqu’ils’estagi de fairesubirdeschangementsauxcursus.
Sansdoute faut-il évoquerla difficulté,sinon l’impossibilité
de l’Université française, dumoinsde la majorité des
établissements, à innover. Tout se passeviadeschangements
incessants voire desmutationslentes ;maisil est rare qu’onse
trouve dansdes situationsméritantd’être qualifiéesd’innovations.
Entoutcas, lesdébatsn’ontjamaisportésur: pour /contre
lesCS (faut-il introduire lesCS oules rejeter?), età plusforte
raison je m’inscrisen fauxcontre l’idée qu’ilyauraiteuen France
unerésistance à l’invasion dethéoriesétrangères. Certes, des
critiquesontété émisescontretelle pragmatique, et surtoutcontre
le fonctionnalisme, mais s’agissantdesCS, il fautplutôtparlerde
méconnaissance. On peutmêmese demander si les textes
argumentésetcritiquesd’auteurscomme Armand MattelartouErik
Neveun’ontpascontribué à informer une bonne partie des
universitairespeuaucourantde la place desCS dansleshumanités
en Grande-Bretagne ouauxÉtats-Unis.
De plus, la questions’estégalementposée à peuprèsdans
lesmêmes termesen Espagne, en Italie, en Amérique latine, etc., et
curieusementdansces« airesculturelles», lerecoursauxCS
émerge maintenantdansdesconditionsassez voisines.
Enréalité,surl’ensemble de la période, donc aucoursdes
troismoments-clés remarqués, lesSIC (à qui il ne faudraitpasfaire
porter toute laresponsabilité :lesétudeslittéraires, les sciences
socialesetpolitiques sont toutautantconcernées), ontde facto
développéun projetdifférentbasé pourl’essentielsur:
-une professionnalisationsignificative desformations
offertes ;
-unerecherche interdisciplinaire centréesurles
méthodologiescroiséesde la plupartdesSHS (avec, il est vrai,une
placeréduiteréservée à l’anthropologieparla communication).

CesontcesdeuxcaractéristiquesduprojetdesSIC qui ont
provoqué la mise à l’écartdesCS, etmême desétudesculturelles
post-modernistes. Ce n’estpas tantque lesSIC aient recouvertle
champ offertauxCS ouauxÉtudesculturelles,rendantl’appel à

1

2

celles-ci inutile oulesmarginalisant. Ellesontmisen œuvreun
projetdifférent,socio-professionnellementet scientifiquement, et
ce projet-qui n’allaitpasdesoi etarencontré bien
desécueilss’estfinalementimposé d’autantplusfacilementque, d’une partles
autresdisciplinespotentiellementint

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents