Regard d un psychanalyste sur la société
128 pages
Français

Regard d'un psychanalyste sur la société , livre ebook

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Description

Lorsqu'un psychanalyste va dans la cité, il s'interroge : qu'est devenu le désir de l'homme dans une société de la marchandise et du capital ? Et son lieu propre n'est-il pas dans la sphère de la culture face au monde envahissant de l'économie ? Ou encore : la liberté n'est-elle pas un trop lourd héritage ? Tout comme Marx pour la chose marchande, Freud a libéré la chose sexuée; celle-ci ne doit jamais être un objet fétiche et ainsi échapper au désir profond de l'homme.

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Date de parution 01 juin 2013
Nombre de lectures 15
EAN13 9782336668918
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0550€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

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Claude Brodeur
Claude Brodeur
REGARD D’UN PSYCHANALYSTE SUR LA SOCIÉTÉ
REGARD D’UN PSYCHANALYSTE SUR LA SOCIÉTÉ
Psychanalyse et civilisations
Regard d’un psychanalyste sur la société
Psychanalyse et Civilisations Collection dirigée par Jean Nadal L'histoire de la découverte de la psychanalyse témoigne que démarche clinique et théorie issues de champs voisins ont concouru, par étayage réciproque à élaborer le concept d'inconscient, à éclairer les rapports entre pathologie et société et à reconsidérer les liens entre le malaise du sujet singulier et celui de la civilisation.  Dans cette perspective, la collectionPsychanalyse et Civilisations tend à promouvoir cette ouverture nécessaire pour maintenir en éveil la créativité que Freud y a trouvée pour étayer, repenser et élargir la théorie. Ouverture indispensable aussi pour éviter l'enfermement dans une attitude solipsiste, qui en voulant protéger un territoire et préserver une identité, coupe en réalité la recherche psychanalytique de ses racines les plus profondes. Dernières parutions Gabriela TARANTO-TOURNON,La Psychanalyse comme parcours poétique. Une odyssée de soi, 2013. Marianne BOUHASSIRA-CHIRON,Frères et sœurs intimes ennemis. A propos du complexe fraternel, 2012. Marie-Laure DIMON (dir.),Fraternités, emprises, esclavages. Psychanalyse et anthropologie critique, 2012. Louis MOREAU DE BELLAING, L’accès au social,V, Légitimation 2012.Dominique GLOPPE,Idéologie et religion : une passion amoureuse. Mémoires, Histoire, Inconscient, 2011. Vincent MAZERAN et Silvana OLINDO-WEBER,La psychanalyse au travail. L’efficacité en question, 2011. Alain COCHET,Le scriptal. Lacan et l’instance de la Lettre, 2011. Nicole BERRY,La « Terre-mère », suivi de Études sur John Cowper Powys et Joseph Conrad, 2011. Claude PIGOTT,Jade et la quête des origines (par deux psychanalystes)2011. Guy LAVAL,Un crépuscule pour Onfray, 2011. Jean-Michel PORRET,Les modes d’organisation du transfert, 2011.
ClaudeBrodeur
Regard dvun psychanalyste sur la société
Du même auteur Portraits de famille, Montréal, France-Amérique, Collection «Thérapies», 1982. Sociétés d’hier et d’aujourd’hui, Montréal, H.M.H. Hurtubise, 1986. (René Devisch) Forces et signes, Regards croisés d’un anthropologue et d’un psychanalyste sur les Yaka, Paris, Archives contemporaines, 1996 - trad. anglaise The law of the life givers, Harwood academic publishers, 1999. Le psychotique : sa quête de sens, Paris, L’Harmattan, 1997. L’espace africain : double regard d’un psychanalyste occidental et d’un dramaturge africain, Paris, L’Harmattan, 1997. Le problème de l’inconscient - De la psychanalyse à la philosophie, Paris, L’Harmattan, 3 vol., 1999. Le père : cet étranger, Paris, L’Harmattan, 2001. Freud : philosophe ?, Paris, L’Harmattan, 2003. L’inconscient collectif, Paris, L’Harmattan, 2003. Parcours d’un psychanalyste – Le cheminement de l’idée, Montréal, Liber, 2008. En collaboration : L’intervention en réseaux : une pratique nouvelle, Montréal, France-Amérique, Collection «Thérapies», 1984. La famille: l’individu-plus-unHomme et Perspectives,, Vermette, Montréal et Marseille, 1990. © L’HARMATTAN, 2013 5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-343-00948-3 EAN : 9782343009483
PRÉSENTATION
Durant plus de deux ans, j’ai participé à un groupe de recherche et de réflexion sur différentes questions sociales et politiques. On y trouvait des sociologues, des politicologues, des anthropologues, mais encore des historiens et des philosophes. Parmi la vingtaine de membres, il y avait aussi des hommes et des femmes de deux générations. C’est à l’occasion et en marge des rencontres de ce groupe que j’ai produit les quelques essais qui composent cet ouvrage. J’étais le seul psychanalyste. Dans ma jeune vingtaine, j’ai fait des études en sociologie. Je n’étais donc pas tout à fait étranger aux sciences du social. Mais j’ai ensuite bifurqué vers la philosophie, où je me suis surtout intéressé aux questions qui regardent la réalité politique, depuis Platon et Aristote jusqu’à Marx en passant par Augustin, Thomas d’Aquin et Rousseau. Encore là, je pouvais établir des ponts avec mes collègues des autres sciences. Sortant du social, je me suis ensuite interrogé, toujours en philosophie, sur les problèmes de la connaissance, et c’est par ce chemin que je suis entré en psychanalyse quelques années plus tard. En écoutant mes premiers analysants, j’ai en effet réalisé que le discours inconscient lui-même, tout comme un discours conscient, obéissait à certaines lois de développement, suivant alors toutefois des voies personnelles. Mais bientôt des recherches sur différents collectifs (familles, réseaux sociaux, villages) m’ont entraîné à nouveau dans le domaine social. Comme l’individu dans le secret de son inconscient, ces entités collectives développent un discours dont les membres ne sont pas conscients, un discours inconscient, dont les figures sont analogues à celles du discours d’un individu. La boucle était alors bouclée.
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C’est ainsi grâce à ces expériences et à ces recherches personnelles que j’ai pu inscrire ma participation au groupe de collègues de différentes disciplines avec lesquels je travaillais. Mais aussi produire ce recueil d’essais, ces quelques analyses sur lesQuestions sociales. Je vous les livre dans l’ordre (ou le désordre ?) où elles sont apparues les unes après les autres dans mon cheminement personnel. Bien qu’elles relèvent d’un même ensemble de pensée, elles sont toutes indépendantes les unes des autres. Elles peuvent donc être lues dans la séquence désirée. Le lecteur aura l’entière liberté dans ses choix. Tout comme moi dans mon parcours sinueux.
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1 FAISONS PLACE AU DÉSIR La société moderne a construit une fabuleuse machine à satisfaire les besoins des hommes. Il faut maintenant développer un espace pour les désirs de l’homme. IJusqu’à une époque assez récente, les désirs humains étaient très étroitement liés ou intriqués à la satisfaction des besoins. On trouvait alors, dans l’« acte de travail » ou dans l’« acte de chair », le support immédiat pour un déploiement de désirs très profonds. L’acte de la chair allumait chez l’homme et la femme l’immensité du désir. Le travail de gestation inscrivait la femme, et son homme, dans la suite indéfinie des générations. Le travail artisanal et agricole de l’homme inscrivait sa marque dans la matière de ce monde, son univers. Les monuments, et plus spécialement les cathédrales du temps, réalisaient, à l’extrême limite du sublime, cette présence du corps et de ses besoins aux désirs les plus élevés de l’homme. Une masse de pierre d’où émerge l’esprit : l’esprit des courbes ondoyantes d’un style roman et l’esprit flamboyant du style gothique. Peut-être y verrions-nous là, mis en forme, les désirs de la femme et ceux de l’homme ? Avec l’avènement de la société industrielle, l’homme a évacué le désir et l’esprit de ses activités propres. Dans un moment de grave perversion presque nécessaire au cours d’un pareil mouvement de l’histoire, les hommes de la machine ont édifié le monde inhumain de la chose : la chose
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sexuelle comme la chose marchande. Ils ont proposé à l’homme moderne une existence sans esprit, sans son âme. La modernité ne s’est toutefois pas installée chez les hommes du jour au lendemain. Elle a mis près de deux siècles pour chasser l’esprit du monde occidental. Longtemps l’esprit devait résister aux assauts de la modernité. Les Églises chrétiennes ont lutté désespérément, pour maintenir le sujet du désir en lien très étroit avec le Dieu de toutes les promesses. Il y eut, par ailleurs, un certain nombre de projets de société, tous plus ou moins utopiques, dont le but était chaque fois de créer de toutes pièces une société marginale où l’homme puisse continuer de vivre dans l’idéal. Enfin, beaucoup ont sérieusement espéré que le communisme, avant et après Marx, viennent freiner ou tempérer le développement de la société industrielle : ce mouvement, généreux au départ, devait toutefois être contaminé, récupéré par les forces montantes du capital. C’est maintenant, dans le concept sinon dans toute la réalité humaine, le règne de « l’homme de fer », pour employer une expression du cinéaste polonais Wajda dans un film sur la perversion du régime communiste en U.R.S.S. Tandis que le sexe est devenu chose pour le plaisir, le travail devient pour sa part machine à produire et à distribuer la chose marchande. Il est bien que le sexe se soit à la fois libéré d’un lien trop étroit au biologique et d’un humanisme trop lourd encore des lois répressives imposées à l’homme afin de dominer ses impulsions charnelles. Entre les besoins biologiques élémentaires et la production du plaisir sexuel, on ne trouve plus toutefois la médiation du désir.
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La chose sexuelle ayant acquis une certaine liberté d’avec la chair de l’homme, il y a maintenant place pour une nouvelle prise de possession par l’homme, dans un rapport davantage médiatisé, d’une fonction sexuelle aux possibilités infinies. Les modalités du rapport sexuel entre les hommes se sont en effet grandement multipliées, et cela dans tous les sens : toutes les formes de rapports sexuels et toutes les pratiques se rencontrent dans nos sociétés. Par ailleurs, et de manière complémentaire, les capacités de sublimation sexuelle se sont développées avec une grande intensité dans tous les domaines du social : la science et les arts en profitent considérablement, mais aussi bien la vie sociale à tous les niveaux et dans tous les ordres de l’existence humaine. C’est ainsi seulement que la sexualité, de chose pour le plaisir qu’elle est devenue de nos jours, retrouvera son âme et une inspiration qui transcende l’univers de la chose. C’est en effet par la médiation du désir que la chose sexuée, depuis les besoins biologiques élémentaires, se trouve élevée, non seulement jusqu’au monde fantaisiste des plaisirs à chaque fois renouvelés, mais encore, par sublimation, jusqu’aux sphères les plus importantes et les plus grandioses de l’existence humaine. Comme pour le sexe, il est bien, en définitive, que le travail se soit libéré des muscles du corps et des sueurs au front. Depuis toujours, les outils avaient été considérés comme des prolongements des organes de l’homme et plus particulièrement de sa main. C’est ainsi de manière immédiate et très personnelle que celui-ci investissait alors, dans son outil de travail, ses espoirs sur la vie ; mais aussi,
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