Un milieu social face à la pauvreté
168 pages
Français

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Un milieu social face à la pauvreté , livre ebook

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168 pages
Français

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Description

La pauvreté au 21ème siècle dans l'UE est un désastre. L'un des remèdes, outre l'emploi, est de stimuler la coopération public/privé par le volontariat, le bénévolat et des fonctions complémentaires rémunérées. Le défi est un retour à l'équilibre économique et à une meilleure justice sociale sans seuil de pauvreté.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 avril 2015
Nombre de lectures 30
EAN13 9782336373294
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0700€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
4e de couverture
Rues des Écoles
Rue des Écoles
Le secteur « Rue des Écoles » est dédié à l’édition de travaux personnels, venus de tous horizons : historique, philosophique, politique, etc. Il accueille également des œuvres de fiction (romans) et des textes autobiographiques.
Déjà parus
Ducrocq (François), Théorie du stock froid , 2015.
Jacques-Yahiel (Simone), Ma raison d’être (réédition), 2015.
Albert (Thierry), Quel est votre nom ?, 2015.
Mbuyi Mizeka (Alfred) L’enfant noir d’Afrique centrale , 2015.
Alain Nesme, Léa la Sainte , 2015.
Pham Ngoc (Lân), De père inconnu , 2015.
Duhameaux-Lefresne (May), Le sourire du père , 2015.
Brousse (Odette-Claire), Sortir de chez soi , 2014.
Beuchée (Laurent), Un regard de Haute-Bretagne , 2014.
Lemaître (Vincent), Risques salés , 2014.
Micaleff (André), Heimat , 2014.
Coutarel (Colette), Promenade romantique à Pôle Emploi , 2014.

Ces douze derniers titres de la collection sont classés par ordre chronologique en commençant par le plus récent.
La liste complète des parutions, avec une courte présentation du contenu des ouvrages, peut être consultée sur le site www.harmattan.fr
Titre

André P HILIPPART




Un milieu social
face à la pauvreté

*

Pourquoi et comment reconstruire
l’équité du système social
par l’intervention citoyenne
Copyright




















© L’Harmattan, 2015-05-13
5-7, rue de l’École-Polytechnique, 75005 Paris
www.harmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
EAN Epub : 978-2-336-72340-2
LA DÉCHÉANCE La pauvreté conduit au silence
L undi matin 13 janvier 2014, quelques passagers ne souhaitant pas être dérangés, assis dans un des halls fermés de la gare du Midi à Bruxelles, distants les uns des autres, attendent le départ pour la France, bagages aux pieds, sans bruit ni mouvement. Le Thalys sans doute ou un TGV. Ils ne semblent pas pressés. Plutôt figés dans leurs pensées ou préoccupations, ils n’ont d’yeux que vers l’horloge. Les agents de sécurité veillent à n’y laisser entrer aucun inconnu en quête de chaleur. La mendicité n’y est pas la bienvenue. De chaleur humaine, il n’y a pas. Les inconnus anonymes, peut-être pas de la surveillance, dont les maigres biens tiennent dans des sacs en plastique souillés, sont pourchassés, parfois sans ménagement. La sérénité apparente qui y règne ressemble à un lieu de cérémonie funèbre.
Un homme, la cinquantaine, rasé, calme, marchant droit du haut de ses 180 cm, sans bagage, sachant où il allait et pourquoi, appuie sur le bouton de droite pour ouvrir la porte vitrée du hall. Certaines têtes se tournent vers lui, dans l’indifférence, attirées par son entrée. Dans une salle d’attente, voir sans regarder est assez coutumier. Rien dans la démarche ne semble suspect. Hormis l’absence de bagage, il est un passager parmi d’autres. Il porte un jean ayant passé l’âge, mais propre. Une veste achetée dans une brocante ou reçue d’une association, mal ajustée au corps, elle aussi sans trop de taches, garnit des épaules à peine effacées. Il contourne les sièges vers les poubelles du fond de la salle. Le bras gauche s’enfonce dans la première poubelle – la blanche – y retire un sachet contenant un demi-sandwich, jeté probablement par un passager pressé au petit matin. Cela fait, le bras droit se perd dans la poubelle bleue pour trouver une petite bouteille d’eau, elle aussi abandonnée – qui sait – par le passager en retard. Le troisième geste, dans la poubelle jaune, en put extraire un journal. Nanti de son maigre butin, ce visiteur s’assit sur le dernier siège de la rangée inoccupée, à l’écart et dos à la salle. Discrétion ou humiliation ? Il étendit le journal sur ses genoux, dégusta le sandwich, but l’eau, se leva, le journal dans une main et dans l’autre la bouteille, déposa le journal dans la poubelle jaune et la bouteille dans la poubelle bleue et partit aussi discrètement qu’à son arrivée. Discrétion ou humiliation ?
Le voyageur âgé, toujours soucieux d’être très en avance pour éviter le stress du voyage, alla à sa rencontre pour lui adresser quelques mots. Il avait saisi la raison du geste, sans doute répété chaque matin et invita cet homme à se rassoir afin d’en savoir un peu plus. Ce dernier se prêta au jeu avec gentillesse, sans formalisme. Il se pourrait que la petite conversation, inattendue, ait été la première depuis longtemps.
La pauvreté conduit au silence. André, prénom fictif attribué pour le récit, avait été un agent des services publics, vivant avec son épouse et sa fille dans un petit appartement d’un logement social. D’allure élégante, d’une taille séduisante, au contact humain aisé, un visage engageant, il avait découvert l’attrait des femmes, au passage le goût pour l’alcool. Femmes et alcool font bon ménage, un jeu de mots de l’observateur. Ce qu’il ne considérait pas comme des travers pouvant conduire à la séparation et au divorce ainsi qu’à l’exclusion du logement avec ce qu’il restait d’économie et à la mise à pied professionnelle. Famille, logement, argent, travail perdus, André se mit à la recherche et trouva en quelques mois un fond de cour pour se loger et comme emploi la maintenance dans une grande surface, consistant à évacuer chaque soir au-dehors des fruits et légumes considérés comme invendables. Il paraît que ces produits sont enlevés régulièrement par des associations. Ayant faim, André se permit un soir d’emporter quelques légumes et fruits « périmés », geste vu par le directeur de la grande surface, entraînant son licenciement sur le champ. L’errance s’aggravait. Le bouche à oreille professionnel n’est pas un vain mot, un mot vain, puisque la bouche n’est plus nécessaire et l’oreille n’a plus rien à entendre. C’est une arme redoutable. Elle ne tue pas, elle laisse mourir.
Le pauvre est d’abord une ombre. Il devient évanescent. D’ailleurs, les outragés comprennent à peine qu’on veuille leur réserver un quelconque intérêt et, en outre, de leur garantir des ressources sous forme d’allocations diverses pour survivre. André, pauvre, restait digne, disant qu’il lui était insupportable de faire la manche, de quémander fut-ce un euro. Pour lui un mendiant peut ne pas être pauvre, s’il fait partie d’un groupe au sein duquel vivent d’autres mendiants, au surplus si l’un d’entre eux ou plusieurs perçoivent des allocations de chômage. La vie en groupe permet d’atténuer le désespoir grâce à une forme de partage. Le pauvre isolé, par pudeur, libre et digne, ne se découvre guère.
Dazaï Osamu aurait-il pris André comme exemple pour écrire son livre « La déchéance d’un homme » ? Cette déchéance c’était à la fois la sienne et celle d’un inconnu dont il s’était inspiré pour expliquer la descente aux enfers. Lui, le fils d’un puissant aristocrate japonais, noble membre de la Chambre des Pairs (chambre haute), mort par suicide en 1948 à 39 ans, après une vie de débauche.
Quel rapport pourrait-on établir entre la situation d’André au début du 21 ème siècle avec celle de Shuji Tsushima, alias Osamu en littérature, le débauché de la première moitié du 20 ème siècle. Aucun. Sinon à parler de déchéance ou à s’interroger sur les fondements de ce concept. L’homme rencontré pendant quelques minutes se considérait-il comme une victime de la déchéance ? Ou la tendance est-elle à considérer André comme un homme déchu, dès lors ne présentant plus aucun intérêt dans la société de consommation ? Son comportement indiquait qu’il avait faim ce matin-là et qu’il n’avait probablement pas les quelques pièces pour se sustenter. L’ironie malveillante serait de penser que l’homme préférait récupérer les vestiges d’un déjeuner frais abandonnés par une personne pressée, par souci d’économie. André, semble-t-il, fait partie des pauvres pudiques, discrets, conscients des effets négatifs de leurs penchants, de leurs faiblesses, mais assumant sans trop d’aigreur un état qu’ils n’avaient pas perçu.

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