Afép
231 pages
Français

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Description

Reine de l'insondable forêt équtoriale, l'afép ou ficus étrangleur est une liane épineuse à le racine phénoménale et toxique. Elle se nourrit de la sève des plantes alentour et les tue. Le deuxième roman d'Honorine Ngou est une transposition allégorique des caractéristiques perverses de cette épine et retrace la vie d'un homme Afép, sexagénaire hanté par un inextinguible désir de puissance.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 novembre 2010
Nombre de lectures 245
EAN13 9782296449466
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0850€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Afép
L’étrangleur-séducteur
Encres Noires
Collection dirigée par Maguy Albet
et Emmanuelle Moysan

Dernières parutions

N°337, Katia MOUNTHAULT, Le cri du fleuve, 2010.
N°336, Hilaire SIKOUNMO, Au poteau, 2010.
N°335, Léonard MESSI, Minta, 2010.
N°334, Lottin WEKAPE, Je ne sifflerai pas deux fois, 2010.
N°333, Aboubacar Eros SISSOKO, Suicide collectif Roman, 2010.
N°332, Aristote KAVUNGU, Une petite saison au Congo, 2009.
N°331, François BINGONO BINGONO, Evu sorcier. Nouvelles, 2009.
N°330, Sa’ah François GUIMATSIA, Maghegha’a Temi ou le tourbillon sans fin , 2009.
N°329, Georges MAVOUBA-SOKATE, De la bouche de ma mère, 2009.
N°328, Sadjina NADJIADOUM Athanase, Djass, le destin unique, 2009.
N°327, Brice Patrick NGABELLET, Le totem du roi, 2009.
N°326, Myriam TADESSÉ, L’instant d’un regard, 2009.
N°325, Masegabio NZANZU, Le jour de l’éternel. Chants et méditations , 2009.
N°324, Marcel NOUAGO NJEUKAM, Poto-poto phénix, 2009.
N°323, Abdi Ismaïl ABDI, Vents et semelles de sang, 2009.
N°322, Marcel MANGWANDA, Le porte-parole du président, 2009.
N°321, Matondo KUBU Turé, Vous êtes bien de ce pays. Un conte fou , 2009.
N°320, Oumou Cathy BEYE, Dakar des insurgés, 2009.
N°319, Kolyang Dina TAÏWE, Wanré le ressuscité, 2008.
N°318, Auguy MAKEY, Gabao news. Nouvelles, 2008.
N°317, Aurore COSTA, Perles de verre et cauris brisés , 2008.
N°316, Ouaga-Ballé DANAÏ, Pour qui souffle le Moutouki , 2008.
Honorine Ngou


Afép
L’étrangleur-séducteur


Roman
© L’Harmattan, 2010
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-13595-6
EAN : 9782296135956

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
À ma maman, OYE OBOUNOU Claire sans laquelle ce texte n’aurait jamais vu le jour.

A mon mari Albert NGOU OVONO , pour avoir saisi ce texte.
Chapitre I
L’évanescence de la brume aurorale laissait place à une lumière blafarde qui se reflétait sur une piscine encore déserte. D’un bleu discret, le ciel semblait languir après le soleil étincelant du mois de février. Grisés par la fraîcheur du lever du jour, les passereaux se groupaient en essaims pour exécuter des mouvements presque concertés. Ce ballet inattendu offrait un spectacle unique et gommait toutes les peurs drainées par la nuit équatoriale. De tous les côtés, s’élevait un festival de couleurs et d’odeurs. Aucun risque de désillusion dans une ambiance qui exhalait des lendemains qui chantent. On respirait l’air frais à pleins poumons au milieu d’un joyau végétal composé de plantes rares. Laurent en prenait soin avec bonheur et traquait les cochenilles qui s’agrippaient comme des sangsues aux hibiscus polychromes, aux rosiers, à une verdure d’une luxuriance onirique.
Dans ce labyrinthe végétal, surgissait une maison dont les murs, d’un rose intact, tranchaient avec les fenêtres pistache. Véritable perle dont le propriétaire n’était pas peu fier, la villa Jupiter s’ouvrait à la vie comme une fleur de lotus et s’étirait avec nonchalance. Bercée par le vent marin et à l’abri des regards indiscrets, elle constituait un site d’exception sur lequel planait une force captative. D’allure altière, elle happait le regard du visiteur privilégié comme le Triangle des Bermudes. Quand quelqu’un y était convié, le regard du propriétaire lui faisait comprendre qu’il n’était pas tout à fait chez lui. A l’entrée de la villa, sculptés dans le ciment au-dessus de deux colonnes ioniques, deux aigles aux ailes déployées fusillaient tout le monde d’un regard redoutable.
La barrière gigantesque sur laquelle les barres de fer faisaient saillie semblait se vanter d’être infranchissable. À côté de la barrière se trouvait la maisonnette du gardien Sandaké tout aussi élégante. C’était le passage obligé pour quiconque voulait accéder à la villa. Homme grand au visage émacié, Sandaké exécutait à la lettre les ordres stricts d’Afép son patron, homme bourru et retors.
Gonflé d’a priori sur les autres, Afép pratiquait la préférence ethnique au nez et à la barbe de tous. Souvent, il hurlait à qui voulait l’entendre que rien de bon ne pouvait lui venir d’ailleurs. L’inconnu, quelle que soit son origine, est une menace, un possible pire. Sandaké, le seul étranger de la villa, faisait tout pour être irréprochable. Aucune étincelle de sa part ne devait provoquer un grand feu. Tant qu’il agissait selon la volonté d’Afép, la vie quotidienne était rythmée par une joie sans fard. Mais la moindre faute donnait lieu à des hurlements qu’on croyait sortir du fond de l’enfer. Sandaké rêvait d’une seule chose à ce moment-là : aller se cacher dans un fouillis de branchages que ne pouvait atteindre la voix spectrale d’Afép. La solitude l’obligeait à se souvenir des jurons grivois d’un homme dont les moments de décontraction étaient rares. Sandaké aurait payé cher pour savoir ce qui tourmentait autant un homme riche à souhait.
Quand tout semblait au repos et que le silence devenait oppressant autour de lui, Sandaké rejoignait souvent Laurent, l’infatigable jardinier dont le sécateur à émonder brillait au soleil et devenait brûlant.
Ah ! Te voilà Sandaké, comment vas-tu ? lui demanda Laurent un après-midi.
Un peu, un peu. Le patron m’a encore parlé mal, très mal. Il pliait même le poing comme s’il voulait me frapper.
Ah bon ! tu sais, je le connais très bien. Nous sommes du même coin. Il faut faire comme si tu étais toujours d’accord avec tout ce qu’il dit. Il veut que tout le monde s’aplatisse devant lui. Tu ne peux rien faire face à un tel homme. Tu es obligé de te tasser si tu veux conserver ton emploi.
Wa laï ! moi aussi je suis un garçon, Laurent. C’est dur de se taire quand un autre homme te parle avec autorité. Souvent, je me sens comme une femme. J’ai parfois envie de lui répondre. Mais mes gosses et ma femme ne comptent que sur moi.
Que veux-tu ? mon pauvre Sandaké ! tu n’as pas le choix. Il faut se taire pour survivre, fit Laurent d’une voix éteinte.
Laurent travaillait lui aussi sous la pression continue d’Afép. En dépit de son savoir-faire, il subissait le regard méprisant d’un homme difficile à satisfaire. Jeune homme dont la peau d’un noir parfait se moirait au soleil, Laurent était respectueux. Grand et plutôt joli garçon au sourire triste mais ravageur, il empêchait plus d’une fille de trouver le sommeil. D’une timidité maladive, il donnait l’impression d’avoir mis une cape opaque sur sa libido. Menant une vie à creuser la roche, il n’osait pas toujours aborder les filles dont le regard était plutôt rivé sur le porte-monnaie du dragueur. Les qualités humaines, passées de mode, ne les accrochaient pas du tout. L’ego de Laurent en était ruiné. A trente ans, il vivait chez sa sœur mariée à Zéphyrin Phauxo, sapeur-pompier, goujat et avare. C’est lui qui avait procuré cet emploi de jardinier à Laurent depuis quelques mois.
Adepte de plaisanteries de mauvais goût, Zéphyrin avait lancé à sa femme au cours d’une chaude discussion :
Le monde a besoin de gens dynamiques Yvonne, de gens qui agissent et non de ceux qui subissent le poids des échecs. Ton frère Laurent a des pieds et des mains, il pourrait s’en servir ! On ne va pas continuer à l’aider jusqu’à quarante-cinq ans !
Zeph, tu n’es pas gentil. Laurent ne nous coûte pas plus cher que nos enfants. Je ne peux pas accepter que tu parles de lui avec autant de mépris.
Qu’il fasse une formation ! je ne sais pas moi. Je le dis dans son intérêt. Rester à la maison toute la journée à regarder la télévision le détruit à petit feu. En attendant qu’il trouve mieux, il peut s’occuper de la résidence d’Afép qui a besoin d’un jardinier. Ton frère est humble, il pourra bien s’entendre avec Afép. Directeur général au ministère de la Lutte contre la déforestation, Afép a été à la tête de la P.M.S. banque pendant plusieurs années. Si tu voyais ce qu’il possède comme richesses ! C’est à devenir fou... Demande à Laurent si ça l’intéresse d’être son jardinier. Je m’occuperai du reste.
Zéphyrin parti, Yvonne parla avec Laurent et sut le convaincre d’accepter le travail de jardinier. Mieux valait un travail peu valorisant que des journées entières d’inaction et d’ennui mortel. Laurent avait raté le bac six fois. Il était donc prêt à retrousser les manches pour survivre et garder la tête haute. Rassasié de l’oisivet

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