FranceBitume
164 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

FranceBitume , livre ebook

-

164 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Description

Une cité HLM en banlieue parisienne. des jeunes traînent quotidiennement en bas des tours. Aziz, l'un d'eux, décide d'écrire un roman. Un roman parce qu'il veut fuir sa routine, et parce qu'il veut prouver qu'il est capable de produire, de créer, en dépit de son échec scolaire. De la Normandie à Paris, des débats sur la société de consommation aux soirées dans des squats, Aziz s'interroge sur les Hommes et le sens de l'existence. Il fait voyager son lecteur à la fin des années 60.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2012
Nombre de lectures 14
EAN13 9782296480599
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© L’Harmattan, 2012
5-7, rue de l’Ecole polytechnique, 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-296-56804-4
EAN : 9782296568044
France Bitume
Du même auteur
Etienn e Marre , Le Manuscrit, Paris, 2007
Nocturn e céleste , Le Manuscrit, Paris, 2009.
Benjamin Rosenberg
France Bitume
roman
L’Harmattan
À Moniqu e S . pou r so n aid e e t se s conseil s toujour s essentiel s
Intus, et in cute (à l’intérieur et sous la peau).
Jean-Jacques Rousseau, Le s confessions .
Première partie
Fais ce que je te dis ou ton père saura.
– Mais je l’aimais ! Et puis j’avais vingt ans. Je suis pas
– Ce sera à ton père d’en juger.
La cave est sombre et humide. Le jeune homme allume son téléphone portable et semble taper un numéro. La lumière du cellulaire éclaire le visage de la jeunefille, elle est belle, c’est inéluctable. Ses yeux sont humides, elle suffoque et ses lèvres tremblent.
– Non ! T’as gagné, s’exclame-t-elle avec effroi en attrapant les mains du jeune homme.
Il sourit narquoisement puis fourre son téléphone portable dans sa poche, déboutonne son pantalon et abaisse brutalement le visage de la fille jusqu’à sa verge tendue comme le stipe d’un palmier.
Il fait un signe de la tête à un autre jeune assis sur des cartons empilés. Ce dernier enclenche aussitôt la commande pla y de la caméra vidéo de son cellulaire.
Elle ferme les yeux et ses pleurs salés se confondent bientôt avec le foutre laiteux qui s’étale sur son visage.
Il reboutonne son pantalon et les deux garçons s’enfuient dans l’obscurité aux odeurs de remugle, de pisse et de mort aux rats. Elle reste là, assise à terre, les yeux fixant le néant, la bouche infestée d’une odeur fétide et le souffle court, la peur au ventre.
Au neuvième étage d’un immeuble HLM qui ne ressemble qu’à un assemblage d’une centaine de fenêtres prêtes à s’étouffer mutuellement, deux jeunes d’une vingtaine d’années jouent à la console de jeu. Ils’agit vraisemblablement d’un jeu de football puisque le fond de l’écran de la télévision paraît vert, et de minuscules points gesticulent dans tous les sens. L’un des deux bondit parfois de sa chaise, tout en pointant du doigt le téléviseur d’un air menaçant, et l’autre sourit en coin.
Au bout d’une vingtaine de minutes, ils posent leur manette, et sortent de sous le lit un genre de cigarette roulée, mais qui semble plus longue et plus épaisse. L’un des deux individus l’allume, en aspire la fumée, allonge sa tête sur le dossier de la chaise, recrache la fumée, et tend le joint à son ami. Ils restent immobiles, assissur leur chaise, silencieux, et le corps entièrement tourné vers la fenêtre de la chambre. L’un d’eux écrase la fin du joint dans un morceau de carton aux extrémités relevées, salue son ami d’une poignée de main lymphatique et sort de la pièce. L’autre s’assoit sur le bord de son lit, courbe le dos, pose chacun de ses coudes sur ses cuisses, et laisse retomber sa tête entre ses poings fermés. Il attend. Il attend que le temps passe, que la journée s’achève enfin, pour qu’une autre, désespérément identique, vienne la remplacer.
Le voilà qui bâille, et qui saisit un objet dont la couleur est difficilement discernable : rose, ou peut-être violet. Il le fait passer nonchalamment d’une main à l’autre, une dizaine, une vingtaine, même une cinquantaine de fois, puis le jette à terre, saisit sa veste, et sort de sa chambre.
Il entre dans la salle de bain, presse son index droit sur l’interrupteur et s’observe dans la glace : un duvet châtain qui commence peu à peu à laisser place à une fine barbe brune, des cheveux bruns coupés courts et une boucle d’oreille du côté gauche qui donnent à penser à sa mère qu’Aziz est un voyou ; un teint basanéet des yeux noirs qui cataloguent presque immédiatement le jeune homme dans la catégorie individ u e n éche c scolaire , ayan t u n casie r judiciaire , consomman t e t vendan t d u cannabis , possédan t un e arm e d e sixièm e catégori e e t sachan t s e servi r d’un e arm e à feu . Même si pour la plupart des jeunes français au teint basané et aux yeux noirs, cette généralité aurait été réfutée, dans le cas d’Aziz, elle n’est que partiellement incorrecte : il ne possède pas d’arme de sixième catégorie.
Il met sa capuche, se dirige vers la pièce mitoyenne, et tourne la tête vers un sofa blanc cassé sur lequel est assise une femme à la peau ridée, aux joues creuses et aux yeux noirs. Il remue ses mains dans tous les sens, tape du pied sur le sol, et claque la porte de l’appartement. Aziz descend les escaliers. Il passe à travers la vitre inexistante de la porte d’entrée du bâtiment et rejoint la zone C : un Lidl , un tabac et un vendeur de kebabs en face desquels sont disposés deux bancs de bois. La zone C désigne principalement ces deux bancs, où certains jeunes aiment se retrouver. Thomas et Romain sont chacun assis sur un banc. Thomas est d’origine martiniquaise, sa mère est technicienne de surface à l’hôpital Saint-Louis et son père manutentionnaire dans un entrepôt à Aubervilliers. Thomas a obtenu son baccalauréat en section littéraire, il est inscrit à l’université en philosophie depuis le début de l’année.
Romain est né dans le vingtième arrondissement de Paris. Lorsque sonpère a perduson emploi, la famille n’a eu d’autre solution que d’aller vivre en HLM où le loyer était moins cher. Il s’agitait toujours en classe et était un élève médiocre. Il disait n’être intéressé par aucune des matières proposées au collège et se décrit encore aujourd’hui comme autodidacte. Romain a donc mis fin à son parcours scolaire à l’âge de quinze ans, en fin de troisième. Il a lu quelques bonnes œuvres : l’Iliad e e t l’Odyssé e d’Homère, Nadj a de Breton, Antigon e de Sophocle, et L e pèr e Gorio t de Balzac ; et feuillette régulièrement des manuels d’histoire et de géographie pour s’instruire par lui-même.
Depuis trois mois, il est bénévole dans une association de soutien scolaire, il propose aux jeunes collégiens de la cité de leur faire réciter leurs cours, ou de les aider à réviser tel ou tel contrôle. Romain leur est très utile, pas tant par son savoir mais par l’encouragement à persévérer qu’il inculque aux élèves. Il a pour eux le rôle d’un coach : il leur donne l’envie de se battre pour sortir de cette cité qui, comme toute autre, destine ses résidents influençables et peu ambitieux à la déchéance. Aziz s’assoit près de Romain.
– Tu fais tourner ? dit-il à son ami qui tient un joint de la main droite, entre le pouce et l’index, la fraise en direction de la paume.
Romain le lui tend.
– Aziz ! Regarde qui arrive, s’écrie Thomas qui bondit du banc et s’esclaffe d’un rire forcé et bruyant.
– Arrête de crier, elle va t’entendre. Vous pouvez quand même avouer qu’elle est belle ! s’exclame Aziz en parlant de plus en plus discrètement.
– C’est vrai qu’elle a un bon petit cul, quand est-ce qu’elle y passe ? reprend Thomas d’un air taquin.
– Ta gueule. Tu vas finir par grandir ? Naëla est pas l’une de ces filles qui se font prendre par une dizaine de mecs dans un parking aux odeurs de pisse ! C’est pas une traînée ! Il faudrait commencer par la respecter avant d’espérer ne seraitce qu’un baiser.
Romain saute du banc sur lequel est toujours assis Aziz, rejoint Thomas et tape dans la mainque ce dernier lui tendait. Les deux amis ricanent et se tournent vers Aziz.
– Sors de ton conte de fées ! Avec les femmes il faut agir, elles aiment pas qu’on réfléchisse trop. Prends ton courage à deux mains et invite-la au cinéma au lieu de la dévorer bêtement des yeux à chaque fois qu’elle passe devant toi ! Ah non j’oubliais : ce serait irrespectueux, ce serait mieux que tu sonnes à sa porte avec un poème et un bouquet de roses.
– C’est vrai ! Agis mon vieux, renchérit Romain. Si t’attends trop, un autre mec tentera le coup, et il te la piquera.
– Laissez-moi faire ce que je veux ! J’ai aucune envie d’aller lui parler.
Naëla sort enfin du Lid l les bras chargés. Avec son teint halé, ses yeux marron et ses cheveux bruns, elle a, au sens le plus général, le physique classique d’une jeune femme maghrébine. Mais c’est son regard à la fois pudique, sensuel et
provocateur, et la rondeur de ses petites fesses — même si dans un souci de bonne conscience, il a du mal à se l’admettre — qui plaisent à Aziz.
– Va lui proposer ton aide, bolosse ! Elle a les deux mains prises ! C’est maintenant ou jamais ! dit Thomas.
– Allez, bouge-toi ! dit Romain qui pousse son ami dans la
direction de la jeune femme. Aziz se lance, il s’approche d’elle.
– Salut Naëla. Ces sacs sont pas trop lourds ?
– Si ça l’est. D’ailleurs p

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents