La boxe de l homme ivre
248 pages
Français

La boxe de l'homme ivre , livre ebook

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248 pages
Français

Description

C'est la fuite en avant d'un être qui réfute son existence et jouit avec morbidité de son effacement contenu et métaphysique. De façon sous-jacente, ce roman sombre par moments à la limite de l'abstraction, est aussi une métaphore caustique, critique et jubilatoire d'un monde qui se traîne d'un chaos permanent au bord de son dernier gouffre.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 octobre 2012
Nombre de lectures 34
EAN13 9782296506442
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

contournements de eur, ma bouche avide de toi cherche encore la source de tes séismes. Mes yeux assoiffés guettent l’arrivée des mirages à l’heure où le bas de ton ventre se fend d’une chaleur aqueuse et édénique comme au commencement fantasmé de tous les euves de la Création…
génie mélancolique de ma poésie d’homme ivre. Empli d’une béatitude incommensurable, il me vient alors perdu dans la senteur boisée et animale de ton jardin – s’offrant à mes rites païens et animistes –, l’envie de m’abandonner au goût de tes pétales et de me répandre en prières murmurées avec des mots d’avant le langage, comme si frappé soudainement par une révélation mystique, je venais de découvrir le saint des saints, toute la beauté cachée de l’univers, condensée et résumée ici à un triangle doré qui te commence et te înit si bien... Égaré et maudit, je viens y boire ma doucereuse afiction d’être né. »
Né le 3 janvier 1972, Dominique CAPELA est architecte et docteur en
propose à un éditeur.
© Photos et couverture Dominique CAPELA, juin 2012.
ISBN : 978-2-336-00415-0 24,50
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Dominique Capela
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La boxe de l’homme ivre
Juin 2012
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À Agnès
© L’Harmattan, 2012 5-7, rue de l’Ecole polytechnique, 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-336-00415-0 EAN : 9782336004150
La boxe de l’homme ivre
Dominique Capela
La boxe de l’homme ivre roman
L’ Harmattan
I
Mercredi
Matin
«À l’homme heureux même l’eau peut procurer une certaine ivresse. » Voilà la première pensée qui me vient au réveil ce matin de juin. Curieuse et positive, elle embrasse tout mon être d’une mélancolique plénitude comme cette eau à demi tiède qui inonde ma bouche, ma gorge… Elle étanche ma soif et ravive ma langue rêche d’un goût légèrement saumâtre. Souriant, allongé sur le lit, le regard au plafond, je pose mécaniquement la bouteille d’eau minérale aux trois quarts vide sur le vieux parquet de chêne. Puis, tournant la tête sur le côté, je contemple les lignes courbes et délicates de son corps endormi. Il irradie de celui-ci une douce chaleur moite telle une brume qui semble troubler l’air de son onde vibrante. Anaïs est le nom que porte ce lieu à la fois si lointain et si proche, si interdit mais à cet instant presque accessible Corps-paysage, sublimé de calmes collines blondes, de vallons pleins d’humidité boisée, de dépressions, de lacs, de rivières souterraines qui pépient et mugissent lorsque du fond d’une dépression, elles affleurent à la surface ou sourdent d’une faille… Étendue fascinante, parfois inquiétante comme une eau trouble et tumultueuse dans laquelle j’ai envie de plonger, gueule ouverte, mâchoires en avant, pour dévorer et garder dans ma propre chair chaque molécule de ce territoire dont je suis le seul à éprouver la singulière et véritable inexistence. Le corps de la femme est toujours le lointain rappel d’un monde d’avant le monde – intra-utérin –, le souvenir signifié d’un paradis à jamais perdu. Il en est le résidu charnel et temporel dans lequel l’Adam comme l’Ève tentent de revenir par le béant. Nous venons tous de là et voulons inconsciemment y retourner, afin de nous lover de nouveau dans le doux lit de viscères de cet Éden – visqueux, soyeux et chaud –, que notre subconscient imagine très beau. Trop beau. Inconsciemment,
nous entretenons l’espoir de remarcher nus et purs dans ce pays chimérique, au nom imprimé au plus profond de l’être et auquel désire retourner l’être lui-même. Nous nourrissons cette espérance de prières païennes aux couleurs enchanteresses. Elles nous sortent parfois par les yeux quand nous sommes en présence de celle ou de celui que nous pensons être l’autre moitié de nous-mêmes. Face à face affligeant du bonheur de deux êtres, qui les yeux dans les yeux et se tenant par la main, effleurent du bout de leur âme ce doux Éden à l’instant entraperçu… Derrière l’arrondi du ventre d’Anaïs pointe la vie et la clarté d’un jour de printemps qui déjà promet l’été. Et moi, moi assailli par toutes ces mièvres pensées, je souris bêtement à l’affluence de réflexions malhabiles et naïves, de celles qui habillent et emplissent d’écritures encore maladroites ou trop appliquées les pages roses ou bleu pâle du journal intime des jeunes filles en fleur d’avant – d’avantFacebook et deTwitter…Peut-être en reste-t-il encore de celles-là ? Sûrement. Si le suicide et la névrose n’ont pas raison d’elles, elles sont promises au flétrissement heureux des orchidées. Je suis là, étendu sur mon lit, traversé de pensées d’une banalité accablante cristallisant la réalité des choses. La lâcheté m’amène à me dire que de telles divagations, d’une nature si doucereuse, ne m’appartiennent pas. Allongé sur le dos, le regard au plafond, je continue d’afficher mon bonheur éphémère au rien… Nous ne savons pas toujours pourquoi, un jour, on se réveille le sourire aux lèvres, plein d’une joie de vivre béate sans véritable raison et d’autres fois, nous sortons du sommeil les yeux comme le cœur, cernés de noir, l’âme charbonneuse creusée d’idées morbides avec des envies de plongeons dans le vide. Je me redresse au bord du lit avec la peine rhumatismale et la lourdeur lithique d’un vieillard centenaire. Sauf que moi, j’ai 35 ans. Je ne pensais pas dépasser en âge la limite christique de ce qui n’est pas convenu d’outrepasser quand on est attiré par un si profond désir de trépassement – trop jeune pour crever et déjà trop mûr pour la crucifixion. Mon âme comme ma viande traduisent un ras-le-bol persistant de l’existence au même temps qu’elles témoignent d’une accoutumance à ce ras-le-bol sordide. C’est là le plus grave.
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Pour moi, qui au hasard de mes lectures découvrais vers dix-sept ans Friedrich Nietzsche, mon mal-être trouvait dans cette phrase dePar-delà bien et mal un : « écho apaisant La pensée du suicide est une puissante consolation : elle nous aide à passer maintes mauvaises nuits. » J’endure depuis trop longtemps une méthodique crucifixion, d’abord subie puis auto-affligée à grands coups d’excès plantés au cœur du nerf ; des coins enfoncés aux angles de l’âme pour l’arrachement, pour l’éclatement d’un sarcophage de chair trop étroit dans lequel je suffoque jusqu'à la nausée dans une odeur persistante de mort collant à la peau, aux habits – qui vient du dedans –, odeur que rien ne peut laver et qu’aucun parfum ne peut masquer. J’ai beau me débattre, changer de lieu… je reste enfermé dans ce cercueil carné. Combien de matins aveuglants débordants de rage envers soi d’abord, puis envers les autres ? Combien de jours et de nuits n’ai-je traversé, vérolé de culpabilités chroniques, constellé de céphalées étroitement enlacées aux nerfs optiques, à crier une douleur aqueuse et muette… « La pensée du suicide est une puissante consolation… » pour nous soulager du démembrement, de l’écartèlement entre nous et nous-mêmes. Mais quand je vois ce paysage paraître dans son trouble, innocemment offert à mes sens et possédé par la lumière solaire, je crois presque, à cet instant précis et à cet instant seulement, que d’être heureux me serait possible. Là, il me vient des idées romantiques à vomir, des idées saugrenues, qui me poussent comme des boutons au visage d’un adolescent acnéique. Et je contemple au croisement de la rotondité soyeuse des cuisses – lumineuses collines lisses d’un marbre blond –, cet îlot sylvestre aux couleurs automnales dissimulant à peine sa chair de nacre mordorée et rose, fendu d’une brèche dont nous ne voyons pas la fin mais que l’on devine se terminer d’un autre côté. C’est «l’Origine du monde». C’est là le commencement individuel d’une errance absolue. Mais ce paradis imaginé nous restera inaccessible, à jamais caché, car même à la femme échappe son propre secret… Elle est cette part visible du devenir qui écrase toutes les antériorités et fait de chaque être humain la prémisse de lui-même.
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