La Céleste et le Container
188 pages
Français

La Céleste et le Container , livre ebook

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188 pages
Français

Description

Cinq nouvelles qui nous parlent à la fois du quotidien de l'Algérie d'aujourd'hui, celui de tout un chacun, et de celui que vit et partage avec les autres l'auteur, né en Algérie et revenu vivre, voici bientôt trois ans, dans sa ville natale, Constantine. Bien sûr, Constantine, la très antique cité, aux dénominations diverses liées à son histoire, La ville des Ponts, le Vieux rocher, l'écrasante, la Céleste, impose son image décrite par maints auteurs au fil du temps.Š

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Informations

Publié par
Date de parution 01 juin 2014
Nombre de lectures 55
EAN13 9782336349107
Langue Français
Poids de l'ouvrage 9 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Armand VIAL
La Céleste
et le Container
La Céleste et le Container
Collection «Vivre et l’écrire» dirigée par Pierre de Givenchy Voir en fin d’ouvrage la liste des titres de la collection
Armand Vial
La Céleste et le Container
Illustration de couverture : Armand Vial
© L’Harmattan, 2014 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris http://www.harmattan.fr diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-343-03634-2 EAN : 9782343036342
L’artiste Anselm Kiefer, dans sa leçon inaugurale au Collège de France le 2 décembre 2010 – L’Art survivra à ses ruines –, décrit un de ses processus de travail : dans son atelier de Barjac, composé de cinquante-deux bâtiments reliés par des tunnels souterrains et aériens, il lui arrive d’enfermer des peintures dans l’obscurité d’un container, durant de longues années. Une forme d’arrêt du temps, de mise à l’écart mais aussi d’agression par l’enfermement des œuvres, consentie, voulue.
Armand Vial, lui, est photographe et bien sûr il lui arrive d’écrire quand il considère que les mots sont plus appropriés que l’image pour dire ce qu’il veut dire. Mais ces nouvelles ne sont-elles pas finalement d’autres images, imaginaires ou réelles, d’ailleurs souvent associées à des photographies et des peintures, quand ce n’est pas au théâtre.
Pour pénétrer au cœur de ces nouvelles, forme littéraire qu’il affec-tionne particulièrement, il faut certainement dévoiler en partie ce qui a déclenché l’écriture. Non pas pour tenter une quelconque approche psychanalytique du contenu mais pour, d’une certaine façon, revenir sur ce concept d’agression qui revêt selon les circonstances et les lieux des formes différentes, plus ou moins brutales, et des conséquences parfois inattendues.
En juin 2011, Armand Vial décide de revenir vivre et poursuivre son travail en Algérie, son pays, et plus particulièrement à Constantine, sa ville natale. Il est alors habité par plusieurs projets et la tête pleine de rêves. L’entreprise de transports maritimes commanditée s’engage à lui faire parvenir à Orléans, où il demeure alors, un container. Il va donc le remplir de ce dont il ne peut se séparer, des signes matériels, visibles de ce qui le constitue pour une grande part selon ses dires : de très nombreux cartons dans lesquels sont empilés avec soin tous les livres de sa biblio-thèque et tout le contenu de son atelier de photographe – l’Atelier des Marges – situé alors tout près de la Loire, le fleuve tranquille, le chemin qui marche seul.
Le contenu de son atelier : des appareils bien sûr, des objets divers, des photographies d’autres photographes, des dessins, peintures, gravures d’artistes amis. Ses livres publiés, ses tirages argentiques, ses négatifs noir et blanc et couleur, ses carnets de notes, des projets en cours. Parmi ses projets, l’un d’eux très avancé,Pierres Aïeules, soit plus de cinq
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cents photographies en écho à l’œuvre de Pascal Quignard :Dernier Royaume. Dans le container, plus de trente ans de travail.
Quinze jours plus tard il est averti que son container se trouve sur le port de Skikda. Entre-temps il a loué un grand appartement pouvant accueillir son atelier et acheté des bibliothèques. Seize mois plus tard le container est toujours sur le port sec de Skikda, bloqué par les Douanes algériennes, après un passage par la fourrière à l’issue duquel tout pouvait être détruit ou vendu aux enchères. Des démarches diverses et nombreuses, des courriers adressés aux plus hautes autorités algériennes et françaises, des voyages à Paris, le tout sans résultat. Le voici alors enfermé, prisonnier de l’attente et du silence.
Kafka et Ubu Roi réunis ici sur le port sec de Skikda. Motif officiel : un vide juridique. Le code des douanes, selon la version officielle, n’a pas prévu son cas : ni employé d’une grande entreprise ni personnel diplo-matique. Il n’existe pas pour les douanes algériennes. La bureaucratie toute puissante et muette, souvent matériellement inté-ressée dresse un rempart infranchissable entre lui et son container. Trois étés, un hiver, l’humidité ambiante ont réduit à néant trente ans de travail. Rien. Plus rien. Que reste-t-il de lui, Armand Vial ?
Dans l’appartement, les trois appartements successifs, l’atelier demeure vide, virtuel. Les étagères, les plans de travail attendent, eux aussi. Pour ne pas se laisser emporter par ce néant, pour tenter de tromper l’angoisse qui lhabite,ilmeublelesétagèresdesfruitsdesescueillettesdanslavieilleville. Ce rituel il le connaît bien et le pratique depuis longtemps. De possibles compositions prennent forme et l’accueillent silencieusement quand il tourne en rond dans l’appartement et finit par chercher refuge dans l’atelier : un crâne de mouton, un pot en plastique bleu et brûlé, une carcasse de téléphone portable, une grenade desséchée, une cafetière cabossée...
Le container, pensée obsédante, l’a obligé par ailleurs à acheter un appareilphotographiquenumérique.Besoinvitaldêtreenpossessiondel’outil de travail : un appareil photographique. Ce faisant il doit affron-ter un autre deuil, celui de la photographie argentique, impraticable ici.
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Pour lui, un autre univers. Il ne se sent plus maître de ses images et ce type de rapport au temps et au monde ne lui convient pas. Sans compter la disparition de l’autre rituel, celui de la prise de vue, du développement des films, du tirage...
La bibliothèque quant à elle n’offre comme présence que quelques livres achetés sur place ou rapportés d’Orléans ou de Paris à l’occasion de brefs voyages. Les livres font semblant de remplir tout l’espace der-rière les vitres, aidés en cela par quelques photographies de petit format, encadrées.«Touslesmatins,quandilselève,ilnepeutsempêcherdallersaluerlabibliothèque.Là,ilseheurteaureetdesonvisagegé.Derrièresonreetlevide,labîme,labandon,lasolitude.Unepartde lui-même lui a été enlevée, arrachée, ressentie comme une forme de meurtre. » Ses livres. Ses fidèles compagnons de route depuis si longtemps. Alors Armand Vial ne sait plus qui il est vraiment, si même il est. Ses rêves sont moins colorés, ses projets se réduisent comme peau de chagrin.
De sa ville, le Vieux Rocher, il n’en retient que les qualificatifs popu-laires : la Céleste, la Cité des Ponts, l’Écrasante… Écrasé, il l’est. Alors il déambule, il regarde, met en place d’autres rituels et va se confier aux façades rocheuses des gorges du Rhumel. Des scènes de la vie quotidienne l’interpellent, d’autres images prennent forme, des mots surgissent, une mémoire se reconstitue se heurtant à l’ici et maintenant, peuplée des présents anonymes condamnés à l’attente et des absents silencieux. L’impérieux besoin d’écrire se fait jour.
C’est dans ce contexte qu’ont été écrites ces nouvelles.
Six nouvelles qui toutes parlent du Vieux Rocher, de cette cité fasci-nante à plus d’un titre, de ses habitants, de ce qu’ils vivent aujourd’hui. Six nouvelles qui parlent aussi d’Armand Vial aujourd’hui, dans cette Algérieretrouvée.
Le lecteur pourrait s’étonner de se trouver brusquement confronté à la dernière : Tombées. À la lecture déjà imagée du texte s’ajoutent douze images faisant partie intégrante du récit. Non pas une illustration, mais une autre forme d’écriture.
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