La peau sauvée
218 pages
Français

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La peau sauvée , livre ebook

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Description

Métisse dans la Martinique des années 50, où le degré de pigmentation de la peau définissait le statut social, Marie-Chantal vit une enfance à la fois heureuse et déchirée au sein de deux familles que tout oppose. Entre la mère génitrice et la mère de lait, dans un climat où l'amour, la jalousie et le ressentiment sont intimement liés, elle raconte comment elle a pu se construire, trouver sa place, se trouver.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 02 avril 2010
Nombre de lectures 189
EAN13 9782336257099
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0850€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Lettres des Caraïbes
Collection dirigée par Maguy Albet
Déjà parus
Sylviane VAYABOURY, La Crique. Roman, 2009.
Camille MOUTOUSSAMY, Princesse Sitâ. Aux sources des l’épopée du Rāmāuama, 2009.
érard CHENET, Transes vaudou d’Haïti pour Amélie chérie, 2009.
Julia LEX, La saison des papillons, 2009.
Marie-Lou NAZAIRE, Chronique naïve d’Haïti, 2009. Edmond LAPOMPE-PAIRONNE, La Rivière du Pont-de-Chaînes, 2009.
Hervé JOSEPH, Un Neg’Mawon en terre originelle. Un périple africain, 2008.
Josaphat-Robert LARGE, Partir sur un coursier de nuages, 2008.
Max DIOMAR, 1 bis, rue Schoelcher, 2008.
Gabriel CIBRELIS, La Yole volante, 2008.
Nathalie ISSAC, Sous un soleil froid. Chroniques de vies croisées, 2008.
Raphaël CADDY, Les trois tanbou du vieux coolie, 2007.
Ernest BAVARIN, Les nègres ont la peau dure, 2007.
Jacqueline Q. LOUISON, Le crocodile assassiné, 2006.
Claude Michel PRIVAT, La mort du colibri Madère, 2006.
Danielle GOBARDHAN VALLENET, Dumanoir, l’incroyable destinée, 2006.
Max DIOMAR, Flânerie guadeloupéenne, 2006.
Le Vaillant Barthélemy ADOLPHE, Le papillon noir, 2006. Christian PAVIOT, Les fugitifs, 2006.
Danielle GOBARDHAN VALLENET, Les enfants du rhumier, 2005.
Philippe Daniel ROGER, La Soulimoune, 2005.
Camille MOUTOUSSAMY, J’ai rêvé de Kos-City, 2005.
Sylvain Jean ZEBUS, Les gens de Matador. Chronique, 2005.
Marguerite FLORENTIN, Écriture de Griot, 2005.
Patrick SELBONNE, Cœur d’Acomat-Boucan, 2004.
Danielle GOBARDHAN VALLENET, Le secret du Maître rhumier, 2004.
La peau sauvée

Yollen LOSSEN
© L’Harmattan, 2010
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan 1 @wanadoo.fr
9782296115552
EAN : 9782296115552
Sommaire
Lettres des Caraïbes - Collection dirigée par Maguy Albet Page de titre Page de Copyright Dedicace AVANT-PROPOS 1 - MES ANCÊTRES 2 - MES PARENTS 3 - MARIE-CHANTAL 4 - LE TESTAMENT DES DEUX MAMANS GLOSSAIRE
À Versilia … ma mère
Un honnête homme c’est un homme mêlé Michel de Montaigne
AVANT-PROPOS
Les personnages de ce roman sont entièrement fictifs. Cependant ils expriment tous, la réalité des rapports sociaux dans l’île de la Martinique entre 1930 et 1960, où le degré de pigmentation de la peau définissait le statut social. Toute ressemblance avec des personnes vivantes ou décédées ne serait que pure coïncidence.
Je suis une métisse, une « sang-mêlé », une chabine* née dans la violence, d’un père blanc et d’une mère noire. Chabine ! J’habite ce mot qui me ramène jusqu’à mon enfance, avec le souvenir précis d’instants délicieux partagés avec ma mère. Quand elle m’appelait chabine, je feignais de ne pas l’avoir entendue, afin de savourer la répétition de ce mot qu’elle prononçait sur la mélodie d’une tierce descendante et qui annonçait toujours l’offrande d’une douceur: un zacchari* ou une « tablette coco ».
Dans mon île, la Martinique, poussière pour certains, mais le plus grand pays du monde pour moi, j’ai été adulée comme une princesse, rejetée comme un crachat, aimée comme il n’est pas possible de l’être, et protégée comme un diamant.
Nichée dans mon écrin, je n’ai pas su regarder autour de moi. J’étais heureuse, comblée par deux mamans que j’aimais d’un même amour.
J’ai grandi brutalement à mon arrivée à Paris, dans la «mère patrie» où, étudiante, j’ai constaté que je n’étais qu’une «négresse».
Afin de cicatriser ma blessure, je me réfugiai dans les écrits de Frantz Fanon et d’Aimé Césaire, qui m’éveillèrent à l’histoire de mon peuple et qui m’aidèrent à me situer. « Peau noire masques blancs » ainsi que le « Discours sur le colonialisme » devinrent mes livres de chevet. J’ai découvert alors une foultitude de choses essentielles, et j’ai compris que mon trouble et mon traumatisme étaient dus à la méconnaissance de mon histoire.
Je me suis intéressée aux déracinements, aux déportations, aux tiraillements, aux joies et aux espoirs de ceux qui ont façonné ma terre, et j’ai voulu tout savoir sur mes origines et sur l’histoire de ma famille. Je passais mes premières vacances au pays à traquer les minutes de disponibilité de ma mère, afin qu’elle me parle de mes racines.
Je me souviens de sa retenue, de la gêne qu’elle éprouvait à m’ouvrir ce paquet de souvenirs qu’elle gardait au plus profond d’elle-même, comme une boîte à secrets dont elle aurait perdu la clef.
Ce ne fut pas facile car, ma mère ne voulait me transmettre que de « belles choses ».
Après maintes suppliques, elle osa enfin m’offrir en cadeau, l’histoire de mes ancêtres.
Longtemps, je me suis réveillée différente, entendant comme un écho sa voix mélodieuse me conter ces choses si terribles et parfois si belles.
J’ai intégré et assumé toutes ses blessures, ses déchirures, ses souffrances et ses joies. J’ose vous en offrir le partage, sans haine, sans colère … Juste, vous les raconter.
1
MES ANCÊTRES
Mon arrière grand-père se nommait Charles-Henri. Il vivait dans le manoir de ses parents en Normandie. Son grand-père, commerçant dans la région de Rouen, ayant fait fortune, y avait acquis une immense propriété et offert les meilleures écoles à ses enfants. La famille, embourgeoisée, se complaisait dans les mondanités, et s’évertuait à coups de réceptions somptuaires, à grimper dans l’échelle sociale.
Charles-Henri, rebelle, refusa d’embrasser la carrière médicale à laquelle son père le destinait, préférant mener en parallèle des études de musique et de droit. Petit à petit, le violon prit le pas sur le droit, et il lui consacra la majeure partie de son temps.
Jeune homme doué, Charles-Henri commençait à se faire un nom dans le milieu fermé des solistes, et se produisait sur des scènes prestigieuses. Sa sensibilité enchantait son auditoire et lui assurait des moments de volupté avec les femmes les plus séduisantes de la bonne société.
Son répertoire allait de Mozart à Tchaïkovski sans oublier Beethoven, et bien d’autres encore.
Il s’était pris d’une passion exclusive pour une brillante pianiste quelque peu volage, avec laquelle il vivait de sublimes moments d’émotion artistique dans l’exécution de duos.
Le jeune homme supportait mal les relations que sa dulcinée entretenait avec d’autres hommes. Sa jalousie fut à l’origine du drame qui ruina sa carrière et qui mit fin à sa vie de jeune dandy. Une valise à la main, son violon sous le bras, un trait tiré sur sa précédente existence, il arriva un beau matin, en terre inconnue : la Martinique. … Exil forcé. Une réunion de famille avait scellé son destin.
« Tu nous as déshonorés, tu seras déshérité !!!. » lui avait crié son père.
« Afin de t’éviter la prison, nous t’avons réservé une cabine sur un paquebot qui appareillera dans trois jours pour l’île de la Martinique ; c’est une de nos colonies qui se situe dans les Caraïbes. Nous avons contacté Monsieur de la Source, un confrère installé depuis peu là-bas, et qui tient le comptoir des épices. C’est lui qui t’accueillera, accompagnera tes premiers pas sur cette terre lointaine et se chargera de te trouver quelques hectares de terres, bien situées.
Il te sera de bon conseil et, avec le pécule que nous te laisserons, tu n’auras aucun souci d’argent pour ton installation. Sois prudent et juste mais, garde tes distances. En attendant ton départ, tu te cacheras dans l’appartement de ton cousin, à Paris.
La Martinique est paraît-il une île magnifique au climat agréable ; si tu t’y prends bien, tu te feras vite une bonne situation. Méfie toi des békés car, avec leurs nombreuses relations, ils risqueraient de percer rapidement le secret de ton exil. Ton seul lien avec ton passé sera ton violon que tu pourras emporter.
Oublie nous. Ne reviens plus. Une nouvelle vie t’attend. Désormais tu t’appelleras: Charles-Henri Sartes. C’est l’anagramme de notre nom. Bonne chance ! ! »
Son identité perdue, obligé d’oublier le nom qui avait fait de lui l’un des musiciens les plus en vue de Normandie, forcé à l’exil définitif, Il prit la mesure de son acte. Pourtant, il fallait rester digne et lucide : c’était mieux que la prison.
Le matin d’avril 1862, le cœur serré, les yeux rougis, il embarqua à Saint Nazaire sur le paquebot : « La Louisiane ».
Pendant les treize jours de la traversée, il resta indifférent à la vie à bord, au luxe de sa cabine de première classe qu’il ne quittait que pour le

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