Le flair de Brume
231 pages
Français

Le flair de Brume , livre ebook

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231 pages
Français

Description

"Il avait besoin de reprendre son souffle. Mais plus il respirait et plus il avalait de la fumée. A la faveur d'un souffle de vent, il découvrait le clocher de l'église qui se consumait doucement dans le ciel. A sa gauche, il entendait distinctement les pleurs d'une petite fille." Des cadavres qui sortent des murs cinquante années après leur mort ; un manuscrit inachevé qui agite les esprits et l'ombre du maquis plane une nouvelle fois sur le plateau du Vercors.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 septembre 2007
Nombre de lectures 109
EAN13 9782296179172
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0800€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le flair de Brume

© L'HARMATTA,2007
5-7, rue de l'École-Polytechnique; 75005Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN: 978-2-296-03831-8
EAN: 9782296038318

Laurent LUTAUD

Le flair de Brume

Roman

L'Harmattan

Ecritures
Collection dirigée par MaguyAlbet

Dernières parutions

Anne-Marie LARA,Lesbellezêveries,2007.
Antoine de VIAL,Prendrecorps ou l’enversdes mots,2007.
Antoine de VIAL,Y9/11 911.Editionbilingue,2007.
Urbano TAVARES RODRIGUES,Lafleurd’utopieAflorda
utopia.ouvelles traduitesdu portugais parJoãoCarlos
VitorinoPereira.Editionbilingue,2007.
Collectif (concours de lanouvelleGeorgeSand),Dernières
nouvellesduBerry,2007.
JaunayCLAN,MiloszouL’idiot magnifique,2007.
JeanBENSIMON,Récits de l’autre rive,2007.
AnneMOUNIC,Jusqu’àl’excès,2007.
ManuelGARRIDO PALACIOS,L’Abandonnoir,2007.
PierreMARTIN,La beautédeGhephra,2007.
FrançoisAUGE,Lumièrecachée,2007.
DerriBERKANI,Le retourné,2007.
AlainLORE,Àtravers les orties,2007.
NicoleVictoireTRIVIDIC,Pleure,2007.
LilianeATLAN,Même les oiseauxne peuvent pas toujours
planer,2007.
LilianeATLAN,La bêteaux cheveux blancs,2007.
LilianeATLAN,Les portes,2007.
LilianeATLAN,Petit lexique rudimentaire et provisoiredes
maladies nouvelles,2007.
LilianeATLAN,Lesânes porteursde livres,2007.
HananiaAlainAMAR,Le livre inachevé etautres textes,2007.
ThomasKARSENTY-RICARD,Les poings serrés,2007.
GenevièveCLANCYet PhilippeTANCELIN,Laquestionaux
pieds nus,2007.
MarieGUICHARD,Levindu souvenir,2006.
PaulineSEIGNEUR,Lesbonnes intentions,2006.
MichelleLABBÉ,Lebateau sous le figuier,2006.
GiovanniRUGGIERO,Tombeaude famille,2006.
JacquesBIOULÈS,La PetiteDemoiselle& autres textes,2006.
PierreFRÉHA,Sahib,2006.

À la mémoire de
Patrice Escolan
etPierreDalloz

Leciel était gris de fumée.Une fuméequimontait
lentementdu sol,suintaitdes murs, des toitures,soufflait
dansles rues vides, hantantlevillagequi crépitaitencore çà
etlà.Iltournait surlui-même et nevoyait que dugris.Une
infinité de gris où perçaientencorequelqueslueursbleues
d’unciel d’été.
Ilmarchaitdansdes ruines, faisantattentionànepas
poser ses pieds surlesbraises rougissantes.De loinenloin, il
percevaitdescoupsde fusilsetdemortiers.Par moments, il
distinguaitclairementleronronnementd’unavionetbaissait
latête. Pendant sa courtemarche fébrile, ilserappelaitces
heures passéesdanslesboisavecsescompagnons.Ilsavait
aussiqu’ily retourneraitbientôt,qu’ilnepouvait pas rester
ici,qu’il était uneproietropfacile.
Ils’arrêtait.Il avaitbesoindereprendreson souffle.Mais
plusilrespiraitet plusil avalaitde la fumée.Iltoussaitde
plusbelle et soudain,mu par une étrangevolonté,se
remettaiten route.Il levaitles yeuxenl’airà larecherche
d’uncoinde cielpuretdécouvrait une grandeombrenoire

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devantlui.Elleplanait surlarue, dressant sonimposante
figuresombre.Toutà coup, il avait peur.Cen’était pas une
peurhabituelle,une de ces peurs quivousenserre lapoitrine
dans unétau,vousglace lesang,vousfait perdrevotresueur
parle front, les mains, le dos.Non! c’était unepeur qui
venaitdeplusloin.Ellen’était pascrééepar un sentiment,
une impression ou une appréhension.Ellevenaitde
luimême, du plus profond desonêtre.C’est peut-être cette
peur quivient quand la finest proche,se disait-il.Il
continuaitd’avancer,s’approchant toujoursde l’ombre,son
corpsentièrement serti danscettepeuret, à la faveurd’un
souffle devent, découvraitle clocherde l’églisequise
consumaitdoucementdansle ciel.Unepointe de grisfoncé
dans un nuage grisclair où persistaientdes pochesde
lumièrequi, lorsqu’ellesétaientbattues pasl’airchaud de
l’été, devenaient rouge etdégageaient mêmequelques
soubresautsde feu.Àsa gauche, il entendaitdistinctement
les pleursd’unepetite fille.Et si ces pleursdéchiraient ses
oreilles,semêlantauxcraquementsdesflammes, aux râles
des maisonsbrûlantes, au vacarme des poutres qui
s’effondraient surdes tasde cendres, ellereprésentait
néanmoinslaseuletouche d’humanité dansce lieu meurtri.
Une humanitésourde, branlante,malmenée.Ilse disait,sans
vraimentenavoirconscience, ilpressentait plutôt,que ces
sanglotslancésdanslescrisduciel avaient quelque chose de
rassurant.Celavoulaitdire,sansdoute,que l’on pouvait
survivre à ça !
Maiscombiendetemps ?
Ilnesavait plus si c’était sonesprit qui déraillait ou si ces
pleurs provenaient réellementd’unevolonté humaine.
Comme ilnesavait pluslenomde cevillage,nimême
commentil étaitarrivé jusque-là.Quelquesimageslui

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revenaientcomme desflashes.Desavions seposant sans
bruitdanslaplaine, des planeursd’où sortaientdeshommes
enarmes.Les maisonsenflammes, desfemmescouraient
dansles ruesleurbébé danslesbras.Deshommesen
uniforme, guidantleurlance-flammesur une grange.Un peu
loin, la façade d’unhôtel explosaitdans ungrand fracas, les
pierres rebondissaient surlesol etil échappaitdepeuà l’une
d’elles.Unarbre isolé apparaissaitdansla fumée, il croyait
devinerl’ombre de deuxhommes pendus surlamême
branche,s’équilibrantde leur poids.
Etluique faisait-il là?Au milieude ces ruinesfumantes,
alors quesescamaradesavaient rejointdepuislongtemps
l’épaisse forêt qui leur servaitderefuge depuisdes mois ?
Qu’était-ilvenuchercherdanscevillage déserté depuis
l’arrivée des planeurs ?
D’épuisement, ils’écroulaitdans une brume de fumée et
sentait ses membres s’engourdir.Les pleurs serapprochaient
de lui.Iln’yavait plusd’autres sons.Que des pleurs, des
fleuvesde larmes qui coulaientdans sapoitrine, de longs
sanglots tragiquesetabsurdes.

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Cela avaitcommencé au milieude lanuit.Jeannotavait
d’abord eufroid danslesjambes,puislemal était monté
dans ses reinset s’emparait maintenantdetout soncorps.
Quand il fermaitles yeux, il avaitl'impressiondepartiren
arrière, danslevide, et s'éveillaiten sursaut, le front trempé
desueur.Il finissait par s'allonger surleventre, les mains
sousl'oreiller, le dos parcourud'étrangesfrissons, latête
agitée depensées tumultueuses.Quand ilrestaitdanscette
position,sesdoigts semblaienténormesetil frottait ses
mainsauxdraps pour retrouverlasensationde leurjuste
proportion.Àd'autres moments, c’était satêtequi grossissait
demanièremonstrueuse,ses yeux ridiculement petits,perdus
dansleur orbite etilse balançaitde droite à gauchepour
échapperà cette fièvreondulante.
Au matin, il avaitessayé dese lever,mais quand il avait
aperçulescristauxde givresurlepourtourde la fenêtre, il
s’était réfugié dans sesdraps.Dès qu'il avait senti la faiblesse
deson maître,Brume était venu se blottircontre lui et son
pelagevibraitdes mêmes tremblements queJeannot.
C’est seulement versdixheures que,nesupportant plus
l'effervescence de l’animal, il lui avait ouvertlaporte en

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prenant soin de l’attacher au voletavecune corde d’escalade
de cinquantemètres,puisavait regagnésonlitencoretiède.
Iln’avait rienà faire.Il haletaitet ses muscles,pourtantau
reposdepuis unequinzaine de jours, étaientdurscomme
après une course en montagne.Le froids’agrippaitàsapeau,
àses os.Ilse déplaçaitlentement, errantentreses meublesà
larecherche d’uncoinconfortable;il avaitenvie dese blottir
dansl'hiver, deresterdansle creuxdesesdrapsentre le
sommeil etlaveille, danslatendre insouciance d'un
dimanchesansfin.
Jeannotdormaitàpoingsfermés quand lasonnerie du
téléphone lesortitdeses rêves.
—Alors,tudors ?demandaunevoixlointaine.
—Mouais.
Dans sa bouche, ilsentait ungoût pâteuxetacide, ce goût
quivient quandonatropdormi.
—Tufais quoi?
Ilreconnaissaitlavoixde Ramock.
—Rien.
—J’aima grange àretaper.
—Ah !
Il avait posé letéléphonesurl’oreiller, jetait uncoupd’œil
résignéparla fenêtre en s'humectantleslèvres.
—Avec cetemps-là?
—Justement!
Brumemontasurla couverture, frétillantd’impatience.Il
frottasatruffe aubrasdeJeannot qui lepoussa, irrité.
—Mais oui,on vasortir.
Ils’étiraitdoucementen regardant unem

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