" Les Blancs, il faut les manger crus ! "
200 pages
Français

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" Les Blancs, il faut les manger crus ! " , livre ebook

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200 pages
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Description

Comment la plaisanterie de Mama Bontidad : " Les Blancs il faut les manger crus ! " a-t-elle pu devenir une réalité ? Le vaccin contre la nouvelle forme de sida extrêmement contagieuse qu'on a réservé aux nations riches va les tuer. Mais la découverte du professeur de médecine, mari d'Adlée, qui, petite, avait pris au sérieux Mama Bontidad, va sauver le monde dans ce qui fut son berceau : l'Afrique. Dans cette fable, de 1929 à nos jours, trois générations vont connaître des événements et des hommes qui ne laisseront aucun répis à l'éternelle question de Kindé, l'Africain, et de son ami Brandy, le Noir américain : que faut-il faire pour rendre le monde meilleur ?

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mai 2010
Nombre de lectures 318
EAN13 9782336257709
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

" Les Blancs, il faut les manger crus ! "

Jean Estivill
Sommaire
Page de titre Page de Copyright Dedicace LE VILLAGE - KINDÉ, BONTIDAD - 1987 LE VILLAGE - BLANCHE NÉGRESSE, KINDÉ - 1929 LONDRES - KINDÉ - 1940 LONDRES -B RANDY, KINDÉ LA FRANCE - KINDÉ, BRANDY - 1944 BARCELONE -B RANDY - 1944 PARIS - KINDÉ, CHANOUS - 1945 BRANDY, LES DÉPORTÉS ESPAGNOLS - 1945 PARIS - GARCIA-MENDES - 1946 CIUDAD RODRIGO - BRANDY - 1948 REUS - BRANDY, MARIA ROSA - 1948 PARIS - KINDÉ, MYRIAM - 1948 LE VILLAGE - BONTIDAD - 1948 ALGER - MYRIAM - LE 26 AOÛT 1956 LE VILLAGE - KINDÉ, BONTIDAD - 1960 PARIS - MANUEL, LUISITA, LUTHER - 1965 PARIS - MANUEL, LUISITA - MAI 1968 LE VILLAGE - BONTIDAD - 1970 GRENOBLE - KINDÉ, BRANDY - 1973 LE VILLAGE - ADLÉE - 1988 PARIS - PURI - 1988 LE VILLAGE - ADLÉE - 1991 PARIS - ADLÉE, BRANDY LE VILLAGE - KINDÉ - 1996 PARIS - LE MARI D’ADLÉE, BONFERRAND ADLÉE, LISSA LE VILLAGE - ADLÉE, KINDÉ QUELQUE PART EN AFRIQUE : UN COMMUNIQUÉ DE L’ASSOCIATION AFRICAINE D’INFORMATION LE VILLAGE - KINDÉ, BONTIDAD
© L’Harmattan, 2010
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr
9782296112414
EAN : 9782296112414
À Amandio, si juste, courageux et bon qui nous manque tellement
À Jacky, l’ami soleil
À l’abuelita et tía teresa
À Yeyette la grande sœurette
À Marie-Thérèse et Juliette qui portent discrètement et fièrement le flambeau transmis par Antonia et Ramon leurs grands parents
À Hervé C. de Cotonou, mon condisciple de H IV, qui à 17 ans me fit découvrir l’horreur du racisme, piqûre de rappel du vaccin familial
À Martine et Patrick qui font de la vie un art qui la justifie
LE VILLAGE - KINDÉ, BONTIDAD - 1987
« On les a toujours mangés cuits ?
- Il faut dire que c’est eux qui le demandaient, d’ailleurs le feu, avant que les blancs apparaissent, on l’ignorait assez. Pour tout dire, on s’en passait souvent.
- Ce n’est pas les blancs qui nous l’ont apporté quand même grand-père ?
- Non, mais le feu, on lui courait beaucoup après et, quand on était fatigué, on y renonçait tout simplement. Si on les faisait cuire, ce n’était pas parce qu’ils étaient meilleurs à ce qu’on disait autrefois, c’est qu’ils criaient trop quand on les mangeait crus, et puis, ils ont commencé à dire qu’ils préféraient ça, qu’on les cuise.
- Quand est-ce qu’on a arrêté de les cuire grand-père ?
- Quand on s’est vu obligé de ne plus les manger. On souffrait de maux d’estomac. Cela venait de leur foie, il était comme empoisonné par une boisson qu’ils appelaient absinthe. Le cœur était trop dur, les poumons, on ne les reconnaissait pas, et la cervelle comme elle était de plus en plus liquide, on la perdait, bref, tout ce qu’on aimait chez l’homme, on a fini par ne plus le trouver chez eux, en tout cas chez ceux-là. Maintenant si vous voulez me croire, il ne faut pas les cuire, ils sont quand même meilleurs crus. Quoi qu’il en soit, de toutes façons, on doit les manger, ce n’est pas possible, c’est la seule manière de s’en sortir. L’homme blanc, il faut le manger...
- Je suis sûre que les hommes blancs, c’est ce qu’ils veulent depuis toujours, être mangés, c’est pour ça qu’ils sont venus, pour qu’on les mange ! »
Comme souvent Mama Bontidad eut le dernier mot ce soir-là.
Dans la nuit, Adlée ne put s’empêcher de réveiller sa cousine.
« Et le foto, tu crois qu’ils n’en ont pas parlé à cause de nous ?
- Le foto chez l’homme blanc, il est peut-être bon, mais à part le sucer comme les os de poulet quand il ne reste presque plus rien, ce ne doit pas être très intéressant. Un jour, j’ai entendu Mama Bontidad qui disait que c’est fin comme un cure-dent, petit comme un clou de girofle et mou comme les asticots qu’on trouve dans la semoule de pépé Youndé. »
« Mais vous allez vous taire ! » A travers la paroi de la case, Mama Bontidad mit fin aux interrogations des deux fillettes : « C’est parce qu’il est mauvais qu’on va le manger l’homme blanc et parce que c’est nécessaire. » A ce moment, les deux cousines crurent comprendre que Mama Bontidad les investissait sûrement d’une grande mission car tout ce qu’elle disait devait être considéré avec le plus grand sérieux.
LE VILLAGE - BLANCHE NÉGRESSE, KINDÉ - 1929
Blanche négresse, c’est comme cela qu’on avait toujours appelé Bontidad, jusqu’au jour où elle avait mordu jusqu’à la couper en deux l’oreille de Kindé Touné. « C’est parce que ton père est allé faire la guerre des blancs », lui répétait sa grand-mère, sans jamais paraître lassée de ses questions.
Il y avait douze ans que les hommes étaient partis sans qu’aucun ne soit jamais revenu. Bontidad comptait comme son oncle le lui avait appris : elle n’avait pas existé pendant trois ans... C’était toujours la même soustraction qu’elle faisait vérifier. Depuis deux ans qu’elle savait poser l’opération, il manquait toujours trois ans. Parfois, l’angoisse qui l’envahissait se communiquait inconsciemment à son vieil oncle Bindalé qui choisissait d’éluder le problème en se fâchant : « Je ne t’apprends pas à lire et à compter pour toujours me demander la même chose. Qui se soucie de ton âge ? Même moi, je ne pourrais pas dire le mien avec certitude. »
Kindé Touné qui ne savait pas compter avait deux grandes oreilles avant qu’il perde la moitié de la gauche et il savait s’en servir, surtout qu’à la maison on était nombreux, les conversations s’alimentaient à la moindre occasion et partaient dans tous les sens.
« Blanche négresse, elle ne sait pas pourquoi elle s’appelle comme ça et elle voudrait connaître son âge.
- Mais son âge, c’est son âge et son nom, elle n’a qu’à demander à sa mère au lieu d’écouter sa vieille folle de grand-mère, parce que ma cousine est encore plus bête que l’était sa mère, avait répété Bamama, lui cacher ce qui est connu de tous, quelle idée ! »
La vieille Bamama était la patronne de la case de Kindé Touné. Elle faisait ce que faisaient toutes les autres Bamama depuis que le village s’était vidé des hommes, disparus dans la nuit de la guerre des blancs, elle régentait tout, car il fallait bien qu’il y ait de l’autorité. Et elle avait continué sur sa lancée : « Sa pauvre mère, elle est comme les autres, mais c’est la petite qui a hérité du nom. » Le propos qui avait suivi était obscur pour Kindé Touné mais pas pour Bontidad.
Les hurlements de ce dernier ne réussirent pas à l’émouvoir quand elle s’en prit à l’une des deux oreilles coupables d’avoir reçu la vérité que Bontidad, en réalité, avait toujours sue et qu’il avait eu la grande imprudence de lui répéter.
Kindé Touné était tout fier du pansement qu’il portait à l’oreille, il était l’objet de toutes les curiosités et comme tout le monde riait, il se doutait qu’il avait fait une chose très importante pour son âge, il n’avait jamais pu toucher un papier aussi blanc, aussi rare que celui que lui avait collé à l’oreille M’sieur révérend Pierre pour arrêter les quelques gouttes de sang qui avaient déclenché un début de panique qu’il avait eu du mal à dissimuler. Cet honneur devait sans doute préfigurer son entrée à l’école de M’sieur révérend Pierre. Pourtant, sa satisfaction était entrecoupée de pincements au cœur. Si beaucoup sortaient de la case du révérend comme de jeunes guerriers aguerris, plus d’un pleurait, surtout la nuit en criant qu’ils voulaient rester désormais à la maison et aider à arracher le manioc, ce qui était pourtant le travail des femmes. M’sieur révérend Pierre lui avait demandé en le hissant sur ses genoux :
« Tu l’as rendue furieuse, Bontidad, que lui as-tu fait ?
- Je lui ai dit que ce n’était pas elle qui s’appelait Blanche négresse, c’était sa mère, et qu’en plus c’était pas le bon nom, son nom, c’était négresse de blanc. C’est Bamama qui le sait.
- Et bien, tu pourras te vanter d’un bel exploit, Kindé, tu as réussi à ne perdre qu’un bout d’oreille à la place d’une langue dont il faudra apprendre à te servir en pensant que tu n’as plus maintenant les plus belles oreilles du village. »
Personne n’avait pu expliquer à Fatémé ce qui s’était passé avec le petit Kindé. Une querelle de gosses, peut-être, et puis le village, tous les jours, retentissait des cris des mômes qui se chamaillaient. Que certains reviennent couverts de bleus et de plaies était un quotidien presque rassurant. Mais Bontidad, malgré une colère inexplicable, rentrée, qu’on sentait perpétuellement en elle, était la plus paci

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