Petite musique d une déchirure
257 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Petite musique d'une déchirure , livre ebook

-

257 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Description

1962, quelques mois avant la fin de la guerre d'Algérie. Une petite fille de deux ans et demi est éloignée d'Alger. Confiée à la garde de ses grands-parents à Marseille, elle est séparée de ses parents et de sa ville de naissance. Ce livre est le récit de tous les bouleversements qu'elle ressent. La petite fille découvre la solitude causée par cet éloignement forcé des lieux et des êtres chers. Submergée d'émotions multiples, elle vit dans un monde secret qui la soutient et qui l'anime. En elle, résonne douce amère, la petite musique de cette déchirure.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 octobre 2010
Nombre de lectures 316
EAN13 9782336258430
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Crédits photographiques :
En première de couverture : photographie provenant des archives personnelles de l’auteur.
En quatrième de couverture : © Benjamin Squinazi.
© L’Harmattan, 2010 5-7, rue de l’École-polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr
9782296119727
EAN : 9782296119727
Sommaire
Page de Copyright Page de titre Dedicace PRÉFACE PREMIÈRE PARTIE - L’ALGÉRIE ALGER
PROLOGUE LA PHOTOGRAPHIE LE BONHEUR LA PORTE À CLEF LA GUERRE DÉPART (1) DÉPART (2) UN PÉLÉRINAGE INTÉRIEUR
DEUXIÈME PARTIE - LA FRANCE MARSEILLE
MARSEILLE CE QUE J’IMAGINE D’ALGER SANS MOI ILS S’EN VONT OÙ EST-ELLE ? LES SOULIERS DE JEUNE FILLE DE MAMAN UN RÊVE LE SOMMEIL LE RÉVEIL LEUR DÉPART TASSADIT LA POUDRE DE RIZ LA SORCIÈRE LA CONFISERIE 26 MARS 1962 LA BIJOUTERIE RETOUR CHABBAT LE CINÉMA LE PETIT ÂNE ATTENTE L’ÉCOLE LES SOURIRES DU BÉBÉ MAMAN À LA PLAGE LE BAIN LA COQUELUCHE LE BALLON ROUGE DÉCEPTION LE PETIT SOLDAT DÉPART (1) DÉPART (2)
TROISIÈME PARTIE - FRANCE PARIS
57 RUE JEANNE D’ARC UN CONTE DE FÉES
Petite musique d'une déchirure

Nicole Squinazi Teboul
À Fabien À Johan, Guillaume, Benjamin et Johanna À mes parents, à ma sœur
Oh enfants ! Jusqu’à quand aimerez-vous l’enfance ?
SALOMON (Proverbes)
Des choses depuis longtemps tenues secrètes.
PRÉFACE
« Sinon l’enfance, qu’y avait-il alors qu’il n’y a plus », disait si justement Saint-John Perse.

L’ouvrage mémorieux de Nicole Squinazi-Teboul est ce minuscule bout d’une très tendre enfance, grandement élargi en gros plan. Et ce rivage enfantin envahit ou submerge toute la conscience de la narratrice qui sent bien, et nous dit là, qu’il faut épuiser cette image primordiale pour connaître enfin l’abandon des chaînes et la profonde respiration d’un poumon libre. Nous sommes à Alger dans les années cinquante, rue Charras, dans le haut immeuble qui ferme la rue, en face d’un magasin de jouets, qui est réserve de rêves, jouxtant la côte Warnier, à deux pas du cinéma le Vox et de la librairie « Les Vraies Richesses » d’Edmond Charlot, et un peu plus bas, dans l’élargissement des rues, cet immeuble massif du Mauritania où travaille le père, à la compagnie d’aviation. Cette géographie, nul ne l’effacera. Mais voilà la guerre qui se déclenche, puis se déchaîne, « la guerre, porteuse d’inquiétude ». Plus de sécurité, les rues sont des pièges, les autobus, les salles de café et de cinéma, les grands magasins recèlent la menace d’une explosion intempestive et meurtrière. Qui peut se dire à l’abri ? Alors les parents envoient leur petite fille dans la famille à Marseille. Ils vivront cet exil dans ce port d’en face devenu alors une base de transit. Pendant ce temps, sur place, ce sera le temps des déménagements et des déchirements. Mais le père, grâce à son emploi, pourra rejoindre avec la mère les siens en métropole chaque week-end, jusqu’à ce que, à la consommation ultime des événements, ou de la tragédie, l’exil définitif propulse tout ce monde à Paris.
Mais qui pourra jamais effacer l’image d’une enfance heureuse, cet « état de pure grâce existentielle », ce « temps de légèreté et de tiédeur » : la chaleur des carrelages, l’odeur d’une ville qui n’était que rose, glycine et jasmin, ce balcon « suspendu dans l’espace et le temps », l’intense luminosité, et dans le cocon de sa chambre « l’amour ardent » d’une petite fille ? Qui nous fera oublier la tendre prévenance de Tassadit, la servante berbère, et l’odeur du henné ? Et tout ce miel gâché des pâtisseries orientales…
Reste cette constatation amère, que partageront la plupart des exilés de la guerre d’Algérie : « Nous étions au centre d’une immense défaite qui nous dépassait et nous ne pouvions pas rester ». Et la narratrice use alors de cette émouvante métaphore : « Mon corps est liquide de toutes mes larmes ». Pour ce constat, pour cette image inlassablement ressassée, pour cette enfance heureuse et ce jardin dévasté, et aussi pour la scansion de ce livre que l’on parcourt comme un long poème, il faut lire de toute urgence le beau témoignage de Nicole Squinazi-Teboul.
Albert Bensoussan Universitaire et écrivain
PREMIÈRE PARTIE
L’ALGÉRIE ALGER
PROLOGUE
Comme l’enfance est longue à partir, à s’enfuir. Comme ce temps béni, protégé, surprotégé est lent à se défaire. Il est si fortement lié à un état de pure grâce existentielle. Je marche en silence et me revient en mémoire l’image d’une petite fille blonde et rieuse qui est partie et qui pourtant est encore là.
LA PHOTOGRAPHIE
D u plus loin que je me souvienne, je revois une photographie prise en noir et blanc. Elle est d’un format moyen. Comme dans les photos anciennes, un cadre clair, brillant et dentelé l’entoure. Mon père et moi nous tenons devant l’objectif sur le balcon de notre appartement. Il est accroupi et me tient par la taille. Je suis l’objet de son extrême et affectueuse attention. Je suis debout, très droite et très fière de cet instant immobile auprès de lui, où nous sommes si proches l’un de l’autre. Je porte une robe de piqué blanc ornée d’un galon festonné d’un ton plus soutenu, peut-être rose. Mes cheveux blonds et bouclés sont épars sur mes épaules. J’ai presque deux ans et demi et nous sommes à Alger, en Algérie, avant la déclaration d’indépendance. Je suis encore dans le temps de légèreté et de tiédeur de l’enfance.
Tout le bonheur du monde est là. Il flotte entre nos deux visages comme un lien ténu, mystérieux et parfaitement invisible. Ce balcon est suspendu dans l’espace et dans le temps. Il est inaccessible - je le crois - à la souffrance et au malheur.
Ma mère est la flamme attentive qui illumine la photographie en même temps qu’elle la prend. Elle n’est pas admise dans cet instant-là. Elle en impose le reflet immortel. Elle nous tend à tous deux un miroir où nous nous reflétons dans un unique et unanime sourire. Ma mère n’est pas dans cette bulle chaude de bonheur que cet instant grave, solennel et pourtant très joyeux de joie contenue, immortalise. Elle m’a sortie d’une autre bulle, close sur le monde, dans laquelle j’avais désiré de toutes mes forces m’accomplir.
Je me tourne vers mon père qui - de toute cette énergie qu’il porte en lui et qui soutient l’univers - me tire vers moi-même et vers l’extérieur. Il me pousse vers ce monde sensible et vivant que je vais apprendre à connaître ; et vers l’avenir, vers ce désir d’être « grande » dans la prodigieuse impatience. Il m’entraîne dans un vent puissant et merveilleux de fraîcheur et de confiance où il me tient la main et m’apprend à être forte et droite. Dans mon souvenir, rien n’existe au delà de nos deux présences. Cette photographie n’est faite que de nous deux, mon père et moi-même, qui sourions. Je ne sais même pas si le soleil brillait ce jour-là. Je ne sais pas si le temps était clair. Je sais qu’il ne pleuvait pas. Je ne vois ni le ciel bleu au-dessus de nous, ni les arbres en fleurs, ni les maisons ou les toits en terrasses alentour.
Seule la bulle transparente et protectrice existe. C’est une coquille de bonheur clos et intime. Un échange vivant et généreux entre nos deux visages comme entre nos deux âmes. Une relation placide et fructueuse entre mon père et moi. Comme un rêve ultime tracé en grains de lumière.
LE BONHEUR
J e suis dans l’appartement d’Alger, allongée sur le lit de la chambre de mes parents. J’ai fait une courte sieste. Je n’ai plus sommeil. J’ouvre les yeux lentement, pour ne pas être éblouie de la trop grande luminosité qui a envahi la chambre. J’en ressens la caresse tiède sur mon visage et sur mes bras nus. Je suis couchée sur le dos. J’aperçois des parcelles d’ombre et de lumière qui tournoient doucement au plafond, comme un manège de clarté et d’obscurité. Le soleil les invente et les réinvente sans cesse, dans les espaces des persiennes entrouvertes qu’un vent léger remue. La magie recommence sans cesse.
Maman est debout devant les grands miroirs de l’armoire. Elle se coiffe. Il y a du soleil sur le parquet ci

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents