Un Pape noir
146 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

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Description

Le premier président noir des États-Unis, un évêque et un jeune archéologue... Trois parcours de vie, trois destins différents, mais qui vont se croiser pourtant. Quel lien mystérieux unit ces trois hommes? C'est le lien de l'Histoire. En suivant la mémoire de la tradition africaine et de la diaspora noire, une partie de l'épopée humaine est convoquée pour retracer l'aventure du cardinal de kola, comme si c'était écrit...

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Informations

Publié par
Date de parution 01 avril 2012
Nombre de lectures 38
EAN13 9782296489127
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Un pape noir
Lambert L IPOUBOU et Thierry B ISSON


Un pape noir


Roman
L’Harmattan, 2012
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-97011-3
EAN : 9782296970113

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
Chapitre I. LA VISION
Le 4 juillet 1961, à midi, il y eut une éclipse de soleil. Une violente tornade s’abattit sur Jungle City, un quartier populaire au sud-est de New York. Les gens paniquèrent, désertèrent les rues pour trouver refuge chez eux. Au même moment, dans un appartement de la rue Christophe Colomb, au numéro 12, Natacha Tambo, une femme blanche mariée à Sem Tambo, un étudiant africain d’origine soudanaise, arrivait au terme de sa grossesse. Elle ressentit des contractions. C’était l’accouchement. Ce fut un garçon qui naquit, les pieds devant. Pour l’ethnie nubienne, c’était le signe de reconnaissance, il était l’élu que l’on attendait. Tout le cérémonial qui accompagna sa naissance ne s’expliquait qu’à la lumière du symbolisme pharaonique soudanais. Son père devrait se séparer de sa mère avant qu’il ait atteint l’âge de trois ans et ne devrait le revoir que quand il aurait dix ans. Mais Sem Tambo, curieusement, ne revint jamais. Lui était-il arrivé malheur ou d’autres causes l’avaient-elles empêché d’accomplir entièrement ces rites ? Ce cérémonial s’était-il conclu d’une autre manière ? Toutes ces questions, restées sans réponse, pèseraient sur le devenir du jeune enfant. Cette incertitude existentielle que devrait assumer le fils de Sem avait peut-être pour but de faire mûrir sa destinée.
Trois ans plus tard, en 1964, cet enfant, Atoum Tambo, vivait à La Nouvelle-Orléans, avec sa mère, une femme douce, attentive, joyeuse, foncièrement gentille, apportant tendresse et protection à son fils, mais qui était aussi une jolie femme d’un mètre soixante quinze, au visage encadré par de longs cheveux bruns. Celle-ci, devenue mère célibataire, partageait un trois-pièces avec son fils et travaillait dans une pharmacie, comme caissière. Les années passant, préoccupée de voir la tristesse de son enfant qui grandissait sans père, elle craignit, à juste titre, d’avoir à le regarder sombrer progressivement dans une grave mélancolie. Pour essayer de lui changer les idées, elle décida de l’emmener souvent aux environs de La Nouvelle-Orléans, dans des balades près du Mississippi. La mère d’Atoum voulait mettre son fils au contact de la nature grandiose pour lui faire un peu oublier cette absence du père qui aurait tendance à le faire se replier sur lui-même. La vision des éléments naturels, au contraire, l’aiderait à s’ouvrir à l’infini. L’enfant aima ces promenades auprès du fleuve immense. Fasciné, il ne cessait de contempler la grandeur et la beauté du Mississippi. Lui et sa mère firent connaissance d’un vieux Noir, Tommy, qui vivait là, sur la rive du fleuve, dans une cabane misérable. Bien que connu des riverains, nul n’aurait pu donner son âge. Le vieil homme se prit d’affection pour le petit Atoum et se montra très protecteur envers ses deux visiteurs. Il les invita dans sa pauvre demeure et leur fit part de sa connaissance de la région. Il pouvait raconter plein d’anecdotes sur le fleuve. Atoum et sa mère l’écoutaient, captivés.
Maintenant, à chacune de ces balades, près du Mississippi, l’enfant voulait revoir son nouvel ami devenu un père de substitution pour lui. Sa mère, qui comprenait ce besoin d’affection chez son fils, le laissa passer des heures avec Tommy. Bientôt, il alla seul à ces rencontres privilégiées. Le vieil homme lui parlait beaucoup de ses ancêtres esclaves, de leurs souffrances. L’enfant Atoum, dont la sensibilité était exacerbée par l’absence de figure paternelle à un si jeune âge, semblait entendre la voix de ces opprimés du passé. Tommy lui parlait beaucoup aussi de l’Egypte antique et de ses mythes. Un jour, alors que le jeune Tambo avait treize ans et que cela faisait des années que le vieux Noir était son mentor, ce dernier lui dit subitement :
Mon cher Atoum, je trouve que l’Histoire que l’on enseigne dans ton école n’est pas assez juste envers le grand pharaon Akhenaton !
Que veux-tu dire ?
Je trouve que son rôle historique a été minoré.
A ce moment, curieusement, le timbre de sa voix se modifia et il se mit à chanter un hymne à la manière d’un gospel, en l’honneur de ce pharaon, dont les paroles étaient les suivantes :
« Ô ! Grand pharaon ! Le plus grand des pharaons de l’histoire de l’Egypte ! Ô ! Toi qui as fait disparaître les petites religions et les petits dieux en amenant à l’Egypte et au monde un Dieu unique et universel !
Ô ! Toi qui n’as pas parlé au nom de la Haute-Egypte du sud ni au nom de la Basse-Egypte du nord, mais au nom de l’Egypte toute entière ! Ô ! Toi qui n’as pas dressé les uns contre les autres, mais fait en sorte que chacun soit au service de la gloire de l’Egypte ! Ô ! Toi qui as dit aux hommes qu’ils n’ont pas besoin de la couleur de la peau ou de l’orientation sexuelle pour se définir ou se repérer, qu’il suffit simplement de laisser le soleil pénétrer leur âme ! Ils pourront voir que les repères sont en eux-mêmes.
Ô ! Toi qui as rapproché les communautés divisées ! Ô ! Toi qui as préparé l’arrivée de Jésus-Christ ! »
En entendant ce chant, Tambo resta muet de stupeur mais le vieil homme ne lui laissa pas le temps de réagir. Il posa sa main sur l’épaule d’Atoum et le fixa intensément. Il lui dit les paroles suivantes avec gravité, sa voix étant redevenue normale : « Mon fils, toi qui porte le nom d’un grand dieu de l’Egypte, sache que nos racines spirituelles, à toi le métis et à moi dont les ancêtres ont été arrachés du continent africain, sont égyptiennes et nubiennes ! »
Tambo fut étonné par cette affirmation dont les fondements semblaient venir de très loin.
Le vieillard reprit :
« Mon fils ! N’en veux pas à ton père biologique ! Il ne pouvait faire autrement que ce qu’il a fait ! Cela fait partie du destin qui te façonne comme il a façonné ton père. Mon rôle auprès de toi a été de le seconder modestement, comme si j’étais un deuxième père. Mon rôle m’a été aussi assigné par le destin pour que tu aies une meilleure vision du tien. Notre rencontre n’était pas due au hasard ! Je n’ai été là que pour t’indiquer la voie qui est déjà dans ton cœur. »
De nouveau sa voix changea. Il dit :
« Mon fils ! Tu es l’étoile de la promesse, l’ultime sursaut d’une dignité offensée ! Tu dois réveiller l’Afrique et éclairer le monde ! Maintenant ton initiation a commencé. Il te faudra trouver seul ta voie. A toi d’apprendre ! Mais tu seras guidé par des forces invisibles de la nature. Apprends à les écouter et à écouter ton instinct ! Apprends à connaître ce qu’il y a à l’intérieur de Toi-même ! »
Après avoir entendu toutes ces paroles, Atoum jugea qu’il était plus sage de garder le silence. Maintenant, le vieux s’était assoupi. Tambo le quitta discrètement.
Un an plus tard, le jeune homme se rendit à son rendezvous avec Tommy, mais bizarrement le vieux n’était pas là. Il percevait pourtant sa présence, une présence invisible. Les riverains ignoraient eux aussi ce qui avait bien pu arriver au vieux Tommy. Atoum était très inquiet. Trois jours plus tard, des vêtements ressemblants à ceux du vieillard furent trouvés flottants sur l’eau. Beaucoup pensèrent qu’il avait dû se noyer accidentellement. A cette nouvelle, Tambo pleura à chaudes larmes. Pendant trois jours, il resta assis près du Mississippi, prostré et pleurant. Il restait inconsolable de la mort de son deuxième père. Il ne faisait que répéter :
« Mississippi, rends-moi mon père ! »
Au bout de ces trois jours, une étrange paix l’envahit comme si Tommy était revenu. Il savait maintenant qu’il devait se ressaisir car le message que le vieil homme lui avait légué était un message basé sur la force de l’âme. D’ailleurs, le vieillard était-il vraiment mort ? Ne lui avait-il pas été donné une autre mission éducatrice ? N’était-il pas un de ces prêtres initiés de l’ancien

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