balzac, résumé de l oeuvre et critique
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1 L'HISTOIRE DU TEXTE EN QUELQUES DATES Alors que le choléra fait rage à Paris, début avril 1832, Balzac est parti rejoindre Mme de Berny, à Saint-Firmin, en bordure du ...

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L’HISTOIRE DU TEXTE EN QUELQUES DATES  Alors que le choléra fait rage à Paris, début avril 1832, Balzac est parti rejoindre Mme de Berny, à Saint-Firmin, en bordure du domaine de Chantilly. C’est là qu’il rédige Le Curé de Tours dont le manuscrit est conservé avec un certain nombre d’épreuves corrigées dans le fonds Lovenjoul de la bibliothèque de l’Institut de France. En même temps, il achève le sixième chapitre de la Femme de trente ans intitulé L’Expiation . Jusqu’en 1839, l’ouvrage se nomme Les Célibataires . Mais lorsque le romancier veut ensuite, sous cet intitulé, regrouper cet ouvrage avec Pierrette et La Rabouilleuse , il lui donne son titre actuel après avoir songé à l’appeler : Le Vicaire de Saint-Gatien , Le Vicaire de la cathédrale ou encore, L’Abbé Troubert . Cédant la place à sa pathétique victime qui devient le personnage éponyme de l’œuvre, le terrible prêtre regagne donc les coulisses de l’intrigue pour y jouer un rôle d’autant plus efficace qu’il demeure occulte. La première édition paraît, en mai 1832, au tome III de la deuxième édition des Scènes de la vie privée chez Mame-Delaunay. Pour sa deuxième édition, en décembre 1833, chez Mme Charles Béchet, l’ouvrage figure au tome VI des Etudes de Mœurs au XIXème siècle (deuxième volume des Scènes de la vie de province ). Balzac y a adjoint notamment les savoureuses pensées intérieures qui ponctuent le dialogue entre Mme de Listomère et Troubert ainsi que les considérations finales sur ce dernier. La troisième édition ne comportant pas de changement est celle des Scènes de la vie de province en deux volumes chez Charpentier (1839). La quatrième édition contrôlée par Balzac est celle du tome II de La Comédie humaine , chez Furne, en 1843 où le récit paraît pour la première fois sous son nouveau titre : Le Curé de Tours .    RESUME DE L’OEUVRE   A l’automne 1826, l’abbé Birotteau, de retour du salon de Mme de Listomère où on lui a presque garanti l’obtention du canonicat qu’il convoite depuis douze ans, supporte patiemment sous la pluie l’ouverture de la porte de la maison de sa logeuse, dans le sinistre quartier du Cloître, près de la cathédrale Saint-Gatien à Tours. Ce logement précédemment occupé et confortablement, voire luxueusement meublé par son ami Chapeloud, a été autrefois l’objet d’un violent désir de la part de Birotteau, désir assouvi par le legs de son mobilier que lui a fait le feu chanoine et l’acceptation de Mlle Gamard de lui louer cet appartement qu’elle destinait pourtant à l’abbé Troubert. Une fois la porte ouverte, en l’absence de son bougeoir, de ses pantoufles et de feu dans sa cheminée, Birotteau doit se rendre à l’évidence du caractère intentionnel de ces oublis. La raison en est qu’il s’est attiré la haine de Sophie Gamard en la vexant sans même s’en rendre compte. En effet, la vieille fille couvait, quant à elle, l’ambition de réunir chez elle, chaque soir, comme d’autres, la société pieuse de Tours. Pendant six mois, Birotteau, en compagnie de ses dévotes amies a satisfait cette vanité, préférant rester au logis plutôt que de se déplacer en ville, le soir. Mais l’ennui lui a fait déserter rapidement la maison Gamard, ce que la despote vieille fille n’est pas décidée à lui pardonner. La vie quotidienne du curé devient alors un véritable calvaire par suite des vexations ingénieusement ourdies par son infernale ennemie qui a enfin trouvé un but à sa stérile existence de célibataire.
 
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N’en pouvant plus moralement, le naïf Birotteau décide d’aller passer quelques jours à la campagne chez Mme de Listomère, tombant ainsi dans le redoutable piège tendu par son antagoniste en réalité manipulée par Troubert qui, à travers Birotteau, cherche à se venger de Chapeloud lui ayant toujours fermé l’accès aux salons aristocratiques de Tours. Dix jours plus tard, survient un avocat mandaté par Mlle Gamard et chargé de faire signer à l’infortuné prêtre un acte constatant sa volonté d’abandonner son logis. Les amis de Mme de Listomère que cette affaire finit par intéresser car elle comble le vide engendré par l’oisiveté provinciale comprennent que Troubert a jeté son dévolu sur l’appartement de Birotteau. En outre, comme Mlle Salomon de Villenoix vient de leur apprendre qu’à cause d’une maladie du vicaire général chargé du personnel, c’est à Troubert, son remplaçant, qu’incombera la nomination au canonicat, ils incitent Birotteau à signer l’acte qui devrait ainsi donner satisfaction au puissant prêtre. Le pauvre homme, bouleversé, obtempère, espérant trouver un autre logement où déménager ses meubles et sauver son canonicat. Seul, M. de Bourbonne, propriétaire terrien surnommé le « vieux malin » flaire un danger. Revenu à Tours pour veiller à l’enlèvement de son précieux mobilier, Birotteau, stupéfait de voir Troubert installé chez lui au milieu de ses chers objets, apprend qu’il n’en a plus la jouissance en raison d’une clause contenue dans l’acte qu’il a hâtivement signé et, qu’en outre, le canonicat lui a échappé. Malgré les avertissements de M. de Bourbonne, Mme de Listomère qui se sent responsable de la ruine de Birotteau du fait des conseils qu’elle lui a prodigués et son fougueux neveu vitupérant contre Troubert décident de porter l’affaire devant la justice. Bien que le soutien donné par la pieuse et noble baronne soit un incontestable atout en faveur de son protégé, les amis de Mlle Gamard secrètement menés par Troubert réussissent à présenter si défavorablement la cause de l’ex locataire de la vieille fille que seul, l’avoué des libéraux consent à s’en charger, l’affaire prenant ainsi une envergure politique. A Paris, le neveu de Mme de Listomère qui espère être élevé au grade de capitaine de corvette est averti, grâce à une indiscrétion que sa nomination est remise en cause. Son oncle, député, lui apprend que le ministre est fort mécontent des propos qu’il a tenus à l’encontre de Troubert qui est en réalité le représentant de la Congrégation en province et il somme son neveu de se raccommoder avec le redoutable abbé car il risque lui-même de ne pas faire partie de la nouvelle promotion de pairs de France. Le baron se précipite alors à Tours pour révéler à sa tante ce qu’il a appris. Le « vieux malin » leur conseille de se hâter d’abandonner Birotteau et de se concilier la faveur du vicaire général. La tâche est d’autant plus difficile que Mlle Gamard, ayant pris froid, est tombée gravement malade et que les mauvaises langues attribuent sa maladie au chagrin provoqué par la perspective d’un procès. Mme de Listomère, dès le lendemain, après avoir révélé à Birotteau les secrètes fonctions de Troubert, convainc l’innocent curé épouvanté par tant d’horreurs, de quitter son logis et d’abandonner ses poursuites contre Mlle Gamard. Celui-ci accepte mais souhaite seulement récupérer le portrait de Chapeloud. Surmontant sa répugnance, la baronne rend visite à Troubert. Leur conversation est digne de celle des plus grands diplomates. Flatté dans sa vanité par son interlocutrice qui l’invite à venir jouer au whist chez elle, Troubert accepte le désistement mais la baronne n’obtient pas la restitution du portrait. Mlle Gamard meurt. Les Listomère se voient invités à assister au service funèbre. Seul Birotteau pleure sincèrement la défunte, se croyant coupable de sa mort. Le lendemain, il apprend qu’il est nommé curé de Saint-Symphorien, faubourg excentré de Tours où, podagre, il se trouvera comme en exil. Cinq mois plus tard, Troubert est nommé évêque de Troyes. La baronne de Listomère meurt à son tour, ayant pris soin de léguer quinze cents francs de rente au malheureux curé. Furieux et avide de vengeance, Mgr Hyacinthe menace de nouveau la carrière du baron, le
 
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somme d’attaquer le testament et fait interdire Birotteau pour captation d’héritage. La dernière image qui nous est donné de ce dernier est celle d’une épave humaine, d’un être réduit à un pur état végétatif que le nouvel évêque consent enfin à oublier.   UNE DONNEE IMPORTANTE : LES LIEUX  ·  Tours et ses environs  Tours et la Touraine occupent une place importante dans la Comédie humaine.  Balzac était effectivement très attaché à sa ville natale et à la région où il avait passé son enfance et son adolescence, son père y ayant occupé le poste de directeur des vivres de la division militaire puis celui d’administrateur de l’Hospice général. Le romancier aimait séjourner à Saché, propriété de M. de Margonne, ami de la famille et probablement le vrai père de son frère Henri, où il retrouvait une sérénité propice à la création. Là furent écrits Maître Cornélius , Louis Lambert , LePère Goriot et il y commença Illusions perdues .  Dès 1819-1820, dans un roman par lettres demeuré inachevé, Sténie ou les erreurs philosophiques,  le jeune Balzac avait choisi de faire naître son héros à Tours puis, comme lui, de lui faire passer sa petite enfance chez une nourrice de Saint-Cyr-sur-Loire. Dans cette œuvre apparaissent, pour la première fois, le quartier du Cloître et la cathédrale Saint-Gatien qui sont aussi le cadre d’un épisode de Wann-Chlore , roman de jeunesse écrit en 1825.  Mais c’est surtout l’année 1832 que l’on peut qualifier d’année tourangelle dans l’inspiration balzacienne puisque se rattachent à Tours et à ses environs, non seulement l’ouvrage primitivement intitulé Les Célibataires et significativement rebaptisé plus tard sous le titre que nous lui connaissons actuellement, mais encore le premier dixain des Contes drolatiques , La Grenadière  et Louis Lambert . Avec le Lys dans la vallée , enfin, en 1836, Balzac écrivit véritablement le poème de sa terre natale, plaçant dans la bucolique vallée de l’Indre, devenue depuis lors la « vallée du Lys », les amours platoniques de Félix de Vandenesse et de Mme de Mortsauf.  Emporté par le lyrisme que suscite chez lui le souvenir de Tours, l’auteur des Contes drolatiques  s’est même, curieusement livré dans l’Apostrophe , à une digression quelque peu anachronique puisque dans cette histoire censée se dérouler au XVIème siècle, le narrateur se laisse aller de manière intempestive à un éloge commençant ainsi : « Tours ha esté et sera toujours les pieds dedans la Loire, comme une iolie fille qui se baigne et joue avecque l’eaue, faisant flic flac en fouettant les ondes avecque ses mains blanches ; car cette ville est rieuse, rigolleuse, amoureuse, fresche, fleurie, perfumée mieux que toutes les aultres villes du monde qui ne sont pas tant seullement dignes de lui paigner ses cheveulx, ni lui nouer sa sainture » et s’achevant sur cette note très personnelle : « mays je debvoys cet hommaige filial, hymne descriptive, venue du cœur, à ma rue natale, aux coins de laquelle manquent seullement les braves figures de mon bon maistre Rabelais et du sieur Descartes, incogneus aux naturels du pays » 1 .                                                  1  Pl , Œuvres diverses , t. I, p. 148-149.
 
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Le même enthousiasme perce  au détour d’une page du  Curé de Tours  lorsque nous est donnée l’indication suivante : « Saint-Symphorien est un faubourg de Tours situé au-delà du pont. Ce pont, un des plus beaux monuments de l’architecture française, a dix-neuf cents pieds de long, et les deux places qui le terminent à chaque bout sont absolument pareilles » 2 . On notera toutefois que dès lors, la précision topographique même si elle est nuancée d’une pointe d’admiration, est avant tout étroitement liée à l’intrigue puisqu’il s’agit de faire comprendre l’ostracisme dont est frappé l’ennemi de Troubert et que matérialise en quelque sorte cet ouvrage d’art.  Allons plus loin. Tours expliquerait même le caractère de Birotteau et sa misérable destinée. En effet, Nicole Mozet fait remarquer que l’œuvre est construite d’après le portrait-robot que Balzac se fait du Tourangeau, sensuel et apathique, profitant béatement de la douceur du climat et de la beauté d’un site et elle rappelle cette confidence faite à Victor Ratier, le 21 juillet 1830 : « Oh ! Si vous saviez ce que c’est que la Touraine ! … On y oublie tout. Je pardonne bien aux habitants d’être bêtes, ils sont si heureux ! » 3 . L’absence de pugnacité, de réactivité même du bon curé n’a peut-être pas d’autre cause. Il nous est d’ailleurs d’emblée présenté comme plongé dans une sorte de léthargie heureuse due à l’espérance du canonicat et qui lui fait ne pas penser à l’averse qu’il doit endurer : « il se trouvait dans une de ces rares circonstances de la vie où d’heureuses sensations font tout oublier » 4 . Ainsi, englué dans un bonheur purement matériel et en en jouissant égoïstement, en brave Tourangeau qu’il est - égoïsme aggravé par celui du célibataire -, il court à sa perte, manquant « dans les infiniment petits détails de son existence, et dans les devoirs minimes de sa vie privée de ce dévouement dont il croyait faire profession ».  ·  Le quartier du Cloître On pourrait croire qu’en situant l’intrigue de son roman à l’ombre inquiétante de la cathédrale Saint-Gatien, Balzac subissait encore l’influence du roman gothique anglais 5 . Dans Maître Cornélius  qui date de la même année 1832, lorsqu’il évoque les vêpres à Saint-Gatien, la dérive vers le fantastique est manifeste : « Certaines figures se dessinaient si vaguement dans le clair-obscur qu’on pouvait les prendre pour des fantômes […]. Le s statues semblaient animées, et les hommes paraissaient pétrifiés. Cà et là des yeux brillaient dans le creux des piliers, la pierre jetait des regards, les marbres parlaient, les voûtes répétaient des soupirs, l’édifice entier était doué de vie » 6 .  Mais dans Le Curé de Tours , il fait désormais œuvre d’historien, d’ « archéologue », comme il se plaît à le souligner, chargé de perpétuer le souvenir de ce qui a disparu. « Jadis, il existait dans le Cloître, du côté de la Grand’rue, plusieurs maisons réunies par une clôture, appartenant à la Cathédrale et où logeaient quelques dignitaires du Chapitre. Depuis l’aliénation des biens du clergé, la ville a fait du passage qui sépare ces maisons une rue,                                                  2  Le Curé de Tours , Folio classique, p. 119. 3 Introduction au Curé de Tours, Pl. , t. IV, p. 168. 4 p. 34. 5 Cf. Danielle Dupuis, « Du sublime burkien au sublime balzacien », L’Année balzacienne 2006 , p. 295 à 320. 6  Maître Cornélius , Pl ., t. XI, p. 17.
 
 
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nommée rue de la Psalette , et par laquelle on va du Cloître à la Grand’rue », fait-il observer au moment de présenter le logis de Mlle Gamard, ajoutant : « Un antiquaire, s’il y en avait à Tours, une des villes les moins littéraires de France, pourrait même reconnaître, à l’entrée du passage dans le Cloître, quelques vestiges de l’arcade qui formait jadis le portail de ces habitations ecclésiastiques et qui devait s’harmonier au caractère général de l’édifice » 7 . Les chercheurs balzaciens ont montré l’exactitude, vérifiable sur place, de la description effectuée par le romancier : la maison de la vieille fille correspond à ce qui est désigné aujourd’hui comme le cloître de la Psalette et était autrefois appelé Préau Saint-Gatien tandis que ce que l’on nommait alors Cloître Saint-Gatien, et qui n’était en fait que le quartier jouxtant la cathédrale, est devenu la place Grégoire de Tours. Suzanne Jean-Bérard a même souligné que Balzac avait sur le Préau des connaissances très précises. Il nous apprend, en effet, que « quoique ce bien eût été acquis de la nation, pendant la Terreur, par le père de Mlle Gamard ; comme depuis vingt ans cette vieille fille y logeait des prêtres, personne ne s’avisait de trouver mauvais, sous la Restauration, qu’une dévote conservât un bien national » du fait qu’on lui supposait « l’intention de le léguer au Chapitre » 8 . Or, le bâtiment, réellement mis en vente sous la Révolution avait été acquis par un certain Charles Guyot qui l’avait revendu à un ecclésiastique, Nicolas Simon, celui-ci l’ayant en 1822 légué à l’archevêque Mgr de Montblanc qui en restitua ensuite, comme Troubert, la propriété au Chapitre 9 .  Ces détails pourraient séduire l’amateur de pittoresque et n’avoir qu’une valeur anecdotique. Ce serait une erreur, toutefois, de ne les considérer que sous l’angle d’un réalisme purement documentaire car la description des lieux, dans Le Curé de Tours  comme dans tout roman balzacien, est consubstantielle à l’intrigue. Leur environnement, en effet, conditionne les personnages. Le narrateur le souligne avec vigueur lorsqu’il évoque le quartier du Cloître : « Cet endroit est un désert de pierres, une solitude pleine de physionomie, et qui ne peut être habitée que par de êtres arrivés à une nullité complète ou doués d’une force d’âme prodigieuse » 10 . Froideur, stérilité ont valeur diégétique et annoncent l’aridité du cœur des personnages. A l’obscurité de l’endroit fait écho le caractère occulte des menées de Troubert et même le jardinet de Mlle Gamard « aux petites allées étroites » est comme le symbole de l’étroitesse d’esprit des protagonistes et il figure certainement aussi, alors que le curé y tourne tristement en rond, le labyrinthe d’une intrigue dans laquelle il se trouve égaré bien malgré lui.   ·  Intérieurs  La description interne des logis n’est pas moins importante en vertu de l’interdépendance qui existe entre le lieu et ceux qui l’habitent. Balzac le dit dans l’ Avant-propos de La Comédie humaine : « L’animal a peu de mobilier, il n’a ni arts ni sciences ; tandis que l’homme par une loi qui est à rechercher, tend                                                  7 p. 35. 8 p. 36. 9 Suzanne Jean-Bérard, « Encore la maison du Curé de Tours », L’Année balzacienne 1968 , p. 208-209. 10 p. 35.
 
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à représenter ses mœurs, sa pensée et sa vie dans tout ce qu’il approprie à ses besoins. […] Ainsi l’œuvre à faire devait avoir une triple forme : les hommes, les femmes et les choses, c’est-à-dire les personnes et la représentation matérielle qu’ils donnent de leur pensée ; enfin l’homme et la vie » 11 . Dans  Gobseck , il le répète au moyen d’une remarquable métaphore : « […] sa maison et lui se ressemblaient. Vous eussiez dit de l’huître et son rocher » 12 .  Mlle Gamard, issue du peuple a les goûts et les moyens de sa classe : le luxe n’est pas entré dans sa salle à manger où une table carrée, une chaise à patins garnie de coussins et deux fauteuils de canne n’ont rien de remarquable si ce n’est leur commodité. Une incurie annonciatrice du décor de la pension Vauquer, dans Le Père Goriot, menace même avec « le gros taffetas ciré que, par un usage immémorial, mademoiselle Gamard laissait pendant le déjeuner sur la table, sans avoir égard ni aux bords usés ni aux nombreuses cicatrices de cette couverture » 13 . Mais c’est surtout le salon de la maîtresse des lieux qui retiendra l’attention. Le jaune y est omniprésent : « les draperies en étaient jaunes, le meuble et la tenture jaunes ; sur la cheminée garnie d’une glace à cadre doré, des flambeaux et une pendule en cristal jetaient un éclat dur à l’œil » 14 . Une telle outrance signale le manque de goût propre, selon Balzac, à toute vieille fille mais le lecteur familier de la Comédie humaine sait que cette couleur y est toujours affectée d’un symbolisme négatif. Par exemple, la maison Vauquer est « badigeonnée avec cette couleur jaune qui donne un caractère ignoble à presque toutes les maisons de Paris » 15 ; la féroce Sylvie Rogron se pare d’un châle de cachemire jaune et la terrible cousine Bette est toujours vêtue de jaune et de noir 16 . La connotation est évidente : non seulement la couleur jaune affecte l’apparence des animaux dangereux, les fauves notamment -Valérie Marneffe surnomme d’ailleurs Bette « ma tigresse » - mais dans l’imagerie populaire ses relents sulfureux ont souvent été associés aux sombres visions infernales. Il n’est donc pas étonnant que dans l’imaginaire balzacien elle soit associée aux personnages maléfiques et à leur cadre de vie. La teinte jaune du salon de Mlle Gamard vaut par conséquent comme un indice de la méchanceté de cette femme.  Quant à l’appartement de Birotteau, il constitue un élément essentiel de l’intrigue. Son luxe relatif, avec sa « bibliothèque en chêne, provenant de la démolition d’un château dépecé par la Bande Noire, et remarquable par des sculptures dignes de l’admiration des artistes », ses deux meubles de Boulle, son tapis d’Aubusson, sa Vierge  du Valentin et son Christ  de Lebrun 17 explique la convoitise, véritable « monomanie », à laquelle fut en proie le prêtre avant que son ami ne meure puisque « Tout ce que les choses du monde font naître d’envie et d’ambition dans le cœur des autres hommes se concentra chez l’abbé Birotteau dans le sentiment secret et profond avec lequel il désirait un intérieur semblable à celui que s’était créé l’abbé Chapeloud » 18 . Il justifie aussi la                                                  11  Pl ., t. I, p. 9. 12   Pl ., t. II, p. 966. 13 P. 65. 14 P. 72-73. 15   16 Cf. Pierrette et La Cousine Bette . 17 p. 38-39 et p. 46. 18 P. 40.
 
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jalousie secrète de Troubert. La satisfaction que donne à son propriétaire la possession de ces meubles permet en outre de mieux comprendre son désespoir lorsque celle-ci lui échappe. Enfin, il n’est peut-être pas interdit d’interpréter la présence d’un lit « en tombeau » dans la chambre du malheureux curé comme la métaphore de la triste destinée qui le conduit au presbytère de Saint-Symphorien où il « va se trouver enterré dans un véritable sépulcre » 19 .   UNE INTRIGUE PROVINCIALE  ·  Trivialités  En écrivant Le Curé de Tours , Balzac accomplissait une véritable gageure : créer, comme l’écrit Félix Davin à propos de cette autre scène de la vie de province qu’est Eugénie Grandet , un « drame appliqué aux choses les plus simples de la vie privée » 20 . La page liminaire de l’œuvre nous initie significativement aux préoccupations on ne peut plus triviales du protagoniste puisque nous apprenons qu’ « entre toutes les petites misères de la vie humaine, celle pour laquelle le bon prêtre éprouvait le plus d’aversion, était le subit arrosement de ses souliers à larges agrafes d’argent et l’immersion de leurs semelles » 21 . Un peu plus loin, les détails matériels qui faisaient le bonheur de Chapeloud sont de la même veine : « […] pendant dou ze années consécutives, linge blanc, aubes, surplis, rabats, rien ne m’a jamais manqué. Je trouve toujours chaque chose en place, en nombre suffisant, et sentant l’iris. Mes meubles sont frottés, et toujours si bien essuyés que, depuis longtemps, je ne connais plus la poussière » 22 , confiait-il à son ami. Mais nous avons été avertis : un tel endroit ne « peut être habité que par des êtres arrivés à une nullité complète ou doués d’une force d’âme prodigieuse » 23 . L’inanité des conversations entre Mlle Gamard et son hôte où il se disait « qu’un homme nourri d’un œuf chaque matin devait infailliblement mourir à la fin de l’année » ou « qu’un petit pain mollet, mangé sans boire pendant quelques jours, guérissait de la sciatique » 24 incite à opter pour la première proposition de l’alternative.  Par conséquent, comme le souligne Nicole Mozet, « par rapport à la tradition romanesque, roman ou nouvelle, Le Curé de Tours  représente une rupture importante, visible dès les première lignes, où l’on s’installe délibérément du côté de l’exigu, du médiocre, du quotidien et de l’anodin » 25 . Birotteau, qui voit la perte entière de son bonheur dans l’oubli de ses pantoufles et de son bougeoir par la servante qui non seulement a tardé à lui ouvrir la porte et n’a pas allumé son feu, fait même figure d’anti-héros. Ce niais à l’horizon très limité est pitoyable et justement, fait encore observer Nicole Mozet, « faire le portrait d’un imbécile en le donnant pour un imbécile mais sans le présenter comme différent ni comique, c’est tout le secret du Curé de Tours , texte mystérieux                                                  19 p. 120. 20 Introduction aux Etudes de mœurs au XIXème siècle , Pl. , t I , p. 1166. 21 p. 33. 22 p. 42. 23 p. 35. 24 p. 67. 25 Nicole Mozet, La Ville de province dans l’œuvre de Balzac , Sedes, 1982, p. 101.
 
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malgré son apparente simplicité » 26 . Félix Davin avait déjà noté ce paradoxe : « Là ne se rencontre aucun des éléments indispensables aux romanciers ordinaires ; ni amour, ni mariage ; peu ou point d’événements ; et cependant le drame y est animé, mouvant, fortement noué. Cette lutte sourde, tortueuse des petits intérêts de deux prêtres, intéresse tout autant que les conflits les plus pathétiques de passions ou d’empires » 27 . Elle intéresse parce que, nous dit le narrateur au début de l’œuvre, dans ce « drame bourgeois, les passions se retrouvent tout aussi violentes que si elles étaient excitées par de grands intérêts » 28 . Elle intéresse aussi, ajouterons-nous, parce que l’écrivain sait dramatiser des faits infimes en en montrant l’intense retentissement psychologique sur un être que sa sensibilité rend particulièrement réceptif et en jouant, nous le verrons, de toutes les potentialités du registre pathétique.  ·  Le drame bourgeois ou l’héritage du XVIIIème siècle  Peindre des infortunes réelles et privées n’était cependant pas une idée totalement nouvelle. Balzac dans La Comédie humaine  et peut-être plus particulièrement dans les Scènes de la vie privée et dans les Scènes de la vie de province , transpose et applique dans le domaine romanesque ce que les théoriciens du XVIIIème siècle avaient souhaité réaliser pour la scène à savoir la tragédie bourgeoise appelée encore tragédie domestique, comédie sérieuse ou drame bourgeois. Ainsi, Diderot, en 1758, avait défini dans son Discours sur la poésie dramatique  un nouveau genre de tragédie « qui aurait pour objet nos malheurs domestiques » 29 . Lorsque son interlocuteur lui demande : « Mais cette tragédie nous intéressera-t-elle ? », Dorval déclare dans le Troisième entretien sur le fils naturel : « Elle est plus voisine de nous. C’est le tableau des malheurs qui nous environnent. Quoi !vous ne concevez pas l’effet que produiraient sur une scène réelle des habits vrais, des discours proportionnés aux actions, des actions simples, des dangers dont il est impossible que vous n’ayez tremblé pour vos parents, vos amis, pour vous-mêmes ? » 30 . Beaumarchais, dans son Essai sur le genre dramatique sérieux , en 1767, reprit l’idée, écrivant : « Le drame sérieux, qui me présente des hommes vivement affectés par un événement, est susceptible d’autant de nerf, de force ou d’élévation que la tragédie héroïque qui me montre aussi des hommes vivement affectés, dans des conditions seulement plus relevées » 31 . Ces écrivains ont donc sans doute conforté Balzac dans l’idée de l’intensité dramatique des malheurs concentrés dans l’espace domestique et l’ont conduit à penser que la vérité issue du quotidien pouvait être source d’un pathétique traversé par la fulgurance des passions.  ·  Contre les outrances du roman noir  Delphine de Girardin s’adressant au romancier en août 1832 lui écrivait : « Birotteau est un chef d’œuvre, je vous le répète ; tout le monde peut faire de l’horreur, de la mort, du crime, etc. Mais personne ne dessine de tableau de                                                  26  Ibid . 27  Op. cit ., p. 1166. 28 p 59.  . 29 Diderot, Œuvres esthétiques , éd. Paul Vernière, classiques Garnier, 1976, p. 191. 30  Ibid. , p. 148. 31 Beaumarchais, Théâtre complet , Pl. , 1973, p. 8-9.
 
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2 mœurs comme vous, et c’est à mon avis, ce qu’il y a de plus difficile […] » 3 . C’est que, s’intéresser, en 1832, aux drames générés par le huis clos domestique avait un caractère innovant. En effet, situer son œuvre dans un cadre provincial marqué par le prosaïsme éloignait définitivement Balzac des outrances du roman noir dont les résurgences furent encore sensibles, sous des plumes tentées par la facilité, pendant la dizaine d’années où il rédigea les Scènes de la vie de province . Dans sa préface à l’ Histoire des treize , en 1833, il soulignera clairement et vigoureusement son aversion pour l’invraisemblance due aux stéréotypes de ce genre de littérature : « Un auteur doit dédaigner de convertir son récit, quand ce récit est véritable, en une espèce de joujou à surprise, et de promener, à la manière de quelques romanciers, le lecteur, pendant quatre volumes, de souterrains en souterrains, pour lui montrer un cadavre tout sec, et lui dire, en forme de conclusion, qu’il lui a constamment fait peur d’une porte cachée dans quelque tapisserie, ou d’un mort laissé par mégarde sous des planchers » 33 . Balzac n’exagérait pas. Alice M. Killen, dans son étude sur Le Roman terrifiant ou roman noir de Walpole à Anne Radcliffe et son influence sur la littérature française jusqu’en 1840 , nous apprend qu’alors « de tous côtés surgissent des milliers de spectres et de brigands. Mme de Nardouet et Mme de Saint-Venant se font concurrence. C’est à qui trouvera le plus de fantômes dans les vieux châteaux, à qui imaginera le plus de mystères et de crimes » 34 . En 1840, une nouvelle traduction du Moine  de Lewis connut encore un succès manifeste.  En réaction contre ces excès, Balzac crée un pathétique qui ne doit plus rien aux péripéties invraisemblables du roman noir ou de ses avatars, à des événements extérieurs peu crédibles. Tout d’abord, celui-ci naît de l’intériorisation du drame, du retentissement psychologique de faits vrais, d’une grande banalité même. Ainsi, se sentant épié par Mlle Gamard et Troubert alors qu’il se promène, Birotteau éprouve un « martyre intolérable » 35 . De même, le pauvre prêtre voulant se confier à son confrère, « après avoir subi les angoisses de délibérations intérieures » se décide à lui parler, « le cœur grossi par des pulsations extraordinaires » 36 et lorsqu’il doit se résoudre à abandonner son appartement, il éprouve « la douleur d’un homme pour qui le tracas d’un déménagement et de nouvelles habitudes étaient la fin du monde » 37 . Le vocabulaire hyperbolique dit bien l’intensité de la souffrance née de circonstances intrinsèquement anodines. Mais peu importe, dans cette nouvelle perspective d’un drame bourgeois à échelle humaine, que les causes des émotions soient dérisoires : celles-ci n’en sont pas moins intenses. Et surtout, Balzac sait qu’il existe des crimes purement moraux dont l’atrocité égale celle des véritables meurtres où le sang est répandu mais qui demeurent impunis. L’argument du Curé de Tours en est un excellent exemple puisque « la manière dont [Mlle Gamard] se plaisait à ourdir ses conspirations contre le bonheur domestique du pauvre prêtre portait l’empreinte du génie le plus profondément
                                                 32  Correspondance , t. II, p. 86. 33  Pl ., t. V, p. 789. 4 3  Op. cit ., p. 168. 35 p. 74. 36 p. 77. 37 p. 88.
 
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38 malicieux » à savoir « une persécution sourde » née d’ « une vengeance froidement calculée » 39 . D’autres œuvres illustreront ce constat telles que Pierrette  ou Eugénie Grandet  et le romancier exprimera avec vigueur sa conviction dans Les Martyrs ignorés  où il affirmera : « J’aperçus d’innombrables victimes sans vengeances, je découvris ces horribles supplices infligés dans l’intérieur des familles, dans le plus profond secret, aux âmes douces par les âmes dures, supplices auxquels succombent tant d’innocentes créatures. Je pensai que l’assassin de grande route mené si pompeusement à l’échafaud n’était pas aux yeux du philosophe si coupable dans son égarement que bien des hommes qui donnent la question avec des mots poignants, qui, après avoir éprouvé, dans certaines âmes, les endroits que la noblesse, le religion, la grandeur rendent vulnérables, y enfoncent à tout moment leurs flèches… » 40 .   Désormais, donc, c’est dans un cadre trivial et domestique et non plus dans d’improbables décors gothiques que les intérêts se heurtent, que les passions s’exaspèrent. La terreur engendrée par des effets faciles et des situations impossibles cède la place à l’horreur provoquée par la peinture de la laideur du réel et du quotidien où peut germer une violence inouïe.Grâce au narrateur, nous sommes initiés au décryptage d’un monde en fin de compte très inquiétant. Dans sa préface à une anthologie de Romans terrifiants  qui nous offre un parcours parmi les œuvres fondatrices du genre noir (ou gothique) anglais, Francis Lacassin affirme : « c’est le roman du Mal incarné par des moines pervers ou avides de pouvoir temporel. Le roman des triomphes du Mal, le roman de la douleur et de la mort » 41 . Par bien des aspects, les Scènes de la vie de province et en tout premier lieu, Le Curé de Tours , méritent elles aussi d’être considérées comme des récits où le mal et la souffrance triomphent. Cependant, leur triomphe est plus prosaïquement mais tout aussi efficacement assuré par le jeu des passions et de l’intérêt. Seulement, « la politesse les orne, l’hypocrisie les déguise, la niaiserie les couvre de beaux noms » faisait justement observer Taine 42 .  ·  Une micro-société  L’histoire racontée dans le Curé de Tours  a, en outre, un caractère exemplaire car « l’étroitesse de la sphère explorée agit comme une loupe », écrit Nicole Mozet 43 . Ce miroir grossissant nous renvoie effectivement l’image d’une société tout entière composée d’individus viciés par les passions nées de l’intérêt. Même les êtres les plus falots peuvent s’avérer minés par le désir de posséder et la prétention de réussir : ainsi Birotteau a d’abord passionnément convoité l’appartement de son ami : « Tout ce que les choses du monde font naître d’envie et d’ambition dans le cœur des autres hommes se concentra chez l’abbé Birotteau dans le sentiment secret et profond avec lequel il désirait un intérieur
                                                 38 p. 75. 39 p. 59. 40  Pl . t.XII, p.750 41  Romans terrifiants , Laffont, 1985, p. VI. 42  Balzac , collection Mémoire de la critique , Presses de l’Université de Paris-Sorbonne, 1999, p. 238. 43  Pl . t. IV, p. 171.
 
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semblable » 44 puis cette monomanie, une fois satisfaite, céda la place à une « chimère », un désir accru par douze années d’attente : « Le titre de chanoine était devenu pour lui ce que doit être la pairie pour un ministre plébéien » 45 . La comparaison souligne bien l’identité des intérêts et des passions quel que soit le contexte social envisagé. Les comportements provinciaux ne sont pas foncièrement différents de ce qu’ils sont ailleurs : « Cette histoire est de tous temps : il suffit d’étendre un peu le cercle étroit au fond duquel vont agir ces personnages pour trouver la raison coefficiente des événements qui arrivent dans les sphères les plus élevées de la société », prend soin de nous avertir le narrateur 46 . Dans un rapport métonymique, l’action provinciale renvoie à ce qui se passe à l’échelon social supérieur. L’entrevue entre Troubert et Mme de Listomère en est un bon exemple : « Jamais courtisan ni diplomate ne mirent dans la discussion de leurs intérêts particuliers ou dans la conduite d’une négociation nationale plus d’habileté, de dissimulation, de profondeur que n’en déployèrent la baronne et l’abbé dans le moment où ils se trouvèrent tous les deux en scène » 47 , lisons-nous. Les intérêts et les conduites s’équivalent donc et l’intrigue qui nous est proposée acquiert la dimension d’un véritable document sociologique.  D’ailleurs, cet échantillon de vie sociale est d’autant plus significatif que les traits en sont appuyés. En effet, dans un cadre provincial restreint s’exaspèrent forcément les antagonismes : ainsi, « Birotteau, pour son malheur, avait développé chez Sophie Gamard les seuls sentiments qu’il fût possible à cette pauvre créature d’éprouver, ceux de la haine qui, latents jusqu’alors, par suite du calme et de la monotonie d’une vie provinciale dont pour elle l’horizon s’était encore rétréci, devaient acquérir d’autant plus d’intensité qu’ils allaient s’exercer sur de petites choses et au milieu d’une sphère étroite » 48 . L’ennui joue un rôle de catalyseur : les amis de Mme de Listomère commencent à se passionner pour les déboires de Birotteau parce que « cette intrigue [est] jetée dans le vide de leur vie provinciale » 49 . Et, si Troubert cherche à se venger de Chapeloud en persécutant Birotteau, il n’est pas exclu de voir aussi dans cette vengeance un divertissement au sens pascalien du terme, rompant la platitude de sa vie à l’ombre de Saint-Gatien. Il nous est en effet précisé que « les heures de l’abbé Troubert coulaient aussi animées, s’enfuyaient chargées de pensées tout aussi soucieuses, étaient ridées par des désespoirs et des espérances aussi profonds que pouvaient l’être les heures cruelles de l’ambitieux, du joueur et de l’amant » 50 .  Exemplaire car révélatrice des rapports sociaux, cette histoire provinciale l’est aussi dans la mesure où elle est le microcosme de la vie politique dans la France de la Restauration. L’affaire Gamard a pris une tournure politique : « L’avoué des Libéraux, devenu celui de Birotteau, jetait beaucoup de défaveur sur la cause du vicaire. Les gens opposés au gouvernement, et ceux qui étaient connus                                                  44 p. 40. 45 p. 43. 46 p. 54. 47 p. 112. 48 p. 73. 49 p. 85.  50 p. 99.
 
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