De la culture africaine pour un développement durable
12 pages
Français

De la culture africaine pour un développement durable

-

Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres
12 pages
Français
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres

Description

Jeune étudiant philosophe au Grand Séminaire

Informations

Publié par
Publié le 16 janvier 2012
Nombre de lectures 4 525
Langue Français

Extrait

I.INTRODUCTION
«La culture est la manière dont un groupe vit, pense, sent, s’organise lui-même, célèbre et partage la vie. Dans chaque culture, il y a des systèmes de valeurs sous-jacents, des significations et des visions, du monde qui s’expriment visiblement dans le langage, les 1 gestes, les symboles, les rites et les stylesAinsi, la culture africaine vue dans notre» . investigation se manifeste comme la source ou le frein de son auto-développement. Le concept développement étant une évolution vers un stade plus avancé, une généralisation progressive ou une évolution vers la perfection est le contraire d’envelopper. Il sera le fruit de la culture africaine dans la mesure que l’africain soit et reste lui même, tout en étant bien sûr ouvert aux autres, conformément aux dires de Joseph Ki-Zerbo : «Oui au modernisme technique mais surtout oui à la personnalité africaine. Oui à la science universelle, mais oui 2 aussi à la conscience africaine» . L’évolution véritable doit être basée sur les potentialités, les besoins, les sentiments, la volonté de l’homme à développer. Est-ce le cas en Afrique ? La masse est-elle impliquée dans son auto-développement ? L’Afrique à l’instar d’autres continents ne peut se passer de la mondialisation. Elle est certes atteinte par les nouvelles inventions dont les effets s’illustrent parfois par l’effritement des valeurs morales, le démantèlement de l’univers culturel et la désacralisation du monde. Devant ce phénomène, l’Afrique ne risque-t-elle pas de se noyer du point de vu culturel voire perdre son identité ?
Face à la modernité, les africains commencent à rejeter leurs bonnes traditions, coutumes et cultures à la poursuite des civilisations étrangères. Ils se trouvent en déséquilibre entre le passé des ancêtres à dépasser et l’avenir d’une nouvelle Afrique à construire. Les séquelles d’une pareille attitude sont sous nos yeux : misère, guerres, désespoir, etc. Dans un monde contrôlé par les nations puissantes, l’Afrique est pratiquement devenue un appendice sans importance, souvent même oublié et négligé partout. L’africain blessé doit, malgré cela, retrouver toutes les ressources de son humanité et revaloriser sa culture qui a des qualités inestimables qu’il peut offrir à l’humanité. C’est cette dynamique de la vie communautaire dans les sociétés africaines, qui fait dire au pape Jean Paul II, qu’elle est une expression de la famille élargie. Que c’est avec un ardent désir qu’il prie et demande des prières pour que
1 René De Haes, « Culture Africaine, Démocratie et Développement Durable » inActes des VIIIe journées philosophiques de la Faculté Saint Pierre Canisius / Kimwenza, éditions LOYOLA, Publications Canisius, 2005, p.7. 2 Joseph Ki-Zerbo,l’Histoire de l’Afrique Noire d’Hier à Demain,Hatier, Paris, 1978, p.644.
1
l’Afrique préserve toujours ce précieux héritage culturel et pour qu’elle ne succombe jamais à 3 la tentation de l’individualisme, si étranger à ses meilleures traditions . II. LE CULTUREL, SOURCE DE DEVELOPPEMENT DE L’AFRIQUE
A l’heure de la mondialisation, où la concurrence n’a de succès que dans la pure compétence, l’Afrique se trouve indubitablement déclassé, or elle est le continent indispensable de la mondialisation en vertu de son don total aux autres. Sans les savoirs endogènes de l'Afrique, sans ses réserves naturelles, sans ses cultures basées sur la valorisation de la personne humaine, sans ses rythmes mythiques, musicales, poétiques et folkloriques, sans sa force énergétique, sans son sens de solidarité, de l’humour, d’hospitalité et de fraternité, notre monde serait sans ambages amputé. Ce continent a payé un très lourd tribut à l'Histoire. Et la mondialisation qui est le résultat d’une longue haleine de travail ne doit pas mettre à l’écart celle-là même qui l’a servit de tremplin au succès. Elle est riche, riche de ses hommes, desescultures et desesressources naturelles. Cette richesse est perceptible dans ses éléments culturels qui sont susceptible par leur mise en évidence d’être une rampe vers le développement. Toutefois, le premier développement que requiert ledasein africain est celui de la connaissance intellectuelle, car la pathologie du sous-développement de l’Afrique est d’abord d’ordre éducationnel. Ce n’est qu’en tant qu’être ayant acquis nombre de connaissance et ainsi susceptible de rationalisation que l’africain pourrais revaloriser sa culture car le culturel est ce qui vise au développement des connaissances intellectuelles, littéraires et artistiques.
La culture est une force incontournable vers l’accomplissement intersubjective de l’être puisqu’elle englobe toutes les vertus sociétales, ingénieuses, économiques, tactiques et religieuses de l’homme. «Toute communauté humaine est forcement régie par des règles et 4 des principes fondés sur la cultureLa culture africaine est un résultat des pures… » . concordances, des compromis du groupe et de la société locale. Elle est un grand complexe institutionnel, technique, cultuel, littéraire, musical ; en un mot, elle est une sorte de phénomène social. C’est un apriori qui est en opposition à ce qui dérive de l’expérience scientifique. Raison pour laquelle son esprit de scientificité est péjoratif. Néanmoins, l’Afrique a ses titres de gloire, sa culture n’est pas subjectif et doit être restituée par des transformations radicales car, au dire de Cheikh Anta Diop : «le berceau d’invention
3 Jean Paul II,Ecclesia in Africa.Exhortation apostolique, Libreria Editrice Vaticana, Cité du Vatican, p.46. 4 Première session de la conférence des Ministres de la culture de l’UA, décembre 2005, Nairobi inwww.africa-union.org., en ligne le 10 septembre 2011.
2
fondamentales, constitutives de l’espèce humaine pendant des centaines de milliers d’années 5 (…) c’est en Egypte que la plus grande civilisation de l’Antiquité est apparue » .Etant donner que la culture dans notre situation englobe une totalité de valeurs et de réponses spécifiques imaginées et préférées par un groupe humain pour résoudre les problèmes de son monde de vie, l’Afrique a un grand intérêt de se moderniser par le rejet systématique des valeurs non édifiantes de sa culture et sauvegarder par là les véritables positives. Etant donné que la culture dans sa dissimilitude en tant que production des peuples est un quotient d’équilibre, de progrès social et propulseur d’innovation pour le développement.
Il est clair d’affirmer sans risque de se tromper que le culturel peut à la fois contribuer au développement de l’Afrique. Cela dépendra de la conscience du peuple, de sa volonté et de son engagement à la valorisation de sa propre culture. Elle est un outil de développement comme l’affirme Brauwere en ces termes : «La culture est donc un outil de gestion de la nature humaine. Le développement est un processus d’adaptation volontaire de sa propre culture vers un état de meilleure résolution des problèmes et de satisfaction des 6 besoins» . Avec cette réflexion nous comprenons comment la culture, bien revue, bien réajustée et bien comprise, peut favoriser l’essor de notre continent sur tous les plans. Ainsi elle saura satisfaire les besoins et les attentes du peuple pour une vie et un avenir meilleurs de chaque individu.
Le développement culturel que nous attendons envisager pour l’Afrique est un développement de l’homme concret et intégral. Raison pour laquelle Njoh Moelle va au delà de la culture traditionnelle pour viser la culture d’ordre scientifique : «la culture dont nous parlons n’as rien de particulariste ; elle est plutôt l’expression de l’aspect scientifique de toute culture particulière. Et en tant que telle elle est d’abord culture des individus pris 7 isolement et non culture d’une société globale ». Il dit cela car pour lui, le sous développement n’est pas seulement celui de l’avoir, mais celui de l’être qui a un manque, une privation marquée par l’ignorance. C’est pourquoi, il nous propose une éducation, un développement non seulement spirituel mais scientifique et praxique. Dans ses recherches il constate que le concept « développement » donne, à première vue, l’idée de l’économique mais pour lui, il est plus que « l’économique » en ce qu’il propose en vue de la promotion de l’art africaine : «il faut que la bataille du développement puisse garantir la pérennité de ce
5 Cheikh Anta DIOP, cité par Joseph KI-ZERBO, A quand l’Afrique ? Entretien avec René Holenstein, Genève, Editions de l’aube /éditions d’en bas, 2004, pp. 11-12. 6 Quentin NOLET DE BRAUWERE, « développement : un outil et une fin en soi », inAu cœur de l’Afrique, Tome LXI, N°1, janvier-mars 1993, p.5. 7 E. NJOH MOELLE,De la médiocrité à l’excellence, Ed. Clé, Yaoundé, 1998, p.150.
3
type d’homme en Afrique, l’artiste et le créateur. Il s’agit bel et bien de garantir sa pérennité car l’Africain, tout le monde le dit, est l’être qui a constamment associé l’art à ses activités 8 diverses de production ».
S’il est vrai que la culture est un outil de développement pour l’Afrique, l’on se demande comment cette conceptualisation peut passer du théorique pour aboutir à la praxique communautaire africaine. Il faut, selon Georges F. M. LEAN, se retourner à la tradition. La 9 tradition comme l’essentiel repère pour la modernisation . Il explicite des éléments importants à imiter dans nos cultures en référence à la tradition. Il s’agit de la communauté, la valeur du temps pour reconstruire la tradition, le respect et la soumission à l’autorité. Certains de nos métiers relevant de nos cultures peuvent êtres améliorés pour notre bonne évolution. Pour Njoh Moelle, il faut non seulement un développement spirituel mais aussi pratique, artisanal. Ainsi, il affirme : «la véritable intériorité appelle à l’extériorité pour s’y manifester, pour être réellement et non imaginairement. C’est une telle intériorité que l’éducation devra favoriser. Pour ce faire, elle empruntera le canal de l’art. Car l’art est la discipline qui restitue à l’homme en même temps que l’initiative créatrice un sens absolument 10 nécessaire de l’harmonie » .Ce faisant, il convient d’affirmer avec véracité qu’il faut pour notre Afrique l’implication de tous au travail en vue d’atteindre un développement sans ambages.
Etant donné que le développement préoccupe d’emblé ledaseinson intégralité, dans c’est-à-dire son intelligence, sa volonté et sa corporéité, la culture africaine a une réponse à la considération colossale de la vie : la conception spirituelle de la vie. La vie est considérée comme ayant une dimension spirituelle qui nécessite une relation de conscience transcendante avec l’Absolu et les ancêtres. Nous savons qu’au centre de toute culture africaine il y a l’Absolu. C’est une valeur transcendante de se référer à l’Etre transcendant pour atteindre un développement à l’état pur, exempt de toute ruse et d’hypocrisie. Cette orthodoxie constitue la base sociale qui impose des logiques de survie pour la communauté.
Le communautarisme est un aspect qui met en valeur la sociabilité de l’africain. L’homme africain n’existe qu’en communauté et pour la communauté, il vit toujours en 8 Idem, p.144. 9 «Tradition as essential for modernization»: la tradition comme l’essential pour le développement. Ce sont les mots utilisés par l’auteur de l’article sur la culture et le développement. (Cf.Georges F. M. LEAN, « community and instrumentalization of work », inPhilosophie africaine: paix-justice-ème travail. Acte de la 10 semaine philosophique de Kinshasa du 30 Novembre au 6 décembre 1986, Facultés philosophiques de Kinshasa, 1988. P114.) 10 E. NJOH MOELLE,Op. Cit. p.140.
4
interdépendance avec les uns et les autres pour les autres. Les membres de la société africaine doivent faire preuve de l’esprit d’ouverture et d’hospitalité, accorder une priorité au social et à la solidarité.
La solidarité est perceptible dans la communauté qui est responsable de la vie de l’ensemble du groupe et de la vie de chacun en particulier. Elle exige le respect mutuel, l’obligation aux enfants de prendre soin de leurs parents, de les nourrir et de les traiter avec beaucoup de délicatesse, aux jeunes le respect pour les anciens.
L’hospitalité est la vertu africaine qui consiste à accueillir le visiteur avec tendresse, sollicitude et grande générosité. La famille hôte lui offre les meilleurs mets et des conditions de couchette confortables. Cet accueil cordial met en exergue la valeur et la dignité de la personne humaine qui est d’ailleurs le réceptacle primordial du développement.
Le consensualisme est aussi un aspect susceptible d’aider l’homme pour son développement. En effet, il est le lieu où les élections des détenteurs du pouvoir se font par démocratie. Des individus sages représentaient l’ensemble du peuple pour voter démocratiquement le chef ou le roi. Ce qui fait dire à BIDIMA que «le consensualisme est Palabrique, parce qu’il est fondé sur la recherche permanente du compromis et de la paix sociale, permet non seulement le règlement pacifique des conflits sociaux et des questions 11 importantes du groupe, mais elle contribue aussi fortement à la cohésion sociale» .
En plus de ces nombreux atouts, la culture africaine comme porteuse d’une dynamique de développent doit accomplir une conversion capitale qui lui assurera la chance d’être en plein pieds dans les enjeux cruciaux du développement. Une conversion qui ne signifie pas pour autant que le continent renonce aux valeurs humanistes qui l’on façonnées pendant des siècles, mais garder et promouvoir ces valeurs humanistes qui ont pour nom : la solidarité, la convivialité, l’amour du prochain, la sauvegarde de l’environnement. C’est alors que, avec 12 Baenge Boyola, nous pourrions poser la question du «redéploiement culturel extérieur» qui permettra à notre continent d’entrer dans la modernité de manière rapide et créatrice. Nous sommes consolidés dans ce sens par Aaron Tolen qui stipule que sans l’économie d’affection et l’ensemble des valeurs d’affectivité et d’ouverture à l’invisible qui structure la raison culturelle africaine, sans la volonté farouche de vie et de foi inébranlable dans l’esprit
11 J.G., BIDIMA,La palabre : une juridiction de la parole, Paris, Michalon, 1997, p.38. 12 Bange Loyola, cité par Ka MANA, Op.cit., p.465.
5
communautaire et le tissu de la tradition, il y a longtemps que les peuples africains auraient 13 perdu l’énergie profonde de l’existence et qu’ils se seraient laissé mourir ou massacrer .
En substance, ce patrimoine culturel immatériel, transmis de génération en génération, est recréé en permanence par les communautés et groupes en fonction de leur milieu, de leur interaction avec la nature et de leur histoire, et leur procure un sentiment d'identité et de continuité, contribuant ainsi à promouvoir le respect de la diversité culturelle et la créativité humaine. Ces aspects positifs sont une rampe pour le développement de l’Afrique, cependant, ces éléments sont insuffisants, car la même culture africaine regorge un tas d’obstacles qui doivent être purifiés.
III. LE CULTUREL, FREIN DU DEVELOPPEMENT DE L’AFRIQUE
Toutefois, une culture n’est jamais parfaite. La culture africaine tout comme les autres doit faire face à ces pénuries, telles les faibles dispositions matérielles et conceptuelles qui cuirassent l’esprit conservateur de la sagesse et du savoir purement ancestral au détriment de l’esprit d’inventivité. Aussi, son esprit d’immédiateté supplée l’organisation méthodique, logique et rigoureuse des choses. Elle doit éradiquer sa propension magique qui est manifestée dans le fétichisme, le maraboutage, le charlatanisme, en un mot la sorcellerie qui imbibe l’esprit dans l’attente d’un bonheur hasardeux au détriment de l’ingéniosité de l’innovation. A cet effet, Manwelo prônera de chasser le faut culturel, car il constitue des obstacles au progrès. Ce faux est le manque de planification, la mentalité hiérarchique qui bafoue l’égalité et le principe de compétence, la conception flexible et élastique du temps, le
culte de l’autorité, la propension exagérée à fêter, le manque criant de la dimension 14 économique et le manque de confiance qui s’exprime dans l’extravagance . De même, l’ethnurgie, un mode de gouvernance tribal qui s’isole des autres malgré leurs compétentes n’est qu’une faille ; la supériorité du logos sur la praxis et l’individualisation du pouvoir ne sont que des désavantages visibles. Ainsi quitte de ces adversités, la culture africaine pourrais adopter ce que les autres ont de richesses et qui leurs opinent de se développer, telle la considération de la pensée méthodique, de la philosophie, la démocratie, la science, la technique, l’industrialisation des grandes puissances, etc.
13 Cf.Aaron Tôlen, art. cit., p.470. 14 Paulin Manwelo, « Chassez le culturel, il revient au galop ! » inCulture africaine, démocratie et développement durable, Actes des VIIIe journées philosophiques de la faculté Saint Pierre de Canisius / Kimwenza, édition Loyola, Canisius 2005, pp. 48-49.
6
La culture africaine si elle s’enferme dans les exaltations folklorique et idyllique sans pour autant être capable de forger ici et maintenant des mentalités de transformation profonde du continent pour son développement, elle restera invalide. L’Afrique doit être rénovée par des logiques sociales et des rationalités existentielles dans la manière de penser, de vivre, d’agir et de s’organiser.
D’abord, c’est dans la mentalité et l’attitude de l’être africain que se trouve l’impasse de son auto-développement. C’est à ce propos que Kä MANA écrit :
«On ne peut s’empêcher d’être frappé par l’acharnement avec lequel les Africains refusent la méthode, l’organisation. Ils gaspillent leurs maigres ressources, sabotent tout ce qui pourrait fonctionner durablement au profit du plus grand nombre. Ils détestent la cohérence, la transparence, la rigueur. A tous les échelons, la faveur va systématiquement au bricolage, hormis l’espoir 15 d’une intervention étrangère, considérée du reste comme un dû historique» .
Ensuite, l’Afrique a à corriger la faute de son esprit d’inaptitude à gérer les ressources humaines et matérielles. En effet, les africains sont appelés à revoir leur gestion du temps, de l’argent, de talent et d’énergie qu’ils gaspillent. Cette inertie mentale et physique bloque le sens de créativité fertile et d’inventivité et plonge par conséquent l’être africain dans la mendicité et l’escroquerie. Kä MANA stipule dans cette perspective qu’: «elle se distingue par un mépris souverain pour la créativité, la diffusion du savoir technique, par une absence 16 terrifiante d’imagination et un conformisme meurtrier.»
En outre, l’Afrique préserve certains éléments de sa culture qui sont susceptible d’être un frein à son développement. Parmi ces soubresaut, on peut citer : la primauté du logos sur la praxis, la propension magique, l’ethnurgie, la personnalisation du pouvoir, la faible compétence matérielle, l’immédiateté, l’escroquerie, l’expertivisme, l’extraversion, l’insuffisante conceptualisation du monde. Ces écueils font que notre culture sans être transformée à moins de chance de se valoir dans le concert des continents. C’est dans cette optique que KI-ZERBO écrit : «notre culture a moins de chance de se diffuser, de participer à la culture mondiale. C’est pourquoi, un des grands problèmes de l’Afrique, c’est la lutte
15 Kä MANA, « La culture africaine peut-elle être porteuse d’une dynamique de développement aujourd’hui ?» inCongo-Afrique,n° 436, Juin-Juillet-Août 2009. 16 Ibidem, p.38.
7
pour l’échange culturel équitable. Pour cela, il faut ‘infrastructurer’ nos cultures. Une 17 culture sans base logistique n’est que vent qui passe. »
De même, l’Afrique va à la perdition, si nos sociétés se meurent dans la misère et périssent du sous-développement. Une des causes unique qui explique notre situation est dans la culture africaine, ses méfaits sont considérables. C’est alors dans cette logique de compréhension que Daniel Etounga-Manguelle stipule que «la cause unique, celle qui est à l’origine de toutes les déviations, c’est la culture africaine ; caractérisée par son autosuffisance, sa passivité, son manque d’ardeur à aller à la rencontre des autres cultures avant que ces dernières ne s’imposent à elle et ne l’écrasent, son incapacité, une fois le mal 18 fait à évoluer, à leur évoluer à leur contact, sans tomber dans un mimétisme objet. »
 Alors, nous pouvons déterminer quelques facteurs du sous-développement dépendant de cette cause unique du mal de l’Afrique : la culture Africaine. Une culture dont la gestion des incertitudes est liée à la soumission à des puissances invisibles qui enserrent toute la communauté dans un étau des préceptes et des tabous innombrables. C’est à ce propos que dira Manwelo que «le fait que la culture africaine est une culture de la magie et de la sorcellerie. L’attrait à la sorcellerie pour l’africain est irrésistible. La sorcellerie est pour bien des africains le moyen approprié pour résoudre les problèmes. Un moyen privilégié pour résoudre les conflits. La sorcellerie est partout : au gouvernement, dans la vie 19 ordinaire…» De même, elle est dépeint un système culturel dominé par une soumission totale à l’ordre des divinités, qui assure l’effacement de l’individu face à la communauté, avec une autorité de contrainte ou de récompense. A travers ces composantes culturelles, il est aussi clair que la culture africaine se caractérise par ‘l’enflure de l’irrationnel’, avec un système de vie où s’épouse dans une exubérance pathologique, la magie, le fétichisme, le commerce avec les divinités et avec les morts, les sacrifices rituels, etc. Ainsi bloquées en elles même par cette enflure de l’irrationnel, les sociétés africaines sont des sociétés ‘ totalitaires’, qui refusent la nouveauté, la créativité et le risque de l’innovation. Elles sont par conséquent incapables d’affronter efficacement les défis nouveaux dans des mutations fertiles et bienfaisantes. Se sont des sociétés fatalistes, soumises à la tradition et incapables de décoller dans un utopisme de novation qui les changerait de fond en comble. Délestée de toute
17 Joseph Ki-zerbo,A quand l’Afrique ? Entretien avec René Holenstein, Genève, Editions de l’aube / 2ditions d’en bas, 2004, p.11. 18 Daniel Etounga-Manguelle, cité par Kä MANA, « La culture africaine : peut-elle être porteuse d’une dynamique de développement aujourd’hui ? Une critique fondamentale des rationalités culturelles africaines » in Congo-Afrique, N°436, juin- juillet- août, 2009. pp. 461. 19 Paulin MANWELO,Op.cit., p.49.
8
possibilité de se remettre en question pour aller de l’avant. Les sociétés africaines meurent de leur propre immobilisme culturel quand la situation historique change et évolue.
Enfin, pour exprimer la manière dont on peut percevoir la culture africaine dans son incapacité d’être porteuse d’une dynamique de développement nous pouvons encore nous faire aider par Daniel Etounga-Manguelle avec cette métaphore qui nous paraît éclairante :
 «Les japonais aiment dirent que leur culture est celle de l’eau : elle prend spontanément la forme du récipient que les réalités lui imposent en épousant les formes de ce récipient, mais sans changer de nature. S’il nous fallait caractériser la notre, nous dirons c’est une culture de à l’image de l’huile de palme froide. Elle est figée par définition et ne peut devenir fluide que si on la réchauffe. Chez nous, les rapports entre groupes sont réglés une fois pour 20 toutes, et se répètent indéfiniment.»
En substance, nous retenons que la culture africaine malgré ses multiples aspects négatifs est porteuse d’une dynamique de développement, pourvu qu’un défi majeur soi relevé : le problème de la révolution qu’il est urgent de lancer pour transformer les rationalités culturelles africaines en vue d’inventer une nouvelle culture capable de répondre aux défis politiques, économiques, sociaux, culturels et spirituels de nos sociétés africaines pour s’assurer un développement harmonieux.
IV. CONCLUSION
Au terme de notre investigation culturelle et développementale, force est de savoir qu’au niveau de l’appétit, l’homme ne se distingue pas de l’animal ; c’est à partir du moment où il prend conscience de la valeur des relations sociales réfléchies et ordonnées, des exigences de la vie politique et de la nécessité de favoriser le progrès économique, technique, culturel et scientifique, qu’il émerge de l’animalité. L’homme africain doit comprendre le passé de ses pères pour devenir un homme nouveau, un homme passionné et engagé pour lutter contre le sous-développement en vue d’accéder voire dépasser le stade des autres peuples en matière de progrès véritable. Mais, selon ARISTOTE :« une vraie société humaine, doit se reposer sur des traditions et la société politique manquera elle-même d’assise si elle se coupe des origines traditionnelles et si les hommes ne vivent plus dans cet
20 Ibidem, pp.462-463.
9
21 esprit de tradition » .Considérant notre cas d’Afrique, le traditionalismedont parle Aristote est une base nécessaire pour toute la vie sociale et politique de l’homme. Pour cela, l’africain, au lieu de continuer à être mû par ses origines et ses ancêtres, il doit se mouvoir par soi-même, sans nier la tradition, mais de la dépasser, en étant maître et responsable de ses actes et en ayant un objectif à atteindre. La mondialisation crée des rapports et favorise aussi la rencontre des différentes cultures, mais il faut donc que l’Afrique ne s’y jette pas aveuglement. L’Afrique et son élite doivent changer de mentalité. Lutter contre la pauvreté, les troubles socio-politico-économiques et la main tendue vers l’extérieur. Aussi, la fuite des cerveaux africains doit s’arrêter pour que ses intellectuels travaillent pour l’industrialisation du continent tout en assurant les transformations de ses matières premières dans l’optique de muter cette identité que relate Léopold S. SENGHOR :« L’Afrique, terre d’oppression, d’injustice et de pauvreté. Vingt ans après la grande vague des indépendances, le cliché reste 22 exact » .L’essentiel, aujourd’hui, est d’associer les paysans au développement, de les responsabiliser pour qu’ils apprennent à organiser eux-mêmes la production. Et l’homme étant donc de dualité corps et esprit, le pape Jean Paul II nous livre un secret pour rendre la vie humaine sur la terre plus humaine et plus digne :« le développement de la technique, et le développement de la civilisation de notre temps marqué par la maîtrise de la technique, exigent un développement proportionnel de la vie morale et de l’éthique. Ce dernier semble 23 malheureusement rester toujours en arrière » . Le Pape ne s’est-il pas dérobé puisque le fondement du développement se trouve d’emblé dans l’homme en tant qu’un être capable et aspirant du développement. Le sous-développement est dans cette perspective inhérente à toute l’humanité du fait qu’il n’est pas que matériel mais spirituel, corporel et éthique. Ainsi, la question du développement se pose également en Europe, en Amérique comme en Asie. L’abolition des repères éthiques, les questions de clonage, d’insémination artificielle, la fécondation in vitro et le transfert d’embryon, l’homosexualité, la pédophilie, la transsexualité, le racisme et la phobie de l’autre, l’individualisme exacerbe. Tels sont les indicateurs d’un sous-développement déshumanisant que le monde entier doit battre en brèche.
 Guy Modeste SOMPOUGDOU
21 Jacques de MONLEON,Marx et Aristote, perspectives sur l’homme, FAC, Paris, 1984, p.145. 22 Christian Casteran et Jean Pierre Langellier,L’Afrique déboussolée, PLON, Paris, 1978, p.145. 23 Jean-Marie Ploux,Jean Paul II. Textes essentiels, Les éditions de l’Atelier/Éditions Ouvrières, Paris, 2005, p.64.
10
V. BIBLIOGRAPHIE
1. NOLET DE BRAUWERE Quentin, « Développement : un outil et une fin en soi », in LXI, Au cœur de l’Afrique, n°1, janvier-mars 1993. 2. NJOH MOELLE, E.,De la médiocrité à l’excellence, Ed. Clé, Yaoundé, 1998.
11
  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents