Relation d effort et salaire au mérite - article ; n°2 ; vol.8, pg 133-176
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Revue française d'économie - Année 1993 - Volume 8 - Numéro 2 - Pages 133-176
Le salaire au mérite s'est fortement développé depuis quelques années en France. C'est l'occasion d'une réflexion sur l'existence de la relation d'effort, telle qu'elle est postulée par les théories du salaire d'efficience. Des enquêtes montrent l'existence de nombreux effets pervers. L'effort ne peut être efficient que s'il existe une cohérence entre politique salariale et organisation du travail.
Merit payment has developed considerably over the last few years in France, thus providing an opportunity to examine the effort relation, as postulated by efficiency wage theory. There is evidence of many perverse effects. Coherence between work organization and wage policy is a necessary condition for effort to become efficient.
44 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1993
Nombre de lectures 23
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Jean-François Troussier
Relation d'effort et salaire au mérite
In: Revue française d'économie. Volume 8 N°2, 1993. pp. 133-176.
Résumé
Le salaire au mérite s'est fortement développé depuis quelques années en France. C'est l'occasion d'une réflexion sur l'existence
de la relation d'effort, telle qu'elle est postulée par les théories du salaire d'efficience. Des enquêtes montrent de
nombreux effets pervers. L'effort ne peut être efficient que s'il existe une cohérence entre politique salariale et organisation du
travail.
Abstract
Merit payment has developed considerably over the last few years in France, thus providing an opportunity to examine the effort
relation, as postulated by efficiency wage theory. There is evidence of many perverse effects. Coherence between work
organization and wage policy is a necessary condition for effort to become efficient.
Citer ce document / Cite this document :
Troussier Jean-François. Relation d'effort et salaire au mérite. In: Revue française d'économie. Volume 8 N°2, 1993. pp. 133-
176.
doi : 10.3406/rfeco.1993.931
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfeco_0769-0479_1993_num_8_2_931Jean-François
TROUSSIER
Relation d'effort
et salaire au mérite
'individualisation des sa
laires est devenue pratique courante dans les entreprises
françaises. T. Coutrot, S. Mabille [1992] montrent sa
progression depuis 1985. Le ministère du Travail [1992]
révèle qu'en 1991, cette pratique concernait la moitié
des ouvriers et plus généralement 57 % des salariés.
Afin d'interpréter la nature et la portée de cette 134 Jean-François Troussier
pratique plusieurs voies de recherche peuvent être
explorées.
Une voie de recherche possible consiste à se situer
à un niveau très global, et à considérer l'individualisation
des salaires par rapport à d'autres mécanismes de déter
mination des salaires qui apparaissent eux aussi dans les
années 1980 : désindexation des salaires, révision de
certaines classifications, annualisation du salaire (pour les
cadres)... Il est tentant de se demander si ces éléments
forment système, et si un «nouveau» système de déter
mination des salaires est en train de prendre tournure.
Il est alors logique de s'interroger sur le point de
savoir si le mode de détermination des salaires est lui-
même cohérent avec les transformations qui affectent
l'organisation et le contenu du travail. L'objet de l'ana
lyse est alors la relation salariale, et la problématique
s'inscrit assez naturellement dans les théories de la
régulation, notamment lorsqu'elles s'attachent à illustrer
l'évolution du rapport salarial (R. Boyer [1986]), dont la
relation salariale n'est qu'un des éléments.
C'est une autre voie de recherche, complémenta
ire, qui sera poursuivie ici. Elle consiste à considérer
que l'individualisation comporte une norme, une pres
cription sur le travail. Il s'agit d'étudier les modalités de
fonctionnement de la prescription salariale : l'individua
lisation des salaires entraîne-t-elle une amélioration des
performances dues au travail? C'est toujours la cohé
rence salaire-travail qui est en jeu, mais à un niveau
d'analyse beaucoup plus détaillé, celui de l'entreprise,
voire de l'atelier ou du service.
On peut préciser quelque peu, avant une présen
tation détaillée ci-dessous. Le salaire au mérite est un
système qui typiquement, fait dépendre la hausse Jean-François Troussier 135
annuelle de salaire d'une appréciation portée sur le
mérite du salarié. Cette est fondée sur des
critères de comportement, de performance, ou plus
directement sur une comparaison entre objectifs prescrits
et résultats atteints. On remarquera que cette forme
d'individualisation des salaires est très différente de celle
qui résulte d'une différenciation des postes de travail,
découlant par exemple de la mise en œuvre des méthodes
dites de «job evaluation». C'est pourquoi le terme même
d'individualisation est ambigu. On gardera ici l'expres
sion des salaires pour des raisons de
conformité avec l'usage, mais il vaudrait manifestement
mieux parler de salaire au mérite, comme le fait
l'expression anglaise de «merit payment».
La conformité aux critères de mérite, l'avantage
salarial qui la récompense constituent donc une prescript
ion, dont les employeurs attendent un effort et un
surcroît de performance. On discutera ici de la relation
d'effort, en confrontant les résultats empiriques rassem
blés au cours d'enquêtes (voir ci-dessous) à l'hypothèse
d'une relation positive entre le salaire et l'efficience du
travail. Cette hypothèse est retenue par les théories du
salaire d'efficience, telles qu'elles sont développées par
de nombreux auteurs, particulièrement G. A. Akerlof et
J.L. Yellen, à partir d'une première formulation généra
lement attribuée à H. Leibenstein [1957].
Avant de mener une discussion sur le salaire au
mérite et l'efficience de l'effort, on définira la position
du problème en rappelant quelles sont les hypothèses de
base des modèles de salaire d'efficience, et quels sont les
mécanismes de l'individualisation des salaires. 136 Jean-François Troussier
Position du problème
Les hypothèses de base des modèles
des salaires d'efficience
On sait que la théorie néo-classique, dans sa version
standard, indique que le salaire se forme sur le marché du
travail, par la confrontation entre l'offre et la demande
de travail. Comme la demande de travail (l'offre d'emp
loi) émanant des employeurs dépend de la productivité
marginale du travail, on a affaire à une détermination
simultanée du niveau de l'emploi (courbes d'offre et de
demande) et du de salaire (productivité marginale
du travail).
Si on considère le sens de la relation entre
productivité et salaire, il apparaît clairement que le
salaire dépend de la productivité.
Il appartient à H. Leibenstein d'avoir le premier
renversé le sens de cette relation (H. Leibenstein [1957])
à partir d'un raisonnement traitant du cas des pays sous-
développés. L'idée est la suivante : pour qu'un travailleur
travaille correctement il faut qu'il soit correctement
nourri, et donc correctement rémunéré. On voit bien
que, alors, la productivité dépend du salaire, et il s'agit
bien d'un renversement de la séquence classique.
A vrai dire, sous une forme un peu plus générale,
consistant à estimer qu'il vaut mieux payer convenable
ment les salariés pour obtenir d'eux un travail convenab
le, cette idée est plus ancienne encore. On peut trouver
des formulations en ce sens dès A. Smith. (B. Lamotte,
J.F. Troussier [1990]). B. Reynaud [1989] explique que la Jean-François Troussier 137
notion de salaire d'efficience était déjà présente chez
A. Marshall.
L'idée que la productivité dépend du salaire a été
développée assez récemment par un ensemble de modèles
théoriques connus sous le nom de théories du salaire
d'efficience, dans un contexte bien particulier.
En effet, le développement du chômage dans le
courant des années soixante-dix rendait peu crédibles des
théories comme celles du «Job Search» de G. Stigler
(J. Stankiewicz [1984]), et il fallait pour les théoriciens
néo-classiques réexaminer les hypothèses de base de la
théorie (B. Gazier [1991]), afin de fournir une explication
plausible du chômage devenu massif.
Parmi les paradoxes que révélait la confrontation
de la théorie standard aux faits, un phénomène attirait
l'attention. «Normalement», la présence d'un fort chô
mage aurait dû conduire à une baisse du salaire, du fait
même de l'abondance de main-d'œuvre disponible sur le
marché du travail. Or on assistait, et on assiste tou
jours, à une relative rigidité (stickiness) des salaires à la
baisse.
L'attention s'est donc déplacée du fonctionne
ment du marché du travail (qui ne permettait pas à lui seul
d'expliquer la rigidité du salaire), vers l'élabo

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