Des sibylles à la Sapience dans la tradition médiévale - article ; n°1 ; vol.98, pg 13-33
22 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Des sibylles à la Sapience dans la tradition médiévale - article ; n°1 ; vol.98, pg 13-33

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
22 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Mélanges de l'Ecole française de Rome. Moyen-Age, Temps modernes - Année 1986 - Volume 98 - Numéro 1 - Pages 13-33
Barbara Obrist, Image et prophétie au XIIe siècle : Hugues de Saint-Victor et Joachim de Flore, p. 35-63. Au XIIe siècle, la vision prophétique est assimilée à l'interprétation de l'Écriture sainte. Dans son De arca Noe morali et mystica, Hugues de Saint-Victor donne des instructions pour la réalisation d'une image de l'arche de Noé qui doit servir de support à la contemplation. Identifiée à l'Écriture, à l'Église et au corps du Christ, l'image de l'arche permet à l'interprète-prophète d'englober de son regard l'état universel de l'Église et la totalité du temps. S'inscrivant dans la même tradition, Joachim de Flore accentue plus particulièrement la progression du principe spirituel aux dépens du principe charnel, en s'appuyant sur la Cité de Dieu de saint Augustin dans le Liber de concordia. La réalisation idéale et finale du spirituel est confiée aux moines cisterciens. Des figures d'arbres servent à représenter les divers aspects de cette évolution que le Liber figurarum visualise par des moyens propres à l'image picturale.
21 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1986
Nombre de lectures 63
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Madeleine Le Merrer
Des sibylles à la Sapience dans la tradition médiévale
In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Moyen-Age, Temps modernes T. 98, N°1. 1986. pp. 13-33.
Résumé
Barbara Obrist, Image et prophétie au XIIe siècle : Hugues de Saint-Victor et Joachim de Flore, p. 35-63.
Au XIIe siècle, la vision prophétique est assimilée à l'interprétation de l'Écriture sainte. Dans son De arca Noe morali et mystica,
Hugues de Saint-Victor donne des instructions pour la réalisation d'une image de l'arche de Noé qui doit servir de support à la
contemplation. Identifiée à l'Écriture, à l'Église et au corps du Christ, l'image de l'arche permet à l'interprète-prophète d'englober
de son regard l'état universel de l'Église et la totalité du temps. S'inscrivant dans la même tradition, Joachim de Flore accentue
plus particulièrement la progression du principe spirituel aux dépens du principe charnel, en s'appuyant sur la Cité de Dieu de
saint Augustin dans le Liber de concordia. La réalisation idéale et finale du spirituel est confiée aux moines cisterciens. Des
figures d'arbres servent à représenter les divers aspects de cette évolution que le Liber figurarum visualise par des moyens
propres à l'image picturale.
Citer ce document / Cite this document :
Le Merrer Madeleine. Des sibylles à la Sapience dans la tradition médiévale. In: Mélanges de l'Ecole française de Rome.
Moyen-Age, Temps modernes T. 98, N°1. 1986. pp. 13-33.
doi : 10.3406/mefr.1986.2849
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mefr_0223-5110_1986_num_98_1_2849MADELEINE LE MERRER
DES SIBYLLES À LA SAPIENCE
DANS LA TRADITION MÉDIÉVALE
Le discours que tiennent les sibylles, d'inspiration divine, en prise sur
le passé et les origines, est porteur des traditions les plus antiques, tant
dans le domaine païen que judaïque, avant qu'elles ne soient intégrées au
cortège annonciateur de l'Ère messianique.
Elles sont citées par Pausanias, au moins celle de Babylone, mais les
plus célèbres sont les sibylles hébraïques, qui se situent dans la tradition
apocalyptique du Livre éthiopien d'Hénoch, et du Livre des Jubilés. Elles
servent d'intermédiaires entre Dieu et les hommes, et comme les prophèt
es, n'ont pas de localisation précise. Leur nombre se multipliera, jusqu'à
atteindre douze, mais les plus connues restent celles d'Erythrée et de
Cumes.
La sibylle est vieille, ainsi le veut l'étymologie hébraïque, qui rattache
la troisième sibylle, celle de Sabbé, à l'araméen sabha ou sabhta1. C'est le
sens retenu par The Jewish Encyclopedia, qui rapporte Lactance : la sibyl
le étant native de Babylone, son nom doit être d'origine sémitique et signi
fier «l'ancienne de Dieu», ce qui se rapporte à son grand âge2. La vogue
des Institutiones divinaes de Lactance à la fin du XVe siècle incite à privi
légier cette interprétation que l'on verra se généraliser à côté des diffé
rences considérables de l'âge des sibylles, qui se forment en cortège3.
Dans Y Ovide moralisé, du XIVe siècle4, la sibylle conduit Énée aux
Enfers. À la salutation de ce dernier: «Dame, dist il, sainte persone, /
1 V. Nikiprowetzsky, La troisième Sibylle, Paris, 1970, p. 12-13.
2 The Jewish Encyclopaedia, New York et Londres, 1972, s.v. Sibyl, p. 318.
3 É. Mâle, L'art religieux de la fin du Moyen Age en France. Étude sur l'icono
graphie du Moyen Âge et sur ses sources d'inspiration, Paris, 1931, p. 256, note 2.
Édition à Subiaco en 1465 puis 1468, 1470, 1471, 1472, 1474, 1478.
4 Ovide moralisé, éd. C. De Boer, 5 vol., Amsterdam, 1915-1936, tome V, XIVe
livre, p. 34-35.
MEFRM - 98 - 1986 - 1, p. 13-33. 14 MADELEINE LE MERRER
Sainte deesse ou Dieu amie» (v. 900-1), elle répond par un soupir: «Je
suis une fame mortelz / mes ma destinée est or telz / Que mil ans m'es-
tuer vivre au monde / Ains que la mors, qui tout affonde / Me puisse
af fonder ne sousmetre» (v. 919-923). C'est pour n'avoir pas voulu répon
dre aux avances d'Apollon, qui lui a accordé autant d'années de vie que
de grains de sable qu'elle pourrait recueillir dans sa main, que sa longévit
é ne s'accompagne pas de la beauté de sa jeunesse. Elle doit s'amenuiser
et se transformer : «Je serai si forment muée / Et mes cors anéantira /
Que nul hom ne me choisira, / Fors a la voix tant seulement». La sibylle
n'est plus que la voix d'antiquité qui annonce le temps de l'avènement.
À ce titre elle véhicule toute la science du monde, d'autant qu'elle
était déjà avec Noè sur l'arche. Selon les versions, elle est sa fille ou sa
bru, mais de toutes façons, détient les connaissances de la période proto
historique. Ainsi en témoigne Suidas, mais aussi une chronique de Michel
le Syrien selon lequel la Reine du Midi qui rencontra Salomon se dénomm
ait Nessa, descendante d'Aster, fille de Noé5. Épiphane la considère
comme la propre fille de Noé, voire d'Eve6, dont on sait qu'elle est, elle
aussi, détentrice de savoir.
Cette tradition est parvenue dans les récits médiévaux, où la sibylle
est la femme savante par excellence, en particulier dans Le livre de Sibile
que l'éditeur, Hugh Shields, démontre avoir été écrit par Philippe de
Thaon, et estime avoir été composé entre 1139 et 11487.
Le prologue indique qu'il existe «dis sibiles / Gentils dames nobiles /
Ki orent en lur vie / Espirit de prophecie». (v. 1-4). Tant que «Si com
dient auctur/e li mestre plusur, / «Sibile» erent nomees/e sages apelees /
Tûtes femmes savantes / Ki erent devinantes» (v. 9-14). S'ensuit une liste
où la troisième est la «delfica, / les batailles nuncia / Ki avindrent a
Troi». (v. 19-21). La cinquième est Eristrïa : «cest fu engendrée / en Babi-
loine e nee / de l'isle Eristrïa, / ou ses livres laissa (v. 29-32). «La siste
sibilla / Elle out nun Cassandra», (ν. 35-36) : aucun commentaire n'a
ccompagne le nom de cette dernière, qui sera célèbre en Italie et en Espa
gne, avec un statut très particulier comme il sera dit. La dernière est la
5 V. Nikiprowetzsky, op. cit., p. 192; J. Lucien Herr, La reine de Saba et le bois
de la croix, dans Revue archéologique, 1914, p. 18-19, note 3; The Jewish Encyclo
paedia, op. cit., p. 320.
6 Épiphane, Adversus Haereses, VI, XXVI, 1.
7 H. Shields, Philippe de Thaon, auteur du «Livre de Sibylle», dans Romania, 85
1964, p. 455-477; Id., Le livre de Sibile par Philippe de Thaon, The Anglo-norman
Society, Londres, 1979. DES SIBYLLES À LA SAPIENCE DANS LA TRADITION MÉDIÉVALE 1 5
Tiburtine, de son nom latin «Ebuleam». Dans ce texte particulièrement
important de par sa date et sa localisation, sans oublier que notre auteur
était un esprit averti auteur d'un Bestiaire et d'un Comput, la précellence
de la Tiburtine est marquée tant par la longueur du passage qui lui est
consacré que par les précisions qu'elle apporte.
«Ceste fist escriptures. De diverses mesures. / Iceste fu plus sage / E
de mut haut parage. . . / Iceste fut reïne / Seinte chose devine. . . / Cest
dist prophecie / Del fiz seinte Marie, / E al rei Salomun, / Prist el dispu-
teisun» (v. 51-72). Sa renommée lui vaut de nombreux voyages, le plus
célèbre l'amenant devant l'empereur Trajan où elle éclaire le songe de
l'empereur, par l'avènement «del fiz seinte Marie. . . et mut apertement /
Del jur de Jugement» (v. 82 et 84-5). Ce dernier rôle est en général réservé
à la sibylle Erythrée, et l'on voit se déclarer par une sybille unique l'a
nnonce des deux avènements; elle est dotée de la faculté d'être présente en
de nombreux lieux, et de pouvoir rencontrer Salomon et l'empereur Tro
jan.
La reine Sibylle est identifiée, par sa rencontre avec Salomon, com
me la reine de Saba, pour des raisons d'approximations phoniques avec la
sibylle hébraïque Sambete ou Sabe, déjà nommée, mais aussi pour des rai
sons familiales et dynastiques, dont nous indiquerons quelques éléments
utiles à notre propos, recueillis dans la tradition complexe des diverses
versions.
Que le statut des sibylles s'achemine vers un type synerétiste est une
tendance générale, qui ne sera a

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents