Enthymème et textualisation - article ; n°137 ; vol.34, pg 29-45
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Description

Langages - Année 2000 - Volume 34 - Numéro 137 - Pages 29-45
L'interrogation centrale de l'article concerne la jonction entre le concept rhétorique d'enthymème et le concept sémiotique de textualisation : celle-ci peut-elle être rapprochée de l'enthymème, et même considérée comme une redéfinition de ce phénomène discursif central dans la rhétorique aristotélicienne ? En quoi les propositions actuelles de la « rhétorique tensive » permettent-elles de suggérer une réponse ? Le statut de l'enthymème dans l'histoire de la rhétorique, entre l'approche argumentative du concept chez Aristote et celle de la logique de Port Royal, conduit à articuler le paramètre logique (la catégorisation implicite projetée) et le paramètre pragmatique qui livre l'implicite à l'énonciataire et sollicite sa participation interprétative. Le rapprochement peut alors s'établir avec les conditions de la textualisation sémiotique : sa définition, l'espace d'énonciation qu'elle libère, et ses limites comme opération discursive d'agencement et de prise en charge des données elliptiques et prévisibles du discours. On sera alors amené à envisager l'apport de la rhétorique tensive à l'approche sémiotique de la textualisation, en mettant l'accent notamment sur les modes de co-présence des significations et sur l'assomption du sens par le sujet interprétatif. Cette analyse invite à isoler la composante thymique qui se trouve au cœur de l'enthymème (l'еn-thymie), et à envisager le passage de l'enthymème restreint (structure cognitive d'argumentation) à l'enthymème étendu (intégrant de droit la composante thymique de l'assomption et la dimension passionnelle du discours). Son déploiement du côté des discours figuratifs permettra enfin de poser la notion « d'enthymème figuratif » , dont la problématique sera développée et exploitée à travers la théorie de la lecture de Proust, comprise comme un acte de textualisation et reposant sur une série de catégories mises en corrélation à partir du matériau-image : corrélation entre le perceptif et le discursif, entre le croire cognitif et l'incorporation du sensible dans l'émotion, entre la création textuelle et la lecture.
Our purpose is to compare the theoretical status of the rhetorical concept of enthumema with the semiotical one of textualization. Can the latter be considered as a redefinition of the central discursive phenomenon in Aristotelian rhetoric? The historical approach of enthumema in rhetorical field leads us to articulate the logical parameter (the implied categorization) with the pragmatical one (calling for interpretative participation). On the other hand, textualization in semiotics is defined as the way discourse is conducted, considering its restricting linearity rules, when it leaves contents in the dark as far as other contents are brought in light, and thus offers the speaker strategic opportunities and the reader interpretation space. The new semiotic approach of tensive interrelations between different meaning levels allows us to establish a link between enthumema and textualization, focusing, in particular, the thymic root of the rhetorical concept. This extended viewpoint is developed and illustrated with a M. Proust's text about novel reading theory.
17 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 2000
Nombre de lectures 25
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Denis Bertrand
Enthymème et textualisation
In: Langages, 34e année, n°137, 2000. pp. 29-45.
Citer ce document / Cite this document :
Bertrand Denis. Enthymème et textualisation. In: Langages, 34e année, n°137, 2000. pp. 29-45.
doi : 10.3406/lgge.2000.1783
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lgge_0458-726X_2000_num_34_137_1783Abstract
Our purpose is to compare the theoretical status of the rhetorical concept of enthumema with the
semiotical one of textualization. Can the latter be considered as a redefinition of the central discursive
phenomenon in Aristotelian rhetoric? The historical approach of enthumema in rhetorical field leads us
to articulate the logical parameter (the implied categorization) with the pragmatical one (calling for
interpretative participation). On the other hand, textualization in semiotics is defined as the way
discourse is conducted, considering its restricting linearity rules, when it leaves contents in the dark as
far as other contents are brought in light, and thus offers the speaker strategic opportunities and the
reader interpretation space. The new semiotic approach of tensive interrelations between different
meaning levels allows us to establish a link between enthumema and textualization, focusing, in
particular, the "thymic" root of the rhetorical concept. This extended viewpoint is developed and
illustrated with a M. Proust's text about novel reading theory.
Résumé
L'interrogation centrale de l'article concerne la jonction entre le concept rhétorique d'enthymème et le
concept sémiotique de textualisation : celle-ci peut-elle être rapprochée de l'enthymème, et même
considérée comme une redéfinition de ce phénomène discursif central dans la rhétorique
aristotélicienne ? En quoi les propositions actuelles de la « rhétorique tensive » permettent-elles de
suggérer une réponse ?
Le statut de l'enthymème dans l'histoire de la rhétorique, entre l'approche argumentative du concept
chez Aristote et celle de la logique de Port Royal, conduit à articuler le paramètre logique (la
catégorisation implicite projetée) et le paramètre pragmatique qui livre l'implicite à l'énonciataire et
sollicite sa participation interprétative. Le rapprochement peut alors s'établir avec les conditions de la
textualisation sémiotique : sa définition, l'espace d'énonciation qu'elle libère, et ses limites comme
opération discursive d'agencement et de prise en charge des données elliptiques et prévisibles du
discours. On sera alors amené à envisager l'apport de la rhétorique tensive à l'approche sémiotique de
la textualisation, en mettant l'accent notamment sur les modes de co-présence des significations et sur
l'assomption du sens par le sujet interprétatif. Cette analyse invite à isoler la composante thymique qui
se trouve au cœur de l'enthymème (l'еn-thymie), et à envisager le passage de l'enthymème restreint
(structure cognitive d'argumentation) à l'enthymème étendu (intégrant de droit la composante thymique
de l'assomption et la dimension passionnelle du discours).
Son déploiement du côté des discours figuratifs permettra enfin de poser la notion « d'enthymème
figuratif » , dont la problématique sera développée et exploitée à travers la théorie de la lecture de
Proust, comprise comme un acte de textualisation et reposant sur une série de catégories mises en
corrélation à partir du matériau-image : corrélation entre le perceptif et le discursif, entre le croire
cognitif et l'incorporation du sensible dans l'émotion, entre la création textuelle et la lecture.Bertrand Denis
Université de la Sorbonně nouvelle - Paris III
ENTHYMÈME ET TEXTUALISATION
Résumé
L'interrogation centrale de l'article concerne la jonction entre le concept rhétorique
d'enthymème et le concept sémiotique de textualisation : celle-ci peut-elle être rapprochée
de l'enthymème, et même considérée comme une redéfinition de ce phénomène discursif
central dans la rhétorique aristotélicienne ? En quoi les propositions actuelles de la
« rhétorique tensive » permettent-elles de suggérer une réponse ?
Le statut de l'enthymème dans l'histoire de la rhétorique, entre l'approche argumentative
du concept chez Aristote et celle de la logique de Port Royal, conduit à articuler le
paramètre logique (la catégorisation implicite projetée) et le paramètre pragmatique qui
livre l'implicite à l'énonciataire et sollicite sa participation interprétative. Le rapproche
ment peut alors s'établir avec les conditions de la textualisation sémiotique : sa définition,
l'espace d'énonciation qu'elle libère, et ses limites comme opération discursive d'agence
ment et de prise en charge des données elliptiques et prévisibles du discours. On sera alors
amené à envisager l'apport de la rhétorique tensive à l'approche sémiotique de la textual
isation, en mettant l'accent notamment sur les modes de co-présence des significations et
sur l'assomption du sens par le sujet interprétatif. Cette analyse invite à isoler la compos
ante thymique qui se trouve au cœur de l'enthymème (Геп-thymie), et à envisager le
passage de l'enthymème restreint (structure cognitive d'argumentation) à l'enthymème
étendu (intégrant de droit la composante thymique de l'assomption et la dimension
passionnelle du discours).
Son déploiement du côté des discours figuratifs permettra enfin de poser la notion « d'e
nthymème figuratif » , dont la problématique sera développée et exploitée à travers la théorie
de la lecture de Proust, comprise comme un acte de textualisation et reposant sur une série
de catégories mises en corrélation à partir du matériau-image : corrélation entre le
perceptif et le discursif, entre le croire cognitif et l'incorporation du sensible dans
l'émotion, entre la création textuelle et la lecture.
Le renouvellement de la réflexion sémiotique sur la rhétorique est moins lié à la
réparation d'un manque — pourquoi la du discours a-t-elle fait abstract
ion, tout au long de son développement, de l'édifice rhétorique ? — qu'à une
évolution de ses orientations de recherche. Tournée désormais vers la saisie du
29 discours en acte, la sémiotique s'efforce de décrire, sur la base de ses fondements
théoriques, l'effectuation du sens au plus près de renonciation vivante. Elle ne
pouvait, dans une telle perspective, que réinterroger la rhétorique en l'envisageant
bien entendu d'un seul tenant, c'est-à-dire en rejetant la scission historique entre la
rhétorique de l'argumentation et la rhétorique des tropes, pour tenter d'établir la
réflexion sur le socle commun où, à l'origine, elles se fondent ensemble. Les hypo
thèses analytiques de la « rhétorique tensive » , au centre de cette nouvelle approche,
ont cependant été pour l'essentiel évaluées dans un réexamen tropologique. À la
différence d'une approche substitutive de la figure, où un contenu « figuré » est mis
à la place d'un contenu « propre », la rhétorique tensive prolonge les analyses de P.
Ricœur l et de M. Prandi2 et postule, dans la manifestation de la figure, une
co-présence, tendue et concurrentielle, de plusieurs modes d'existence de la signif
ication corrélés les uns aux autres, à l'appel de l'énoncé. Un des enjeux d'une telle
compétition sémantique est d'articuler les rapports entre les versants sensible et
intelligible, passionnel et interprétatif, de la signification tropologique. Or, au delà
des seules figures, on peut considérer que cette hypothèse a une portée globale et
concerne la dimension discursive générale de la rhétorique.
Exercice du faire persuasif, la rhétorique est traditionnellement, par excellence,
« le lieu de rencontre de l'homme et du discours », selon la formule de M. Meyer.
Celui-ci propose, dans sa riche introduction à la Rhétorique d'Aristote 3, de la
définir à partir d'une double polarité : d'un côté, elle concerne « le traitement du
problématique dans le discours » 4, s'occupant de ce qui est probable, incertain,
contestable, de ce qui pourrait être autre, ou même ne pas être, localisant ainsi
l'espace de la p

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