La chanson de Roland à la lumière de l histoire : vérité de Baligant - article ; n°1 ; vol.8, pg 125-139
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Description

Revue de l'Occident musulman et de la Méditerranée - Année 1970 - Volume 8 - Numéro 1 - Pages 125-139
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1970
Nombre de lectures 33
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Jean Poncet
La chanson de Roland à la lumière de l'histoire : vérité de
Baligant
In: Revue de l'Occident musulman et de la Méditerranée, N°8, 1970. pp. 125-139.
Citer ce document / Cite this document :
Poncet Jean. La chanson de Roland à la lumière de l'histoire : vérité de Baligant. In: Revue de l'Occident musulman et de la
Méditerranée, N°8, 1970. pp. 125-139.
doi : 10.3406/remmm.1970.1084
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/remmm_0035-1474_1970_num_8_1_1084LA CHANSON DE ROLAND
A LA LUMIÈRE DE L'HISTOIRE :
VÉRITÉ DE BALIGANT
"Le public noble, bourgeois, religieux et populaire, cheval
iers, marchands, piétaille, devant lesquels (les chansons de geste)
sont destinées à être chantées, est moins soucieux d'exactitude
que d'agrandissement ou de déformation légendaires".
"...Difficile à rencontrer, l'aventure... s'offrira soit à
l'Occident, dans la péninsule ibérique, pour la lutte des Chrétiens
contre les Maures, sous l'impulsion des abbés de Cluny, au Xlème
siècle, soit en Orient. . . ".
(G. COHEN "La grande clarté du Moyen Âge", chez Gal
limard, 1945, p. 49 et 60).
La dernière édition scolaire de la Chanson de Roland, qui vient d'être
publiée chez Bordas, rassemble, grâce au travail de compilation de G.
MOIGNET, la traduction et l'essentiel des commentaires récents ayant trait
à ce premier acte de la littérature française. Elle ne prétend certes appor
ter aucune lumière nouvelle sur les controverses qui concernent l'origine
ou le contenu de cette oeuvre-clé. Au contraire, sommes-nous tenté de dire :
cette bonne mise au point reste si prudente qu'elle ne souligne pas assez les
progrès réalisés dans la compréhension même de la "Chanson", du fait de
l'apport des historiens et des critiques modernes, depuis les travaux déjà
anciens de J. BEDIER et de P. BOISSONNADE l.
Sans doute, le débat touchant les origines de la "Chanson" et les dé
veloppements apportés à des récits légendaires antérieurs, par l'auteur du
poème retrouvé à Oxford, paralt-il aujourd'hui dépassé. G. MOIGNET remar
que fort justement qu'il n'y a nulle contradiction à supposer que l'auteur de
la Chanson ait pu être à la fois un "remanieur et un écrivain de génie. . . "
(cf. Introduction, p. 10). Le véritable problème n'est plus là. On ne peut
par contre être satisfait par la confusion qui continue à caractériser comment
aires et notes de présentation habituellement consacrée à la Chanson de
Roland. Tout se passe comme si la plupart des spécialistes d'histoire litt
éraire ne parvenaient pas à se dégager entièrement de leur vision moderne ,
à replacer le texte d'Oxford et son auteur dans l'époque et le milieu où ils
apparurent. G. BEDIER avait cependant parfaitement ouvert la voie, même
s'il restait beaucoup de choses à dire après lui et même si nous ne pouvons
1. Joseph BEDIER Lea légendes épiques Paris, 1927, 4 vol. (Le volume 3 est con
sacré à la Chanson de Roland). Pierre BOISSONNADE Du nouveau sur la Chanson de Roland,
Paris, 1923. J. PONCET 126
plus adhérer à son idée qu"'un chef d'oeuvre commence à son auteur et finit
à lui". Car c'est lui qui, le premier, a établi le lien existant entre le gé
nie propre de l'auteur épique recréant, remaniant, enrichissant un thème
légendaire sur lequel nous ne possédons par ailleurs que fort peu d'indica
tions précises et toute une atmosphère historique et géographique détermi
née. L'oeuvre de Turold, comme l'Iphigénie de Racine, écrivait BEDIER ,
"ne s'explique que par la collaboration et la complicité de son temps" (cité
par MOIGNET, p. 300). BEDIER attirait l'attention sur le fait qu'"au com
mencement était la route" : les chansons de geste comme celle-ci, supposait-
il, "seraient nées au Xlème siècle, dans les sanctuaires qui jalonnent les
grands pèlerinages de la chrétienté, de la collaboration des moines déten
teurs de légendes locales obscurément conservées et de jongleurs plus ou
moins inspirés, attirés par la clientèle des pèlerins". La Chanson de Roland
aurait été liée aux "souvenirs", aux reliques et aux récits vrais ou faux,
évoquant, tout au long de la route de Bordeaux à Saint Jacques de Compos-
telle, et surtout aux étapes de Blaye ou de Roncevaux même, la mort de
Roland, tombé en combattant les "païens" dans les défilés pyrénéens. L'hy
pothèse de BEDIER appelle beaucoup de remarques et même de corrections .
Un progrès essentiel est fait à partir du moment où critiques littéraires et
historiens ont replacé la conception et la composition du poème épique dans
son véritable contexte : celui d'une époque de croisade, et plus particulière
ment de la guerre conduite en Espagne, sur l'Ebre, par les croisés français
allant combattre Sarrasins et Almoravides, à l'appel des grands abbés de
Cluny, des rois de Castille ou d'Aragon, du comte de Barcelone...3.
Les historiens, pour leur part, ont parfois commis l'erreur de ne
voir dans la Chanson qu'une transposition d'événements contemporains : c'est
le cas de P. BOISSONNADE , qui semble minimiser l'importance du long tra
vail d'élaboration de la légende. Les commentateurs littéraires, par contre ,
se sont surtout demandé s'il existait ou non, avant le poème retrouvé à
Oxford, et attribué à Turold, des textes graduellement enrichis par divers
2. J. GAREL, dans le Manu el d'histotre littéraire de la France publié en 1965 aux
Editions Sociales (tome I, p. 90 à 97) analyse longuement la manière dont a pu se former la l
égende carolingienne, dans une vaste aire géographique et culturelle où se recruteront par la suite
les troupes de la croisade espagnole. H montre comment ont pu mûrir les conditions les plus
propices à la naissance de la chanson de geste romane, et souscrit à l'idée d'après laquelle
"le poème de Roland (serait) le remaniement d'un poème de Roncevaux qui aurait iinorê le
personnage de Ganelon, son ambassade auprès de Marslle, sa trahison, le retour de Char-
lemagne a Roncevaux, son combat contre Bal liant et l'épilogue a Alx... (p. 95).
Et nous avons placé en exergue la citation du livre de G. COHEN sur le Moyen Age,
expression des progrès accomplis dans la compréhension de ce qu'est la Chanson de Roland.
Il manquait cependant à ce dernier auteur, d'avoir fait certains rapprochements histo
riques précis, qui nous permettent d'aller un peu plus loin sur la même route et de dater avec
une relative exactitude la version définitivement fixée par le texte d'Oxford. J. GAREL écrit
à ce sujet : "Si on admet qu'en 1060-1065, la version primitive de la Chanson de Roland était
achevée, qu'en 1090-1100, la version de Turold l'était, et que le fut en 1140 l'Historia Karoli
du pseudo-Turpin, c'est moins d'un siècle qu'il aura fallu ft notre légende pour qu'elle prenne
les dimensions d'une oeuvre européenne".
En réalité, le poème d'Oxford suppose connus des événements et des noms qui datent
des années lili à 1126... Il faut donc reculer quelque peu la date de composition définitive
du texte que nous possédons. LA CHANSON DE ROLAND A LA LUMIERE DE L'HISTOIRE 127
conteurs, s 'inspirant du souvenir laissé par un événement réel, mais devenu
légendaire et déformé8.
Il est généralement admis aujourd'hui que des récits oraux pour le
moins ont précédé le texte que nous connaissons. Un jongleur nommé
TAILLEFER aurait déjà "chanté de Roland" pour les Normands qui allaient
rencontrer les troupes saxonnes de Harold à Hastings, en 1066. Une "nota
Emilianense", retrouvée au monastère espagnol de San Millan de la Cogolla
et "datée par les paléographes du troisième quart du Xlème siècle" nomme
"six des douze neveux de Charlemagne, dont Roland, Olivier et Turpin" ;
elle cite pour la première fois le nom de ce Roncevaux ou ils seraient morts...
(cf. MOIGNET, p. 294).
De là cependant à croire que l'oeuvre &

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