La réforme de 1883 au Caucase - article ; n°1 ; vol.8, pg 21-35
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La réforme de 1883 au Caucase - article ; n°1 ; vol.8, pg 21-35

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Description

Cahiers du monde russe et soviétique - Année 1967 - Volume 8 - Numéro 1 - Pages 21-35
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1967
Nombre de lectures 11
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

John P. LeDonne
La réforme de 1883 au Caucase
In: Cahiers du monde russe et soviétique. Vol. 8 N°1. Janvier-Juin 1967. pp. 21-35.
Citer ce document / Cite this document :
LeDonne John P. La réforme de 1883 au Caucase. In: Cahiers du monde russe et soviétique. Vol. 8 N°1. Janvier-Juin 1967. pp.
21-35.
doi : 10.3406/cmr.1967.1689
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/cmr_0008-0160_1967_num_8_1_1689LA RÉFORME DE 1883 AU CAUCASE
UN EXEMPLE D'ADMINISTRATION RÉGIONALE RUSSE
Cet article a pour but de servir d'introduction à un problème peu
connu de la politique intérieure tsariste : l'administration des marches
de l'Empire. Nous prenons ici le Caucase comme exemple type destiné
à illustrer la relation entre les deux principes rivaux de l'administra
tion territoriale russe : le principe fonctionnel, linéaire, mettant
l'accent sur les liens directs entre la bureaucratie ministérielle et ses
agents d'exécution locaux, et le principe régional, territorial, mettant
l'accent sur l'autonomie locale et la décentralisation fonctionnelle.
Le système d'administration territoriale qui régissait l'Empire russe
datait des réformes de Catherine et d'Alexandre Ier. L'unité de base
était la gubernija (province ou « gouvernement ») divisée en uezdy
(cantons). L'administration de la gubernija était dirigée par un gou
verneur, mais se fragmentait en un grand nombre de subdivisions
locales des ministères centraux, et le gouverneur n'établissait qu'une
coordination lâche de leurs activités1. La législation russe, cependant,
reconnaissait, parfois ouvertement, parfois implicitement, l'existence
de régions administratives et d'autorités exerçant leur juridiction sur
un territoire dépassant les limites d'une gubernija. Cela posait deux
problèmes : l'établissement des gubernii placées sous la juridiction
intermédiaire d'une autre autorité, et la définition de cette juridiction.
Le problème de la localisation était relativement simple : les terri
toires situés au-delà du vieux noyau moscovite — c'est-à-dire la vallée
de la moyenne et basse Volga, au-delà de la Volga vers Orenburg et
les portes de « l'Asie », l'Ukraine et la Bessarabie dans le Sud, les
régions nouvellement acquises dans l'Ouest — , bien que divisés en
gubernii, étaient reconnus comme régions fondées sur des « particular
ités locales » et placées sous l'autorité de Gouverneurs Généraux,
1. I. M. Strahovskij, « Gubernskoe ustrojstvo » (L'administration des « gou
vernements »), Žurnál Ministerstva Justicii, sept. 1913, 7, pp. 61-62 et 75. 22 JOHN P. LE DONNE
officiers militaires du rang de général, dont l'activité restait mal
définie et se fondait sur les parcelles de pouvoir que le Tsar accordait
individuellement, et morceau par morceau, à chacun d'eux.
Mais la définition de la juridiction du Gouverneur Général restait
depuis le début un problème insoluble. Il n'est pas douteux que, de
Catherine à la fin du règne de Nicolas Ier, les Gouverneurs Généraux
furent considérés comme des expédients temporaires. L'établissement
et le maintien de liens directs entre le Gouvernement central et les
provinces restait la politique fondamentale du tsarisme1. L'immensité
de la Russie d'Europe, la difficulté des communications et l'ignorance
qui, en conséquence, régnait à Pétersbourg sur la vie des provinces,
tels étaient les obstacles qui se dressaient devant cette politique. La
tâche du Gouverneur Général devint, donc, non pas d'administrer mais
de veiller à ce que l'administration locale obéît à la loi et que les rouages
de la justice fonctionnassent sans retard — ce qui exigeait une pression
formidable de la part du Gouverneur Général étant donné la lenteur
proverbiale de la justice russe — , et de veiller enfin à ce que tout
le monde respectât l'orthodoxie politique. Pour y parvenir, le Gouver
neur Général avait le droit d'inspecter n'importe quel bureau à n'im
porte quel moment, de déplacer le personnel subalterne et d'infliger
de sévères punitions aux dissidents politiques.
Il apparut cependant qu'il était impossible de séparer rigidement
supervision et administration. Les officiers de haut rang chargés de
tâches essentiellement politiques avaient grand-peine à admettre de
tels raffinements de la doctrine administrative. Entre les Gouverneurs
Généraux et les divers ministères, surtout ceux des Finances et des
Affaires Intérieures, le conflit était endémique2. La suppression finale
de la fonction de Gouverneur Générai fut le signe de la victoire de la
centralisation ministérielle. Les liens linéaires directs et les contacts
plus étroits entre les ministères et les bureaux locaux apparurent
comme incompatibles avec l'existence d'une supervision territoriale
sur un certain nombre d'activités fonctionnelles8.
1. A. D. Gradovskij, « Istoričeskij očerk učreždenija General-Gubernatorstv
v Rossii » (Esquisse historique de l'établissement des Gouverneurs Généraux en
Russie), Sobranie sočinenij, Saint-Pétersbourg, 1899, I, p. 308.
2. Ibid., pp. 315-317; K- Sokolov, « Očerki istorii i sovremennago značenija
general-gubernatora » (Esquisse de l'histoire et de l'importance contemporaine
du Gouverneur Général), Vcstnik prava, sept. 1903, 7, pp. 151-154 ; Istoričeskij
obzor dejatel'nosti Komiteta ministrov (Analyse historique de l'activité du Conseil
des ministres), Saint-Pétersbourg, 1902, III, pp. 47 et 59; IV, pp. 107-110.
3. Cela fut défini très énergiquement par D. Gur'ev, ministre des Finances
sous Alexandre Ier, et qui s'opposa à l'établissement de Gouverneurs Généraux
partout : Kommisija 0 preobrazovanii gubernskih i uezdnyh učreždcnij (Commiss
ion pour la transformation des administrations des gouvernements et des cantons),
Otdel administrativnyj, cast' I, otdelenie I, pp. 60-65. Pour une introduction
générale au problème de la fonction face au problème de l'aire, cf. J. W. Fesler,
Area and Administration, University of Alabama Press, 1964. LA RÉFORME DE 1883 AU CAUCASE 23
Dans les territoires frontaliers, c'est-à-dire la Sibérie, l'Asie Cent
rale, le Caucase, la Pologne et la Finlande, plusieurs considérations
atténuèrent le conflit. Les distances qui séparaient la capitale du Cau
case ou de la Sibérie étaient phénoménales, et l'ignorance des « condi
tions locales » propres à certaines régions frontalières quasiment
complète. La population indigène était partout non russe et non
orthodoxe et s'opposait, parfois par la force des armes, au contrôle
politique russe. Le besoin d'une puissante présence politique dans ces
régions, soutenue par la force militaire, était donc évident. Dans ces les Gouverneurs Généraux portaient des titres différents :
Namestnik en Pologne et au Caucase, Administrateur en chef (au
Caucase avant 1845), Gouverneur Général en Finlande, au Turkestan
et en Sibérie. Leur autorité variait suivant les régions en fonction
des « particularités locales ». Us étaient tous commandants d'un corps
d'armée, sinon même d'une armée.
Pourtant le conflit entre les ministres et ces hauts fonctionnaires
ne tarda pas à se manifester. Il était toujours admis que l'administra
tion régionale n'était que provisoire et devait préparer l'intégration
de la région dans un Empire organiquement unifié et l'établissement
de liens directs, comme en Russie même, entre les ministères et leurs
bureaux locaux dans les gubernii. Le Caucase n'était pas une exception
et le dessein de cet article est d'étudier comment la réforme de 1883
a modifié les relations entre l'administration régionale et le Gouverne
ment central et établi d'une façon décisive la prééminence de l'admi
nistration régulière, ministérielle, sur la décentralisation régionale.
Le Caucase n'était pas seulement une région lointaine et complexe,
mais aussi le théâtre de conflits militaires depuis l'annexion de la
Géorgie en 1801 jusqu'à la fin de la guerre muride en 1859, et l'annexion
de Kars et de Batoum en 18771. Les désordres permanents en Trans-
caucasie et l'hostil

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