La rime d après le Dictionnaire des rimes de Lanoue (1596) - article ; n°1 ; vol.99, pg 107-123
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La rime d'après le Dictionnaire des rimes de Lanoue (1596) - article ; n°1 ; vol.99, pg 107-123

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Description

Langue française - Année 1993 - Volume 99 - Numéro 1 - Pages 107-123
Y.-C. Morin This essay examines the rhyme-system of 16th century French as presented by Lanoue (1596) in his rhyming dictionary — certainly the most precise and extensive rhyming dictionary in the history of French — and how it evolved from a strictly phonetic system into the « classical rhyme », a system depending more and more heavily on stereotyped interpretations of a stabilizing conventional spelling, as poets tried to maintain distinctions no longer existing in the language.
17 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1993
Nombre de lectures 88
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Y.-C. Morin
La rime d'après le Dictionnaire des rimes de Lanoue (1596)
In: Langue française. N°99, 1993. pp. 107-123.
Abstract
Y.-C. Morin
This essay examines the rhyme-system of 16th century French as presented by Lanoue (1596) in his rhyming dictionary —
certainly the most precise and extensive rhyming dictionary in the history of French — and how it evolved from a strictly phonetic
system into the « classical rhyme », a system depending more and more heavily on stereotyped interpretations of a stabilizing
conventional spelling, as poets tried to maintain distinctions no longer existing in the language.
Citer ce document / Cite this document :
Morin Y.-C. La rime d'après le Dictionnaire des rimes de Lanoue (1596). In: Langue française. N°99, 1993. pp. 107-123.
doi : 10.3406/lfr.1993.5856
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lfr_0023-8368_1993_num_99_1_5856Yves-Charles MORIN
Université de Montréal
LA RIME D'APRÈS LE DICTIONNAIRE DES RIMES
DE LANOUE (15%)
Cet essai sur les caractéristiques de la rime à la fin du XVIe siècle telle qu'elle
apparaît dans le Dictionnaire des rimes françoises (1596) à d'abord été conçu comme un
préliminaire à une étude sur la prononciation de son auteur — il est en effet essentiel
de bien comprendre la nature de l'iDENTITÉ PHONIQUE minimale requise à la rime pour
reconstruire la prononciation. Les nombreuses réflexions qui accompagnent les class
ements des différentes terminaisons permettent aussi de reconstituer la systématique de
la rime que concevait notre auteur et les rapports de la rime avec la prononciation et
la graphie. Cette analyse devrait aussi contribuer à mieux comprendre la nature de la
rime classique et en particulier ce que Cornulier (1977, 1981, 1992) a appelé la fiction
graphique *.
1. L'ouvrage et son auteur
L'auteur du Dictionnaire des rimes françoises est prisonnier 1 lorsqu'il écrit son
ouvrage. C'est à peu près tout ce qu'il dévoile de lui-même. Très tôt cependant, on
décidera qu'il s'agit d'un certain Lanoue, sans s'accorder cependant sur son identité
complète : Odet de Lanoue selon les uns 2, Pierre de Lanoue selon les autres 3 — tous les
deux originaires de l'ouest de la France, cependant.
Son ouvrage est imprimé en 1596 à Genève 4 par les héritiers d'Eustache Vignon.
* Cette recherche a été subventionnée en partie par le Conseil de recherches en sciences humaines
du Canada et par le Fonds pour la formation de chercheurs et l'aide à la recherche du Québec. Je tiens
à remercier ici pour leurs précieux conseils Mme Michèle Bonin, M. Benoît de Cornulier et M. Etienne
Tiffou.
1. « Ce sont petites observations que j'ai colligées en passant mon tempz pour prendre quelque
relasche en des estudes plus sérieuses, tandis qu'une longue prison me defendoit d'expozer ma vie pour
le salut de ma patrie affligée » (424).
2. Thurot (I : XLIII) en appelle à l'autorité de Sorel dans la Bibliothèque françoise (1664 : 6). C'est
sur la foi de ce témoignage, ainsi que ceux de La Monnoye et Le Duchat que Hoefer (1852) aboutit à la
même conclusion. Selon Thurot, Lancelot fait référence au dictionnaire de rimes de « Monsieur de la
Noue » dans son Traité de poesie françoise (ch. II, art. 3), ce qui ne suffirait pas à identifier totalement
notre auteur. Darmesteter (1876 : 395nl) est de la même opinion, mais ne donne pas ses sources.
3. Levot (1852-57) ne semble pas satisfait des opinions de Lancelot (qu'il trouve dans la Méthode
latine de Port-Royal), de Sorel, et de La Monnoye-Le Duchat. Il préfère celle de Barbier (1809), pour qui
l'auteur du dictionnaire est « Pierre de la Noue, gentilhomme angevin ». C'est aussi pour Pierre de la
Noue « traducteur de Cuido Panciroli 1617 » qu'opte Picot (1906-1907) — sans justification cependant.
4. Le Catalogue général des livres imprimés de la Bibliothèque Nationale (1926, tome 88), indique à
tort Paris comme lieu d'édition ; cette information a été corrigée manuellement dans l'exemplaire déposé
à la Bibliothèque Nationale quand je l'ai consulté en 1991.
107 Une deuxième édition révisée apparaît en 1623, puis une troisième en 1624 5, imprimées
à Genève par Matthieu Berjon. Le réviseur, aussi anonyme, en augmente considérabl
ement le volume, principalement à l'aide de préfixes sans intérêt. On n'accordera que peu
d'importance à ces éditions ultérieures.
S'il écrit ce dictionnaire de rimes c'est, dans l'ordre de sa préface, pour le bénéfice
des générations futures, des poètes contemporains et « (par occasion) de ceux qui
voudront bien parler François ».
La référence aux générations futures est un thème fréquent au XVIe siècle et cher,
entre autres, aux réformateurs de l'orthographe. Le français deviendra une langue
morte, comme le sont devenus le latin et le grec — c'est dans la nature des langues. Mais
il restera, cela ne fait aucun doute à ces lettrés, une langue de culture. Il faut donc, pour
aider les utilisateurs futurs, non seulement en décrire les règles de prononciation et de
versification avant sa disparition, mais aussi établir les listes des formes imprévisibles
afin d'épargner à ces utilisateurs la nécessité de les retrouver dans l'usage des
« autorités ».
2. Lee canons de la rime
Deux terminaisons sont permises à la rime si elles obéissent à une double contrainte
d'identité/distinction : IDENTITÉ PHONIQUE et DISTINCTION LEXICALE.
Cette contrainte se trouve souvent exprimée sous la forme d'une opposition
SON-SENS ou RICHESSE-CONTRASTE sur les mots (cf. l'analyse de Cornulier 1985 :
121-125 des nombreuses formulations traditionnelles), qui ne lui est cependant pas
équivalente.
La contrainte, telle que la conçoit Lanoue, porte moins sur les mots conventionnels
des lexicographes que sur les parties de mots pertinentes pour la rime. Par exemple, la
paire noblesse : tigresse est licite parce que les terminaisons -esse sont phoniquement
identiques et appartiennent à des unités lexicales distinctes, ici deux suffixes différents.
La paire noblesse : noblesse est bien sûr exclue, car bien que l'identité phonique soit
totale, il n'y a aucune distinction lexicale entre ces deux mots conventionnels. Mais la
contrainte lexicale, pour Lanoue, peut aussi interdire la rime noblesse : vieillesse, parce
que les terminaisons -esse sont deux occurrences du MÊME suffixe nominal féminin
exprimant le caractère (l'état, la qualité, etc.) 6, donc non distinctes.
Les canons de la rime doivent préciser le MINIMUM nécessaire pour satisfaire la
condition d'identité phonique. Les LICENCES permettent de relâcher les contraintes. Ce
sont ces concepts, DISTINCTION LEXICALE, MINIMUM D'IDENTITÉ PHONIQUE, LICENCES,
tels qu'on peut les reconstruire de la pratique de Lanoue et de ses commentaires, que
nous aimerions préciser dans cette étude.
5. L'édition de 1624 a été reproduite en 1972 par Slatkine à Genève avec une page titre
additionnelle, dans laquelle l'ouvrage est attribué à Pierre de La Noue sans discussion. Hoefer (1852)
mentionne une édition de Cologne en 1624, qui est vraisemblablement celle de Genève. Darmesteter
(1876 : 395) mentionne aussi une « seconde édition » publiée en 1823 à Genève.
6. Lanoue ne discute pas explicitement de la contrainte lexicale pour -esse, mais en présente
d'autres semblables, comme nous verrons.
108 Il faut bien comprendre que Lanoue ne présente pas une THÉROIE DE LA RIME à
laquelle se conforme son dictionnaire, mais un instrument pour le praticien à partir
duquel on ne peut pas toujours reconstruire complètement le système de l'auteur.
3. La distinction lexicale
La nature de la contrainte de distinction lexicale apparaît le plus clairement dans
les annotations relatives aux terminaisons 1ER dissyllabe, c'est-à-dire [i'ër] (196b- 197a).
Ces terminaisons contiennent toutes le même suffixe d'infinitif [ër] et souvent le même
suffixe dérivationnel [i] : injur + i + er, licenc + i + er, remed + i + er. Elles sont
donc rarement lexicalement distinctes. La même observation vaut pour les terminaisons
1ER monosyllabiques, c'est-à-dire [iër] : batel + ier, drap + ier, usur + ier. L'auteur
recommande donc d'apparier la terminaison dissyllabique à la monosyllabique pour
garantir la distinc

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