Le théâtre national populaire au temps de Jean Vilar (1951-1963) - article ; n°1 ; vol.57, pg 89-103
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Description

Vingtième Siècle. Revue d'histoire - Année 1998 - Volume 57 - Numéro 1 - Pages 89-103
National Popular Theater at the time of Jean Vilar (1951-1963), Emmanuelle Loyer.
Following a long tradition going back to the French revolution, Jean Vilar's national theater was dedicated to service to the people. He carried out an effective policy to attract the people and renewed the classic repertory in an original way. For him the theater was an explicit form of commitment to the left. This gave him an incontestable success, especially as in France the theater traditionally represents a political and social stake. Conceived as a public service, the TNP knit close ties with the State, considering that it had duties toward its citizens' culture. For Jean Vilar, the theater belonged to the life of a human being; it was as vital as living and eating. But of the role of who decided which culture was the right one were born the ambiguities and difficulties of a form of theater denounced in 1968.
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1998
Nombre de lectures 64
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Emmanuelle Loyer
Le théâtre national populaire au temps de Jean Vilar (1951-
1963)
In: Vingtième Siècle. Revue d'histoire. N°57, janvier-mars 1998. pp. 89-103.
Abstract
National Popular Theater at the time of Jean Vilar (1951-1963), Emmanuelle Loyer.
Following a long tradition going back to the French revolution, Jean Vilar's national theater was dedicated to service to the
people. He carried out an effective policy to attract the people and renewed the classic repertory in an original way. For him the
theater was an explicit form of commitment to the left. This gave him an incontestable success, especially as in France the traditionally represents a political and social stake. Conceived as a public service, the TNP knit close ties with the State,
considering that it had duties toward its citizens' culture. For Jean Vilar, the theater belonged to the life of a human being; it was
as vital as living and eating. But of the role of who decided which culture was the right one were born the ambiguities and
difficulties of a form of theater denounced in 1968.
Citer ce document / Cite this document :
Loyer Emmanuelle. Le théâtre national populaire au temps de Jean Vilar (1951-1963). In: Vingtième Siècle. Revue d'histoire.
N°57, janvier-mars 1998. pp. 89-103.
doi : 10.3406/xxs.1998.3712
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/xxs_0294-1759_1998_num_57_1_3712LE THEATRE NATIONAL POPULAIRE
AU TEMPS DE JEAN VILAR
(1951-1963)
Emmanuelle Loyer
d'Avignon fête ses cinquante ans. S'expri- « Un tréteau, un acteur, une pas
sion », était-ce là tout le credo du théâ mant dans les genres habituels du propos
tre de Jean Vilar, ce TNP mythique, commémoratif - biographies, expositions,
lieu d'engagement à gauche et de fer colloques - une telle réapparition en force
veur artistique ? Emmanuelle Loyer d'un personnage ou d'une réalité dans le
replace l'histoire d'une riche décennie champ culturel a le mérite de restituer toute
dans la tradition théâtrale française la visibilité voulue à une action longtemps
pour montrer les ambiguïtés d'une occultée. En effet, les termes de «théâtre
aventure à l'esthétique mise au service civique» ou de «théâtre citoyen», bannis
d'un projet social. de la scène française - à quelques except
ions près - depuis 1968, semblent resurgir
dans les ambitions des hommes et femmes Jpean Vilar est devenu un lieu de
I mémoire atteint par les différentes for- de théâtre, chargés de nouvelles significa
I mes de la commémoration. Depuis quel- tions et porteurs de missions 3.
Un tel constat invite à réfléchir sur le succès ues années, la conjoncture en matière
artistique et la pertinence historique des théâtrale se caractérise par une indéniable
«actualité Vilar»: en 1991, divers colloques1 deux créations de Jean Vilar, le festival
fêtent le quarantenaire de sa nomination d'Avignon à partir de 1947 4, mais surtout
le Théâtre national populaire qu'il dirige à la tête du TNP ainsi que le vingtième
du 1er septembre 1951 jusqu'en 1963. anniversaire de sa mort ; en 1995, la Maison
Quels furent les fondements d'une si Jean Vilar, sise en Avignon, retrace en une
indéniable réussite? Comment l'après- riche exposition cent ans de «théâtre
guerre invente-t-il une configuration cultucitoyen, du Théâtre du Peuple de Bussang
au Théâtre du Soleil»2 au sein desquels le relle où, de nouveau, le théâtre puisse voul
oir rimer avec le peuple? Théâtre national populaire occupe une
Dans cette solution moderne, l'État a eu place de choix. En juillet 1996, le Festival
sans aucun doute une partie à jouer que
1. Des -Journées Jean Vilar« se sont tenues au Centre Geor le siècle précédent n'imaginait pas. Le
ges Pompidou les 22, 23 et 24 mai 1991.
2. Théâtre citoyen, du Théâtre du Peuple au Théâtre du
3. Bernard Dort, • Le théâtre en guerre contre la guerre -, Soleil, Avignon, Maison Jean Vilar, 1995- C'est le titre du cata
logue accompagnant l'exposition de la Maison Jean Vilar ; le Le Monde, 24 février 1994.
texte est de Pascal Ory, le choix de citations et d'illustrations 4. Cf. Antoine de Baecque, Avignon, le royaume du théâtre,
de Melly Puaux. Paris, Découvertes/Gallimard, 1996.
89 :
:
EMMANUELLE LOYER
Théâtre national populaire navigue par gros TNP inscrit au pochoir sur les affiches
et programmes fait partie du paysage paritemps de 1951 à 1954, années de fondation
et donc de difficultés économiques, d'argut sien, tout comme les deux clés du festival
ies administratives dans le renouvellement d'Avignon résument la cité papale. Pourt
ant, cette solidité symbolique et pratique du contrat liant Vilar à l'État, de mises en
- environ 500000 spectateurs par saison — place héroïques et d'ulcères à l'estomac1,
d'invention culturelle et d'attaques polit est remise en cause par la crise de crois
iques manichéennes : « théâtre rouge » contre sance que vit le TNP, incapable d'assumer
« théâtre bourgeois » ; il réussit à atteindre financièrement les foules vespérales de
une certaine bonace à partir de 1955. C'est fidèles. Celles-ci ne compensent pas les sub
l'année de nouvelles résolutions, micros ventions qui, bien qu'augmentées par
copiques aux yeux de l'Histoire — avancée Malraux, n'en demeurent pas moins chiche
de la représentation à 20 heures et chasse ment distribuées4. De plus, Vilar répond en
aux retardataires, refus des pourboires aux homme de théâtre à la conjoncture histor
ouvreuses -, mais qui contribuent progres ique des premières années de la Cinquième
sivement à donner sa coloration conviviale, République, celles de la guerre d'Algérie
son identité « populaire », à ce théâtre planté et de l'affirmation du pouvoir gaullien. Réi
térant l'exigence de «faire le théâtre de son en plein seizième arrondissement. Jusqu'en
I960, la «nef de Chaillot» vogue sur des temps », il se lance dans l'aventure du Réca-
eaux qui, pour être calmées, ne sont nul mier où ne sont programmés que des textes
lement stagnantes. Les représentations théât exclusivement contemporains, et présente
dans la grande salle de Chaillot un «répertrales, les concerts, les tournées nationales
oire civique» - qui peut se vanter d'avoir et internationales, le rythme incessant de
ce «théâtre-Minotaure»2 sont autant de fac monté Arturo Ui, Antigone, L'Alcade de
teurs qui impressionnent André Malraux, le Zalaméa et La Paix en pleine guerre
tout nouveau ministre des Affaires cultu d'Algérie? - où la pertinence de l'allusion
relles, prêt en 1959 à reconnaître officie politique fait mouche chaque soir dans des
llement dans le TNP la seule oeuvre salles galvanisées pour qui le théâtre est
d'importance laissée en héritage par une explicitement une des armes de la bataille
Quatrième République minée, selon lui, par républicaine qui s'engage dans cette France
les hésitations et les démissions3. De I960 déroutée, en quasi-guerre civile.
jusqu'au départ de Vilar en 1963, le TNP L'exemplarité du TNP, son aura tout à
est soumis à des forces contradictoires : fort fait singulière résultent de ce «feuilleté» de
d'une légitimité désormais incontestée, il discours, d'expériences et de mythes qui,
est à bien des égards le modèle des centres en France, ont rythmé l'histoire du théâtre
dramatiques nationaux et autres troupes populaire depuis deux siècles.
permanentes de la décentralisation. Le sigle
O LE THÉÂTRE NATIONAL POPULAIRE,
1. Vilar en fut souvent victime. En juillet 1954, il entre sur ENFANT DE LA RÉVOLUTION FRANÇAISE la scène d'Avignon en Macbeth titubant et bredouille son
texte plus qu'il ne le dit, en pleine crise d'ulcération stomacale. Un mythe : le peuple réconcilié du théâ2. Jean Vilar, Mémento, Paris, Gallimard, 1981, p. 66, 12 fé
vrier 1954 : « Malgré les publics et les heureux résultats finan tre antique, soudé par une culture unifiante
ciers de Lorenzaccio, de Richard II, de Don Juan, du Cid, et universelle établissant un rapport nous avons peine à rassasier ce théâtre-Minotaure. De guerre
d'immédiateté avec la «nation», la &

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