Les futurs maitres face à l immigration. Le piège d un « habitus discursif » - article ; n°1 ; vol.60, pg 30-42
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Les futurs maitres face à l'immigration. Le piège d'un « habitus discursif » - article ; n°1 ; vol.60, pg 30-42

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Mots - Année 1999 - Volume 60 - Numéro 1 - Pages 30-42
LES FUTURS MAITRES FACE À L'IMMIGRATION. LE PIÈGE D'UN «HABITUS DISCURSIF» L'un des objectifs des IUFM est de préparer les jeunes enseignants aux quartiers où ils devront exercer. Cependant, en insistant sur les différences culturelles, les formateurs renforcent l' «habitus discursif» qui se défosse des dysfonctionnements du système sur les origines des élèves.
FUTURE TEACHERS «CONFRONTED WITH» IMMIGRATION. THE TRAP OF A « DISCURSIVE HABITUS » One of the objectives of the IUFM is to prepare young teachers for the areas in which they will be working. However, by insisting on cultural differences, the instructors reinforce the « discursive habitus » which masks the dysfunctiuns of the system through a concentration on the students' origins.
LOS FUTUROS MAESTROS « FRENTE A» LA INMIGRACION. LA TRAMPA DE UN « HABITUS DISCURSIVO » Uno de los objetivos de los Institutos Universitarios de Formación de Maestros de preparar los jóvenes profesores a enseňar en los barrios donde tendran que ejercer su oficio. Sin embargo, poniendo el énfasis sobre las diferencias culturales, los formadores refuerzan el « habitus discursivo » que consiste en abordar los disfuncionamientos del sistema a traves de los orígenes de los alumnos.
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1999
Nombre de lectures 27
Langue Français

Extrait

Gabrielle Varro
Les futurs maitres face à l'immigration. Le piège d'un « habitus
discursif »
In: Mots, septembre 1999, N°60. pp. 30-42.
Resumen
LOS FUTUROS MAESTROS « FRENTE A» LA INMIGRACION. LA TRAMPA DE UN « HABITUS DISCURSIVO » Uno de los
objetivos de los Institutos Universitarios de Formación de Maestros de preparar los jóvenes profesores a enseňar en los barrios
donde tendran que ejercer su oficio. Sin embargo, poniendo el énfasis sobre las diferencias culturales, los formadores refuerzan
el « habitus discursivo » que consiste en abordar los disfuncionamientos del sistema a traves de los orígenes de los alumnos.
Abstract
FUTURE TEACHERS «CONFRONTED WITH» IMMIGRATION. THE TRAP OF A « DISCURSIVE HABITUS » One of the
objectives of the IUFM is to prepare young teachers for the areas in which they will be working. However, by insisting on cultural
differences, the instructors reinforce the « discursive habitus » which masks the dysfunctiuns of the system through a
concentration on the students' origins.
Résumé
LES FUTURS MAITRES FACE À L'IMMIGRATION. LE PIÈGE D'UN «HABITUS DISCURSIF» L'un des objectifs des IUFM est
de préparer les jeunes enseignants aux quartiers où ils devront exercer. Cependant, en insistant sur les différences culturelles,
les formateurs renforcent l' «habitus discursif» qui se défosse des dysfonctionnements du système sur les origines des élèves.
Citer ce document / Cite this document :
Varro Gabrielle. Les futurs maitres face à l'immigration. Le piège d'un « habitus discursif ». In: Mots, septembre 1999, N°60. pp.
30-42.
doi : 10.3406/mots.1999.2162
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mots_0243-6450_1999_num_60_1_2162VARRO° Gabrielle
Les futurs maîtres face à l'immigration.
Le piège d'un « habitus discursif »
Les principes fondateurs de l'école publique française — laïcité
et égalité des chances — guident-ils toujours les enseignants et
leurs formateurs ? La question vaut d'être posée, parce que l'école
est souvent présentée comme le dernier bastion de la République1,
alors que, parallèlement, on assiste à une inflation de revendications
identitaires, individuelles ou collectives, qui mettent à mal ces
principes et, partant, tout le système français d'intégration. Système
que certains relèguent à un passé révolu2, ou qu'il s'agirait en
tout cas de sérieusement réactualiser3. De fait, ce qui change —
et qui doit changer, si on ne veut pas se couper des réalités —
est ce que l'on met derrière les mots emblématiques, liberté, égalité,
fraternité.
Pour connaître la position d'enseignants sur le terrain quant à
ces principes fondamentaux, j'ai mené une enquête en 1996, par
entretiens et observations de classes, dans une école primaire de
Paris inscrite en ZEP (zone d'éducation prioritaire). J'y ai rencontré
des enseignants « républicains », qui appliquaient, sans les énoncer,
0 Laboratoire « Printemps », CNRS (UPRESA 8085), université Versailles-Saint-
Quentin-en-Yvelines, 47 boulevard Vauban, 78047 Guyancourt Cedex.
1. «L'égalité des chances, l'obligation scolaire, la gratuité /.../ ces notions de
base, ces vertus historiques sont menacées pour la première fois depuis longtemps /
.../ Ces derniers mois, l'opinion a aussi réalisé que l'école demeurait le dernier
bastion républicain au milieu des ruines urbaines » (Philippe Boggio, « Virer Allègre...
pour sauver la réforme?», Marianne, 94, 8-14 février 1999, p. 7.
2. Alain Touraine, Pourrons-nous vivre ensemble ? Égaux et différents, Paris,
Fayard, 1997.
3. Michel Wieviorka, « À propos du modèle français d'intégration républicaine »
dans « Relations-Interethniques : complexité et ambiguïté », Migrants -Formation, 109,
juin 1997, p. 7-21.
30 Mots, 60, septembre 99, p. 30 à 42 principes républicains1. De fait, les enseignants de cette école les
avaient élaboré une posture nouvelle, combinant une « sensibilité
aux réalités personnelles et familiales (dont "culturelles") des
enfants hors de l'établissement, liée à une volonté de sauvegarder
l'égalité des chances au-dedans2». Cette attitude de «laïcité mo
derne », sans oblitérer les réalités sociales et familiales de chacun,
cantonnait néanmoins les « différences culturelles » à la sphère de
la vie privée. Une fois intégrés dans les classes normales, les élèves
anciennement étrangers non francophones se trouvaient ainsi « nor
malisés » et « naturalisés », élèves comme les autres, citoyens de
l'école. Seules surnageaient, dans l'évaluation des instituteurs,
comme facteurs de différenciation avoués, les aptitudes individuelles
des élèves. Les enseignants ont évoqué les différences culturelles
essentiellement pour rendre compte (admiratifs, d'ailleurs) du point
de départ de la scolarité des élèves, issus de l'immigration ou de
milieux modestes. Cependant, la prise en compte de ces différences
par les instituteurs n'influait guère sur leurs pratiques pédagogiques
en classe qui continuent à s'inscrire dans l'idéologie de l'école
pour tous.
Le thème de l'immigration dans la formation
des futurs maitres
Comme les attitudes des futurs enseignants dépendent en partie
de celles de leurs formateurs, j'ai examiné le livret de formation
1997-1998 de l'IUFM (Institut universitaire de formation des maitres)
de Paris. Il contient les cours et programmes proposés aux élèves
de première année qui désirent préparer les concours de professeurs
des lycées et des collèges ou de conseillers principaux d'éducation
(CPE). Afin de permettre aux étudiants de choisir leurs options,
chaque formateur présente, sur une page, les objectifs, contenus et
modalités de son cours et, éventuellement, une bibliographie.
De prime abord, en parcourant le Livret, j'avais l'impression que
prédominait une volonté de ne pas faire de distinction entre publics
1. Gabrielle Varro, « L'(in)égalité à l'école» dans Pierre Fiala (dir.), L'(in)égalité.
Variations, déplacements, substitutions (18e-20e siècles), Paris, L'Harmattan, 1998.
2. Gabrielle Varro, Marie-Christine Mazurkiewicz, « Les non-francophones, leurs
cultures et la culture scolaire » dans Jean-Louis Chiss, Daniele Boyzon-Fradet (dir.),
Enseigner le français en classes hétérogènes. École et immigration, Paris, Nathan
Pédagogies, 1997, p. 213.
31 et donc de maintenir une posture « républicaine » (égalité scolaires,
de traitement de tous les élèves). La référence à un quelconque
public particulier semblait en effet pratiquement absente, ce qui
pourrait correspondre à une telle volonté. Lorsque, ensuite, j'ai
recherché les mots de la famille étranger ou migrant dans le
volume, cette impression s'est vérifiée : à peine une demi-douzaine
d'occurrences en 420 pages. Le thème de l'immigration semble
donc peu présent dans les formations proposées. Mais, là où il
apparait, comment est-il traité ? Quelle image produit-il des publics
concernés ? Considérons les exemples suivants :
1 — Un cours intitulé Immigration et intégration scolaire évoque
les conditions des quartiers où les futurs maitres iront travailler :
«Les jeunes enseignants sont souvent nommés dans des quartiers "pop
ulaires " où la présence des enfants issus de l'immigration est plus
visible qu'ailleurs /.../ on examinera la question suivante : les différences
culturelles entre les enseignants et leurs élèves sont-elles devenues telles
que la transmission des connaissances soit remise en cause ? » (p. 413).
Dans cette description, l'enseignant responsable présente son cours
en mettant en exergue les « enfants issus de l'immigration ». Alors
que l'on pourrait croire que les différences culturelles entre ensei
gnants et élèves (énoncées comme une évidence) concernent tous
les jeunes de ces quartiers « populaires » \ la référence à des
enfants dont la présence est « plus visibl

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