Les verbes substituts lexicaux de la négation dans le théâtre classique. Le corpus racinien - article ; n°1 ; vol.143, pg 93-110
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Les verbes substituts lexicaux de la négation dans le théâtre classique. Le corpus racinien - article ; n°1 ; vol.143, pg 93-110

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Langue française - Année 2004 - Volume 143 - Numéro 1 - Pages 93-110
Françoise Berlan : Les verbes substituts lexicaux de la négation dans le théâtre classique. Le corpus racinien
Verbs of negative meaning are as commonly used in French as negative adverbs, and have always been during the different periods of this language models underlying this possibility of substitution appear more clearly using the theory of support verbs and predicative nouns (ex: manquer de courage is almost synonym of ne pas avoir de courage). These lexical resources have been extensively used in french over the XVI Ith century. This phenomenon affects mainly constrained forms of writing such as verses and in particular dramatic alexandrine. It is linked to the large number of sentences with support verbs and rests on preferences and prohibitions. We suggest that this process eventually offers an immediately available solution, because of its obvious conveniency. Although it cannot be said to have affected the linguistic system, its influence still exists nowadays.
18 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2004
Nombre de lectures 143
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Françoise Berlan
Les verbes substituts lexicaux de la négation dans le théâtre
classique. Le corpus racinien
In: Langue française. N°143, 2004. pp. 93-110.
Abstract
Françoise Berlan : Les verbes substituts lexicaux de la négation dans le théâtre classique. Le corpus racinien
Verbs of negative meaning are as commonly used in French as negative adverbs, and have always been during the different
periods of this language models underlying this possibility of substitution appear more clearly using the theory of support verbs
and predicative nouns (ex: manquer de courage is almost synonym of ne pas avoir de courage). These lexical resources have
been extensively used in french over the XVI Ith century. This phenomenon affects mainly constrained forms of writing such as
verses and in particular dramatic alexandrine. It is linked to the large number of sentences with support verbs and rests on
preferences and prohibitions. We suggest that this process eventually offers an immediately available solution, because of its
obvious conveniency. Although it cannot be said to have affected the linguistic system, its influence still exists nowadays.
Citer ce document / Cite this document :
Berlan Françoise. Les verbes substituts lexicaux de la négation dans le théâtre classique. Le corpus racinien. In: Langue
française. N°143, 2004. pp. 93-110.
doi : 10.3406/lfr.2004.6784
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lfr_0023-8368_2004_num_143_1_6784Françoise Berlan
Sens et Texte. GEHLF. Université Paris IV-Sorbonne.
Les verbes substituts lexicaux
de la négation dans le théâtre classique.
Le corpus racinien
La langue dispose d'un matériel morphologique spécifique correspondant à
l'opération logique d'inversion de la valeur de vérité, ce sont les adverbes de
négation. La notion d'expression lexicale de la négation peut être contestée du
fait de ses contours imprécis où la valeur négative est mêlée à des données
sémantiques hétérogènes liées au statut de lexemes des termes considérés. Les
verbes de sens négatif sont pourtant une ressource constante de la langue. Un
grand nombre d'entre eux sont hérités et le latin présente aussi ce phénomène de
choix, tout comme les différentes étapes du français. C'est l'existence même de
ces deux façons de nier qui rend souvent possible la double négation. Sont autor
isées alors les nuances d'ordre pragmatique plus complexes que la simple oppos
ition logique du oui au non. De ce point de vue, l'interprétation de ne pas ignorer
ne se réduit pas à la stricte synonymie avec savoir. C'est néanmoins au nom d'une
équivalence écartant cette irréductibilité de chaque ressource que l'étude sera
menée. À ce titre, ne pas avoir et manquer de, par exemple, peuvent être considérés
comme substituables. Un autre critère dont le bien-fondé peut aussi être contesté
est d'ordre extralinguistique. L'idée négative semble inhérente à certains verbes.
Manquer de, éviter, empêcher, quitter, ôter, refuser, ignorer, etc. sont perçus en
rapport avec l'inexistence, la perte, l'absence. En témoigne leur définition dans
les dictionnaires où ils sont glosés par la négation de leur antonyme, alors que
l'inverse n'est pas vrai. Voici quelques exemples tirés du Petit Robert :
Ne plus avoir un bien.
Enlever /Perdre : Faire qu'une chose ne soit plus où elle était.
Empêcher : Faire en sorte que ne se produise pas.
Défendre : Enjoindre à quelqu'un de ne pas faire quelque chose.
Ignorer : Ne pas connaître, ne pas savoir.
LANGUE FRANÇAISE 141 93 La négation en français classique
Refuser : Ne pas consentir à.
Cesser de : Ne pas continuer de.
Il y aurait certainement des contre-exemples. La technique lexicographique n'est
pas rigoureuse au point qu'on puisse en tirer des conclusions incontestables. On
ne peut écarter cependant ce critère référentiel autour non de la vérité mais de
l'existence. Les lexemes ainsi repérés sont souvent plus immédiatement disponi
bles que leur glose analytique faisant surgir les adverbes de négation. Cet
examen d'une négativité lexicale de certains verbes est ici envisagée dans le cadre
d'une théorie de la valence verbale et des constructions à supports. Les verbes
concernés incluraient le support auquel ils ajouteraient l'information négative,
soit directement, soit dans une construction factitive de type faire que ne pas. Ils
seraient sélectionnés par le substantif abstrait prédicatif, nom de qualité ou de
procès. Ces verbes associés ainsi à des noms prédicatifs subissent une désémanti-
sation plus ou moins avancée, une grammaticalisation qui les réduit presque à la
valeur négative et aux faits de contruction en rapport avec la disposition des
actants. Ainsi, dans le théâtre classique qui est notre lieu d'observation, quitter la
jalousie, par exemple, fait apparaître le même verbe que quitter ses amis, mais dans
cette deuxième occurrence, le lexeme a un sémantisme plein de verbe de mouve
ment et indique l'éloignement plutôt que la négation. En revanche, avec jalousie,
quitter signifie faire en sorte de n'avoir -plus de + N ou faire en sorte de n'être plus +
Adj. Il est quasi-synonyme de cesser d'être jaloux, mais il indique sans ambiguïté
un acte volontaire. Par rapport à avoir de la jalousie, quitter apporte ainsi deux
informations : la valeur négative et la relation d'identité entre l'agent et le siège.
Aux temps de l'inaccompli, l'expression est de plus perçue comme inchoative.
L'intervention du sémantisme des verbes peut faire apparaître des limitations
chronologiques. Si manquer de, c'est approximativement ne pas avoir, et ignorer, ne
pas savoir, perdre en revanche - ou plutôt avoir perdu — , c'est ne plus avoir, et quitter,
c'est faire que n'avoir plus. Cette simplification du sémantisme des verbes étudiés
est plus ou moins acceptable. C'est la syntaxe sous-jacente au complexe constitué
par le verbe et le nom prédicatif qui légitime ces réductions de la matière sémant
ique. Faute d'outils conceptuels suffisants, cet article se limitera à des relevés
classés et à quelques perpectives en diachronie. Il y a là cependant une voie qui
semble pouvoir être explorée dans la ligne des travaux du LADL que les histo
riens de la langue souhaiteraient mettre à profit.
C'est ici qu'interviennent les contraintes quasi-oulipiennes de l'alexandrin
classique faisant du corpus choisi, le théâtre de Racine x, un lieu privilégié
d'expérience pour les faits envisagés. Elles sont les suivantes2 :
1. Le corpus est la totalité du Théâtre de Racine à l'exclusion des Plaideurs. Nous avons consulté ce
corpus dans RACINE, Œuvres complètes, tome 1, Théâtre, Poésie, édition G. Forestier, Paris, Gall
imard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1999. Les références aux pièces sont en abrégé : Théb. : La
Thébaïde, Alex. : Alexandre le Grand, Andr. : Andromaque, Brit. : Britannicus, Baj. : Bajazet, Mithr. :
Mithridate, Iphig. : Iphigénie, Phèdre : Phèdre, Esther : Esther, Athalie : Athalie.
Sont indiqués l'acte, la scène et le numéro de vers.
2. Voir Françoise Berlan, 2000, « Voltaire remarqueur : les Commentaires sur Corneille et les cons
tructions à supports », colloque du GEHLF des 16-18 novembre 2000, ENS, Presses de l'ENS.
94 verbes substituts lexicaux de la négation dans le théâtre classique. Le corpus racinien Les
- Priorité aux noms abstraits, pour la plupart dérivés à suffixe favorisant des
rimes faciles et massant la densité sémantique en fin de vers.
- Équilibrage binaire des hémistiches, cette binarité étant le propre des construct
ions à supports (on préférera faire un récit à raconter), et favorisant le modèle du
tétramètre (deux accents par demi- vers).
- Évitement des monosyllabes graphiques avec répercussions à l'oreille. Cette
tendance concerne beaucoup de mots grammaticaux parmi lesquels les négat
ions, les prépositions, les conjonctions. Tout se passe comme si le vers idéal
reposait sur une construction transitive de préférence directe, les complétives
étant remplacées par des prédicats nominaux. Il est évident que ces tendances ne
vont pas

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