Philosophie et langage. A propos de Jean Bollack et du Centre de Recherche philologique de Lille - article ; n°129 ; vol.32, pg 64-75
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Langages - Année 1998 - Volume 32 - Numéro 129 - Pages 64-75
Classical scholarship has determined our image of classical texts that it edited and explained. What can it afford to our understanding of language? Purpose of this paper is 1) to situate philology among the sciences of language 2) to present the critical hermeneutic of Jean Bollack 3) through few examples from different authors of the Centre de recherche philologique (on Heraclitus and Hesiod above all) and 4) to sketch some problems concerning the epistemology of linguistics and the relations between philology and philosophy.
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1998
Nombre de lectures 23
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

M. Denis Thouard
Philosophie et langage. A propos de Jean Bollack et du Centre
de Recherche philologique de Lille
In: Langages, 32e année, n°129, 1998. pp. 64-75.
Abstract
Classical scholarship has determined our image of classical texts that it edited and explained. What can it afford to our
understanding of language? Purpose of this paper is 1) to situate philology among the sciences of language 2) to present the
critical hermeneutic of Jean Bollack 3) through few examples from different authors of the Centre de recherche philologique (on
Heraclitus and Hesiod above all) and 4) to sketch some problems concerning the epistemology of linguistics and the relations
between philology and philosophy.
Citer ce document / Cite this document :
Thouard Denis. Philosophie et langage. A propos de Jean Bollack et du Centre de Recherche philologique de Lille. In:
Langages, 32e année, n°129, 1998. pp. 64-75.
doi : 10.3406/lgge.1998.2145
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lgge_0458-726X_1998_num_32_129_2145Denis THOUARD
C.N.R.S. Lille
PHILOLOGIE ET LANGAGE
A propos de Jean Bollack et du Centre de Recherche philologique de Lille
S'il est question ici d'une discipline déjà ancienne, la philologie, plus volont
iers synonyme d'érudition pesante et, pour tout dire, de dépense d'efforts un
peu vaine, c'est qu'il me semble, d'abord, qu'elle a été le lieu, pendant des
siècles, au même titre que la grammaire ou la rhétorique, mais autrement, d'une
réflexion sur le langage. Celle-ci s'est attachée bien sûr à la matérialité des
textes, leur établis sèment, leur authenticité, leur histoire, mais aussi à leur
signification et à leur mode de signifier. C'est quand ce savoir séculaire, composé
d'observations et de règles disséminées dans le travail même d'édition et d'émen-
dation, s'est trouvé repris dans une réflexion unitaire, sous la forme d'une
encyclopédie de l'antiquité et d'une théorie de l'interprétation, qu'un seuil a été
franchi, et que la philologie a aspiré à se former en une science (de l'Antiquité)
ou en une méthode (de la compréhension). De différentes manières, cette rup
ture s'est opérée en Allemagne vers la fin du XVIIIe siècle, sous l'impulsion de
philologues comme Friedrich August Wolf (1759-1824), le premier à fonder un
« séminaire de philologie » à l'Université de Halle, et surtout de ses élèves.
Schleiermacher, Friedrich Schlegel ou Ast ont ainsi tenté de réfléchir systéma
tiquement l'unité d'une discipline soit autour de son objet, compris comme le
« monde antique au sens large », ainsi que le fait Ast, soit de ses procédures,
comme chez Schleiermacher. Son herméneutique présente une conception de la
signification d'une grande portée théorique, dont les indications n'ont cepen
dant pas été suivies. Ou plutôt, la grande synthèse de l' Encyclopédie et métho
dologie des sciences philologiques d'August Boeckh en reprend bien des él
éments, mais dans une perspective historicisante. Par ailleurs, la philologie tend
à se figer au cours du siècle, la critique se coupant de l'herméneutique avec
Lachmann, et l'étude des textes se concentrant de plus en plus sur les « faits » et
une « scientificité » de type positiviste, non exclusive d'évaluations, comme chez
Wilamowitz. On a affaire à la solidification d'un mode de questionnement qui
constitue, sur le plan théorique, plutôt une régression qu'un approfondisse
ment l.
XIXe 1. siècle Ce que comme ne voit étant pas « intellectuellement J. C. Milner quand contemporaine il présente la » grammaire de Schleiermacher comparée et non allemande de la science de la de fin son du
temps, Introduction à une science du langage, Paris, Seuil, 1989, p. 99. En fait, il faudrait soutenir le
contraire : cette discipline ne s'inspire que de loin en loin de la méthodologie de l'époque romantique, dont
le questionnement est aplati de manière positiviste. Elle eût gagné à le faire, évitant par là le scientisme où
elle est tombée (entre Févolutionieme de Schleicher et les Néo-grammairiens). Pour une mise en place de
cette problématique complexe, voir l'article de P. Judet de La Combe, « Philologie classique et légitimité.
Quelques questions sur un 'modèle' », in M. Espagne/M. Werner (éds.), Philologiques I, Paris, MSH,
1990, pp. 23-42.
64 L'actualité de la réflexion philologique suppose une reconsidération critique
de cette tradition. C'est l'originalité du parcours de Jean Bollack que d'avoir
revendiqué, dans un paysage universitaire français qui ne l'accueillait pas
volontiers, la philologie comme science. Deux gestes se trouvaient conjoints dans
cette entreprise : d'une part, l'aspect le plus visible, l'importation d'un modèle
« allemand » de scientificité, opposé à l'esprit des Belles Lettres présidant au
rapport à l'Antiquité en France 2 ; d'autre part, la reprise critique d'une
tradition, consistant à montrer que les principes herméneutiques dégagés par
Schleiermacher ou Boeckh n'avaient pas été appliqués et n'avaient pas pu
l'être. Il n'était que trop temps de les mettre en œuvre, agissant donc à la fois
pour la philologie et contre elle, contre ce qu'elle était devenue. Agissant pour
elle parce que contre elle.
Ainsi s'est constituée à Lille, au Centre de recherche philologique 3, une
direction de travail partagée 4 autour du noyau formé par Jean Bollack et Heinz
Wismann, avec Mayotte Bollack, Pierre Judet de La Combe, André Laks,
Philippe Rousseau et d'autres, qui peut être considérée comme formant une
position relativement cohérente à travers ses nécessaires évolutions, discussions
internes et remises en question. Celle-ci est, dans son champ, en discussion avec
d'autres approches comme l'anthropologie structurale, la théorie de Г oral
poetry, le déconstructionnisme, le style analytique anglo-saxon, etc. Mon propos
sera ici de dégager certaines incidences de portée plus générale de cette philolo
gie qui assume l'ambition d'être une herméneutique critique. Il me faut pour
cela commencer par cerner la philologie que les « sciences du langage » consi
dèrent plutôt comme une vieille aïeule inoffensive qu'un interlocuteur dont on
puisse attendre des vues rafraîchissantes.
1. Le langage pour la philologie
La philologie a affaire au langage sous la forme de textes. Elle vise à réunir les
conditions d'une juste compréhension des textes, en joignant la critique, qui les
établit, à l'herméneutique, qui en dégage la signification. Ces deux démarches
sont solidaires. Par là, elle se distingue d'emblée de la grammaire ou de la
linguistique, qui aspirent à formuler une théorie du langage en général ou de
2. Sur cette problématique, voir les volumes édités par M. Espagne et M. Werner, Philologiques I-III,
Paris, MSH, 1990-94, et P. Simon-Nahum, La cité investie. La « science du judaïsme 'français et la
République, Paris, Cerf, 1991. M. Werner expose les raisons « traditionnelles » qui ont favorisé en France
l'emprise de la linguistique générale et du structuralisme, au détriment de la prise en compte de l'indivi
dualité historique : « La grammaire générale des idéologues et la tradition rhétorique, qui eut tôt fait de lui
succéder, prônaient la recherche et la transmission de normes du discours. Orientées vers la production et
dédaignant fréquemment le sujet interprète, les études littéraires françaises n'ont cessé de mettre en
évidence les règles universelles, voire anhistoriques, de construction et de composition des œuvres »,
Philologiques I, p. 11.
3. Fondé par Jean Bollack en 1971, il a été affilié au CNRS en 1973 ; de 1986 à 1997, il a été dirigé par
Pierre Judet de La Combe et l'est maintenant par Philippe Rousseau.
4. Les travaux sont le plus souvent le fruit de séminaires communs, suivant le principe d'une discussion
élargie et d'une collaboration ; voir V Heraclite (1972), les Epicure (1971, 1975, 1976, 1979). VŒdipe-roi
(1990) et tout dernièrement VHésiode (1996). Ce cadre de discussion suppose que des débats importants sur
la méthode et les choix d'interprétation

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