Pour une grammaire du discours : l « ordre oratoire » face à la Praelectio, une occasion manquée - article ; n°1 ; vol.121, pg 11-27
18 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Pour une grammaire du discours : l'« ordre oratoire » face à la Praelectio, une occasion manquée - article ; n°1 ; vol.121, pg 11-27

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
18 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Langue française - Année 1999 - Volume 121 - Numéro 1 - Pages 11-27
Alain VIALA : For a speech grammar. The « oratory order » against the praelectio : a missed opportunity The « Français » still persists in treating the study of the language as a preliminary to the study of the texts (lot of grammar in primary school and Junior High School, lot of literature and no grammar in High School), especially by laying the emphasis on sentence's grammar. In reaction to its kicks, has appeared a text's grammar. But the language exists, in practice, as a speech, and is learned before school, and, more, the notion of « text » is problematical. The persistence of such an inadequate mechanism has historical reasons. In the middle of 18th Century, Batteux, by proposing to study the French authors aside of the Ancients, started a movement towards the « oratory order ». But the scholar institution didn't extend it, under the influence of the dominating model : the teaching of latin with a grammar of sentence — for a foreing language — and praelectio — for the literary texts. So there is an aggiornamento necessary and possible by the way of a « speech gram-
17 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1999
Nombre de lectures 34
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

A. Viala
Pour une grammaire du discours : l'« ordre oratoire » face à la
Praelectio, une occasion manquée
In: Langue française. N°121, 1999. pp. 11-27.
Abstract
Alain Viala : For a speech grammar. The « oratory order » against the praelectio : a missed opportunity
The « Français » still persists in treating the study of the language as a preliminary to the study of the texts (lot of grammar in
primary school and Junior High School, lot of literature and no grammar in High School), especially by laying the emphasis on
sentence's grammar. In reaction to its kicks, has appeared a text's grammar. But the language exists, in practice, as a speech,
and is learned before school, and, more, the notion of « text » is problematical. The persistence of such an inadequate
mechanism has historical reasons. In the middle of 18th Century, Batteux, by proposing to study the French authors aside of the
Ancients, started a movement towards the « oratory order ». But the scholar institution didn't extend it, under the influence of the
dominating model : the teaching of latin with a grammar of sentence — for a foreing language — and praelectio — for the literary
texts. So there is an aggiornamento necessary and possible by the way of a "speech grammar"
Citer ce document / Cite this document :
Viala A. Pour une grammaire du discours : l'« ordre oratoire » face à la Praelectio, une occasion manquée. In: Langue
française. N°121, 1999. pp. 11-27.
doi : 10.3406/lfr.1999.6276
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lfr_0023-8368_1999_num_121_1_6276Alain VlALA
Centre de Recherches sur l'Institution Littéraire, Paris III - Sorbonně Nouvelle /
University of Oxford
POUR UNE UNE GRAMMAIRE DU DISCOURS :
L'« ORDRE ORATOIRE » FACE À LA PRAELECTIO,
UNE OCCASION MANQUÉE
La question de l'étude de la langue dans sa relation avec l'étude des textes est
extrêmement complexe dans la tradition scolaire française. Jusqu'à une date
récente, elles étaient de fait dissociées : l'agenda hebdomadaire des classes de
français comprenait, pour les niveaux concernés, des heures de grammaire-
orthographe d'un côté et des heures de lecture et explication de textes d'un autre.
Bien sûr, il y a depuis longtemps des déclarations de principe disant qu'il faut lier
les deux. Mais dans la pratique, la séparation a subsisté et pour une large part
subsiste encore. Les programmes de collège de 1995-1998 établissent clairement que
l'étude de la langue non seulement ne doit pas être dissociée de celle des textes, mais
se fait par, pour et dans le travail sur les textes. Cette orientation était déjà sensible
dans les programmes de 1977, elle n'est donc pas tant nouvelle en soi que plus
fortement exprimée, et explicitement assumée dans ses enjeux et ses conséquences.
En dépit de cela, l'observation « de terrain » montre que nombre de profes
seurs continuent à faire des heures de grammaire d'un côté et d'autres heures pour
les travaux sur textes. Refus d'appliquer les programmes ? Non : les mêmes
observations montrent que cela se produit même chez des professeurs qui, loin de
refuser de les appliquer, les approuvent et s'efforcent de les mettre en œuvre. On
peut faire la même remarque à propos des manuels fondés sur ces nouveaux
programmes, qui continuent à proposer des de textes d'un côté et des
« livres de grammaire » de l'autre. Force de l'habitude ? Dans la mesure où on peut
voir que des professeurs qui font de nouvelles préparations de cours en fonction des
nouveaux programmes et que des auteurs qui conçoivent de nouveaux manuels
retombent dans cette séparation traditionnelle, ce n'est pas une volonté d'inertie
qui joue : c'est bien plutôt la force de Vhabitus. Puissance d'un schéma de pensée
profondément incorporé, si profondément qu'il produit des distorsions, en partie
inconscientes, jusque chez ceux qui essayent de suivre un programme qui appelle à
rompre avec cet usage...
L'hypothèse d'un effet d'habitus implique trois conséquences. La première,
qui va de soi, est qu'il faut mettre cette hypothèse à l'épreuve. La deuxième, qu'un
11 habitus ne peut se modifier que par un processus lent et long, exigeant notamment
une prise de conscience de cet habitus comme tel. La troisième, que s'il s'agit d'un
habitus, la coupure des deux pratiques n'est sans doute pas délibérée, ni chez ceux
qui la pratiquent ni chez ceux qui la prescrivaient, mais considérée comme « allant
de soi » : donc privée de fondements théoriques et didactiques. Un travail utile à
ces trois égards consiste à aller regarder comment tout cela a commencé. Ce qui
suppose que l'on regarde vers les temps où l'on a commencé d'enseigner les textes
français, au XVIIIe siècle. Les pages qui suivent voudraient contribuer à construire
cette histoire, avec les enjeux théoriques qui lui sont liés.
Leur auteur n'est pas linguiste de spécialité. Tout au plus historien de l'ense
ignement et sociologue des institutions littéraire (en même temps qu'historien de la
littérature, ce qui signifie qu'il ne dissocie pas les textes — notamment ceux dits
« littéraires » — et les usages — notamment ceux de l'enseignement et de la
langue) : ce n'est donc pas de la langue en elle-même qu'il est ici question, mais de
l'Ecole. Cet auteur est aussi mêlé à l'élaboration des programmes actuels d'ensei-
gnemen du français : ce qui est ici exposé est hé à cet engagement ; et je tiens à
l'assumer explicitement.
1. Préalables : discours plutôt que texte.
Cela étant, il convient de préciser aussi que toutes les réflexions qui suivent se
fondent sur cette donnée d'évidence première que l'acquisition de la langue se fait
à l'oral. Évidence, certes ; mais qui ne semble pas toujours prise en compte, même
et notamment à l'Ecole. Pourtant il est clair que de la langue se fait
dans des actions de parole qui exigent très tôt de l'enfant qu'il élabore des énoncés
complexes et « en situation » . Or il est courant de constater que des enfants tout à
fait aptes à recevoir et produire de tels énoncés complexes se retrouvent en difficulté
scolaire, notamment en « français ». Et, on le sait, ce qui est alors largement en
cause n'est pas le seul rapport à la langue, mais aussi le rapport à l'écrit. Et c'est ce
que l'on entend par « étude des textes ». Aussi l'investigation doit commencer par
là : l'Ecole privilégie l'écrit. La question, ici, n'est pas de savoir a priori si elle a en
cela tort ou raison ; mais de voir ce que cela implique. Dans tout ce qui concerne la
langue et les textes, il faut donc sans cesse préciser si ce dont on parle est la langue,
ou l'écrit, ou la langue « à l'écrit ». Ce qui, d'évidence encore, change sinon tout,
en tout cas beaucoup de choses.
Il y a eu, il y a, force théories du texte. Sans y revenir en détail, je me sens tenu
de souligner — ce que beaucoup de ces théories ne s'attardent guère à examiner —
que le texte est doublement artefact. Il est donc nécessaire de réinterroger ce
concept, sur frais nouveaux mais par des questions simples, et de fait, crues.
12 Qu'est-ce en effet qu'un « texte », au sens le plus plat ? Si texte implique
support écrit, le texte est donc second par rapport à l'énoncé oral. La logique
élémentaire serait que le texte constitue une transcription d'un oral. Donc le
rapport scolaire le plus logique voudrait que le texte soit d'abord mis à la disposi
tion de l'élève comme moyen de transcrire ce qui se dit. Y compris, toujours en
toute logique, quand on écrit des choses qui n'ont pas été dites d'abord ; l'épisto-
laire le montre assez : on écrit faute de pouvoir parler. Ou bien que l'oral serait
malcommode : difficile de maintenir parole et écoute pendant une durée très
longue, celle d'un livre par exemple ; de même, une parole « donnée «oralement ne
peut avoir valeur performative que pour ceux qui ont été présents à sa profération,
mais pour la stabiliser et pouvoir l'opposer à un tiers, le vecteur écrit devient
nécessaire. En résumé, je retiens comme une donnée première la nature de substi-
tutivité du texte écrit.

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents