Principes et méthodes en phonostylistique - article ; n°1 ; vol.3, pg 73-84
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Description

Langue française - Année 1969 - Volume 3 - Numéro 1 - Pages 73-84
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1969
Nombre de lectures 32
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Pierre R. Léon
Principes et méthodes en phonostylistique
In: Langue française. N°3, 1969. pp. 73-84.
Citer ce document / Cite this document :
Léon Pierre R. Principes et méthodes en phonostylistique. In: Langue française. N°3, 1969. pp. 73-84.
doi : 10.3406/lfr.1969.5436
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lfr_0023-8368_1969_num_3_1_5436P. R. Léon, Toronto.
PRINCIPES ET MÉTHODES EN PHONOSTYLISTIQUE
Double fonction du message parlé.
La langue est un système de signes conventionnels, un code, à l'aide
duquel sont transmis des messages. Ces messages peuvent avoir de mult
iples fonctions que l'on classera en deux grandes catégories. La première,
phonologique ou phonémique, la seconde, phonostylistique. La première
catégorie se réduit à la fonction représentative — selon la terminologie
de Troubetzkoy (1939) — distinctive, selon André Martinet (1960), ou
référentielle selon Roman Jakobson (1963).
Cette fonction concerne essentiellement la forme sonore, phonéma-
tique ou prosodique, envisagée comme un ensemble de relations à valeur
oppositive — pour reprendre un terme saussurien. C'est la fonction dis
tinctive qui permet de différencier saute/sol/ de sol /sol/ et il pleut /2 4 xf
de il pleut ? /2 / 4/-
La seconde catégorie, apporte une information supplémentaire. Ainsi
tout en continuant de donner une linguistique, le message
il pleut peut transmettre en même temps de la colère, de la tendresse, un
accent régional, un effet emphatique, etc. Ce second message, phonos
tylistique, est facilité par la redondance de la langue parlée. Une langue
sifflée, comme le silbo-gomero, décrit par André Class (1963), langue réduite
pratiquement à quatre phonèmes et à un découpage syllabique, ne présente
presque aucune possibilité expressive. L'observation de faits analogues a
peut-être conduit les linguistes à surestimer l'importance de la fonction
distinctive. Certains d'entre eux cependant, tel Charles Bally (1909) et
après lui Pierre Guiraud (1953)b et Georges Faure (1962), ont pu poser la
question de savoir si un message dont les éléments n'auraient qu'une fonc
tion strictement distinctive, dépourvu de toute affectivité, pouvait réell
ement exister. Il semble bien que, dans une langue employant des sons
articulés, cela soit sinon impossible du moins très rare. (On attend même
d'un ordinateur électronique qu'il ait sa propre voix. Tous ceux qui ont
entendu chanter Daisy par l'ordinateur de la Bell Telephone Company
73 n'auront-ils pas retrouvé cette voix avec attendrissement dans le film de
Stanley Kubrick, Odyssée 2001!)
Certains messages n'existent même que sur le plan phonostylistique.
Il en est ainsi très souvent avec la fonction phatique, définie par Jakobson
(1963) comme destinée à maintenir le contact entre deux interlocuteurs.
Ce sera, par exemple, cette jeune et jolie femme dont parle Sacha Guitry,
dans L'Amour et les femmes, et qui fait semblant de tout comprendre —
même la politique étrangère. Pendant que parlent les hommes, elle fait
toujours : « Hm / hm \ hm / hm \ hm / hm 4. » Elle pense en
réalité qu'elle aurait mieux fait de mettre son petit chapeau rose plutôt
que celui qu'elle a sur la tête. Néanmoins, grâce à ce « hm-hm », cons
titué d'unités phonématiques hors-inventaire, elle signale sa présence.
Si elle peut ainsi le faire sans employer le code phonologique « nor
mal », c'est qu'il existe un second code phonostylistique, reconnu et admis
par les sujets parlants.
DÉFINITIONS DU CHAMP D'ÉTUDES PHONOSTYLISTIQUES.
La tentative la plus importante pour définir le champ de la phonos
tylistique semble être celle de Troubetzkoy (1939). Suivant une voie tra
cée par Charles Bally (1902) et surtout Karl Biihler (1934), l'auteur des
Principes de phonologie proposait de distinguer ici deux domaines : une
stylistique phonologique et une stylistique phonétique. La première
comprendrait l'étude des signes conventionnels, codés dans la langue,
tels que l'accent d'insistance en français; la seconde celle des signes non-
codés, tels que la toux, le bégaiement, etc. On voit reparaître ici la dis
tinction saussurienne entre signes arbitraires, proprement linguistiques,
et signes motivés pour lesquels signifié et signifiant sont inséparables.
Cette division semble justifiée en phonostylistique tant que l'on envisage
la nature des signes employés. Elle ne tient plus lorsqu'on envisage ces
mêmes signes sous l'angle de leur fonction dans le cadre général d'une
sémiotique vocale. Que le bégaiement, la toux, le rire ou le zézaiement
soient, à des degrés divers, des « symptômes » — selon Troubetzkoy —
plus ou moins pathologiques, des signes individuels, appartenant à tous
les êtres humains et non à une communauté linguistique particulière, il
n'en reste pas moins vrai qu'ils peuvent également fonctionner comme
indices phonostylistiques codés, dans un système extra-linguistique,
reconnu par un même groupe de sujets parlants. Ainsi la toux peut être
employée au théâtre comme signal d'appel; la nasalité, défaut physio
logique, peut devenir indice de l'émotion, de la personnalité ou même du
groupe linguistique — comme pour le nasal twang du Middle-West améri
cain. Le codage et le décodage sont ici bien différents de ceux du langage
articulé mais d'un côté comme de l'autre il s'agit de systèmes, parce que
l'expression, directe ou non, est transférée à une représentation symbo-
74 lique. Nous dirons alors qu'en phonostylistique, comme en phonétique,
c'est le critère de fonction qui permettra seul d'attribuer au signe vocal
son appartenance à un système donné.
Troubetzkoy envisageait les fonctions phonostylistiques sous un angle
psychologique; d'une part, une fonction « expressive » caractérisant le
sujet parlant — comme le timbre de sa voix — et d'autre part, une fonc
tion « appellative » destinée à provoquer une impression particulière sur
l'auditeur — comme l'accent d'insistance, par exemple.
La terminologie de Troubetzkoy — en fait la traduction de Canti-
neau (1949) — a été modifiée plusieurs fois. Elle présente en effet une pre
mière ambiguïté avec l'emploi très particulier de fonction expressive. Il
vaudrait sans doute mieux conserver à ce dernier terme son acception
courante généralement admise en stylistique et utilisée par André Mart
inet (1960) pour désigner l'ensemble des fonctions de caractère affectif
ou esthétique. Ce que Troubetzkoy qualifie de fonction expressive devient
fonction émotive pour Roman Jakobson (1960), évocatrice pour Georges
Faure (1962), et plan présentatif, pour André Rigault (1964). « Émotive »,
paraît trop restreint, « évocatrice » un peu trop large et « présentatif »
risque de laisser croire à un effort conscient du locuteur. Au risque de
compliquer les choses, je proposerais le terme de fonction identificatrice,
qui indiquerait peut-être mieux les limites d'une où le message
phonostylistique identifie le sujet parlant — généralement à son insu.
Quant à la fonction appellative, selon Troubetzkoy, elle devient
conative, pour Jakobson, expressive pour Rigault et impressive pour Pierre
Guiraud (1953)b. Étant donné la difficulté qu'il y a — et cela gêne bien
Troubetzkoy — à distinguer entre l'expressivité indépendante du sujet
parlant et l'expressivité volontaire, proprement stylistique dans ses
intentions, on serait tenté d'adopter la terminologie de Rigault. Mais si
l'on accepte, avec Jakobson, l'idée d'un choix volontaire, conscient ou
non, pour définir un style, comme par exemple le ton oratoire, il apparaît
que le terme de fonction impressive — destinée à produire un effet, une
impression sur l'auditeur — est peut-être plus justifiée ici. Dès que l'on
envisage le message lui-même, le terme général ď expressivité reprend év
idemment sa valeur objective. En résumé, nous garderons le terme de
fonctions expressives pour désigner l'ensemble des fonctions phonostylist
iques, que nous diviserons en fonctions identificatrices et impressives.
Recherches en phonostylistique.
Les recherches en phonostylistique ont été assez nombreu

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