Quirinus et le droit  - article ; n°1 ; vol.96, pg 195-237
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Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité - Année 1984 - Volume 96 - Numéro 1 - Pages 195-237
André Magdelain, ~~Quirinus et le droit~~ (spolia opima, ius fetiale, ius Quiritium), p. 195-237. Chaque fois que Quirinus apporte sa protection aux grains, les textes mentionnent une intervention simultanée de Mars. Ces deux dieux de la guerre, sans être agraires, protègent l'agriculture contre les influences néfastes du dehors. La vocation guerrière de Quirinus se manifeste clairement dans les ~~spolia opima~~ et l~~'indictio belli~~, qu'il patronne. Dans le ~~ius Quiritium~~ il apparaît comme dieu du corps civique qui exerce sa tutelle sur les droits absolus, garantis par le témoignage de l'ensemble des citoyens. La ~~festuca~~ des plaideurs, qui est loco hastae, marque comme dans le ~~ius fetiale~~ l'ouverture des hostilités. Quirinus exerce la fonction guerrière en période de non-belligérance et c'est lui qui fait éclater la guerre.
43 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1984
Nombre de lectures 28
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

André Magdelain
Quirinus et le droit
In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité T. 96, N°1. 1984. pp. 195-237.
Résumé
André Magdelain, Quirinus et le droit (spolia opima, ius fetiale, ius Quiritium), p. 195-237.
Chaque fois que Quirinus apporte sa protection aux grains, les textes mentionnent une intervention simultanée de Mars. Ces
deux dieux de la guerre, sans être agraires, protègent l'agriculture contre les influences néfastes du dehors. La vocation
guerrière de Quirinus se manifeste clairement dans les spolia opima et l'indictio belli, qu'il patronne. Dans le ius Quiritium il
apparaît comme dieu du corps civique qui exerce sa tutelle sur les droits absolus, garantis par le témoignage de l'ensemble des
citoyens. La festuca des plaideurs, qui est loco hastae, marque comme dans le ius fetiale l'ouverture des hostilités. Quirinus
exerce la fonction guerrière en période de non-belligérance et c'est lui qui fait éclater la guerre.
Citer ce document / Cite this document :
Magdelain André. Quirinus et le droit . In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité T. 96, N°1. 1984. pp. 195-237.
doi : 10.3406/mefr.1984.1407
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mefr_0223-5102_1984_num_96_1_1407MAGDELAIN ANDRE
QUIRINUS ET LE DROIT
(SPOLIA OPIMA, WS FETIALE, WS QUIRITIUM)
Quirinus1 est devenu facilement l'enjeu des querelles qui divisent les
historiens sur les origines de Rome. Sa personnalité, comme sa fête [Qui-
rinalia), est mal connue, mais il fait partie de la triade précapitoline. Il
n'y a pas à revenir sur la démonstration de Wissova2 qui au début de ce
siècle avait reconnu dans la série Jupiter, Mars Quirinus, non une associa
tion occasionnelle, mais un groupement organique qui se reflète dans
celui des trois f lamines majeurs, dialis, martialis, quirinalis, au sommet
de la hiérarchie sarcerdotale (Fest. ν. ordo sacerdotum 198 L). Peu import
e que cette triade n'ait pas un temple qui lui soit propre comme la triade
capitoline. Elle reste actuelle sous la République de bien des manières et
principalement dans le texte de documents officiels, comme la formule
de la devotio du général en chef qui par sa mort sauve l'armée en péril
(Liv. 8, 9, 6) ou le serment prononcé par le fétial à l'occasion d'un foedus
(Pol. 3, 25, 6). Si les deux premiers dieux de cette triade, Jupiter et Mars,
sont relativement transparents, Quirinus, le troisième, l'est beaucoup
moins et son identification avec Romulus3, difficile à dater, n'a rien simp
lifié.
Dans cette association, chaque dieu a son rôle. Jupiter est souverain
et confère au roi puis, sous la République, au magistrat supérieur la sou
veraineté, civile ou militaire, par le jeu des auspices d'investiture pour la
première, et de départ pour la seconde4. Mars étend sa compétence sur la
guerre. Sur Quirinus on discute. Ce n'est pas sans hardiesse qu'une figure
1 Dernièrement sur ce dieu: G. Radke, ANRW, II, 17, 1, 1981, p. 276-299;
Porte, ibid., p. 300-342.
2 G. Wissova, Religion und Kultus der Römer, Munich, 1912, p. 23.
3 W. Burkert, Hist., 1962, p. 356-376.
4 Voir mes Recherches sur l'imperium, Paris, 1968, chap. IL
MEFRA - 96 - 1984 - 1, p. 195-237 196 ANDRÉ MAGDELAIN
divine mal dessinée est mise au service de schémas qui tendent à rendre
compte de la naissance d'une ville. La science des origines est toujours
suspecte, ici elle exploite à des fins opposées des fragments apparemment
conflictuels de la personnalité d'un dieu. Ses aspects guerriers, qui ne
sont pas douteux, ses armes par exemple, ont contribué à faire dès l'anti
quité de Quirinus un dieu de la guerre à la manière de Mars. D'après Var-
ron (5, 74) 5, il fut introduit à Rome par Titus Tatius. Aussi, comme il a
pour siège cultuel le Quirinal, auquel le rattache l'histoire des mots, on le
tient aujourd'hui pour un Mars sabin, à l'image du peuplement de sa col
line. Une thèse, devenue canonique, n'a aucune peine après un tel départ
à expliquer la genèse de la triade archaïque. À la suite, de la fusion des
Romains et des Sabins au sein de la cité, Jupiter s'est associé dans une
même trinité les deux dieux de la guerre des uns et des autres, Mars et
Quirinus6. G. Dumézil s'est élevé avec énergie et un immense talent contre
ces hypothèses, dans l'œuvre de toute une vie7. Il a neutralisé à sa manièr
e ce que d'autres ont appelé «la légende sabine»8. Mais là n'est pas le
plus important. Pour l'éminent comparatiste, les Romains ont conservé
de leur préhistoire une structure idéologique qu'il retrouve chez d'autres
peuples indo-européens. Leur théologie se répartit, à ses yeux, en trois
fonctions qui fournissent une explication simple de la vieille triade. Jupi
ter souverain est «l'expression maximale du sacré», Mars gère la guerre,
Quirinus la paix, la prospérité, l'abondance9. Et il est rejoint dans cette
«troisième fonction» par d'autres divinités, comme Ops. Le principal
argument pour interpréter Quirinus de la sorte est sa relation avec les
grains, tout au long de leur carrière, d'abord sur tige, puis mis en réserve,
enfin torréfiés.
On le voit, Quirinus est le support fragile de vastes théories. Elles ne
parviennent pas à concilier tous les traits de sa personne, guerriers ou
agraires; de l'une à l'autre, il est dieu de la guerre ou de la paix; mais, si
ces hypothèses laissent dans l'ombre une part de ce qu'il est, elles veulent
enfermer Rome tout entière dans un système soit ethnique (l'union latino-
5 G. Wissova, article Quirinus dans Lexicon de W. H. Roscher, c. 15; C. Koch,
Religio, Nuremberg, 1960, p. 23.
6 En dernier lieu, Rosivach, Lat., 1983, p. 509-521.
7 Voir surtout : La religion romaine archaïque, 2e éd., Paris, 1974, (cité RRA).
8J. Poucet, Recherches sur la légende sabine des origines de Rome, Louvain,
1967.
9 Le thème de la paix augustéenne n'apporte rien au Quirinus archaïque. Dans
un autre sens, G. Dumézil, RRA, p. 268. ET LE DROIT 197 QUIRINUS
sabine), soit théologique (les trois fonctions). Il faut se méfier des doctri
nes qui expliquent tout, c'est une leçon de la philosophie contemporaine.
Mais ce n'est même pas le cas : les théoriciens du Mars sabin ne savent
que faire de son penchant pour les grains, alors que dans « l'idéologie tr
ipartite des indo-européens » les dieux de la troisième fonction ont à Rome
un chef de file qui a une vocation guerrière. Suffit-il de dire que, s'il a des
attributs guerriers, Quirinus, interprété comme dieu de la paix, les doit à
sa «vigilance»? Il est plus facile d'admettre que comme dieu de la guerre
il protège les produits de la terre, comme c'est aussi le rôle de Mars.
Cependant, il faut sortir du dilemne guerre-paix. Il n'épuise qu'en
apparence le problème. Quirinus avec sa panoplie et ses saliens est aussi
peu un dieu de la paix qu'il est un dieu de la guerre de plein exercice, il
est absent des batailles. Il y a une autre solution. À Rome, quand les
armes sont au repos, la guerre est latente. Servius à basse époque offre
l'issue, il répartit la fonction guerrière entre Mars et Quirinus selon l'a
lternance des combats et des armistices. À Quirinus revient le patronage
de la paix armée 10, autrement dit de la guerre quand elle sommeille :
Serv. Aen. 1, 292 Mars enim cum saevit Gradivus dicitur, cum tranquillus
est Quirinus; 6, 859 Quirinus autem est Mars, qui praeest paci. Ces formul
es ont attiré soit le scepticisme soit l'incompréhension. Il n'y a pas à en
tirer avec G. Dumézil11 la définition d'un Quirinus pacifique. Servius par
tage entre deux dieux le ministère de la guerre, selon qu'elle se déchaîne
ou est apaisée. C'est comme dieu de la guerre que Quirinus en temps ca
lme est vigilant, custos (Serv. Aen. 1, 292). Pour rendre à ces textes leur
crédibilité il aurait fallu que le bilan de Quirinus fût complet, il lui man
que ses pièces juridiques. Entre autres choses, elles enseignent que c'est
ce gardien en armes de la « tranquillité » publique, et non Mars, qui pr.ési-
de à côté de Jupiter à la procédure d'ouverture des hostilités aussi bien
dans les termes du ius fetiale entre peuples que du ius Quiritium entre
plaideurs, avec le même symbole, la lance ou la festuca qui en tient lieu.
C'est ens

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