L affaire Ringeisen devant la Cour européenne des Droits de l Homme - article ; n°1 ; vol.20, pg 334-353
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Description

Annuaire français de droit international - Année 1974 - Volume 20 - Numéro 1 - Pages 334-353
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 1974
Nombre de lectures 18
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur Robert Pelloux
L'affaire Ringeisen devant la Cour européenne des Droits de
l'Homme
In: Annuaire français de droit international, volume 20, 1974. pp. 334-353.
Citer ce document / Cite this document :
Pelloux Robert. L'affaire Ringeisen devant la Cour européenne des Droits de l'Homme. In: Annuaire français de droit
international, volume 20, 1974. pp. 334-353.
doi : 10.3406/afdi.1974.2275
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/afdi_0066-3085_1974_num_20_1_2275L'AFFAIRE RINGEISEN DEVANT LA COUR EUROPEENNE
DES DROITS DE L'HOMME
(arrêts du 16 juillet 1971, 22 juin 1972 et 23 juin 1973)
Robert PELLOUX
Bien que dépourvue de tout caractère politique, l'affaire Ringeisen est
une des plus importantes parmi celles qu'a tranchées jusqu'ici la Cour
européenne des droits de l'homme. Elle a donné lieu à trois arrêts. Ces arrêts
interprètent de nombreuses dispositions de la Convention. Sur divers points
ils confirment et précisent la jurisprudence antérieure. Sur d'autres, ils se
prononcent pour la première fois, notamment sur l'octroi et le calcul d'une
indemnité, ainsi que sur les modalités d'exécution de ces dispositions
pécuniaires.
Pour s'orienter dans le dédale de l'affaire, le juriste devrait être doublé
d'un historien ou d'un romancier : la complexité des situations et des
péripéties évoque à la fois Balzac et Kafka. Nous nous bornerons à un
exposé sommaire des faits.
Le Sieur Ringeisen, agent d'assurances à Linz, s'était peu à peu orienté
vers la négociation de prêts et d'affaires immobilières. Il avait notamment
acquis des terrains situés à Alkoven (Haute-Autriche) en vue de les lotir
et de les vendre par parcelles. Le contrat était soumis à l'approbation de
la Commission des transactions immobilières, qui doit s'opposer aux opéra
tions spéculatives ayant pour objet de soustraire des terres à l'agriculture.
Or l'approbation avait été refusée d'abord par la Commission de district,
puis par la Commission régionale. Dans sa décision rendue le 3 février 1965,
cette dernière constate que Ringeisen n'avait pas hésité à poursuivre ses
opérations en dépit du refus d'approbation, qu'il avait déjà délimité plus
de deux cents lots à bâtir sur le terrain litigieux, que soixante- dix-huit
(♦) Robert Pelloux, Professeur à la Faculté de droit de l'Université Jean Moulin
(Lyon III). Commentaire de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de
l'homme à YAF.D.I. depuis 1961; collaboration à la Revue des droits de l'homme —
Human Rights Journal. RINGEISEN 335 AFFAIRE
parcelles avaient fait l'objet de contrats de vente et que l'approbation avait
été définitivement refusée pour trente-trois d'entre elles ; que dans diverses
demandes d'approbation il avait produit des allégations contradictoires. Par
arrêt du 27 septembre 1965 la Cour constitutionnelle avait rejeté le recours
de Ringeisen tant en ce qui concerne le grief de partialité dirigée contre
certains membres de la Commission régionale que les autres griefs articulés
par lui.
Dans l'intervalle de nombreuses plaintes avaient été déposées de la
part notamment de certains des acquéreurs des lots. Le juge d'instruction
l'a alors inculpé d'escroquerie, a décerné contre lui un mandat d'arrêt puis
l'a placé en détention provisoire à partir du 5 août 1963. Il fut remis en
liberté le 23 décembre 1963. Après d'innombrables incidents de procédure
et d'innombrables recours de l'inculpé tendant notamment à récuser les
magistrats chargés de le juger, et à obtenir le renvoi de l'affaire, Ringeisen
devait être finalement condamné pour escroquerie en première instance
le 14 janvier 1966 à trois ans d'emprisonnement rigoureux, peine qui devait
être ramenée à deux ans et neuf mois à la suite de diverses voies de
recours.
Mais entre temps, et avant cette décision définitive, de nouvelles plaintes
avaient été déposées pour banqueroute frauduleuse. On l'accusait notamment
d'avoir conclu un emprunt fictif de 200 000 schillings auprès de la Compagnie
d'assurances dont il avait été l'agent, de manière à faire échapper une partie
de ses biens à ses créanciers.
On lui reprochait également de ne pas avoir renouvelé en temps utile
certaines garanties hypothécaires au profit de ses créanciers. L'instruction
devait se poursuivre avec une sage lenteur, l'intéressé fut de nouveau
arrêté le 15 mars 1965 et placé en détention préventive sous l'inculpation
à la fois d'escroquerie et de banqueroute frauduleuse. Finalement les pour
suites pour banqueroute frauduleuse devaient être abandonnées, et Ringeisen
devait être définitivement élargi le 20 mars 1967.
Entre temps, cet infatigable procédurier avait saisi la Commission
européenne des droits de l'homme par requête du 3 juillet 1965. Après
avoir écarté plusieurs des nombreux griefs allégués par lui, la
a déclaré recevables ceux qui portaient sur l'art. 5 § 3 (durée de la détention
préventive) et sur l'art. 6 § 1 (longueur des procédures pénales, refus de
la Cour constitutionnelle d'examiner les allégations relatives à la partialité
des membres de la Commission régionale). Après échec de la tentative
de règlement amiable, la a rédigé son rapport et formulé l'avis
suivant : par onze voix contre une, que la longueur de la détention provi
soire a excédé le délai raisonnable prévu à l'art. 5 § 3 ; à l'unanimité, que
la longueur des procédures dans l'affaire d'escroquerie n'a pas excédé le
délai raisonnable prévu à l'art. 6 § 1 et, par onze voix contre une, qu'il
en a été de même dans l'affaire de banqueroute frauduleuse ; par sept voix COUR EUROPÉENNE DES DROITS DE i/hOMME 336
contre cinq que l'art. 6 § 1 n'a pas été davantage violé dans la procédure
d'approbation des contrats de vente, car il ne s'agissait pas de trancher une
contestation portant sur des « droits et obligations de caractère civil ».
C'est la Commission qui a déféré l'affaire à la Cour.
Devant la Cour l'affaire a connu deux phases, que nous étudierons
successivement. La première phase a abouti à l'arrêt du 16 juillet 1971 qui,
après s'être prononcé sur de délicates questions de compétence et de rece
vabilité, écarte la violation de l'art. 6 § 1, reconnaît la violation de l'art. 5 § 3
et réserve le droit éventuel pour le requérant de réclamer une satisfaction
équitable. La seconde phase a abouti à l'arrêt du 22 juin 1972 qui accorde
une indemnité, et à l'arrêt du 23 juin 1973 qui interprète le précédent quant
aux conditions de paiement et au caractère insaisissable de l'indemnité.
I. — LA PREMIERE PHASE
A) Les problèmes de compétence et de recevabilité
1) Compétence de la Cour sur l'exception de non-épuisement des voies de
recours internes.
Le Gouvernement autrichien a soulevé une exception d'irrecevabilité
(ou fin de non-recevoir, mais la terminologie paraît hésitante en la matière...)
tirée du non-épuisement des voies de recours internes. Cette exception
concernait uniquement d'ailleurs le grief de violation de l'art. 6 § 1 (exigence
d'un procès équitable ou fair trial) au cours des procédures poursuivies
pour obtenir l'approbation d'une mutation de propriété de terrains agricoles.
Mais alors la question se posait de savoir si la Cour est compétente
pour apprécier la recevabilité des requêtes sur laquelle s'est déjà prononcée
la Commission. Bien entendu, le Gouvernement autrichien soutenait l'affi
rmative, et la Commission la négative. La Cour tranche très brièvement :
«Par les motifs indiqués aux paragraphes 47 à 51 de l'arrêt que la Cour
plénière a rendu le 18 juin 1971 dans les affaires De Wilde, Ooms et Versyp, la
Cour ne peut accueillir la conclusion principale de la Commission : elle se déclare
donc compétente.» (n° 84).
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