La jurisprudence française actuelle et le contrôle de la conformité des lois aux traités - article ; n°1 ; vol.21, pg 859-887
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Description

Annuaire français de droit international - Année 1975 - Volume 21 - Numéro 1 - Pages 859-887
29 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1975
Nombre de lectures 21
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

M. le Professeur Dinh Nguyen
Quoc
La jurisprudence française actuelle et le contrôle de la
conformité des lois aux traités
In: Annuaire français de droit international, volume 21, 1975. pp. 859-887.
Citer ce document / Cite this document :
Nguyen Quoc Dinh. La jurisprudence française actuelle et le contrôle de la conformité des lois aux traités. In: Annuaire français
de droit international, volume 21, 1975. pp. 859-887.
doi : 10.3406/afdi.1975.2362
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/afdi_0066-3085_1975_num_21_1_2362LA JURISPRUDENCE FRANÇAISE ACTUELLE
ET LE CONTROLE
DE LA CONFORMITÉ DES LOIS AUX TRAITÉS
Nguyen QUOC DINH
SOMMAIRE
Introduction : La primauté des traités sur les lois selon les articles 26 et 28 de la Consti
tution de 1946, et 55 de la Constitution de 1958; le problème de leur sanction juri
dictionnelle; Décision du Conseil Constitutionnel du 15 janvier 1975 et Arrêt de la
Cour de Cassation du 24 mai 1975.
I. Nature du contrôle : sa différence avec le contrôle de la constitutionnalité des lois.
A. — Différence d'effet;
B. — de norme de référence.
II. Exercice du contrôle : la compétence des juridictions non constitutionnelles.
A. — La reconnaissance implicite de cette compétence par le Conseil constitutionnel;
B. — L'arrêt du 24 mai 1975 de la Cour de Cassation (avec quelques-unes de ses
incidences sur le droit communautaire);
C. — La vérification des conditions d'une primauté effective du traité da réciprocité).
Annexe : Décision du Conseil Constitutionnel du 15 janvier 1975.
En France, le principe de la primauté des traités sur les lois a fait
l'objet d'une reconnaissance sans équivoque par la Constitution depuis 1946.
Et pourtant, jusqu'en 1975 encore, à part quelques rares exceptions, les
juges ont refusé de lui donner son plein effet. Une discordance aussi
prolongée entre un droit écrit progressiste et une jurisprudence conservatrice
dans un domaine où, tout à la fois, le rayonnement international de' l'Etat
et la protection juridictionnelle de l'individu sont en cause, était extrêmement
regrettable. Fort heureusement, elle est en train de disparaître. Tout indique
que les prescriptions constitutionnelles vont désormais l'emporter sur une
résistance qui, il est vrai, était fondée sur de solides raisons.
(*) Nguyen Quoc Dinh, Professeur à l'Université de Droit, d'Economie et de Sciences
sociales de Paris. CONTRÔLE DE LA CONFORMITÉ DES LOIS AUX TRAITÉS 860
1. Rappelons que les articles 26 et 28 de la Constitution de 1946 étaient
rédigés comme suit :
«Les traités diplomatiques régulièrement ratifiés et publiés ont force de loi
dans le cas même où ils seraient contraires à des lois françaises, sans qu'il soit
besoin pour en assurer l'application d'autres dispositions législatives que celles
qui auraient été nécessaires pour assurer leur ratification.» (art. 26).
« Les traités diplomatiques régulièrement ratifiés et publiés ayant une autorité
supérieure à celle des lois internes, leurs dispositions ne peuvent être abrogées,
modifiées ou suspendues qu'à la suite d'une dénonciation régulière, notifiée par
voie diplomatique. Lorsqu'il s'agit d'un des traités visés à l'article 27, la dénonciat
ion doit être autorisée par l'Assemblée Nationale, exception faite pour les traités
de commerce.» (art. 28).
La Constitution de 1958 a confirmé cette supériorité en des termes concis,
mais irréfutables, bien qu'elle ait ajouté aux conditions de son application
déjà prévues en 1946 la réserve de réciprocité qui a suscité de nombreux
commentaires. Son article 55, actuellement en vigueur, renferme à cet égard
tout un système :
«Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur
publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque
accord ou traité, de son application par l'autre partie.»
2. En quelques mots, évoquons également l'accueil enthousiaste réservé
dans le pays, et hors de ses frontières, à l'attitude de ses Constituants.
Avant 1946, aucune Constitution française pas plus qu'aucune Constitution
étrangère n'avaient inclus le principe de cette primauté dans leur dispositif
même. Une prise de position expresse et vigoureuse, une rupture d'un
silence traditionnel s'ajoutant à une promesse solennelle déjà faite dans
le Préambule, que la République se conformerait « aux règles du droit
public international », tout cela dépassait largement le geste symbolique,
le simple acte de foi. Indiscutablement, l'intention véritable était d'affirmer
avec éclat un principe en lui conférant la valeur d'une norme imperative
de droit positif. Aussi a-t-on déclaré sans ambages que la France pouvait
vraiment en être fière.
Ce cri admiratif se comprenait d'autant mieux que cette solution d'avant-
garde, bientôt suivie par d'autres Etats européens, tout en répondant aux
aspirations du monde solidaire nouvellement issu de la victoire commune,
apportait une garantie suprême et inédite au droit conventionnel en prodi
gieuse expansion. Déjà, avant la fondation de la IV* République, les accords
conclus n'augmentaient pas uniquement en quantité. Leur domaine matériel
s'élargissait encore de manière constante. Depuis, pour développer leur
coopération, les Etats ont consenti à internationaliser de si larges portions
du secteur économique et social laissé auparavant à leur compétence
exclusive que, de nos jours, de nombreux traités réglementent directement
la situation des individus. En outre, cette solution a certainement aidé à la CONTRÔLE DE LA CONFORMITÉ DES LOIS AUX TRAITÉS 861
ratification des traités sur les Communautés européennes qui, suivant le
même élan de solidarité, ont institué un ordre juridique supérieur à ceux
des Etats membres et bénéficiant d'une validité immédiate sur leurs terri
toires respectifs. En 1958, les fondateurs de la Ve République ne pouvaient
que maintenir la reconnaissance formelle d'une primauté dont la nécessité
et l'utilité se renforçaient encore par la pénétration incessante des éléments
variés et multiples du droit communautaire dans l'ordre interne de ces
mêmes Etats.
3. La doctrine moniste, qui n'a ni ménagé les éloges, ni dissimulé sa
satisfaction, s'est empressée de tirer aussitôt les conséquences de la promotion
de ce principe à la positivité interne. Pour elle, il est parfaitement clair
que les dispositions constitutionnelles impliquent l'obligation pour les
juges français d'assurer eux-mêmes le contrôle du respect de la hiérarchie
des normes qu'elles instaurent et de sanctionner de manière appropriée
toutes les lois contraires aux traités, même celles qui leur sont postérieures.
Malheureusement, le passage de la règle à sa sanction juridictionnelle
soulève dans ce cas un problème particulièrement ardu. On a opposé à son
automatisme le statut des juges non constitutionnels qui ne leur reconnaît
pas le pouvoir d'exercer un quelconque contrôle de conformité sur une
loi votée par le Parlement souverain. Et d'ajouter qu'à cet égard, aucune
modification n'est apportée par les textes constitutionnels susvisés. Cette
thèse négative est partagée, cette fois-ci, par les dualistes ainsi que par tous
ceux qui redoutent le glissement d'un tel contrôle vers le « gouvernement
des juges » ou qui, bien que sensibles aux seules réalités, n'en estiment
pas moins que le fait étatique toujours actuel et en expansion dans le
monde est tout aussi important que le phénomène de la solidarité inter
nationale.
La Constitution aurait pu mettre tout le monde d'accord en donnant un
ordre précis et exprès aux juridictions. Dans son silence, il ne reste plus
à celles-ci, quand elles sont saisies par les justiciables, qu'à interpréter la
volonté de ses auteurs à travers les dispositions qui les expriment. Or,
pendant trente ans, entre les contradictions doctrinales et sous le poids
des traditions, elles ont hésit&

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