Le mariage coutumier en droit sénégalais - article ; n°3 ; vol.30, pg 811-832
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Description

Revue internationale de droit comparé - Année 1978 - Volume 30 - Numéro 3 - Pages 811-832
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1978
Nombre de lectures 463
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Serge Guinchard
Le mariage coutumier en droit sénégalais
In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 30 N°3, Juillet-septembre 1978. pp. 811-832.
Citer ce document / Cite this document :
Guinchard Serge. Le mariage coutumier en droit sénégalais. In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 30 N°3, Juillet-
septembre 1978. pp. 811-832.
doi : 10.3406/ridc.1978.18682
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_1978_num_30_3_18682LE MARIAGE COUTUMIER EN DROIT
SÉNÉGALAIS
par
Serge GUINCHARD
Professeur aux Facultés de droit de Lyon et de Dakar
1. Carrefour de civilisation, mosaïque de coutumes (un arrêté du
28 février 1961 en reconnaissait soixante-huit applicables au Sénégal),
foyer religieux où domine l'Islam mais où l'on rencontre des traditions
animistes et chrétiennes, le Sénégal s'est donné en 1972 un Code de
la famille qui essaie courageusement de réaliser une synthèse entre la
tradition et le modernisme (1) entre toutes les composantes de la société
sénégalaise. Entré en vigueur le 1 "janvier 1973, il est encore trop tôt
pour juger de son impact réel dans le pays. Les premières oppositions
de certains milieux religieux ont été vite surmontées (2) et si certains
ont pu parler de Code de la femme au lieu de Code de la famille, il est
juste de dire que ce Code constitue une étape importante dans l'élabo
ration d'une société sénégalaise moderne qui ne renie pas ses origines ;
le Code en effet est, dans son ensemble, une œuvre de compromis,
parce que le législateur a voulu laisser à chacun le libre choix de sa
conduite en harmonie avec les prescriptions de sa religion (3). Toute
remise en cause étant jugée prématurée (4) il semble que l'on s'achemine
vers une sorte de régime de croisière du Code, les innovations ne pou
vant être apportées que par la jurisprudence.
2. C'est en matière de conclusion du mariage que la tradition a le
mieux résisté aux assauts du modernisme non seulement en fait, dans
la pratique quotidienne, mais aussi en droit, dans le Code ; en effet,
l'article 830 qui abroge les coutumes générales et locales, fait exception
pour « celles relatives aux formalités consacrant traditionnellement le
(1) V. notre article « Les grandes orientations du Code sénégalais de la
famille », Venant 1978, p. 224 et s.
(2) V. sur ce point T Congrès de l'IDEF, discussions sur le rapport de
M. Aboulaye Diop, Revue juridique et politique 1972, spec. p. 808.
(3) En ce sens Kéba Mbaye, Discours prononcé à la rentrée solennelle des
Cours et Tribunaux, 3 nov. 1977.
(4) Selon l'expression même de M. le Président de la République, Leopold
Ségar Senghor, Discours prononcé à la rentrée solennelle des Cours et Tribunaux,
3 nov. 1977. 812 LE MARIAGE COUTUMIER EN DROIT SÉNÉGALAIS
mariage » ; cette exception était nécessaire parce que les articles 114
et 125 permettent aux futurs époux « de s'unir selon les formalités
consacrant traditionnellement le mariage ». Le législateur sénégalais
n'a pas voulu imposer en ce domaine une seule forme de mariage,
de type moderne c'est-à-dire célébré par l'officier de l'état civil ; tout
en éprouvant la nécessité d'organiser un service d'état civil et tout en
posant le principe que l'état des personnes ne peut se prouver que par
les actes de l'état civil (article 29), les rédacteurs du Code de la famille
ont ressenti le besoin de laisser subsister les formes traditionnelles de
conclusion du mariage ; mais il ne fallait pas non plus réduire à néant
le système de la preuve de l'état des personnes par les actes de l'état
civil et que le recours aux services de l'état civil ne soit un vœu pieux ;
pour tenir compte de ces deux exigences contradictoires le législateur
sénégalais a réglementé la formation du mariage autour des deux me
sures complémentaires suivantes : d'une part, un choix est offert aux
futurs époux entre la forme moderne du mariage célébré par l'officier
de l'état civil et les formes traditionnelles du mariage ; d'autre part,
le mariage coutumier doit normalement être constaté par l'officier de
l'état civil pour acquérir la même force, la même valeur que le mariage
célébré. Ces deux formes de mariage constituent en quelque sorte, les
formes ordinaires de validité et d'opposabilité du mariage ; il convient
donc dans un premier temps de les comparer afin de dégager la portée
de cette dualité des formes et la mesure dans laquelle le mariage coutu
mier accède à la vie juridique officielle, celle du Code de la famille (I).
3. Mais le législateur sénégalais est allé plus loin ; alors que nor
malement, en dehors de ces deux formes de mariage, toute conclusion
d'une union devrait être sans valeur, notamment lorsque le mariage a
été conclu selon les formalités coutumières traditionnelles mais sans
constatation par l'officier de l'état civil, le Code de la famille reconnaît
certains effets à un tel type de mariage. Le seul fait de se marier selon
les formalités traditionnelles du mariage et sans constatation par l'offi
cier de l'état civil, crée une situation juridique à laquelle la loi reconnaît
une certaine valeur. Le mariage coutumier non constaté n'est pas consi
déré comme une union libre ; il est donc nécessaire de préciser dans
un second temps la portée du mariage coutumier non constaté par
rapport à l'union libre (II). Cela nous permettra de nous rendre compte
que le mariage coutumier a une force beaucoup plus grande qu'il n'y
paraît au premier abord.
I. _ MARIAGE COUTUMIER CONSTATÉ
ET MODERNE CÉLÉBRÉ :
LES FORMES ORDINAIRES DU MARIAGE
4. Aux termes mêmes de l'article 114, (qu'il convient ici de repro
duire en raison des interprétations divergentes qu'il a suscitées), « selon
le choix des futurs époux, le mariage peut être célébré par l'officier
de l'état civil ou constaté par lui ou son délégué, dans les conditions
prévues par la loi. Le mariage ne peut être constaté que lorsque les LE MARIAGE COUTUMIER EN DROIT SÉNÉGALAIS 813
futurs époux observent une coutume matrimoniale en usage au Sénégal ».
Ce texte applique à la matière du mariage un système que l'on ren
contre fréquemment dans le Code de la famille, celui des options (5) ;
il consacre, ainsi que l'indique son intitulé, la dualité des formes du
mariage au Sénégal. D'un point de vue purement formel il est intéres
sant de souligner que la première phrase de cet article 114 alinéa pre
mier ne contient pas les mots, « mariage moderne » et « mariage
coutumier » ; l'accent est mis sur le rôle de l'officier de l'état civil qui
en principe intervient toujours dans la formation du mariage au-delà
de la dualité des formes ; il est le pivot du système puisqu'il célèbre
ou constate ; les deux formes de mariage sont ainsi réunies dans une
seule et même expression et cette remarque va bien au-delà d'un simple
aspect formel. En effet, toute la réglementation des deux formes du
mariage est sous-tendue par cette idée de leur identité, tout au moins
de leur similitude. A cette similitude des formes (A) doit correspondre
selon nous (mais la question est controversée) l'égalité du mariage
coutumier constaté et du mariage moderne célébré (B).
A) Similitude des formes
5. Les conditions de fond du mariage sont rigoureusement identi
ques pour le mariage coutumier et le moderne (articles 108 à
113) et il ne nous semble pas utile de nous y arrêter dans le cadre de
cette étude dont l'objet est limité aux aspects les plus originaux du mar
iage coutumier. Les procédures de conclusion du mariage sont qua
siment identiques, à tel point qu'un auteur a pu écrire qu'il n'y avait
entre elles « que l'ombre d'une différence » (6).
Le législateur sénégalais a véritablement calqué les formalités per
mettant de constater un mariage coutumier sur celles du mariage célébré
à tel point qu'il s'est contenté à plusieurs reprises, de renvoyer pour le
mariage coutumier aux articles consacrés au mariage célébré

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