Fantastique et surnaturel au théâtre à l époque romantique - article ; n°1 ; vol.32, pg 193-204
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Description

Cahiers de l'Association internationale des études francaises - Année 1980 - Volume 32 - Numéro 1 - Pages 193-204
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1980
Nombre de lectures 27
Langue Français

Extrait

Madame Renée Lelièvre
Fantastique et surnaturel au théâtre à l'époque romantique
In: Cahiers de l'Association internationale des études francaises, 1980, N°32. pp. 193-204.
Citer ce document / Cite this document :
Lelièvre Renée. Fantastique et surnaturel au théâtre à l'époque romantique. In: Cahiers de l'Association internationale des
études francaises, 1980, N°32. pp. 193-204.
doi : 10.3406/caief.1980.1218
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/caief_0571-5865_1980_num_32_1_1218ET SURNATUREL AU THEATRE FANTASTIQUE
A L'EPOQUE ROMANTIQUE
Communication de Mme Renée LELIEVRE
(Paris)
au XXXIe Congrès de l'Association, le 26 juillet 1979.
Quels sont les rapports qui existent, dans notre théâtre
romantique, entre les deux notions de fantastique et de surna
turel ? Auteurs et critiques usent des deux mots sans trop de
rigueur : c'est que leur sens évolue justement à l'époque.
Est fantastique ce qui n'existe pas dans la réalité, ce qui est
du domaine de la fantaisie, que l'effet en soit plaisant ou
angoissant. Sous l'influence d'Hoffmann, la « nouvelle école
dramatique française » restreint l'emploi de ce qualificatif aux
personnages ou événements troublants, causes d'anxiété.
Mais un Nodier, un Th. Gautier, si curieux qu'ils soient du
monde irréel, inquiétant, conservent le sens premier du mot»
C'est ce que nous ferons. Le fantastique est évidemment surna
turel ; mais est surnaturel ce qui est matière de foi et ne peut
donc relever de la fantaisie. Quand Chateaubriand, dans
un vocabulaire volontairement ambigu, défend le merveilleux
chrétien et impute à mérite à la « vraie religion d'avoir créé
parmi nous l'âge de la féerie et des enchantements », il
entend par « merveilleux » le surnaturel. En effet, « merveil
leux », dans son sens général, qualifie « ce qui cause de
l'admiration », mais aussi, dans son sens restreint, ce qui est
produit par des êtres surnaturels. La féerie appartient au
théâtre du merveilleux, qui admet également la fantasmagorie,
le mélodrame à grand spectacle, les pièces où figurent des
animaux savants (Jocko, le singe du Brésil ou Les Eléphants
13 194 RENÉE LELIÈVRE
de la pagode). Seule, la féerie aura quelque rapport avec
notre sujet. Il en sera de même pour le ballet. Tous deux
sont avant tout spectacle.
Nous sommes en 1828. Les Français vont enfin pouvoir
connaître le véritable Shakespeare, interprété par une troupe
anglaise. Enfin, on va leur montrer Lady Macbeth somnamb
ule, errant dans son palais, son époux terrorisé par l'appa
rition du fantôme de Banquo, les sorcières et le spectre du
père d'Hamlet !
Des œuvres étrangères paraissent en traduction qui vont
secouer le monde des lettres : le Manfred de Byron, le Faust
de Gœthe déjà connu par la traduction de Stapfer, celle de
Saint Aulaire, illustrée par Delacroix, et la plus récente, celle
de Nerval ; enfin les premiers Contes d'Hoffmann présentés
par Loeve-Vemars, toutes œuvres dont le surnaturel fait la
nouveauté et l'intérêt.
Le théâtre français, dont on s'accorde à déplorer la sclé
rose, ne peut-il trouver dans ces modèles une source d'inspi
ration nouvelle ?
Le 2 août 1828, J.-J. Ampère dans le Globe, où s'exprime
la « nouvelle école dramatique », indique la voie à suivre :
plus de ce « merveilleux proprement dit... la sorcellerie, les
diables, les apparitions qui ne peuvent faire illusion qu'un
moment », mais « un merveilleux naturel », né du sentiment
soudain de l'insolite qui vient troubler le cours ordinaire de
la vie, bref le merveilleux d'Hoffmann. En décembre 1830,
Nodier à son tour traite dans la Revue de Paris du Fantas
tique en littérature. Sorte de Préface de Cromwell au petit
pied, l'article établit une histoire de la société et de la poésie
en trois âges et énumère les ouvrages qui, au cours des siè
cles, ont sauvegardé le fantastique dont l'être humain ne
peut se passer. Admiratrice fervente d'Hoffmann, « la nouv
elle école dramatique » inclinait vers le fantastique sombre,
angoissant, de l'auteur allemand, . Nodier penchait vers un
fantastique aimable et faisait place parmi les modèles, aux
féeries shakespeariennes et aux Fiabe de Gozzi. Le 1" dé
cembre 1839, la Revue des deux mondes publie un article FANTASTIQUE DANS LE THÉÂTRE ROMANTIQUE 195
de George Sand : Essai sur le drame fantastique : Faust,
Manfred, Conrad, (il s'agit du Conrad de Mickiewicz, traduit
en 1834, troisième partie de sa pièce Dziady, encore ina
chevée). Pour elle, ces trois œuvres majeures sont en réalité
des drames métaphysiques ; le fantastique n'y sert que de
moyen d'évoquer les plus graves problèmes philosophiques
et moraux. Auteurs et critiques précisent, par la suite, leurs
positions. Après ces théories et analyses, on s'attendrait à voir
se multiplier les œuvres originales d'inspiration fantastique. Il
n'en est rien. C'est au drame historique ou philosophique que
se vouent les porte-flambeau du romantisme. La comédie
d'intrigue triomphe avec Scribe qui en exerce le quasi monop
ole pendant un demi-siècle.
C'est sur les scènes lyriques que le fantastique va conquérir
peu à peu sa place et triompher dans le ballet, un ballet qui
n'est plus un intermède introduit tant bien que mal dans le
drame, mais qui constitue à lui seul un spectacle complet.
Le conteur crée son monde ; l'auteur dramatique doit l'im
poser, par l'intermédiaire des acteurs, à un public aux réac
tions collectives. Entreprise hasardeuse quand il lui faut
évoquer l'insolite, l'expérience vécue d'un individu, le plus
souvent seul à en témoigner, et la restituer sur la scène. Or,
les plus ardents partisans du fantastique sont des conteurs,
non des hommes de théâtre, et s'ils sont à l'occasion auteurs
dramatiques, tels Mérimée ou Balzac, c'est au conte qu'ils
réservent leurs histoires fantastiques. Balzac projette et an
nonce même une Vieillesse de Don Juan destinée au théâtre.
Il n'en écrit que la liste des personnages. Hoffmann lui-
même, « qui comprenait si bien le mécanisme psychologique
du théâtre », comme l'affirme M. Gravier, n'a pas écrit pour
la scène. Si des contes ont été portés à la scène, c'est du fait
de « faiseurs » divers, plus soucieux d'un succès d'argent
que de poésie. Devenus mélodrames à grand spectacle ou
comédies mêlées de couplets, ils ont perdu toute fantaisie,
toute qualité dramatique. Ainsi du charmant Trilby de Nodier
qui, dans l'année même de sa publication, est joué sur deux 196 RENÉE LELIEVRE
petits théâtres et reparaît sous divers titres et divers arran
gements pendant toute la période romantique. Il deviendra
enfin ballet en 1846.
Les modèles proposés n'étaient pas d'un grand secours
quant à la technique théâtrale. Manfred poème dramatique
n'avait jamais été joué (il ne le sera qu'en 1834 à Covent
Garden) ; Byron lui-même le réputait injouable. Faust, créé
le 29 octobre 1828 au Théâtre de la Porte Saint-Martin dans
l'adaptation de Béraud, ne gardait de la pièce traduite par
Nerval que ce qu'elle avait de plus convenu, de plus périmé :
les sorcières, le tour de magie qui fait apparaître sur la table
le verre de vin de Tokay, l'incantation, le cercle magique, le
philtre, tout ce que condamnait Ampère. Tous les problèmes
philosophiques avaient disparu. La danse infernale exécutée
dans un style parodique par Frederick Lemaître et Madame
Zélie-Paul, l'apothéose finale, Marguerite montant au ciel
alors que Faust allait brûler dans les feux de Bengale de
l'Enfer, appartenaient à la meilleure tradition du mélodrame
à grand spectacle. Là était le problème majeur. Comment
matérialiser des fantasmes, comment conférer la présence
réelle et visible sur la scène à des êtres surnaturels ?
éviter de tomber dans les trucs du mélodrame ou de la féerie ?
Ne pouvait-on arracher à S

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