Une lettre retrouvée : Campanella à Peiresc, le 19 juin 1636 / A letter recovered : Campanella to Peiresc, June 19th 1636 - article ; n°2 ; vol.55, pg 273-286
15 pages
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Une lettre retrouvée : Campanella à Peiresc, le 19 juin 1636 / A letter recovered : Campanella to Peiresc, June 19th 1636 - article ; n°2 ; vol.55, pg 273-286

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Description

Revue d'histoire des sciences - Année 2002 - Volume 55 - Numéro 2 - Pages 273-286
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 2002
Nombre de lectures 36
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

M GERMANA ERNST
M EUGENIO CANONE
Une lettre retrouvée : Campanella à Peiresc, le 19 juin 1636 / A
letter recovered : Campanella to Peiresc, June 19th 1636
In: Revue d'histoire des sciences. 2002, Tome 55 n°2. pp. 273-286.
Citer ce document / Cite this document :
ERNST GERMANA, CANONE EUGENIO. Une lettre retrouvée : Campanella à Peiresc, le 19 juin 1636 / A letter recovered :
Campanella to Peiresc, June 19th 1636. In: Revue d'histoire des sciences. 2002, Tome 55 n°2. pp. 273-286.
doi : 10.3406/rhs.2002.2154
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhs_0151-4105_2002_num_55_2_2154Une lettre retrouvée :
Campanella à Peiresc, le 19 juin 1636 (*)
Germana Ernst, Eugenio Canone (**)
Le 29 octobre 1634, fuyant Rome pour se rendre à Paris, Campan
ella écrit de Marseille une lettre à Nicolas-Claude Fabri de Peiresc
pour lui annoncer son arrivée en France et pour lui communiquer son
désir de rencontrer au plus tôt ce mécène et protecteur des savants (1).
Après leur affectueuse et émouvante rencontre à Aix-en-Provence, où
Peiresc hébergea généreusement l'exilé pendant une dizaine de jours,
leur correspondance continua même après que Campanella se fut éta
bli à Paris (2). Dans ses lettres, Campanella répond aux questions que
son aimable et savant correspondant lui adresse ; il lui raconte ses ren-
(*) Nous présentons ici, dans la traduction française et sous forme un peu modifiée, une
étude précédemment parue la Rivista di storia délia filosofla, XLIX/2 (1994), 353-366, à laquelle nous renvoyons pour des informations et une bibliographie plus amples.
Nous remercions Amalia Perfetti qui nous a proposé de rééditer l'importante lettre de Camp
anella. La traduction de l'article est de Silvia Spazzafumo, celle de la lettre est d'Alain
Mothu : nos remerciements à tous deux.
(**) Germana Ernst, professeur d'histoire de la philosophie de la Renaissance, Diparti-
mento di filosofia, Universita di Roma Tre, via Ostiense, 234, 00146 Roma. Eugenio Canone,
primo ricercatore, Lessico intellettuale europeo, CNR, Universita la Sapienza, via Carlo Fea,
2-00161 Roma.
(1) Tommaso Campanella, Letter e, Vincenzo Spampanato (éd.) (Bari : Laterza, 1927),
247-248 (cité par la suite Lettere). Érudit, collectionneur de livres et d'objets anciens, Nico
las-Claude Fabri de Peiresc (1580-1637) fut conseiller au parlement ď Aix-en-Provence et
correspondant des savants de l'Europe entière. Pour les relations de Campanella avec les
savants et les milieux français, voir Michel-Pierre Lerner, Tommaso en France au
xvif siècle (Naples : Bibliopolis, 1995).
(2) Les lettres de Peiresc à Campanella sont dans Luigi Amabile, Fra Tommaso Campan
ella nei castelli di Napoli, in Roma in Parigi (Napoli : Morano, 1887) (cité par la suite Cas-
tellî), II, 248-259. Sur la correspondance entre Campanella et Peiresc voir Cecilia Rizza, Pei
resc e I'ltalia (Torino : Giappichelli 1965), 239-273. Pour les lettres de Campanella à Peiresc,
voir n. 7.
Rev. Hist. Sci., 2002, 55/2, 273-285 274 Germana Ernst, Eugenio Canone
contres avec les personnages les plus éminents de la capitale, qui ne
manquent pas de lui montrer leur estime, et se félicite notamment de
la cordialité de la première audience accordée par Louis XIII. En
outre, il informe ponctuellement son ami de l'édition de ses œuvres, lui
envoyant des exemplaires dès que cela lui est possible et lui annonçant
son intention de lui dédier une œuvre, pour manifester de cette façon
sa gratitude à celui qu'il n'hésite pas à appeler le « luminar magno des
vertus spéculatives et morales» - mais l'ami refuse la dédicace en
disant qu'il ne recherche pas « ces vanités » et que « le cœur des amis
sans trop de fastes » lui suffît (3).
Les manifestations réciproques d'estime et de sympathie subiront
une brusque interruption et connaîtront un moment de forte tension
au cours de l'été 1635, quand Peiresc, à cause d'informations malveil
lantes sur le compte de Campanella, lui écrit une lettre très sévère (4).
Dans cette lettre, le dominicain est réprimandé à cause de sa dérision
présumée des doctrines atomistes soutenues par Gassendi et il est
invité à peser avec plus de précaution ses jugements lorsqu'il parle
des hommes de lettres français, car il doit se rappeler que, dans ce
pays, il y a « une très grande liberté de choisir telle ou telle opi
nion ». En raison de la brièveté de la vie, il est inutile, selon Peiresc,
de se forcer à réfuter les doctrines des autres : il est préférable d'ap
précier les aspects positifs que l'on peut trouver dans chaque philo
sophie et, laissant de côté des polémiques inopportunes et fastidieus
es, il vaut mieux se limiter « à enseigner ce que les lumières
naturelles vous ont élucidé ».
Campanella, très déçu, se hâte de répondre, en se défendant avec
passion et dignité des reproches qui le visent et qui lui semblent naître
de calomnies intolérables (5). Il réaffirme toute son admiration et son
estime pour l'ami Gassendi, même s'il confirme que la philosophie
atomiste lui semble insuffisante sous de nombreux aspects, car elle se
limite à considérer « la matière de l'univers » sans évaluer « l'art admi
rable et d'autres causes de différentes sortes ». En ce qui concerne les
doctrines philosophiques des siennes, il sait très bien que
« dans les sectes les plus méprisées il y a des pensées admirables » ; et
en ce qui concerne la liberté, non seulement il la respecte mais il
l'apprécie tellement, lui qui en a été brutalement privé, qu'il est venu
en France parce qu'il en était « assoiffé ». Le regret qu'il manifeste est
si sincère et affligé que Peiresc ne pourra que considérer l'incident clos,
de sorte, qu'un mois après, Campanella, de son côté, se sentira sou-
(3) Castelli, II, 257.
(4) Lettre du 3 juillet 1635, ibid., 255-257.
(5)du 17 in Lettere, 316-321. lettre retrouvée : Campanella à Peiresc 275 Une
lagé, heureux qu'il soit resté son ami et qu'il ait « éliminé de son cœur
la jalousie de sa grâce (6) ».
Mais à côté des onze lettres écrites à Peiresc entre 1634 et 1635
dans l'édition Spampanato (7), il en manque trois autres de 1636.
Selon le rédacteur du Catalogue de la correspondance de Peiresc, le
corpus des lettres se terminait avec trois missives du 24 février, 19 juin
et 3 octobre 1636 : on ne trouve aucune trace de ces trois lettres dans
le tome VI de la Correspondance (8). L'histoire compliquée des viciss
itudes de ces trois lettres a été reconstruite par Luigi Firpo dans l'un de
ses plus brillants Appunti campanelliani, intitulé avec vivacité Storia di
un furto (9). Dans ces pages, Firpo racontait comment, vers 1840, les
trois missives étaient allées enrichir l'important butin du comte,
d'origine florentine mais naturalisé français, Guglielmo Libri Carrucci
délia Sommaia (1803-1869), auteur d'une appréciée Histoire des scien
ces mathématiques en Italie et titulaire d'une chaire de calcul des pro
babilités à la Sorbonně, mais qui, à l'intérêt pour la science, associait
une passion immodérée, nullement désintéressée, pour les livres pré
cieux, les manuscrits et les autographes, une passion qui l'avait poussé
jusqu'à dévaliser sans aucun scrupule de nombreuses bibliothèques
françaises. Quand le scandale éclata en 1848, il subit un procès reten
tissant et Libri, qui s'était réfugié en Angleterre, fut condamné à dix
ans de prison par contumace. Les ouvrages retrouvés chez lui furent
séquestrés et à la fin du procès, après avoir été réunis en trente et un
volumes, ils furent consignés à la Bibliothèque nationale de Paris.
La première des trois lettres volées de Campanella, celle du
24 février, était incluse dans l'avant-dernier de ces volumes et a été
publiée par Firpo en 1948 (10). De la troisième lettre, celle du
3 octobre, on avait perdu toute trace après que la riche collection
privée dont elle faisait partie avait été mise en vente en 1887, à la mort
de son possesseur (11). Mais avant que la lettre soit perdue, Louise
(6) Lettre du 22 août 1635, ibid, 322 ss.
(7) Lettere nos 70, 72, 74, 77, 80, 83, 85, 86,

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