Propos sur les fondements de la psychologie - article ; n°100 ; vol.68, pg 483-506
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Revue Philosophique de Louvain - Année 1970 - Volume 68 - Numéro 100 - Pages 483-506
24 pages

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Publié le 01 janvier 1970
Nombre de lectures 63
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Jean Florence
Propos sur les fondements de la psychologie
In: Revue Philosophique de Louvain. Troisième série, Tome 68, N°100, 1970. pp. 483-506.
Citer ce document / Cite this document :
Florence Jean. Propos sur les fondements de la psychologie. In: Revue Philosophique de Louvain. Troisième série, Tome 68,
N°100, 1970. pp. 483-506.
doi : 10.3406/phlou.1970.5574
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/phlou_0035-3841_1970_num_68_100_5574Propos sur les fondements
de la psychologie
Où en est la critique des fondements de la psychologie, depuis
que les philosophes, toujours soucieux de légitimer les démarches
de la pensée, ont entrepris d'en établir le statut théorique ?
Est-il vraiment déplacé ou malséant de demander au psychologue :
« qu'est-ce que la psychologie ? ». Comme telle, la question n'est pas
impertinente ; sous son apparente banalité, elle est philosophiquement
justifiée. C'est du côté des réponses que l'on pourrait s'attendre à
des déplacements. Peut-on, par exemple, se satisfaire de cette réponse
pragmatique : «La psychologie, c'est ce que fait le psychologue»?
N'est-ce pas faire passer une question d'essence pour une question
d'utilité ou d'efficacité ? Bien sûr, le technicien — l'homme d'action — ,
dans le contexte de sa pratique, formule par là ce qu'il est simplement
autorisé à dire. On juge quelqu'un selon ses actes, on mesure la valeur
d'une technique à ses réalisations. Dès lors, soulagé, le psychologue
peut revaquer aux occupations où il trouve son assiette, sa justification
et peut-être son bonheur.
Mais, si le curieux qui lui adressait la question est philosophe,
cette manière de répondre est une dérobade. Parce que la question est
épistémologique, donc théorique, aucune solution opérationnelle n'est
en mesure de la résorber. Si la réponse existe, elle sera nécessairement
théorique ; elle devra rendre compte d'elle-même, en y vouant le temps
requis. Or, ce temps ne peut être baillé par le simple entracte qu'offrirait
entre deux expériences ou deux consultations de cas, l'activité du
psychologue praticien. Car il ne s'agit pas seulement d'une réflexion
sur une praxis, — ce que réclame toute activité scientifique qui se
veut sérieuse — ; il ne s'agit pas non plus d'une légitimation intérieure
au champ de recherches d'une discipline particulière. Il s'agit d'un
procès à porter devant l'instance philosophique où c'est la psychologie
elle-même qui doit rendre compte de son concept.
Commence ici un long parcours, où l'on chemine auprès des philo
sophes et, en particulier, auprès de ceux qui aujourd'hui s'interrogent
sur la scientificité des pratiques des sciences dites «humaines». Épelons 484 Jean Florence
quelques noms : Husserl, Politzer, Foucault, Canguilhem, Lacan,
Althusser, Derrida, Gusdorf, Lévi-Strauss. C'est avec eux, et d'autres,
que le dialogue doit avoir lieu. Nous nous bornerons dans cette étude
à tracer les coordonnées qui nous paraissent, selon ces auteurs, assigner
à notre questionnement son juste lieu.
A l'origine de notre interrogation, il y a cet opuscule de Georges
Politzer, Critique des fondements de la psychologie, écrit en 1928,
fameux pour la virulence de sa polémique et la pénétration de ses
jugements. Nous ne voulons pas dénier la solidarité qui nous lie à son
projet ni désavouer une intention qui nourrit la nôtre, mais nous tenons
à souligner qu'il serait anachronique et stérile de prendre le ton pamp
hlétaire de sa critique.
A y réfléchir, il semble d'ailleurs que cette violence demeure aujour
d'hui nécessaire, à condition d'en orienter la force autrement : non pas
d'une psychologie contre une autre, mais du psychologue contre lui-
même. La différence des pratiques est secondaire à celle, plus intérieure
mais combien plus fuyante, de la science et de l'idéologie.
♦ * *
Une page de Politzer prête un point d'ancrage à nos menus propos :
« La psychologie est actuellement dans l'état où se trouvait la philo
sophie au moment de l'élaboration de la Critique de la raison pure.
Sa stérilité est manifeste, ses démarches constitutives sont mises à
nu, et tandis que les uns se confinent dans une scolastique impression
nante par sa mise en scène, mais qui n'avance pas du tout, les autres
se jettent dans des solutions désespérées. Un souffle nouveau se fait
sentir aussi : on voudrait déjà avoir vécu cette période de l'histoire
de la psychologie, mais on retombe constamment dans les fantaisies
scolastiques. Il manque donc quelque chose : la reconnaissance du
fait que la psychologie classique n'est rien d'autre que l'élaboration
notionnelle d'un mythe. Cette reconnaissance ne doit pas être une
critique dans le genre de celles dont pullule la littérature psychol
ogique, et qui montrent tantôt la faillite de la psychologie subjec
tive, tantôt celle de la psychologie objective et qui préconisent péri
odiquement le retour de la thèse à l'antithèse et de l'antithèse à la
thèse. Il ne faut pas, par conséquent, instituer une dispute qui puisse,
de nouveau, rester intérieure à la psychologie classique, et dont
tout le bénéfice est de faire tourner la sur elle-même. Propos sur les fondements de la psychologie 485
C'est une critique rénovatrice qu'il faut, une critique qui, en faisant
dépasser, par la liquidation claire de ce qui a été, le point mort où se
trouve la psychologie, crée cette grande évidence qu'il s'agit de com
muniquer (...)».
La psychologie qui, en 1928, était « actuelle », n'était plus ce que
les programmes classiques, c'est-à-dire, ceux de Wolff, Ribot, Wundt,
avaient élaboré, mais un champ ravagé par des projets conflictuels :
en France, la psychologie introspectionniste, inspirée du spiritualisme
philosophique ambiant auquel Bergson tentait de redonner figure,
s'exaspérait en analyses du « moi » ; en Autriche et en Allemagne,
la psychanalyse qui se conquérait durement une place parmi les sciences
établies, connaissait déjà des divisions intestines, Adler et Jung inau
gurant la contestation au sein des disciples de Freud ; contemporané-
ment, une théorie nouvelle de la perception, de l'intelligence et de
l'apprentissage se développait dans le chef des psychologues de la
« Gestalt », donnant son essor à la psychologie comparée ; dans les
pays anglo-saxons, les recherches expérimentales, lointainement
inspirées des idées de Wundt, subissaient des remaniements théo
riques décisifs grâce aux travaux de James, de Watson et de leurs
épigones ...
Politzer, dans cette conjoncture nouvelle, cherchait à faire
le point. Son projet était d'examiner tout ce matériel de faits et
de doctrines inédits. Il avait vu l'urgence d'instituer une enquête
sur les fondements, qui eût à dévoiler les présupposés de la psychologie
classique encore vivaces, dans la psychanalyse, la Gestalttheorie et
le behaviorism. Son œuvre s'interrompit par sa mort prématurée,
arrêtant son investigation au premier tiers de sa route.
Mais le fragment qu'il nous a laissé demeure un paradigme,
à tout le moins quant à la manière de questionner. Revenons donc
au texte que nous avons cité et commentons-le afin d'en dessertir
les directives majeures. Nous croyons en effet que leur mise au clair
permettra de saisir le sens des tentatives pratiques et théoriques
qui ont surgi depuis lors. Ce commentaire représente ainsi un prétexte
et un liminaire pour ce que nous tentons de mettre en forme ici.
Suivons le texte pas à pas. Il commence par évoquer l'œuvre
de Kant. Comme celui-ci a intenté un procès à la raison (raison théo
rique, raison pratique et faculté de juger) pour lui prescrire ses limites
en vertu de sa propre architectonique et la dessaisir de ses pré- 486 Jean Florence
tentions métaphysiques, ainsi faudrait-il à la psychologie son Kant.
Nous pourrions nous demander, au-delà de l'évocation qu'en fait
Politzer, comment délimiter le lieu d'une pareille « répétition » de la
question kantienne.
Les « fantaisies scolastiques » désignent les indestructibles abstrac
tions que l

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