Après Eltsine ? - article ; n°2 ; vol.59, pg 369-379
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Politique étrangère - Année 1994 - Volume 59 - Numéro 2 - Pages 369-379
After Yeltsin ?, by Jerzy Reinhardt
In order to understand the électoral success of Vladimir Zirinovsky, the underlying structure of Russian politics must be examined. Whilst seemingly disorderea, this structure mayy since the nineteenth century, be divided up into four major blocs forming two coalitions. The first is comprised of Westernizers and populists, the second of « conservatives », or so-called statist groups (gosudarstvenniki) and nationalists. The first two groups, which represent between 65 and 70 % of the Russian electorate, brought Yeltsin to power. As for the other two groups, the Russian nationalists suffered from the lack of a credible representative and, more importantly, the so-called statist groups were hampered by the natural identification of their elite with the previous nomenklatura and the Soviet System which were rejected on a large scale by the population. The exceptional context created by the exit of communism therefore made impossible an alliance between the supporters of the Russian orthodox nation and those of the imperial Soviet state without a hypothetical passage into the realm of irrationality. It is exactly this option that Vladimir Zironovsky represents. His maximum electoral potential may be estimated as being between 30 and 35 %. The chances of such a minority coming to power increase with the disorganisation of the government and the state.
Pour comprendre les succès électoraux de Vladimir Jirinovsky, il faut examiner la structure profonde de la politique russe qui, sous un désordre apparent, se divise depuis le XIXe siècle en quatre courants fondamentaux appelés à s'unir en deux coalitions : d'un côté, les occidentalistes et les populistes, de l'autre, les « conservateurs » ou « partisans de l'Etat » et les nationalistes. Les deux premiers, qui rassemblent 65 à 70 % de l'électorat russe, ont porté au pouvoir Boris Elstine. Les deux autres ont souffert, d'une part, de l'absence de représentant crédible du côté des nationalistes russes, d'autre part et surtout, de l'identification des élites naturelles du courant des « partisans de l'Etat » à l'ancienne nomenklatura et au système soviétique, massivement rejetés par la population. Le contexte particulier de la sortie du communisme rendait de ce fait impossible l'alliance entre les partisans de la nation russe et orthodoxe et ceux de l'Etat soviétique impérial, en dehors de l'hypothèse d'une fuite dans l'irrationnel. C'est précisément cette option que représente Vladimir Jirinovsky. On peut estimer entre 30 et 35 % au maximum l'électorat potentiel de Vladimir Jirinovsky. Les chances d'accession au pouvoir d'une telle minorité augmentent avec la désorganisation du pouvoir et de l'Etat.
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1994
Nombre de lectures 31
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Jerzy Reinhardt
Après Eltsine ?
In: Politique étrangère N°2 - 1994 - 59e année pp. 369-379.
Citer ce document / Cite this document :
Reinhardt Jerzy. Après Eltsine ?. In: Politique étrangère N°2 - 1994 - 59e année pp. 369-379.
doi : 10.3406/polit.1994.4277
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1994_num_59_2_4277Abstract
After Yeltsin ?, by Jerzy Reinhardt
In order to understand the électoral success of Vladimir Zirinovsky, the underlying structure of Russian
politics must be examined. Whilst seemingly disorderea, this structure mayy since the nineteenth
century, be divided up into four major blocs forming two coalitions. The first is comprised of
Westernizers and populists, the second of « conservatives », or so-called statist groups
(gosudarstvenniki) and nationalists. The first two groups, which represent between 65 and 70 % of the
Russian electorate, brought Yeltsin to power. As for the other two groups, the Russian nationalists
suffered from the lack of a credible representative and, more importantly, the so-called statist groups
were hampered by the natural identification of their elite with the previous nomenklatura and the Soviet
System which were rejected on a large scale by the population. The exceptional context created by the
exit of communism therefore made impossible an alliance between the supporters of the Russian
orthodox nation and those of the imperial Soviet state without a hypothetical passage into the realm of
irrationality. It is exactly this option that Vladimir Zironovsky represents. His maximum electoral potential
may be estimated as being between 30 and 35 %. The chances of such a minority coming to power
increase with the disorganisation of the government and the state.
Résumé
Pour comprendre les succès électoraux de Vladimir Jirinovsky, il faut examiner la structure profonde de
la politique russe qui, sous un désordre apparent, se divise depuis le XIXe siècle en quatre courants
fondamentaux appelés à s'unir en deux coalitions : d'un côté, les occidentalistes et les populistes, de
l'autre, les « conservateurs » ou « partisans de l'Etat » et les nationalistes. Les deux premiers, qui
rassemblent 65 à 70 % de l'électorat russe, ont porté au pouvoir Boris Elstine. Les deux autres ont
souffert, d'une part, de l'absence de représentant crédible du côté des nationalistes russes, d'autre part
et surtout, de l'identification des élites naturelles du courant des « partisans de l'Etat » à l'ancienne
nomenklatura et au système soviétique, massivement rejetés par la population. Le contexte particulier
de la sortie du communisme rendait de ce fait impossible l'alliance entre les partisans de la nation russe
et orthodoxe et ceux de l'Etat soviétique impérial, en dehors de l'hypothèse d'une fuite dans l'irrationnel.
C'est précisément cette option que représente Vladimir Jirinovsky. On peut estimer entre 30 et 35 % au
maximum l'électorat potentiel de Vladimir Jirinovsky. Les chances d'accession au pouvoir d'une telle
minorité augmentent avec la désorganisation du pouvoir et de l'Etat.POLITIQUE ÉTRANGÈRE 1 369
Jerzy REINHARDT Après Eltsine ?
Vladimir Jirinovsky a créé la surprise en deux occasions. La première
s'est produite à l'échelle de son propre pays, en juin 1991, lors de la
première élection au suffrage universel direct du président de la
Russie. A peu près totalement inconnu jusqu'alors, Vladimir Jirinovsky par
vint, à l'issue d'une campagne électorale où il n'eut droit qu'à deux passages à
la télévision nationale, à conquérir la troisième place, en recueillant près de
8 % des suffrages, certes loin derrière Boris Eltsine, triomphalement élu au
premier tour avec 57 % des voix, et l'ancien premier ministre Nikolai"
Ryjkov, candidat officiel des conservateurs (17 %), mais loin devant Viktor
Bakatine, ancien ministre de l'Intérieur, soutenu par Mikhaïl Gorbatchev
(3,42 %). Le succès partiel de Vladimir Jirinovsky, éclipsé par la victoire de
Boris Eltsine, rappela, à une moindre échelle, celui de Tyminski à la président
ielle polonaise de la même année. Les moyens du Russe n'avaient certes
aucune commune mesure avec ceux du Polonais, soutenu dit-on par une
véritable fortune personnelle.
Force est pourtant de constater que ce succès électoral ne rapporta guère de
crédibilité à l'intéressé. En Russie, seules quelques voix isolées et, pour tout
dire, marginales soulignèrent l'importance du personnage. Parmi elles, on peut
compter celle de la veuve d'Andreï Sakharov, Elena Bonner *. En tout cas, il
ne fut nullement pris au sérieux dans les cercles du pouvoir, en particulier par
l'équipe électorale du Président qui, pourtant, avait fait preuve jusque-là de
remarquables qualités d'analyse et d'intuition. A l'étranger, les débuts de la
carrière politique de Vladimir Jirinovsky furent largement couverts par le
bruit et la fureur des événements du second semestre de 1991, tentative de
putsch conservateur, victoire de Boris Eltsine, chute de Mikhaïl Gorbatchev
et dissolution de l'Union soviétique, puis querelles intestines du nouveau
pouvoir russe, jusqu'à la prise du Parlement en octobre 1993. Les qualités de
linguiste de Vladimir Jirinovsky et sa forte présence dans les manifestations
de rue lui valurent certes de nombreuses interviews de la part des télévisions
1. « II ne sert à rien de se lamenter sur la chute de Gorbatchev et de la cour du roi, personne ne
leur rendra le pouvoir... L'échec de la politique d'Eltsine peut renforcer la coalition du vieil
appareil communiste et des forces du chauvinisme, mener au pouvoir des « guides » du type Nina
Andreeva ou Jirinovsky. Aidez Eltsine ! » [1]. Nina Andreeva, chef d'un groupuscule stalinien de
Leningrad, fut, un peu malgré elle, le personnage central de l'un des grands scandales politiques
de la période gorbatchévienne, l'affaire du manifeste conservateur publié par Sovietskaïa Ros-
sia [2]. La mention du nom de ce personnage secondaire peut être mise au compte d'une sorte de
code interne à l'intelligentsia moscovite. C'est naturellement l'évocation de Vladimir Jirinovsky
qui est pertinente et significative. 370 I POLITIQUE ÉTRANGÈRE
occidentales mais il n'y fut traité que comme un phénomène pittoresque et
vaguement inquiétant. Aussi, le franc succès emporté à la législative russe du
15 décembre 1993, où 24 % des voix se portèrent sur sa liste, constitua- t-il
une seconde surprise, cette fois-ci à l'échelle internationale. Les vagues
craintes d'une rechute de la Russie dans un totalitarisme, cette fois-ci de
coloration fasciste ou nazie, prirent alors corps et vinrent s'incarner, à tort ou
à raison, dans la personne de Vladimir Jirinovsky, décrit à Penvi par les
médias du monde entier comme une sorte de nouvel Hitler. Ignoré jus
qu'alors, Vladimir Jirinovsky devint, du jour au lendemain, l'astre autour
auquel semble graviter la politique russe, sans pour autant peut-être que les
mécanismes de sa montée en puissance n'aient été pleinement explorés.
Une observation attentive de l'évolution russe eût-elle pourtant permis de
détecter, dès la fin de 1991, l'importance potentielle du phénomène Jir
inovsky ? Peut-être [3]. De la constatation à l'explication, il y a néanmoins un
pas qu'il est impossible de franchir immédiatement. Depuis la prise du
pouvoir par Boris Eltsine, chacun percevait d'une manière plus ou moins
confuse l'existence d'une alternative que l'on doit qualifier, pour simplifier, de
« droite » ou d'« extrême droite ». Pourquoi devait-elle s'incarner dans Vladi
mir Jirinovsky, et non dans l'une quelconque des personnalités que compte la
vaste palette du nationalisme russe sous ses différentes espèces, certaines, du
général du KGB Sterligov au vice-président Routskoï, pouvant passer pour
plus « sérieuses » selon des critères occidentaux ?
Le succès de Vladimir Jirinovsky doit, en premier lieu, être rapporté à son
équation personnelle. Il doit l'être surtout au fait que ce succès est porté par
deux des quatre courants profonds de la politique russe, le courant que l'on
qualifiera pour l'instant, pour simplifier, de « conservateur » et le courant
nationaliste. Les deux autres courants, populiste et occidentaliste, ont porté

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