De la mesure dans un service public régalien. Peut-on et faut-il quantifier la charge de travail des magistrats ? - article ; n°4 ; vol.18, pg 91-118
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De la mesure dans un service public régalien. Peut-on et faut-il quantifier la charge de travail des magistrats ? - article ; n°4 ; vol.18, pg 91-118

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Politiques et management public - Année 2000 - Volume 18 - Numéro 4 - Pages 91-118
La modernisation du service public est souvent associée aux idées de rationalisation, d'objectivité, et donc de mesure. Quoi de plus objectif, de plus 'juste qu'un chiffre s'il est bien calculé et bien utilisé ? C'est dans cette optique qu'une recherche a été menée en collaboration avec le ministère de la Justice pour tenter de quantifier la charge de travail des magistrats des Tribunaux de Grande instance, de manière à améliorer l'affectation par le Ministère des effectifs budgétaires.
La recherche a montré que la construction progressive du modèle et des normes d'activité qui y étaient liées, en collaboration étroite avec les magistrats, permettait de légitimer ces chiffres par rapport aux pratiques professionnelles en vigueur, et que, de surcroît, les caractéristiques générales de l'activité judiciaire, contrairement à une intuition répandue, renforçaient cette légitimité de représentation. Mais une deuxième légitimité reste à construire, celle de l'utilisation du modèle en routine, qui nécessite la mise en place d'une véritable 'ingénierie' (nouvelles structures, nouveaux acteurs, nouvelles compétences...) sans laquelle l'utilisation de l'outil deviendra rapidement caduque car décrédibilisée. A travers une expérimentation géographique, les conditions de mise en place de cette ingénierie ont pu être mises en évidence par la recherche.
28 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 2000
Nombre de lectures 31
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Frédérique Pallez
De la mesure dans un service public régalien. Peut-on et faut-il
quantifier la charge de travail des magistrats ?
In: Politiques et management public, %vol. 18 n° 4, 2000. Numéro spécial - "Le management public et la mesure :
des lettres aux chiffres". pp. 91-118.
Résumé
La modernisation du service public est souvent associée aux idées de rationalisation, d'objectivité, et donc de mesure. Quoi de
plus objectif, de plus 'juste" qu'un chiffre s'il est bien calculé et bien utilisé ? C'est dans cette optique qu'une recherche a été
menée en collaboration avec le ministère de la Justice pour tenter de quantifier la charge de travail des magistrats des Tribunaux
de Grande instance, de manière à améliorer l'affectation par le Ministère des effectifs budgétaires.
La recherche a montré que la construction progressive du modèle et des "normes d'activité" qui y étaient liées, en collaboration
étroite avec les magistrats, permettait de légitimer ces chiffres par rapport aux pratiques professionnelles en vigueur, et que, de
surcroît, les caractéristiques générales de l'activité judiciaire, contrairement à une intuition répandue, renforçaient cette légitimité
de représentation. Mais une deuxième légitimité reste à construire, celle de l'utilisation du modèle en routine, qui nécessite la
mise en place d'une véritable 'ingénierie' (nouvelles structures, nouveaux acteurs, nouvelles compétences...) sans laquelle
l'utilisation de l'outil deviendra rapidement caduque car décrédibilisée. A travers une expérimentation géographique, les
conditions de mise en place de cette ingénierie ont pu être mises en évidence par la recherche.
Citer ce document / Cite this document :
Pallez Frédérique. De la mesure dans un service public régalien. Peut-on et faut-il quantifier la charge de travail des magistrats
?. In: Politiques et management public, %vol. 18 n° 4, 2000. Numéro spécial - "Le management public et la mesure : des lettres
aux chiffres". pp. 91-118.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/pomap_0758-1726_2000_num_18_4_2647LA MESURE DANS UN SERVICE PUBLIC RÉGALIEN. DE
PEUT-ON ET FAUT-IL QUANTIFIER LA CHARGE DE TRAVAIL
DES MAGISTRATS?
Frédérique PALLEZ*
Résumé La modernisation du service public est souvent associée aux idées de rationalisation,
d'objectivité, et donc de mesure. Quoi de plus objectif, de plus 'juste" qu'un chiffre s'il
est bien calculé et bien utilisé ? C'est dans cette optique qu'une recherche a été
menée en collaboration avec le ministère de la Justice pour tenter de quantifier la
charge de travail des magistrats des Tribunaux de Grande instance, de manière à
améliorer l'affectation par le Ministère des effectifs budgétaires.
d'activité' La recherche qui y a étaient montré liées, que en la construction collaboration étroite progressive avec les du magistrats, modèle et permettait des "normes de
légitimer ces chiffres par rapport aux pratiques professionnelles en vigueur, et que, de
surcroît, les caractéristiques générales de l'activité judiciaire, contrairement à une
intuition répandue, renforçaient cette légitimité de représentation. Mais une deuxième
légitimité reste à construire, celle de l'utilisation du modèle en routine, qui nécessite la
mise en place d'une véritable 'ingénierie' (nouvelles structures, nouveaux acteurs,
nouvelles compétences...) sans laquelle l'utilisation de l'outil deviendra rapidement
caduque car décrédibilisée. A travers une expérimentation géographique, les
conditions de mise en place de cette ingénierie ont pu être mises en évidence par la
recherche.
* Ecole des Mines de Paris.
Revue POLITIQUES ET MANAGEMENT PUBLIC, Volume 18, n° 4, décembre 2000.
© Institut de Management Public - 2000. 92 FrédériquePALLEZ
L'introduction du chiffre et de la mesure dans le secteur public fait partie d'une vague
de fond déjà ancienne. Associée à l'idée de modernisation, elle s'appuie sur une
pratique communément répandue dans les entreprises, et un corpus théorique
maintenant bien constitué mettant en avant la force de la quantification en matière de
conformation des comportements dans les organisations. Il n'est d'ailleurs pas
nécessaire que ces quantifications soient conçues explicitement en terme d'outil de
mesure de la performance, pour produire des effets par la connaissance qu'elles
produisent, et le poids des jugements qui y sont souvent associés.
Dans l'administration, si les quantifications monétaires sont largement répandues,
pour cause d'allocation budgétaire, l'activité physique des unités a, pour l'instant,
donné lieu à de moindres développements, en raison du tabou que représentait
souvent une mesure de la performance. Et ce, d'autant plus que l'activité concernée
semblait a priori rebelle à la quantification. A cet égard, le monde de la justice, comme
celui de la recherche ou de la culture paraissent impossible à enfermer dans le carcan
du chiffre, sous peine de les dénaturer.
Et pourtant, les nécessités de la rigueur budgétaire, de l'équité et de l'efficacité
poussent inéluctablement les responsables administratifs dans cette direction. C'est
ainsi que le Ministère de la Justice a demandé à une équipe de chercheurs de l'Ecole
des Mines de l'aider à construire un outil de mesure de la charge de travail des
magistrats dans les tribunaux de grande instance (TGI).
Cette recherche^, qui a duré plus de trois ans (entre 1993 et 1996), a été riche
d'enseignements sur le thème des relations entre "chiffres et lettres' dans
l'administration, et c'est sur cette expérience singulière, bien que fortement
concordante avec d'autres réflexions de la recherche en gestion, que nous nous
appuierons dans ce papier pour montrer quels types de légitimité doivent être
construits, d'une part pour élaborer un modèle quantifié de l'activité, qui soit
acceptable par les acteurs, d'autre part pour l'utiliser en routine dans un processus
administratif.
Nous essaierons de montrer que, si l'on a l'habitude de négliger la phase d'insertion
de l'outil, ou du moins de la considérer comme relevant seulement de l'habileté
politique et de la négociation, il nous semble qu'il y a en fait une véritable ingénierie à
mettre en place à ce stade, permettant in fine le retour des chiffres vers les lettres,
c'est-à-dire des paramètres quantifiés vers le discours ordinaire, condition ultime pour
que le processus ait été producteur d'une connaissance • et, sans doute aussi, d'une
justice • accrues.
Dans un premier temps, nous présenterons succinctement les objectifs recherchés et
le modèle d'évaluation de la charge de travail, pour montrer comment, par son mode
d'élaboration, et par sa structure, cet outil fut construit pour être reconnu par les
magistrats. Dans les deux parties suivantes, nous analyserons les deux types de
1 La recherche a été menée conjointement par l'auteur et par François Engel, professeur et chercheur à l'Ecole
des Mines. On en trouvera une analyse plus détaillée dans (Engel et Pallez, 1 997). la mesure dans un service public régalien. 93 De
Peut-on et faut-il quantifier la charge de travail des magistrats ?
légitimité auxquels il tenta de répondre : légitimité dans la représentation ; légitimité
dans l'utilisation, pour conclure sur le processus d'ensemble.
La modélisation Avant de présenter les principales caractéristiques de la modélisation effectuée, et le
de l'activité des mode d'élaboration, il faut évidemment préciser la nature de la demande de la
magistrats Chancellerie, qui orientait la construction de l'outil, et les principaux traits de
fonctionnement de l'institution judiciaire, qui justifient les partis retenus pour la
modélisation.
La demande de la Chancellerie
Les objectifs de l'étude confiée aux chercheurs du CGS, tels qu'ils étaient formulés
par la Sous-Direction à l'Organisation Judiciaire du Ministère de la Justice, étaient au
départ les suivants :
- mettre au point des outils d'évaluation de la charge de trava

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