L Allemagne et son émigration - article ; n°4 ; vol.20, pg 453-466
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Description

Politique étrangère - Année 1955 - Volume 20 - Numéro 4 - Pages 453-466
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1955
Nombre de lectures 28
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

C. L. Lang
L'Allemagne et son émigration
In: Politique étrangère N°4 - 1955 - 20e année pp. 453-466.
Citer ce document / Cite this document :
Lang C. L. L'Allemagne et son émigration. In: Politique étrangère N°4 - 1955 - 20e année pp. 453-466.
doi : 10.3406/polit.1955.2574
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1955_num_20_4_2574L'ALLEMAGNE ET SON ÉMIGRATION
L'antisémitisme hitlérien n'était qu'un aspect du programme néfaste
du national-socialisme, un maillon de la chaîne des conceptions racistes,
antidémocratiques, anticivilisatrices, inhumaines et de guerre à outrance.
L'antisémitisme fut pourtant la première manifestation de la volonté rétro
grade du régime hitlérien. Par conséquent, la tentative de réparation des
actions antisémites hitlériennes envers les survivants est aujourd'hui pour
l'Allemagne de Bonn un problème de justice, de morale et d'éducation
civique dont la solution permettra d'évaluer la contribution de l'Allemagne
fédérale à la communauté des nations civilisées.
Au moment de l'arrivée d'Hitler au pouvoir, le Reich comptait à peine
600 000 israélites, soit moins de 1 p. 100 de la population allemande.
Vers le 1er avril 1933, jour du boycottage des commerçants israélites, le
gouvernement national-socialiste commença l'exécution de son programme
visant à l'« épuration des Juifs du Reich», d'abord par le renvoi des fonc
tionnaires et magistrats « non aryens » et par l'exclusion des Juifs de la
presse, des services publics et du barreau.
Le judaïsme allemand, profondément enraciné dans la vie allemande,
avait une structure professionnelle spécifique. Plus de la moitié de la popul
ation active juive travaillait dans le commerce et l'industrie. Les Juifs
avaient particulièrement réussi, entre autres, dans l'exportation et l'import
ation, les banques, les assurances, les industries du vêtement et de la
chaussure, les grands magasins, les éditions et la production cinémato
graphique. D'après les statistiques de l'État de Prusse, de loin le plus grand
des « pays » allemands, élaborées en 1 925, 26 p. 1 00 des avocats,
15 p. 100 des médecins et dentistes, 9 p. 100 des journalistes et hommes de
lettres allemands appartenaient à la religion juive. Les Juifs étaient encore
particulièrement nombreux parmi les professeurs et chargés de cours des
universités (1 400 pour le Reich, y compris les savants engagés dans la
recherche pure), parmi les ingénieurs, les pharmaciens, les juges et pro
cureurs, les musiciens, artistes et metteurs en scène, et les agents en bre- C. L LANG 454
vets. Le nombre des étudiants et licenciés juifs était également très consi
dérable.
L'intensification des mesures antisémites fit émigrer environ 300 000 Juifs
allemands jusqu'au début de la deuxième guerre mondiale. A la fin de la
guerre, on comptait en Allemagne à peine 1 5 000 Juifs survivants, dont
quelques milliers de Juifs allemands. Plus de 200 000 ont donc été tués
par les nazis, sans compter ceux des émigrés qui, dans les pays occupés
par les ont été capturés et mis à mort.
Les émigrés juifs, auxquels s'ajoutaient quelques milliers d'hommes poli
tiques, intellectuels et militants antinazis, se sont dispersés à travers le
monde : plus de la moitié ont trouvé asile en Amérique, dont 140 000 aux
États-Unis; Israël en a recueilli environ 60000, la Grande-Bretagne 45000,
l'Australie 10 000, l'Afrique du Sud 7 000, et en France, pays d'asile et
surtout, de transit pour un grand nombre d'émigrants se rendant outre-mer,
on en compte environ 7 000 à l'heure actuelle.
Les émigrés de la première période de la dictature hitlérienne pouvaient
encore emmener une partie de leurs biens ; ceux gagnant l'étranger dans
la dernière année avant la guerre s'expatriaient avec 10 marks en poche.
Les réfugiés, qui avaient appartenu pour la plupart à la classe moyenne,
étaient brutalement arrachés à leur cadre de vie habituel et obligés d'ac
complir un rude effort de réadaptation. Beaucoup d'entre eux ont sombré
dans la misère.
Au début, les émigrés ont rencontré dans leurs pays d'accueil des
difficultés exceptionnelles, puisque le monde occidental sortait à peine delà
crise économique. Ils ne pouvaient profiter d'emblée des connaissances
et expériences acquises dans leur pays, qui, dans les domaines de la tech
nique, de l'organisation, de la science, et dans certains arts, avait été un des
plus avancés du monde. Dans les pays d'accueil, on ne comprenait pas
encore, au début de l'émigration, quels avantages on pouvait tirer de l'af
flux d'hommes de valeur, tous formés et expérimentés dans leurs profes
sions. Dans les affaires, les sciences, les techniques et dans tout autre
domaine, ils amenaient nécessairement des idées nouvelles à l'étranger,
et la confrontation de ces idées avec les conceptions traditionnelles du pays
d'asile devait amener un progrès certain — ce qui a été amplement prouvé
par la suite.
Dans les pays d'accueil, beaucoup croyaient avoir affaire à des Allemands
tout court, leurs ennemis de la première guerre mondiale et leurs adver
saires de demain. Ce n'est qu'avec l'agressivité accrue d'Hitler, et notam
ment avec l'intensification des mesures antisémites allant jusqu'au massacre
de milliers de Juifs, qu'on apprenait à discerner les Allemands des Juifs
d'origine allemande, premières victimes du national-socialisme. On admit L'ALLEMAGNE ET SON ÉMIGRATION 455
alors les émigrés comme alliés dans la lutte contre le Reich totalitaire.
Cet allié, en dépit de ses effectifs réduits, s'avérait, dans la conduite de la
guerre scientifique au moins, d'une efficacité particulière.
Une fois installés, les spécialistes des branches d'activités éminemment
internationales, tels qu'exportateurs et importateurs, assureurs, agents en
brevets et certains banquiers, ont commencé à travailler avec quelque succès,
notamment en Angleterre. La deuxième guerre mondiale et l'interruption
totale du commerce international privé a empêché la continuation de leurs
activités. Lorsque, sept ans plus tard, les échanges reprenaient, ces émigrés
étaient pour la plupart trop âgés et financièrement trop affaiblis pour
s'intégrer à nouveau dans les circuits internationaux.
Quelques industriels se sont établis tôt en Angleterre dans les régions
qui leur furent assignées, c'est-à-dire dans les contrées particulièrement
touchées par le chômage, et ont réussi à former une centaine d'entreprises
nouvelles dont plusieurs occupaient bientôt chacune plus de 1 00 ouvriers.
Les pelletiers et fourreurs de Leipzig s'établirent à Londres, qui devint
rapidement le centre international le plus important pour le commerce
de la fourrure ; la confection pour dames, émigrée de Berlin, et les tanneurs
d'Offenbach se regroupèrent également en Angleterre et enlevèrent bientôt
à leurs concurrents allemands les marchés de la Scandinavie, de la Hollande,
de la Suisse et du Commonwealth britannique. Dans certains pays, la
fabrication de jouets, d'articles électriques et d'autres spécialités d'export
ation, jusqu'alors allemandes, reprit grâce aux initiatives des réfugiés et
remplaça sur les marchés nationaux la marchandise allemande. Pour
nombre d'industriels émigrés outre-mer, la guerre, comportant la coupure
de leur pays d'accueil des importations habituelles en provenance de
l'Europe ou des États-Unis, permit la reprise de leurs activités dans des
conditions favorables. Ainsi, des industries de transformation, dans la
mécanique, le textile, la chimie, etc., se constituèrent en Israël, en Amérique
et Afrique du Sud, en Australie et au Canada. Lorsque le commerce inter
national reprit peu à peu après la guerre, ces entreprises étaient, pour la
plupart, déjà suffisamment consolidées pour pouvoir soutenir la compétit
ion internationale. D'autres industriels, ingénieurs et techniciens, établis
dans des pays fournissant un gros effort de. guerre, sortirent de l'oisiveté
forcé

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