L Angleterre et l Europe - article ; n°1 ; vol.30, pg 22-34
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Description

Politique étrangère - Année 1965 - Volume 30 - Numéro 1 - Pages 22-34
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1965
Nombre de lectures 25
Langue Français

Extrait

Gladwyn
L'Angleterre et l'Europe
In: Politique étrangère N°1 - 1965 - 30e année pp. 22-34.
Citer ce document / Cite this document :
Gladwyn . L'Angleterre et l'Europe. In: Politique étrangère N°1 - 1965 - 30e année pp. 22-34.
doi : 10.3406/polit.1965.2250
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1965_num_30_1_2250L'ANGLETERRE ET L'EUROPE
Avant de traiter le sujet qui nous intéresse, je ferais peut-
être aussi bien d'avouer tout de suite que je ne suis pas un
Européen de la première heure, mais plutôt un converti. En
1947, ainsi qu'en 1948, j'appartenais au gouvernement ;
c'est pourquoi, quelles que fussent mes opinions personnell
es, il m'incombait, en dernier ressort, de m'aligner loyal
ement sur les positions de mes supérieurs politiques. A cette
époque, le gouvernement travailliste britannique se montrait
extrêmement méfiant à l'égard de toute initiative visant à
introduire le principe de la supranationalité dans les ques
tions européennes, et c'est ainsi, en grande partie grâce aux
efforts du regretté M. Bevin, que le Conseil de l'Europe dut
d'être fermement ancré sur le principe contraire de l'unani
mité ; ce principe devait, bien entendu, être repris au sein
d'organismes comme l'OECE, et même l'OTAN.
Cette attitude était assez compréhensible bien que sans
doute erronée rétrospectivement. La Grande-Bretagne n'avait
pas été occupée ou battue comme la plupart des nations euro
péennes, et bien que très affaiblie par la guerre, se croyait
néanmoins, avec quelque raison, l'une des trois puissances
victorieuses. En 1947 et 1948, elle était en outre renforcée non
seulement d'un Commonwealth, mais encore d'un immense
empire. A ce stade, aucun gouvernement n'aurait donc pu
convaincre le peuple britannique de s'intégrer au sein d'une
quelconque fédération européenne sur un pied d'égalité avec
la France, l'Italie et à brève échéance avec l'Allemagne fédé
rale, son ancienne ennemie.
Sous l'influence de Winston Churchill, les conservateurs
s'étaient bien plus ou moins engagés, à la conférence de La L'ANGLETERRE ET L 'EUROPE 23
Haye de 1947, à participer à l'armée européenne, mais à leur
arrivée au pouvoir, quatre ans plus tard, on s'aperçut qu'il
n'en était plus question. Leur position en général demeura
d'ailleurs conforme à celle de leurs prédécesseurs quant à
l'acceptation de tout caractère supranational dans les ques
tions européennes. Cette position ne commença à s'infléchir,
et encore à un degré presque insignifiant, qu'après la conclu
sion et la signature du Traité de Rome, en 1957, auquel ils
ne s'attendaient guère. Ce n'est d'ailleurs que deux ans plus
tard, lorsqu'il s'avéra que la Communauté Economique Euro
péenne fonctionnait réellement, qu'ils se rendirent compte
qu'elle avait acquis un caractère permanent et qu'elle repré
senterait à la longue une puissance considérable aux portes
de la Grand-Bretagne.
En ce qui me concerne, je pensais avant 1950 que le prin
cipe de supranationalité n'avait que peu de chances d'être
adopté, au plein sens du terme, que la souveraineté nationale
l'emporterait et qu'au mieux, on ne pouvait réellement
escompter qu'une association étroite de nations indépendant
es, protégées de la menace soviétique par la puissance écra
sante de l'Amérique. Je devais cependant changer bientôt
d'avis. Je me dis qu'à tout le moins, la Grande-Bretagne
aurait pu tenter de participer à la Communauté Charbon-
/Vcier suggérée par Robert Schuman en mai 1950 ; par la
suite, j'acquis de plus en plus la conviction de la nécessité
de constituer une Communauté européenne dont ferait partie
là Grande-Bretagne.
Juste avant d'abandonner mes fonctions d'ambassadeur en
France, je prononçai une allocution dans laquelle j'affirmais
que la CEE et l'AELE ne pouvaient manquer de se réunir,
que la configuration politique mondiale de l'époque imposait
de toute évidence l'existence d'une Europe unie sous une
forme quelconque, qu'il était aberrant de faire reposer l' Al
liance (comme on le préconisait alors dans les milieux offi
ciels français) sur la soi-disant « troïka » formée par l'Europe
occidentale réunifiée, la Grand-Bretagne accompagnée de son 24 LORD GLADWYN
Commonwealth et l'Amérique du Nord, par suite de l'inca
pacité de la Grande-Bretagne de représenter, dans ce cas, un
associé à part entière, et enfin que toute tentattive de créer
une « troisième force » européenne sans sa participation se
révélerait peu efficace et certainement périlleuse. En conclus
ion, la Grande-Bretagne devait se rallier à l'Europe occi
dentale.
De retour en Angleterre, ayant repris mes activités personn
elles, je prononçai d'autres discours beaucoup plus tranchés
et préconisais franchement l'entrée de la Grande-Bretagne
dans le Marché Commun. En mai 1961, je lançai la campa
gne du Commun à cette fin, et notre déclaration
recueillit les signatures d'un grand nombre de responsables
et de dirigeants dans toutes les sphères d'activité de notre
pays. Deux mois plus tard, le gouvernement se rangeait à nos
vues et posait sa candidature. Ce fut un immense progrès.
En effet, le gouvernement britannique renonçait ainsi à
toute une doctrine, épousée avec bonheur par la Grande-Bre
tagne durant des siècles, et adoptait une ligne opposée visant
à s'associer avec ses voisins d'Europe occidentale au sein
d'une forme d'union qui comporterait certainement un él
ément de supranationalité. Je ne pense pas, pour ma part, que
le sens de cette révolution, tout à fait extraordinaire, fut
apprécié à sa juste valeur dans les milieux d'Europe continent
ale et surtout en France. Durant les dix-huit mois suivants,
notre campagne eut pour objet de gagner des partisans à la
cause de l'idée européenne, d'attirer l'attention sur les consé
quences politiques de notre entrée au sein de la Communauté,
de réfuter les arguments de l'opposition, et de faire de notre
mieux pour appuyer les efforts du gouvernement.
Ce déploiement d'activité fut brutalement stoppé par le
veto prononcé par le Président de la République française le
23 janvier 1963 à l'endroit de l'admission de la Grande-Bret
agne. Cette mesure constitua une véritable tragédie pour nos
deux pays, car à mon sens, elle mettait fin (temporairement
je l'espère) à une tentative qui visait à faire reconsidérer par la l/ ANGLETERRE ET LE IJ ROPE 25
Grande-Bretagne sa politique antérieure à l'égard de l'Europe
et à lui faire rallier la Communauté sur un pied d'égalité (et
non de supériorité) avec les principales puissances européenn
es. Le veto français, de plus, détruisait la seule doctrine
cohérente concernant l'avenir de l'Alliance atlantique, qui
consistait à faire reposer celle-ci sur deux « piliers » de
même importance : l'Amérique du Nord et l'Europe occiden-
iale ; rien dans cette conception ne semblait pourtant aller
à l'encontre des intérêts français ou britanniques.
C'est la raison pour laquelle, malgré les deux dernières
années difficiles durant lesquelles la Grande-Bretagne a semb
lé se désintéresser de l'Europe et a tenté de s'associer à
l'Amérique en compagnie de certains autres Etats européens
(possibilité qui n'est pas encore exclue), j'ai maintenu les
activités de mon organisation en vue de définir plus large
ment la forme d'association politique avec l'Europe occident
ale que la Grande-Bretagne et ses partenaires continentaux
pourraient accepter le moment venu. Puisque, de toute évi
dence, le veto français avait été motivé par des impératifs
purement politiques, il s'agissait de savoir s'il existait une
réponse politique satisfaisante dans l'ensemble, au cas où les
circonstances viendraient à se modifier.
L'organisation pro-européenne que je prés

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