L Europe et ses populations excédentaires - article ; n°2 ; vol.19, pg 143-156
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L'Europe et ses populations excédentaires - article ; n°2 ; vol.19, pg 143-156

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Description

Politique étrangère - Année 1954 - Volume 19 - Numéro 2 - Pages 143-156
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1954
Nombre de lectures 10
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Robert Rochefort
L'Europe et ses populations excédentaires
In: Politique étrangère N°2 - 1954 - 19e année pp. 143-156.
Citer ce document / Cite this document :
Rochefort Robert. L'Europe et ses populations excédentaires. In: Politique étrangère N°2 - 1954 - 19e année pp. 143-156.
doi : 10.3406/polit.1954.2625
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1954_num_19_2_2625L'EUROPE ET SES POPULATIONS EXCÉDENTAIRES
Lorsque les dix-huit gouvernements représentés à Bruxelles en novembre
et décembre 1951 à l'hôtel Atlanta adoptèrent la Résolution qui porte le
nom de la capitale belge et créèrent l'organisation alors nommée Comité
intergouvernemental provisoire pour les Mouvements migratoires d'Eu
rope, un acte important, sous une apparence modeste, venait d'être fait
dans un domaine jusqu'alors trop négligé. Le problème des populations
excédentaires de l'Europe — problème qui, entre les deux guerres, avait
joué si puissamment contre la paix, puisqu'il avait servi de base à la théorie
de l'espace vital et de prétexte à une politique d'agression — venait en effet
d'entrer réellement dans la voie de l'organisation et de la coopération inter
nationales. Il n'y entrait sans doute que sous une forme provisoire à titre
d'expérience, avec des moyens limités, en dehors des Nations Unies et en
quelque sorte par la petite porte, sous le seul aspect de l'émigration outre
mer, mais il y entrait cependant, et par là le problème se trouvait porté, au
même titre que l'avait été celui des personnes déplacées, celui des réfugiés
arabes en Palestine, ou celui de la reconstruction et de l'assistance en Corée,
au rang des grands problèmes internationaux jugés dignes d'un effort
international.
Le nom de Bruxelles restera associé à ce texte dont l'importance réelle
dépasse de loin l'apparence et les dispositions modestes. On a parfois cri
tiqué cette Résolution en disant en particulier qu'on ayait alors commis
l'erreur de ramener toute la question de l'émigration outre-mer à une
affaire de transports. Mais c'était en un temps où beaucoup de gouverne
ments hésitaient encore soit sur la nécessité de l'effort à entreprendre, soit
sur le type d'organisation le mieux qualifié pour l'entreprendre. Entre le
projet présenté à Naples par le B. I. T. et ce qu'on appelait alors le projet
américain ou projet de l'O. I. R., les différents gouvernements, et dans plu
sieurs pays les autorités nationales elles-mêmes, d'un côté les Affaires
étrangères, de l'autre les ministères du Travail, se trouvaient souvent
divisés. On reprochait généralement au premier projet son ambition, tout ROBERT ROCHEFORT 144
en soulignant qu'il n'avait pas l'appui des Etats-Unis ; au second on repro
chait sa modestie. Les organisations et instances internationales 0. E. C. E.,
Conseil de l'Europe, pour n'en citer que deux, se rangeaient elles-mêmes
d'un côté ou de l'autre, et l'on put craindre ce que M. Giusti del Giardino
a appelé à l'époque la « guerre des organisations ». En fait, l'espoir de voir
aboutir après l'échec de Naples le mince projet présenté à Bruxelles, projet
qui représentait pour ceux qui ont bien voulu le comprendre alors un
essai de mise en œuvre de la solidarité internationale dans le domaine des
migrations outre-mer, ne tenait vraiment qu'à un fil ; c'est miracle que celui-
ci ne se soit pas brisé.
Je n'ai pas l'intention de présenter une description systématique du
problème des populations excédentaires de l'Europe. Ce serait trop long
et fastidieux, car ce problème, comme tous les problèmes posés à l'Europe,
est infiniment complexe. Tout est toujours très compliqué chez nous, Euro
péens, et il est difficile de ramener ce problème à quelques notions simples.
Il s'agit en effet d'un problème économique et d'un problème humain,
d'un problème humain et d'un problème politique, d'un poli
tique et d'un problème social, d'un social et d'un problème démog
raphique. II se pose en Europe, et il se pose à l'Europe. II se pose à l'Europe
et il se pose au monde libre tout entier. Il est actuel et il est ancien. Il
affecte ici les Latins, les Méditerranéens ; il affecte également l'Allemagne
et les Pays-Bas. Il est hétérogène dans les éléments qui le composent,
divers dans ses origines ; ici, il s'agit surtout d'éléments démographiques
et là d'événements historiques ; divers également dans ses solutions. Si
même nous n'en retenons qu'une, celle que le Comité des Migrations a
pour tâche de mettre en œuvre, c'est-à-dire l'émigration vers les pays
d'outre-mer, nous aurons vite fait d'apercevoir que cette solution soulève
une masse extraordinaire de questions avec d'un côté et de
l'autre l'immigration et toutes les perspectives qui s'ouvrent sur l'ensemble
du monde.
Il ne saurait donc s'agir ici que de proposer quelques réflexions, de
soumettre quelques idées non pas à proprement parler comme le ferait un
spécialiste, un expert, mais comme peut le faire quelqu'un qui s'est trouvé
associé sur le plan français et sur le plan international à l'évolution de ce
problème depuis quelques années (1).
Georghiu, l'auteur célèbre de « La vingt-cinquième heure », citait à pro
pos du problème des réfugiés un mot du grand philosophe danois Kirkegaard,
qui disait à peu près, voici cent ans, que toute chose tend vers sa parodie
(I) M. Robert Rochefort, qui fut le chef du cabinet de M. Robert Schuman, était le délégué
de la France a la Conférence cle Bruxelles. Il est actuellement conseiller diplomatique auprès du
Comité intergouvememental pour les migrations européennes. POPULATION EUROPÉENNE 145
et que la parodie finale de toute chose serait la politique, la politique natu
rellement entendue au sens le moins noble, stade auquel selon Georghiu
nous sommes arrivés. Je voudrais reprendre ce mot d'une façon plus large :
ce n'est pas seulement vers la parodie de la politique que tend toute chose,
c'est aussi vers la parodie des abstractions, la plus simple et la plus déri
soire étant celle des chiffres. Sans doute ne saurait-il en être autrement
dans un monde de plus en plus peuplé dont le professeur Gemaehling rap
pelait à Liège l'an passé qu'il a connu au XIXe siècle un accroissement égal
à celui que connut la terre en 500 000 ans : un monde qui compte près de
2 milliards et demi d'habitants et qui atteindrait selon certains experts
près de 4 milliards à la fin du siècle, et ceci alors que parallèlement se déve
loppent une connaissance de l'homme, une prise de conscience de l'homme
comme il n'y en a jamais eu en profondeur et en étendue. Ce ne sont pas
seulement les phénomènes naturels, ceux de la physique par exemple, qui
échappent de plus en plus à nos perceptions directes, de telle sorte que l'on
ne peut plus appréhender la réalité que par le moyen d'instruments compli
qués et de calculs abstraits ; ce sont aussi les phéomènes humains, l'instr
ument compliqué étant ici dans certains cas l'organisation internationale
(ou l'ensemble de ces organisations), et, si notre problème n'échappe pas
plus que d'autres à cette nécessité, ne risque-t-il pas, perdu au milieu de ces
chiffres vertigineux, de nous laisser indifférents ? Essayer de dépasser cette
abstraction des chiffres, de dégager quelques-unes des idées qui per
mettent de le saisir, de proposer quelques éléments d'une doctrine, d'une
philosophie de ce problème, tel sera le but de mon exposé.
Mais, avant de traiter le sujet, je voudrais évoquer l'œuvre de l'O. I. R.
et lui rendre l'hommage qui lui revient. Je me bornerai, faute de place,
à ce qui a trait à l'œuvre accomplie par l'O. Iv R. dans le domaine de
l'émigration. A cet égard, je ne puis mieux faire que de rappeler ce que
j'avais eu l'honneur de déclarer en tant que Président du Conseil général
de l'O. I. R., représentant l'organisation lors de la cérémonie du départ du

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