La crise nigériane - article ; n°5 ; vol.35, pg 517-546
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Description

Politique étrangère - Année 1970 - Volume 35 - Numéro 5 - Pages 517-546
L'effondrement du Biafra est un échec politique qui s'est traduit par un échec militaire. Les nombreux groupes ethniques du Nigeria ne peuvent cohabiter à l'avenir, à l' intérieur d'une Fédération, qu'en renonçant à la lutte pour le pouvoir central. L'auteur souhaite que s'établissent les fondements d'une entreprise communautaire : un système où le chef de l'exécutif représenterait l'ensemble de la nation, un Sénat, les intérêts des Etats, une Assemblée nationale, la politique des partis. L'Afrique n'a pas acquis son visage définitif : une plus grande connaissance du continent peut amener ses habitants à souhaiter une unification qui pourrait avoir pour point de départ le Nigeria, à condition que celui-ci ne tente pas d'absorber ses voisins.
30 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1970
Nombre de lectures 37
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Raph Uwechue
La crise nigériane
In: Politique étrangère N°5 - 1970 - 35e année pp. 517-546.
Résumé
L'effondrement du Biafra est un échec politique qui s'est traduit par un échec militaire.
Les nombreux groupes ethniques du Nigeria ne peuvent cohabiter à l'avenir, à l' intérieur d'une Fédération, qu'en renonçant à la
lutte pour le pouvoir central. L'auteur souhaite que s'établissent les fondements d'une entreprise communautaire : un système où
le chef de l'exécutif représenterait l'ensemble de la nation, un Sénat, les intérêts des Etats, une Assemblée nationale, la politique
des partis.
L'Afrique n'a pas acquis son visage définitif : une plus grande connaissance du continent peut amener ses habitants à souhaiter
une unification qui pourrait avoir pour point de départ le Nigeria, à condition que celui-ci ne tente pas d'absorber ses voisins.
Citer ce document / Cite this document :
Uwechue Raph. La crise nigériane. In: Politique étrangère N°5 - 1970 - 35e année pp. 517-546.
doi : 10.3406/polit.1970.2085
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1970_num_35_5_2085LA CRISE NIGÉRIANE
Réflexions sur l'échec du Biafra
et l'avenir politique du Nigeria
par Raph UWECHUE (1)
L'effondrement du Biafra est un échec politique qui s'est traduit
par un échec militaire.
Les nombreux groupes ethniques du Nigeria ne peuvent
cohabiter à l'avenir, à l'intérieur d'une Fédération, qu'en renonçant
à la lutte pour le pouvoir central. L'auteur souhaite que s'établis
sent les fondements d'une entreprise communautaire : un système
où le chef de l'exécutif représenterait l'ensemble de la nation,
un Sénat, les intérêts des Etats, une Assemblée nationale, la
politique des partis.
L'Afrique n'a pas acquis son visage définitif : une plus grande
connaissance du continent peut amener ses habitants à souhaiter
une unification qui pourrait avoir pour point de départ le Nigeria,
à condition que celui-ci ne tente pas d'absorber ses voisins.
Qu'au Nigeria la guerre civile ait essentiellement été l'exten
sion militaire d'une longue lutte politique, lutte pour le pou
voir depuis longtemps engagée entre diverses forces antagon
istes, qu'il se soit en quelque sorte agi d'une explosion due à
la charge trop forte, accumulée pendant des années, d'intérêts
rivaux, politiques, économiques et sociaux, c'est sans doute l'un
des rares points sur lesquels s'accordent les spécialistes des
questions africaines. En tant qu'entité politique, avec ses quel
que deux cent cinquante groupes ethniques pour une populat
ion de soixante millions d'habitants, le Nigeria pourrait être
défini comme un conglomérat régional africain de fabrication
(1) Historien, ancien diplomate nigérian. A représenté le Nigeria, puis le Biafra
à Paris. Auteur de : « Reflexions on the Nigerian civil war », 1969, A.P.C. New-
York, Consultant à liJnesco sur le projet : L'histoire générale de l'Afrique. 518 UWECHUE
anglaise. A l'intérieur de ses frontières : environ la moitié de
la population totale de l'Afrique de l'Ouest et presque autant
de variétés ethniques qu'il en existe dans l'ensemble des autres
XIXe pays de siècle cette cette région ancienne du continent colonie noir. britannique Depuis a qu'au été constituée, début du
et aussi longtemps que le pouvoir colonial s'est maintenu, les
forces politiques autochtones sont demeurées comme des vol
cans en sommeil. Ces volcans sont entrés en activité avec l'a
pproche de l'indépendance politique, ses séductions, la promesse
du pouvoir politique. Si bien que, une vingtaine d'années avant
la guerre civile, une lutte sévère était déjà engagée autour de
l'héritage britannique. Lutte qui mettait en présence des él
éments très divers : dissemblances d'origine ethnique, de reli
gion, de culture, d'inégalités de développement économique
entre les diverses parties du pays.
Durant toute cette période, la lutte revêt l'allure d'une course
au pouvoir toujours plus effrénée, ces divers facteurs jouant
le rôle tantôt de causes, tantôt d'instruments. Les politiciens se
complaisaient aux jeux politiques, avant tout préoccupés d'af
fermir leur propre autorité ou celle de leur région, le plus sou
vent sans souci de l'intérêt national. Qui plus est, les dimensions
trop inégales conférées aux territoires régionaux de l'ancienne
fédération interdisent toute possibilité d'alternance dans la di
rection effective du pays. Selon toute apparence, le contrôle
du gouvernement central se trouve à jamais dévolu au N.P.C.
(Northern People's Congress), organisation teintée, son nom
l'indique, d'un puissant chauvinisme et tenant sous son emprise
la vaste et prépondérante région du Nord. Nigérians éclairés
et nationalistes en général, hommes politiques progressistes en
particulier, tous ressentent la situation ainsi créée comme une
frustration. De mieux en mieux informés, les Nigérians expri
ment de plus en plus le désir de voir changer le système et les
méthodes du gouvernement. Voilà essentiellement ce qui moti
vera l'action des jeunes officiers idéalistes du matin du 15 jan
vier 1966. Et ce coup d'Etat plonge l'armée au cœur du combat
politique, combat qui, dans sa nature et sa dimension, ne tar- NIGERIA 519
dera pas à se transformer en un gigantesque conflit : la guerre
civile.
L'effondrement du Biafra, dans les premiers jours de janvier
1970, met brutalement fin à cet aspect militaire du drame nigé
rian. Mais la fin de la guerre n'a pas effacé les causes d'un
conflit beaucoup plus ancien. Les problèmes socio-politiques
restent entiers.
Nous nous proposons ici, d'abord d'examiner pour quelles
raisons le Biafra a échoué dans sa tentative d'obtenir la sécurité
des Ibo, ensuite de rechercher quelles leçons peuvent être tirées
de cette expérience pour servir à l'édification d'un avenir poli
tique mieux assuré.
I - GENESE D'UN ECHEC
Culte de la personnalité
On admet trop souvent - et sans doute est-ce le mode d'expli
cation le plus facile - que l'échec du Biafra était inévitable.
Le conflit mettant aux prises le géant Nigeria et l'enclave ibo,
la défaite n'était-elle pas une simple question de temps ? Il est
vrai que le Nigeria doit sa victoire à sa prépondérance physique-
sa population et ses ressources - ainsi qu'à un soutien inter
national qui va de préférence à un Etat souverain pleinement
reconnu. A regarder les choses de plus près, on n'a pourtant
pas de peine à découvrir que ces avantages étaient surtout d'or
dre militaire et qu'il a fallu bien du temps au Nigeria pour les
exploiter à fond. L'échec du Biafra est, avant tout, un échec
politique qui, le moment venu, s'est converti en échec militaire.
Quant à l'échec politique, c'est celui d'un leadership qui, en
premier lieu, n'a pas su exploiter en temps opportun les nomb
reuses faiblesses du Nigeria d'avant-guerre et qui, ensuite, du
rant les hostilités, s'est révélé inapte à ajuster sa politique aux
réalités concrètes auxquelles il était confronté.
Il est des historiens pour qui la personnalité d' Adolf Hitler
a, plus que tout autre facteur, déterminé le destin de l'Aile- 520 UWECHUE
magne au cours de la deuxième guerre mondiale, tout comme
celle de Winston Churchill a, selon eux, déterminé le destin
de la Grande-Bretagne. Hypothèse d'école, mais par analogie
on peut dire que, dans la guerre civile nigériane, la personnalité
d'Odumegwu Ojukwu a, plus que tout autre facteur, déterminé
le conflit en général, son issue en particulier. L'examen de ses
méthodes fait apparaître un homme accordant plus d'attention
à la politique qu'à l'obligation réelle de combattre. Energique,
tenace, il impose sa propre image à l'effort biafrais et, tout au
long, la lutte portera surtout le reflet de sa force, de ses fai
blesses aussi.
Cette personnalisation du conflit et le mortel brouillard d'illu

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