La politique étrangère du parti socialiste - article ; n°2 ; vol.40, pg 177-199

Jacques Huntzinger

Description

Politique étrangère - Année 1975 - Volume 40 - Numéro 2 - Pages 177-199
23 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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• Publié par: POLITIQUE_ETRANGERE
• Publié le: 01 janvier 1975
• Nombre de lectures: 95
• Langue: Français
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Extrait

Jacques Huntzinger
La politique étrangère du parti socialiste
In: Politique étrangère N°2 - 1975 - 40e année pp. 177-199.
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Huntzinger Jacques. La politique étrangère du parti socialiste. In: Politique étrangère N°2 - 1975 - 40e année pp. 177-199.
doi : 10.3406/polit.1975.5956
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1975_num_40_2_5956LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE
DU PARTI SOCIALISTE *
par Jacques HUNTZINGER
Introduction
II est compréhensible que l'on s'interroge aujourd'hui sur le
contenu du programme de politique étrangère du Parti socialiste.
La première raison tient au fait que ce dernier est susceptible
d'exercer des responsabilités gouvernementales dans la prochaine
décennie, ce qui n'était pas le cas jusqu'ici depuis l'avènement de
la V* République. Il est donc normal que les observateurs politiques
français et étrangers s'intéressent de plus près aux intentions et aux
analyses de ce parti.
La seconde raison réside dans le profond changement intervenu au
sein du socialisme français depuis quelques années. Le Parti social
iste, héritier de la S.F.I.O. et membre de la IP Internationale,
n'a pas cependant le visage que l'on prête en général aux formations
socialistes de l'Europe occidentale. Ayant en quelque sorte renoué
avec la tradition socialiste française, le Parti socialiste, depuis l'im
portant Congrès d'Epinay de juin 1971, s'est attaché à définir et à
poursuivre une stratégie fondée sur la rupture avec le système éco
nomique et social que représente le capitalisme, sur le développe
ment d'un socialisme démocratique non réformiste et sur l'union
avec le Parti communiste français qui est depuis 1920 l'autre bran
che de la gauche française (1).
Ce double visage actuel du Parti socialiste, visage de la continuité
* Une version abrégée de cet article est publiée dans la revue Europa-Archiv
(Bonn).
(1) 11 faut rappeler que les socialistes et les communistes français sont issus du
même parti et ont fait scission au lendemain de la première guerre mondiale, au
Congrès de Tours (1920) à partir de profondes divergences d'appréciation sur
les conséquences à tirer de la révolution soviétique. 178 JACQUES HUNTZINGER
avec la S.F.I.O. et visage de la fidélité retrouvée à la tradition so
cialiste française, va s'exprimer naturellement dans la politique
étrangère du P.S.
En conséquence, cette dernière va être marquée d'une certaine
ambiguïté, ce qui est inévitable et au surplus peut être fécond ; car
il est rare qu'une politique étrangère puisse se permettre d'être « l
inéaire » et mécanique*: les gouvernants n'ont pas le même rapport
avec les acteurs de la société internationale qu'avec ceux de la
société interne, ils doivent forcément tenir compte de contraintes
qui leur sont extérieures et de positions sur lesquelles ils n'ont que
peu d'influence. L'adaptation est donc une grande vertu en politique
étrangère au même titre que l'action.
L'ambiguïté qui caractérise la politique étrangère du Parti social
iste, quant à elle, semble féconde car elle conduit ce dernier à ef
fectuer un vigoureux effort d'analyse, lequel s'est traduit par une
clarification de certaines données essentielles sur lesquelles repose
cette politique étrangère ; le contenu de l'internationalisme social
iste, l'analyse de l'impérialisme et l'approche socialiste de la cons
truction européenne en sont les aspects les plus intéressants. En la
matière, les socialistes ont été tout au long de la IV* emportés par
les événements internes et internationaux.
Or, il est vrai que sur les chapitres de la défense, de la sécurité
collective, des rapports entre les grandes puissances, des rapports
avec les U.S.A. et de la construction européenne, les options de la
IVe République partagées par la S.F.I.O., ont été également celles
du mouvement socialiste de l'Europe occidentale et de la IIe Inter
nationale. Ceci signifie tout simplement que les socialistes européens
se sont trouvés aux prises avec les mêmes éléments que ceux vécus
par la France de 1947 et ont réagi de la même façon. Et, actuelle
ment, les options prises à l'époque demeurent, pour l'essentiel, celles
des socialistes européens. Pour l'essentiel, car précisément, les so
cialistes français ont, quant à eux, amorcé une révision de leur poli
tique étrangère. Cette révision ne s'est pas faite en un jour et elle ne
s'est pas faite sans raisons.
Detente + Opposition = une nouvelle politique étrangère
Les raisons sont simples mais elles ont été déterminantes ; le
développement de la détente internationale et l'achèvement de la PARTI SOCIALISTE 179
décolonisation d'une part, la longue cure d'opposition et la réno
vation consécutive de la S.F.I.O., d'autre part, expliquent la « ré
volution », d'abord silencieuse et mesurée, puis explosive et brutale
du socialisme français à partir des années 60.
Il n'est pas question ici d'en retracer les étapes. Il s'agit simplement
de souligner que les deux facteurs nouveaux de 1962 - détente Est-
Ouest et opposition socialiste au gouvernement - expliquent, à leur
tour, le changement politique des socialistes de la Ve (2).
Le point de départ de cette rescision date de 1962. Quel va en
être le trajet jusqu'à aujourd'hui ?
La radicalisation et le gauchissement du Parti socialiste vont
conduire ce dernier à adopter peu à peu le langage et les concepts
du gaullisme dans le domaine de la politique étrangère, alors même
qu'il est devenu, de façon permanente et incontestable, un parti
d'opposition au gouvernement gaulliste et à ses successeurs. Tel est
le grand paradoxe - purement apparent - de l'évolution des socialistes
français : plus il s'est posé en force d'opposition désireuse de trans
former le système économique, social et politique français, plus il
a capté et utilisé le vocabulaire, les thèmes, voire les angoisses et les
obsessions gaullistes en matière extérieure.
Les données actuelles de la politique étrangère du PS.
« La politique extérieure d'une France en marche vers le sociali
sme sera fondée sur la défense des intérêts légitimes du pays et sur
l'internationalisme ».
Cette formule introduit le programme du Parti socialiste en mat
ière de politique étrangère, dont l'intitulé est le suivant : « un nouv
el internationalisme ». Ce sera adopté lors de la
Convention de Suresnes de 1972 (« Changer la vie », programme de
gouvernement du Parti socialiste).
(2) Naturellement, l'arrêt de la décadence de la S.F.I.O. et la longue entreprise
de renouvellement et de rajeunissement interne amorcé avec les initiatives de
Gaston Defferre en 1963, accélérée par l'élection présidentielle de 1965 et la
F.G.D.S., parachevée par A. Savary (1969) et surtout par F. Mitterrand (Congrès
d'Epinay 1971) permettront au Parti socialiste de se donner les moyens d'élabo
ration d'un programme politique, ce qu'il n'avait jamais pu entreprendre entre
1946 et 1962. 180 JACQUES HUNTZINGER
Le Parti socialiste a organisé depuis 1972 des cadres de réflexion
et d'étude consacrés aux questions internationales (secrétariat aux
relations internationales, Commission de politique étrangère, Comm
ission Tiers-Monde, de la Défense Nationale) et, par
ailleurs, a approfondi et précisé ses choix lors de ses Congrès ou à
l'occasion des grandes campagnes électorales.
Aussi, on peut dire aujourd'hui que le Parti socialiste dispose d'un
ensemble de documents qui constituent, au sens large, son « pr
ogramme international » (3).
La recherche d'un nouvel internationalisme
Le Parti socialiste est, en fait, à la recherche d'une conception des
rapports internationaux et de la société internationale. On constate,
en effet, que l'on retrouve dans le domaine de la politique extérieure,
plus que dans d'autres domaines, les diversités, les ambiguïtés et les
contradictions du