Le nouvel ordre sud-africain en gestation - article ; n°2 ; vol.55, pg 369-387
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Politique étrangère - Année 1990 - Volume 55 - Numéro 2 - Pages 369-387
South Africa's New Order in the Making, by Pierre Mayer
The bell tolled for the old order on the day of Nelson Mandela's liberation, the llth February, 1990. This system had been installed in 1948, following the victory of Afrikaner nationalism over the old Anglophoneelite. It is not impossible that in a few years' time, we might find that South Africa has become one of the best integrated pluralist democracies in the world. A silent revolution in attitudes has sown the seeds of change. But this does not mean that a stormy and tortuous path to democracy can be avoided, even though the problems caused by Soviet interference in the région have disappeared. The outcome is hardly in doubt and chances are excellent for the establishment of majoritarian democracy in the Southern tip of Africa. Will South Africa become a major stabilising factor in Sub-Saharan Africa and develop into an important player in world politics at the outset of the Twenty First Century when geopolitical forces everywhere are undergoing radical change ? This is the vital question.
La libération de Nelson Mandela, le 11 février 1990, a sonné le glas de l'ordre issu, après la dernière guerre, de la victoire des nationalistes afrikaners sur le colonisateur britannique en 1948. Désormais, il n'est même plus exclu que l'Afrique du Sud émerge, d'ici quelques années, comme l'une des démocraties pluralistes les plus intégrées du monde. Historique, l'événement était en germe dans la révolution silencieuse qui se tramait dans la société. II n'en demeure pas moins que l'évolution du pays sera aussi tortueuse que tumultueuse et exacerbée, nonobstant la disparition des ingérences soviétiques régionales qui cabraient les protagonistes. L' issue n'en est cependant pas douteuse ; un nouvel ordre sud-africain a les meilleures chances de s'imposer à la pointe du continent noir. Facteur de stabilité et de paix en Afrique australe et au Sahara, l'Afrique du Sud saura-t-elle et voudra-t-elle s'affirmer comme une pièce maîtresse sur l'échiquier planétaire à l'orée du XXIe siècle, alors que partout les forces de la géopolitique se redistribuent radicalement? Toute la question est là.
19 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1990
Nombre de lectures 20
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Pierre Mayer
Le nouvel ordre sud-africain en gestation
In: Politique étrangère N°2 - 1990 - 55e année pp. 369-387.
Citer ce document / Cite this document :
Mayer Pierre. Le nouvel ordre sud-africain en gestation. In: Politique étrangère N°2 - 1990 - 55e année pp. 369-387.
doi : 10.3406/polit.1990.3951
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1990_num_55_2_3951Abstract
South Africa's New Order in the Making, by Pierre Mayer
The bell tolled for the old order on the day of Nelson Mandela's liberation, the llth February, 1990. This
system had been installed in 1948, following the victory of Afrikaner nationalism over the old
Anglophoneelite. It is not impossible that in a few years' time, we might find that South Africa has
become one of the best integrated pluralist democracies in the world. A silent revolution in attitudes has
sown the seeds of change. But this does not mean that a stormy and tortuous path to democracy can
be avoided, even though the problems caused by Soviet interference in the région have disappeared.
The outcome is hardly in doubt and chances are excellent for the establishment of majoritarian
democracy in the Southern tip of Africa. Will South Africa become a major stabilising factor in Sub-
Saharan Africa and develop into an important player in world politics at the outset of the Twenty First
Century when geopolitical forces everywhere are undergoing radical change ? This is the vital question.
Résumé
La libération de Nelson Mandela, le 11 février 1990, a sonné le glas de l'ordre issu, après la dernière
guerre, de la victoire des nationalistes afrikaners sur le colonisateur britannique en 1948. Désormais, il
n'est même plus exclu que l'Afrique du Sud émerge, d'ici quelques années, comme l'une des
démocraties pluralistes les plus intégrées du monde. Historique, l'événement était en germe dans la
révolution silencieuse qui se tramait dans la société. II n'en demeure pas moins que l'évolution du pays
sera aussi tortueuse que tumultueuse et exacerbée, nonobstant la disparition des ingérences
soviétiques régionales qui cabraient les protagonistes. L' issue n'en est cependant pas douteuse ; un
nouvel ordre sud-africain a les meilleures chances de s'imposer à la pointe du continent noir. Facteur de
stabilité et de paix en Afrique australe et au Sahara, l'Afrique du Sud saura-t-elle et voudra-t-elle
s'affirmer comme une pièce maîtresse sur l'échiquier planétaire à l'orée du XXIe siècle, alors que
partout les forces de la géopolitique se redistribuent radicalement? Toute la question est là.ÉTRANGÈRE I 369 POLITIQUE
^ «.,™ Le nouvel ordre sud-africain Pierre MAYER *
en gestation
Les prodigieux événements qui ont secoué l'ordre établi en Europe de
l'Est depuis le second semestre de 1989 ont été précédés, un an plus
tôt, par des changements moins convulsifs mais tout aussi radicaux en
Afrique australe : l'URSS s'était dégagée, avec Cuba, du bourbier angolais
et, en accord avec les Etats-Unis et la République d'Afrique du Sud (la
RSA), le retrait des Cubains avait été échangé contre l'ultime décolonisat
ion africaine restée en suspens, celle de la Namibie.
Les perspectives ouvertes par le dégel Est-Ouest et par la décomposition du
bloc communiste seront aussi décisives en Afrique australe qu'en Europe.
Mais, tout bien pesé, elles s'y avéreront sans doute moins incertaines et
plus prometteuses. Cela étant, où en est la RSA, où va-t-elle dans ce
contexte inédit ? Ce que, depuis des lustres, on tenait là-bas pour impensab
le, l'éradication de l'apartheid, devient désormais non seulement inévita
ble, mais encore largement perçu et reconnu comme plus que souhaitable,
indispensable, nonobstant l'évidence que l'Afrique du Sud de demain sera
livrée à des défis sans pareils.
Par conséquent, pour peu que la RSA sache exploiter ses atouts, qui sont
incontestables, elle s'imposera comme le facteur de stabilité et de paix au
sud du Sahara et en Afrique australe. Toute la question est de savoir si et
comment la RSA, pièce maîtresse sur l'échiquier du monde en devenir, se
mettra en posture de faire ce pari et de le gagner.
Les défis
Même aux yeux de la plupart de ses anciens adeptes, l'apartheid, c'est-à-
dire la ségrégation forcée des ethnies, classées et codifiées dans leur vie
quotidienne en fonction de critères raciaux catégoriques, passe aujourdh'ui
pour économiquement impraticable, socialement et humainement injuste,
politiquement inacceptable et enfin moralement indéfendable. Si son acte de
décès est prévisible dans un avenir plus ou moins proche, son cadavre
bouge encore. L'apartheid agonise, son sort est scellé. En effet, il est
frappé à mort. Il est devenu mortel pour l'Afrique du Sud, à laquelle il
inflige le gâchis d'une économie et d'une société duales vouées à des
conflits inexpiables. En revanche, son démantèlement déclencherait des
progrès substantiels, à l'intérieur et à l'extérieur de la RSA.
* Inspecteur général des Finances. 370 I POLITIQUE ÉTRANGÈRE
• L'apartheid frappé à mort
La chute finale de l'apartheid est inscrite dans les devenirs mêmes de la
démographie et de la société sud-africaines.
La population actuelle est de 35,3 millions d'habitants dont 4,9 de Blancs,
soit 14 %. En 2000, elle s'élèvera à plus de 47 millions, dont 5 millions de
Blancs, soit seulement 10,5 % du total, c'est-à-dire deux fois moins, en
pourcentage, qu'en 1948, année de la conquête du pouvoir par les national
istes afrikaners.
Tout le surcroît de la population se déversera non pas dans les zones
rurales, mais dans les villes. Tandis que les Blancs progressent de moins de
1 % par an, les Noirs avancent de près de 3 % et leur urbanisation s'accroît
au rythme soutenu de 7,5 % par an. De 11 millions de Noirs urbanisés, on
passera à 27 millions en 2000. En 1980, les Noirs représentaient un peu plus
de la moitié de la population urbaine. En 2000, ils surclasseront les Blancs
dans un rapport de 5 à 1 et ils seront alors trois fois plus nombreux que les
Blancs, les métis et les Indiens réunis. Autrement dit, les villes sud-
africaines, jusqu'à présent l'apanage des Blancs, cesseront d'appartenir au
premier monde développé, dont elles sont un peu les avant-postes et les
témoins, et prendront l'aspect des énormes métropoles du Tiers-Monde.
Politiquement, les problèmes gigantesques et protéif ormes qui feront irrup
tion dans le sillage du développement et de l'urbanisation massive des Noirs
sont tels qu'ils ne pourront être abordés qïi'avec et non contre l'assentiment
de ces derniers. En l'absence d'une coopération constructive entre toutes les
ethnies, qu'elles soient blanche, noire, métis ou indienne, sans égard pour
les divisions entre ethnies et classes sociales, les défis sont tels qu'ils
engloutiront tout le monde : un partage du pouvoir entre Blancs et Noirs
n'est pas seulement inéluctable, il conditionne sans doute aussi la survie des
Blancs et du genre de vie qui, à leurs yeux, rend la vie digne d'être vécue.
Sinon, un pouvoir majoritairement noir est certain et son avènement, en
termes de contraintes et de coûts, serait encore plus prohibitif pour le pays.
• L'apartheid, mortel pour l'Afrique du Sud
Que la mort de l'apartheid soit fatalement proche, cela découle d'autre part
des charges de plus en plus excessives nécessitées pour le faire survivre
contre vents et marées. Jusque dans les années 60, la prodigalité du sous-sol
et de la rente minière, ainsi que celle de l'afflux constant des investiss
ements étrangers avaient garanti à la RSA une croissance économique
enviable, de 5 à 6 % par an.
Dès les années 70, l'économie sud-africaine a commencé à fléchir, pour
chuter sérieusement jusqu'à 0,3 % dans les années 80 *, alors que le courant
des investissements étrangers s'est tari et que, sous le coup du désinvestisse-
ment des Américains et des Européens, la RSA est même devenue exportat
rice nette de capitaux 2. Si la RSA avait pu bénéficier depuis 1975 du
1. Les taux de croissance furent les suivants : en 1986, 0,3 %, en 1987, 2,1 %, en 1988, 2,1 %,
en 1989, 2 %, alors que la population s'accroissait de 2,3 % par an.

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