Logique socio-stratégique au Proche-Orient - article ; n°5 ; vol.38, pg 533-568
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Description

Politique étrangère - Année 1973 - Volume 38 - Numéro 5 - Pages 533-568
Cette étude été écrite au lendemain de la Guerre des Six-Jours. Hors des remous événementiels et des espérances illusoires, elle tentait de décanter les limites logiques du conflit. Son pessimisme nous avait dissuadé de la publier. L'affaire Dreyfus, les camps de la mort, le ghetto de Varsovie nous ont inculqué ce que doivent être la dignité humaine, une vie libre dans un pays libre. Hôte pendant plus de vingt ans de la terre d'Islam, ne comptant plus le nombre de nos amis musulmans, nous ressentions profondément la sensation de droit bafoué et l'angoisse arabes. Nous avions repris ces pages lorsque l'incendie de la Mosquée al-Aqça raviva cette dialectique historique et architecturale menant des victoires de Salomon à celles de Salah ed-Dîn par les légions de Vespasien et les chevaliers du Temple. La guerre du Kippour - ou du Ramadhan - a relancé ce processus de guerre sub-limitée discontinue dont nous appréhendions alors la reconduction. Par souci d'objectivité, nous n'atténuons pas les plus abruptes propositions relatives à chaque camp. - Nous aimerions avoir tort.
36 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1973
Nombre de lectures 86
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Jean-Paul Charnay
Logique socio-stratégique au Proche-Orient
In: Politique étrangère N°5 - 1973 - 38e année pp. 533-568.
Résumé
Cette étude été écrite au lendemain de la Guerre des Six-Jours. Hors des remous événementiels et des espérances illusoires,
elle tentait de décanter les limites logiques du conflit. Son pessimisme nous avait dissuadé de la publier. L'affaire Dreyfus, les
camps de la mort, le ghetto de Varsovie nous ont inculqué ce que doivent être la dignité humaine, une vie libre dans un pays
libre. Hôte pendant plus de vingt ans de la terre d'Islam, ne comptant plus le nombre de nos amis musulmans, nous ressentions
profondément la sensation de droit bafoué et l'angoisse arabes. Nous avions repris ces pages lorsque l'incendie de la Mosquée
al-Aqça raviva cette dialectique historique et architecturale menant des victoires de Salomon à celles de Salah ed-Dîn par les
légions de Vespasien et les chevaliers du Temple. La guerre du Kippour - ou du Ramadhan - a relancé ce processus de guerre
sub-limitée discontinue dont nous appréhendions alors la reconduction. Par souci d'objectivité, nous n'atténuons pas les plus
abruptes propositions relatives à chaque camp. - Nous aimerions avoir tort.
Citer ce document / Cite this document :
Charnay Jean-Paul. Logique socio-stratégique au Proche-Orient. In: Politique étrangère N°5 - 1973 - 38e année pp. 533-568.
doi : 10.3406/polit.1973.1844
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1973_num_38_5_1844LOGIQUE SOCIO-STRATÉGIQUE
AU PROCHE-ORIENT*
par Jean-Paul CHARNAY
Cette étude a été écrite au lendemain de la Guerre des Six-Jours.
Hors des remous événementiels et des espérances illusoires, elle
tentait de décanter les limites logiques du conflit. Son pessimisme
nous avait dissuadé de la publier. L'affaire Dreyfus, les camps
de la mort, le ghetto de Varsovie nous ont inculqué ce que doivent
être la dignité humaine, une vie libre dans un pays libre. Hôte
pendant plus de vingt ans de la terre d'Islam, ne comptant plus
le nombre de nos amis musulmans, nous ressentions profondément
la sensation de droit bafoué et l'angoisse arabes. Nous avions
repris ces pages lorsque l'incendie de la Mosquée al-Aqça raviva
cette dialectique historique et architecturale menant des victoires
de Salomon à celles de Salah ed-Dîn par les légions de Vespasien
et les chevaliers du Temple. La guerre du Kippour — ou du
Ramadhan — a relancé ce processus de guerre sub-limitée di
scontinue dont nous appréhendions alors la reconduction. Par souci
d'objectivité, n'atténuons pas les plus abruptes propositions
relatives à chaque camp. — Nous aimerions avoir tort.
Face aux pays arabes, Israël se veut, depuis vingt ans, un état-
nation, et non seulement une communauté organisée.
A l'origine, le foyer juif en Palestine n'était qu'une réunion d'in
dividus se réclamant d'une religion, ou même plus simplement d'une
éventuelle origine raciale commune, et s'institutionalisant pour
mieux survivre. Par un processus socio-politique fort explicable, il
s'est transformé en état conférant aux individus un sentiment de pa
triotisme et de sécurité. Mais si le Juif tend à se transformer en Is
raélien, le séculaire espoir du retour à la terre promise et retrouvée,
le voeu toujours renouvelé : « L'an prochain à Jérusalem », ont sou
levé des harmoniques enthousiastes dans les esprits les plus athées.
* Cette étude prend place dans notre série d'articles Evolution des doctrines
stratégiques. Pour les notions stratégiques, v. notre Essai général de stratégie, Paris,
Champ libre, 1973. 534 CHARNAY
Contre Israël se dresse l'affirmation arabe appuyée sur une im
plantation plus que millénaire. Les Arabes n'ont pas cessé de reven
diquer la destruction de l'Etat israélien : revendication amèrement
prouvée par la non-intégration des Palestiniens dans leurs territoires
de repli et leur organisation en tant qu'entité autonome de droit in
ternational aspirant à revenir à leur tour un jour ou l'autre, une an
née ou l'autre, sur la terre de leurs ancêtres — sur la terre arabe.
Et certes, par rapport à notre période, et au-delà des légitimations
historico-canoniques, bibliques ou coraniques, s'annulant mutuelle
ment dans la contingence (nous ne portons aucun jugement de va
leur au fond), les Palestiniens sont bien les évincés.
D'autre part, dans la situation israélienne, se conjuguent divers
mouvements historiques de grande amplitude : insuffisante défini
tion et mauvais fonctionnement du statut des communautés minorit
aires, que ces communautés aient ou non le rang d'état : cf. la po
litique de petits pays africains, sud-américains ou la nécessaire ag
glomération du Benelux, face à leurs puissants voisins. Suspicion et
parfois relents de haine : humiliations réciproques ressenties par les
colonisés lors de la période impérialiste, par les colonisateurs lors
des guerres d'indépendance, par les pays en voie de développement
en raison des méfaits verbaux ou réels du néo-colonialisme, et peut-
être de la simple situation d'inégalité. Or, pour les Arabes, Israël,
par ses catégories mentales, ses modes de vie et son économie ne
peut faire partie des pays frères du Tiers-Monde. D'autant plus que
l'intégration du Juif dans les sociétés colonisatrices a entraîné de
puis longtemps des rancœurs dans les sociétés arabes dont étaient
bafouées les vieilles hiérarchies sociales. Si, eu égard à une série
de phénomènes complexes dont on n'a point à traiter ici, la dominat
ion du roumi, détestable en soi, n'entraînait cependant point une hai
ne personnelle à l'égard de la civilisation ou de l'individu français ou
anglais, par contre la supériorité acquise par le Juif dans la situa
tion coloniale suscitait de plus vifs refus : que l'on songe à l'émotion
soulevée par le décret Crémieux en Algérie.
Et cependant, c'est cette intégration qui contribue encore à ren
dre Israël partie du monde industriel — donc traduisent les Ara
bes — , du monde impérialiste contre lequel la lutte doit se pours
uivre. Au vieux mépris traditionnel de l'Arabe pour le Juif se joint
le sentiment de libération anti-coloniale, tous deux avivés par l'i
ndéniable « réussite » israélienne, économique ou militaire. A tout PROCHE-ORIENT 535
cela s'ajoute une dialectique tri-millénaire que certains théologiens
publicistes, bien ou mal intentionnés, font remonter à l'abandon
d'Agar et Ismaël, père des Arabes, dans le désert, poursuivant l'his
toire de cette séparation des « frères ennemis » jusqu'au nationa
lisme arabe et au sionisme.
Ainsi replacé dans une plus large perspective historique, le dra
me qui se joue entre Israéliens et Arabes éclaire l'inconciabilité
principielle des positions. Dans l'étape actuelle de la civilisation (pha
se de décolonisation et d'affirmation des aires géo-culturelles), les
Arabes ne peuvent pas abandonner leur souveraineté sur une portion
de leur terre, même s'ils se déclarent prêts à assurer l'existence de
populations israéliennes « non sionistes ». Les Israéliens ne peuvent
pas abandonner leur organisation étatique et militaire, condition es
sentielle de leur sécurité.
Cette simple constatation montre dès l'abord la quasi-impossibili
té, pour Israël, de concevoir soit un affaiblissement ou un partage
de souveraineté, soit la rentrée d'un nombre important de Palesti
niens sur son territoire — ce qui ruinerait son équilibre démograp
hique et sa sécurité intérieure — , soit l'organisation de deux états
à base non pas territoriale mais humaine, démographique, sur un
même espace qui avait été un moment préconisé pour l'Algérie,
mais qui n'avait convaincu ni les Européens ni les Algériens.
Certes, dans la contingence historique, et eu égard au rapport des
forces existant à tel moment déterminé, telle de ces solutions, ou
telle solution intermédiaire serait possible : par exemple, armées
arabes victorieuses, trop essoufflées pour obtenir une victoire totale
mais capables d'imposer

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