Pakistan : vers une « démocratie militaire » ? - article ; n°2 ; vol.67, pg 271-283
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Politique étrangère - Année 2002 - Volume 67 - Numéro 2 - Pages 271-283
Towards a Military Democracy?, by Mariam Abou Zahab Apart from breaking its isolation, Pakistan has not gained much from its unreserved support to the United States. The external debt has not been written off, and the economy shows few signs of recovery. Jihadi and sectarian movements have been banned, but many militants are still active and the law and order situation has not improved. In order to legitimise his stay in power for another five years, President Musharraf has announced a referendum which will be followed by general elections in October 2002, while Benazir Bhutto and Nawaz Sharii are still in exile. The military establishment wants to retain its hold on power, and everything seems to be in place for a repetition of history.
Au lendemain des attentats du 11 septembre, le général Moucharraf entraîne le Pakistan aux côtés des Etats- Unis dans la guerre contre le terrorisme et l'écrasement des Talibans. Quatre mois plus tard, le pays semble sortir renforcé de la crise : son isolement diplomatique est brisé, la banqueroute évitée, et l'avenir peint aux couleurs de la modération et du progressisme. Mais, aujourd'hui, la reprise des violences confessionnelles dans le pays et celle des attentats de l'autre côté de la frontière indienne montrent que les groupes jihadistes ont conservé leur capacité de nuisance, tandis que leurs liens n'ont pas été réellement coupés avec une partie de l'establishment militaire et des services secrets. Sur le plan politique, tout laisse à penser que l'histoire pourrait bien se répéter : en guise de démocratisation, l'armée va sans doute se contenter de partager le pouvoir avec des civils qu'elle aura choisis, après avoir instauré un système lui permettant de contrôler le Premier ministre et de légitimer ses interventions. Ainsi, avec la persistance du conflit avec l'Inde et de la crise économique, nombre de Pakistanais se demandent aujourd'hui ce que le soutien aux Etats-Unis a réellement apporté au pays.
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 2002
Nombre de lectures 25
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Abou Zahab
Pakistan : vers une « démocratie militaire » ?
In: Politique étrangère N°2 - 2002 - 67e année pp. 271-283.
Abstract
Towards a "Military Democracy?", by Mariam Abou Zahab
Apart from breaking its isolation, Pakistan has not gained much from its unreserved support to the United States. The external
debt has not been written off, and the economy shows few signs of recovery. Jihadi and sectarian movements have been
banned, but many militants are still active and the law and order situation has not improved. In order to legitimise his stay in
power for another five years, President Musharraf has announced a referendum which will be followed by general elections in
October 2002, while Benazir Bhutto and Nawaz Sharii are still in exile. The military establishment wants to retain its hold on
power, and everything seems to be in place for a repetition of history.
Résumé
Au lendemain des attentats du 11 septembre, le général Moucharraf entraîne le Pakistan aux côtés des Etats- Unis dans la
guerre contre le terrorisme et l'écrasement des Talibans. Quatre mois plus tard, le pays semble sortir renforcé de la crise : son
isolement diplomatique est brisé, la banqueroute évitée, et l'avenir peint aux couleurs de la modération et du progressisme. Mais,
aujourd'hui, la reprise des violences confessionnelles dans le pays et celle des attentats de l'autre côté de la frontière indienne
montrent que les groupes jihadistes ont conservé leur capacité de nuisance, tandis que leurs liens n'ont pas été réellement
coupés avec une partie de l'establishment militaire et des services secrets. Sur le plan politique, tout laisse à penser que l'histoire
pourrait bien se répéter : en guise de démocratisation, l'armée va sans doute se contenter de partager le pouvoir avec des civils
qu'elle aura choisis, après avoir instauré un système lui permettant de contrôler le Premier ministre et de légitimer ses
interventions. Ainsi, avec la persistance du conflit avec l'Inde et de la crise économique, nombre de Pakistanais se demandent
aujourd'hui ce que le soutien aux Etats-Unis a réellement apporté au pays.
Citer ce document / Cite this document :
Abou Zahab. Pakistan : vers une « démocratie militaire » ?. In: Politique étrangère N°2 - 2002 - 67e année pp. 271-283.
doi : 10.3406/polit.2002.5178
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_2002_num_67_2_5178POLITIQUE ÉTRANGÈRE 2/2002
Pakistan :
Mariam ABOU ZAHAB vers une « démocratie
militaire »?
Au lendemain des attentats du 11 septembre, le général Moucharraf entraîne le
Pakistan aux côtés des Etats- Unis dans la guerre contre le terrorisme et l'écras
ement des Talibans. Quatre mois plus tard, le pays semble sortir renforcé de la
crise : son isolement diplomatique est brisé, la banqueroute évitée, et l'avenir
peint aux couleurs de la modération et du progressisme. Mais, aujourd'hui, la
reprise des violences confessionnelles dans le pays et celle des attentats de l'autre
côté de la frontière indienne montrent que les groupes jihadistes ont conservé leur
capacité de nuisance, tandis que leurs liens n'ont pas été réellement coupés avec
une partie de l'establishment militaire et des services secrets. Sur le plan poli
tique, tout laisse à penser que l'histoire pourrait bien se répéter : en guise de
démocratisation, l'armée va sans doute se contenter de partager le pouvoir avec
des civils qu'elle aura choisis, après avoir instauré un système lui permettant de
contrôler le Premier ministre et de légitimer ses interventions. Ainsi, avec la per
sistance du conflit avec l'Inde et de la crise économique, nombre de Pakistanais
se demandent aujourd'hui ce que le soutien aux Etats-Unis a réellement apporté
au pays.
Politique étrangère
Quatre mois après son ralliement « sans réserve » aux Etats-
Unis, et alors que quelques commentateurs occidentaux
avaient prédit le chaos et la guerre civile, le Pakistan semblait
être sorti renforcé de la crise. L'isolement international a été
brisé, la banqueroute évitée, et le discours prononcé le 12 janvier 2002
par le général Moucharraf a été interprété comme une rupture avec la
politique menée depuis le début des années 1980. Certains sont allés
jusqu'à dire que, si le monde a changé le 11 septembre, c'est le 12 jan
vier 2002 qui représentait un tournant pour le pays, et le retour vers
Mariam Abou Zahab est chargée d'enseignement à l'Institut d'études politiques (IEP) de Paris et à l'Institut
national des langues et civilisations orientales (INALCO). :
272 / POLITIQUE ÉTRANGÈRE
le Pakistan modéré et progressiste imaginé par Jinnah1. Le général
Moucharraf a osé s'attaquer aux organisations extrémistes religieuses
qui terrorisent la population, une page semble tournée, un air de
liberté souffle dans les villes. Deux mois plus tard, pourtant, les même
libéraux qui avaient parlé de miracle se demandent si le « printemps
pakistanais » va durer et commencent à s'interroger sur la sincérité du
président. L'assassinat de Daniel Pearl, l'attaque contre le temple protes
tant d'Islamabad et la reprise dès la fin janvier des violences confessionn
elles ont en effet démontré que la capacité de nuisance des groupes
jihadistes était presque intacte. Par ailleurs, la volonté de Moucharraf de
conserver le pouvoir par le biais d'un référendum et les grandes
manœuvres politiques qui ont débuté dans la perspective des élections
prévues pour le mois d'octobre ont un air de déjà- vu et font craindre une
répétition de l'histoire.
L'économie : des espoirs déçus
La relance de l'économie était l'un des quatre arguments invoqués par
le général Moucharraf en septembre 2001 pour justifier son ralliement
à la coalition américaine2. La situation était alors quasi désespérée et
les attentes immenses. Les espoirs d'annulation de tout ou partie de la
dette extérieure - 37 milliards de dollars en septembre 20013 - ont été
très largement déçus4. Le Pakistan a certes obtenu de nouveaux prêts
et un rééchelonnement de la part du Club de Paris ; et le ministre des
Finances, Shaukat Kxix, très apprécié en Occident, se donne beaucoup
de mal pour expliquer à ses concitoyens que les taux préférentiels qui
ont été négociés permettront au pays d'économiser des centaines de
millions de dollars. Le FMI, officiellement satisfait des réformes enga
gées depuis octobre 1999, a approuvé en décembre 2001 un prêt de
1,32 milliard de dollars sur trois ans à un taux préférentiel de 0,5 %,
dans le cadre d'un programme de « facilité pour la réduction de la
1. Muhammad Ali Jinnah, promoteur de l'Etat pakistanais, en devint le chef en 1947.
2. Les autres points mis en avant étaient l'intégrité et la cohésion du pays, la sécurité de l'armement
nucléaire et la protection des intérêts pakistanais au Cachemire. « Highlights of General Pervez Musharraf's
Address to the Nation », Dawn, 19 septembre 2001.
3. La dette extérieure, qui était de 10 milliards de dollars en 1980, a atteint 43 milliards en mai 1998, après
les essais nucléaires, pour retomber à 37 à la suite du rééchelonnement intervenu en 2000. La moit
ié de la dette est multilatérale.
4. Pour des détails sur le contrecoup économique pour le Pakistan des attentats du 1 1 septembre, voir
M. Abou Zahab, « Pakistan les hoquets de l'histoire », Politique internationale, n° 94, hiver 2001-2002. :
;
: VERS UNE « DÉMOCRATIE MILITAIRE » ? / 273 PAKISTAN
pauvreté et pour la croissance », qui doit être débloqué en douze ver
sements trimestriels soumis à un examen des progrès accomplis. Les
nouveaux prêts sont toutefois assortis de conditions draconiennes5
réclamées de longue date par le FMI et la Banque mondiale, notam
ment l'application de la General Sales Tax (GST, équivalente à la
TVA) de 15 % aux médicaments, à Phuile végétale (ghee) et aux
engrais (entre autres), ainsi que la suppression des prix subventionnés
pour les produits agricoles, le gaz et l'électricité.
Ces mesures fort impopulaires, et qui augmentent considérablement

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