« Ogo » et « binukedine ». Quelques considérations sur les cultes de Lebé-Nommo et de Binu chez les Dogon. République soudanaise - article ; n°2 ; vol.158, pg 181-194
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« Ogo » et « binukedine ». Quelques considérations sur les cultes de Lebé-Nommo et de Binu chez les Dogon. République soudanaise - article ; n°2 ; vol.158, pg 181-194

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Description

Revue de l'histoire des religions - Année 1960 - Volume 158 - Numéro 2 - Pages 181-194
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 1960
Nombre de lectures 18
Langue Français

Extrait

Montserrat Palau-Marti
« Ogo » et « binukedine ». Quelques considérations sur les
cultes de Lebé-Nommo et de Binu chez les Dogon. République
soudanaise
In: Revue de l'histoire des religions, tome 158 n°2, 1960. pp. 181-194.
Citer ce document / Cite this document :
Palau-Marti Montserrat. « Ogo » et « binukedine ». Quelques considérations sur les cultes de Lebé-Nommo et de Binu chez les
Dogon. République soudanaise. In: Revue de l'histoire des religions, tome 158 n°2, 1960. pp. 181-194.
doi : 10.3406/rhr.1960.9096
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhr_0035-1423_1960_num_158_2_9096■
« Ogô » et (( binukedine »
Quelques considérations sur les cultes
de Lébé-Nommo et de Binu chez les Dogon
(République soudanaise)
Les termes ogô et binukedine désignent les prêtres des
cultes de Lébé-Nommo et de Binu, respectivement1.
L'étymologie du mot ogô n'a pas encore été nettement
établie ; il a, peut-être, une racine commune avec gà et ода,
termes qui appartiennent aux langues fô (Dahomey) et
yoruba (Dahomey, et Nigeria)* respectivement, et qui se tr
aduisent par chef. ;
« Cet homme [le ogô] qui est choisi jeune, devient, en
quelque manière, le représentant du peuple dogon entier,
au contraire des autres chefs qui, eux, exercent leur autorité
sur une région restreinte et sont les plus vieux des fractions
qu'ils commandent »2.
Cependant, il faut dire que, en pratique,» il y a un hogon
par région et [que] au-dessus se trouve un- hogon -suprême,
choisi obligatoirement dans la tribu Aru et résidant à~ Aru
(prèsd'Ibi), dans les falaises »3.
Le ogô suprême est jeune, les autres sont des hommes
1) Tous les mots africains sont écrits en orthographe phonétique et chaque
son est représenté par une seule lettre, toujours la même. La nasalisation est
indiquée par la tilde au-dessus de la voyelle correspondante. Le d barré (d) est
une interdentale. Exemples : -
ogô, lire : ogon ;
binukeâine, lire : binoukedine (ď comme le th anglais dans îather), etc.
2) Griaule, L'oncle utérin..., p. 44-45.
3) Palau-Marti, Les Dogon, p. 70. REVUE DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS 182
vieux ; les deux types de ogô — jeune et vieux — se retrou
vent effectivement dans les mythes1.
Binukedine se traduit littéralement par « gardien deBinu ».
Ce dernier mot dériverait de binna (parti, et, avec plus
d'exactitude, parti pour l'endroit d'où on est venu) et vyay
(revenu) ; binna vyay aurait donné binuyay, ce mot se serait
contracté pour devenir1 b innay, et, enfin, bí/ш2.
Avant d'essayer d'exposer les rapports qu'on peut observer
entre les deux personnages qui nous occupent,. il sera néces
saire de les placer dans un contexte plus général en faisant
appel à la mythologie dogon :
Au commencement, il n'y avait que le dieu Amma. Le
verbe d'Amma donna origine à la première chose créée, la
graine du pô (Digitaria exilis) qui tournait en spirale. De
ce mouvement est issu Yaduno tal (« l'œuf du monde ») qu'on
doit considérer comme la matrice primordiale puisqu'il conte
nait le principe de tous les éléments de la création, et, de façon
plus précise, les germes de deux couples de jumeaux mixtes.
Le mâle de l'un des couples se révolta contre dieu en
sortant de la matrice primordiale avant terme. . Il vola une
partie des éléments de la création et descendit sur terre avec
une arche. Ayant laissé sa- femelle derrière lui, il commit
le premier inceste avec la terre — élément féminin et épouse
d'Amma son père. Cet être révolté fut transformé en renard
et. son nom est Yurugu3.
Yurugu représente une première création .manquée ; il
est seul, privé de son complément féminin pour l'éternité;
il s'oppose toujours à dieu en dévoilant ses secrets aux hommes.
En fait, Yurugu ne doit pas être vu sous un jour purement
négatif; du point de -vue philosophique, il représente un
élément indispensable dans le système du monde ; d'autre
part,, une tâche aussi importante que la divination lui est
attribuée. En effet, le principal système de chez
1) Dieterlen, Parenté..., p. 132.
2) De Ganay, Le binou..., p. 6.
3) C'est le Vulpes pallida. ,
DE LÉBÉ-NOMMO ET DE BINU CHEZ LES DOGON 183 CULTES
les Dogon est une géomancie : on pose des questions à Yurugu
et le devin lit les réponses dans les traces de pas du renard
sur le sable, qu'il interprète1.
L'autre couple de jumeaux sortit de l'œuf ou matrice
primordiale au terme normal de la gestation; on l'appelle
Nommo, désignation qui représente aussi bien les deux
jumeaux à la fois, ou bien, l'un ou l'autre des deux.
Nommo est la réalisation du vouloir d'Amma, c'est la
création dans son aspect* positif, ce qui équivaut à dire
ordre, jour et lumière, pluie et fertilité. En ce sens, Yurugu
est la contradiction de la volonté d'Amma et s'oppose par
là à Nommo ; Yurugu est alors désordre, nuit et obscurité,
sécheresse et stérilité.
Pour remédier au déséquilibre causé par la sortie prémat
urée de Yurugu de la matrice primordiale, dieu procéda au
sacrifice de Nommo ; ceci eut pour effet de purifier le monde,
c'est-à-dire, de le mettre en état de recevoir l'idée d'Amma
pour qu'elle puisse y prendre forme.
C'est ainsi qu'après différentes tentatives, fut créé le
monde tel que nous le connaissons. La première création était
contenue dans l'arche de Yurugu. En fait, plusieurs arches
descendirent du ciel successivement, représentant autant de
créations. La dernière arche fut conduite par le Forgeron.
Comme ceux des premiers êtres humains, les membres
du ' Forgeron étaient dépourvus d'articulations; l'arche du heurta violemment la terre et comme conséquence
de la secousse ses membres se brisèrent à l'endroit des coudes
et, des genoux, ce qui les rendait aptes au travail.
Dans les premiers temps, les hommes ne mouraient pas :
devenus vieux ils se métamorphosaient en animaux — ser
pents, notamment — et disparaissaient. Le langage des
serpents n'était pas le s même -que celui des hommes.
]) Cf. D. Paulme, La divination par les chacals chez les Dogon..., p. 1-14
(Jmirnal de la Société des Africanistes, 7, Paris, 1937) ; M. Griaule, Notes sur la
divination par les chacals..., p. 113-141 (Bull, du Comité ďětudes hist, et scientif.
,k VA.O.F., '20, Paris, 1937). ■
184 REVUE DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS
Une fois, un vieillard qui s'était déjà métamorphosé en
serpent, se montra sous cette forme à un groupe d'hommes
qui avaient commis une faute et il leur en fit reproche dans
leur propre langue. Il commit ainsi une rupture d'interdit
car, transformé en . serpent, il ne devait plus employer la
langue des hommes. Cette rupture . d'interdit causa la mort
du coupable. On l'enterra et on inventa le culte des masques.
Lorsque. les Dogon décidèrent d'émigrer de. leur pays
d'origine, ils ouvrirent la tombe. du premier mort et y trou
vèrent un serpent vivant,, « forme vivante ,de^ l'ancêtre
Septième et du Lébé, qui portait sur son: crâne.;, un épi
de mil m1.
Le serpent est le Lébé toujours vivant qui vient, en tant
que reptile, visiter; son prêtres « Tous les soirs le serpent
Lébé se rend chez le hogon pour lui lécher le corps; il. lui
communique i ainsi, avec sa salive, la force nécessaire pour
faire marcher le monde »2.
Lébé est une hypostasc de Nommo. Ces deux noms
évoquent toujours la vie, ce qui, par définition, ne peut. pas
mourir * vraiment.
En tant que tel; Nommo — pas plus qu'Amma — ne
reçoit aucun culte. Cependant, étant donné sa -place, de
premier plan dans les mythes et son association intime avec
Lébé, je crois justifié d'accoler les deux noms dans l'expres
sion « culte de Lébé-Nommo •» que j'ai utilisée» tout au début
de -cet article.
Si, un peu plus haut, j'ai opposé, d'un certain point de vue,
Nommo et Yurugu, on peut également opposer Lébé à Binu,
soit, la vie et la mort, respectivement:
Dans les mythes,. Binu est parfois présenté comme un
vieill

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