Alchimie et littérature à Paris en des temps de trouble : Le Discours d Autheur incertain sur la pierre des philosophes (1590) - article ; n°1 ; vol.41, pg 75-122
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Description

Bulletin de l'Association d'étude sur l'humanisme, la réforme et la renaissance - Année 1995 - Volume 41 - Numéro 1 - Pages 75-122
48 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1995
Nombre de lectures 61
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Didier Kahn
Alchimie et littérature à Paris en des temps de trouble : Le
Discours d'Autheur incertain sur la pierre des philosophes
(1590)
In: Bulletin de l'Association d'étude sur l'humanisme, la réforme et la renaissance. N°41, 1995. pp. 75-122.
Citer ce document / Cite this document :
Kahn Didier. Alchimie et littérature à Paris en des temps de trouble : Le Discours d'Autheur incertain sur la pierre des
philosophes (1590). In: Bulletin de l'Association d'étude sur l'humanisme, la réforme et la renaissance. N°41, 1995. pp. 75-122.
doi : 10.3406/rhren.1995.2030
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhren_0181-6799_1995_num_41_1_2030ALCHIMIE ET LITTÉRATURE À PARIS
EN DES TEMPS DE TROUBLE :
LE DISCOURS D'AUTHEUR INCERTAIN
SUR LA PIERRE DES PHILOSOPHES (1590)*
A Luce et Fernando
Inédit durant près de cinq siècles, le Discours d'autheur incertain
sur la pierre des philosophes, dont l'action se déroule à Paris en des
temps dramatiques, entre la Journée des Barricades (12 mai 1588) et le
siège de la ville (31 août 1590), constitue un excellent exemple de la
complexité et de la richesse des rapports entre « littérature » et
alchimie à la fin de la Renaissance1. S'ouvrant sur une section allégo
rique où surgissent à profusion songes, visions et énigmes, ce Discours
s'émaille de treize sonnets alchimiques - chose en soi remarquable -
appelés à une étonnante fortune jusqu'aux premières décennies du
XVIIe siècle ; s'achevant à nouveau par une allégorie, elle aussi versif
iée, il offre, chemin faisant, plusieurs lectures alchimiques de romans
médiévaux. Fondé sur les doctrines les plus classiques de l'alchimie du
Moyen Age, il les réinterprète à la lumière de la doctrine du spiritus
mundi empruntée à Marsile Ficin via H.-C. Agrippa, et y ajoute une
discrète touche paracelsienne. Un épisode de son prologue marque la
toute première apparition, en cette fin de Renaissance, d'un grand
thème alchimique appelé au siècle suivant à un succès considérable
Cet article reprend et développe l'un des cours que j'ai consacrés en 1992-1993 à
un Historique des rapports entre littérature et alchimie, au Moyen Age et au
début des temps modernes, dans le cadre de la conférence de M. Antoine Faivre à
la Ve section de l'École Pratique des Hautes Études (Paris).
1. Adoptant ici le point de vue rétrospectif de l'histoire littéraire, on restreindra
le sens du mot « littérature » à son acception actuelle, qui repose sur les notions de
« genres littéraires » et de « grands auteurs », renonçant à l'entendre dans son sens
le plus large, celui de la res literaria dont tout l'espace, à la Renaissance, est
occupé par l'encyclopédie du savoir (cf. Marc Fumaroli, L'Age de l'éloquence.
Rhétorique et « res literaria » de la Renaissance au seuil de l'époque classique,
Genève : Droz, 1980, rééd. Paris : Albin Michel, 1994, p. 17-32).
RHR 41 — Décembre 1995 76 DIDIER KAHN
(entre autres par le relais du mythe rosicrucien), celui de l'adepte
voyageur, démontrant la réalité de son art par des transmutations pu
bliques. Mais ce qui donne finalement à ce texte tout son sens, c'est
son inscription dans une historicité fratricide où seule l'alchimie est
porteuse de consolation, où elle seule est à même de recréer l'entente
entre des hommes que l'Histoire, au même moment, rend irréconcil
iables. L'alchimie du Discours d'autheur incertain devient ainsi lieu de
médiation par excellence, reprenant à son compte l'une des plus
hautes fonctions de la littérature.
Avant de n'étudier - faute de place - que le premier et le dernier
de ces aspects, il convient de rappeler brièvement la nature des rap
ports entre littérature et alchimie à la fin de la Renaissance, du moins
tels que l'état actuel de la recherche permet de les esquisser2. Depuis
le Moyen Age, l'alchimie occupe, comme on le sait, une place margi
nale par rapport à l'ensemble du savoir : si elle fait partie intégrante
du paysage culturel du temps, le universitaire ne l'a pourtant
jamais admise parmi les disciplines dignes d'être enseignées3, et les
diverses classifications des sciences et des arts qui ont à en connaître
hésitent à la situer dans les arts mécaniques ou, à l'opposé, dans le
vaste domaine de la philosophie naturelle, ce qui ne traduit que trop
la difficulté — d'ailleurs toujours actuelle — à trouver une définition
claire, précise et complète de ce que l'on appelle « alchimie »4. Cette
2. Je n'ai pu prendre encore connaissance de la totalité de la thèse de Frank
Greiner, Tradition alchimique et esthétique littéraire à l'automne de la
Renaissance française (1583-1646), Université de Paris X-Nanterre, 1995.
3. Cf. entre autres Robert Halleux, Les Textes alchimiques, Turnhout : Brepols,
1979 (Typologie des sources du Moyen Age occidental, fasc. 32) ; Barbara Obrist :
« Die Alchemie in der mittelalterlichen Gesellschaft », dans : Christoph Meinel
(éd.), Die Alchemie in der europàischen Kultur- und Wissenschaftsgeschichte,
Wiesbaden : Otto Harrassowitz, 1986, p. 33-59 ; William Newman : « Technology and
Alchemical Debate in the Late Middle Ages », Isis, 80 (1989), p. 423-445 ; et les ar
ticles de Chiara Crisciani et B. Obrist dans : Le Crise dell'Alchimia I The Crises
of Alchemy, actes du colloque de Lausanne (8-10 nov. 1993), à paraître dans
Micrologus, 4 (1995).
4. Voir R. Halleux (cf. n. 3), p. 43-45, et Jean-Marc Mandosio : « La place de l'alch
imie dans les classifications des sciences et des arts à la Renaissance »,
Chrysopœia, 4 (1990-1991), p. 199-282 ; version abrégée de cet article : « L'alchimie
dans les classifications des sciences et des arts à la Renaissance », dans : J.-C.
Margolin, S. Matton (éd.), Alchimie et philosophie à la Renaissance. Actes du col
loque international de Tours (4-7 déc. 1991), Paris : Vrin, 1993 (De Pétrarque à
Descartes, LVII), p. 11-41. ALCHIMIE ET LITTÉRATURE À PARIS 7 7
marginalité d'ordre institutionnel et scientifique est aggravée par une
lacune criante : l'alchimie n'est représentée dans aucune des sources
où s'est formée la littérature médiévale ou que redécouvre la
Renaissance, sources antiques, bibliques, celtiques ou gréco-orientales
(ralchimie gréco-égyptienne n'étant connue que très progressivement
au XVe et au XVIe siècle), tandis qu'astrologie, magie et médecine
bénéficient d'une haute antiquité et de modèles célèbres5. Ce qui
marque donc les rapports entre littérature et alchimie au Moyen Age,
c'est surtout l'absence remarquable de l'alchimie dans la littérature
médiévale6. S'il n'en est plus exactement de même à la Renaissance,
où l'alchimie conquiert dès la Chrysopœia de G. A. Augurelli (1515) ses
premières « lettres de noblesse humanistes »7, on comprend néanmoins
5. Sur l'alchimie gréco-égyptienne et sa réception à la Renaissance, cf. John
Ferguson : « On the First Editions of the Chemical Writings of Democritus and
Synesius », Proceedings of the Philosophical Society of Glasgow, 16 (1884-1885), p.
36-46 et 287-288, à compléter par Ferguson, Bibliotheca Chemica. A Catalogue of
the alchemical, chemical and pharmaceutical books in the collection of the late
James Young of Kelly and Durris, Glasgow : James Maclehose and sons, 1906 (repr.
Hildesheim : Georg Olms, 1974), I, p. 205 ; plus récemment, cf. Robert Halleux : « La
controverse sur les origines de la chimie, de Paracelse à Borrichius », dans : J.-C.
Margolin (éd.), Acta Conventus neo-Latini Turoniensis, Paris : Vrin, 1980 (De
Pétrarque à Descartes, XXXVIII), t. II, p. 807-819 ; François Secret : « Pierio
Valeriano et l'alchimie », dans : D. Kahn, S. Matton (éd.), Alchimie : art, histoire et
mythes. Actes du Ier colloque international de la Société d'Étude de l'Histoire de
l'Alchimie, Paris : Universitas, 1995 (Textes et Travaux de Chrysopœia, 1), sous
presse, et surtout l'article de Sylvain Matton : « L'influence de l'humanisme sur la
tradition alchimique », dans : Le Crise dell'Alchimia I The Crises of Alchemy (cf.
n. 3). Voir aussi ci-dessous, n. 9.
6. Cf. D. Kahn : « Historique de

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