Danse sacrée à Surakarta: la signification du Bedojo Ketawang suivi d une note sur le culte rendu à la Roro Kidul par les ramasseurs de nids d hirondelles - article ; n°1 ; vol.3, pg 117-132
19 pages
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Danse sacrée à Surakarta: la signification du Bedojo Ketawang suivi d'une note sur le culte rendu à la Roro Kidul par les ramasseurs de nids d'hirondelles - article ; n°1 ; vol.3, pg 117-132

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Description

Archipel - Année 1972 - Volume 3 - Numéro 1 - Pages 117-132
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1972
Nombre de lectures 13
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Kangdjeng Gusti Pangeran
Harjo Hadiwidjojo
A. Damais
D. Lombard
Danse sacrée à Surakarta: la signification du Bedojo Ketawang
suivi d'une note sur le culte rendu à la Roro Kidul par les
ramasseurs de nids d'hirondelles
In: Archipel. Volume 3, 1972. pp. 117-132.
Citer ce document / Cite this document :
Hadiwidjojo Kangdjeng Gusti Pangeran Harjo, Damais A., Lombard D. Danse sacrée à Surakarta: la signification du Bedojo
Ketawang suivi d'une note sur le culte rendu à la Roro Kidul par les ramasseurs de nids d'hirondelles. In: Archipel. Volume 3,
1972. pp. 117-132.
doi : 10.3406/arch.1972.991
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/arch_0044-8613_1972_num_3_1_991117
DANSE SACREE A SURAKARTA: LA SIGNIFICATION DU
BEDOJO KETAWANG
par Kangdjeng Gusti Pangeran Harjo HADIWIDJOJO
Les danses dites bedojo ont longtemps compté au nombre des prérogatives des sou
verains de Java central. Si le Sultan de Djogdjakarta autorisait dès 1918 la réalisation de
ces danses en dehors du palais, les Susuhunan de Surakarta (Solo) ont veillé à maintenir
jusqu'à nos jours leur caractère éminemment sacré et ésotérique. Il ne s'agissait à
l'origine nullement d'un "spectacle", au sens occidental du terme, mais d'une cérémonie
solennelle à laquelle n'assistaient que le souverain lui-même, les femmes de son entou
rage et quelques hauts dignitaires. La danse dite Bedojo ketawang, considérée comme la
plus sacrée, était, et est encore, exécutée par neuf danseuses, en présence du Susuhun
an, lors de la date anniversaire de son accession au trône.
En raison de son caractère sacré, peu d"étrangers" étaient admis à y assister, ce
qui explique que jusqu'à une date très récente, nous ne disposions que de rares précisions
à son sujet. En 1962 toutefois, A.S. Pakubuwana XII autorisait M. Nusjirwan Tirta-
amidjaja à prendre quelques photographies et à publier une description de la cérémonie
(1) En 1971, l'autorisation a même été accordée, pour la première fois, de filmer une
bonne partie de la danse qui, dans sa forme actuelle, dure environ une heure et demie.
L'origine de cette danse est rapportée traditionnellement au règne de Sultan Agung
de Mataram (1 ère moite du XVII ème s.); elle commémore en principe la rencontre de
Sénapati Ingalaga (grand père de Sultan Agung et fondateur de la dynastie de Mataram,
1575-1601) avec la Roro Kidul ou "Reine de la Mer du Sud". C'est de cette rencontre,
longuement décrite dans la Babad Tanah Djawi (2), et de l'alliance alors conclue entre
Sénapati et le monde des esprits malins auxquels préside la Roro Kidul que la
dynastie de Mataram aurait tiré la force qui l'a maintenue sur le trône jusqu'à nos
jours. Mais il se pourrait faire aussi que cette "alliance" remonte à une époque bien
antérieure, à un moment où l'influence indienne était prépondérante à Java.
x) Voir: Nusjirwan Tirtaamidjaja, A Bedaja Ketawang dance performance at the
Court of Surakarta", Indonesia 3, 1967, pp. 30-62.
») Babad Tanah Djawi, éd. Olthof, La Haye, 1941; texte p. 78-79; trad, hollandaise
p. 80-81. 118
"Transgressant l'interdit" (3) qui oblige tous les membres de la lignée à garder le
secret sur cette dance, le Prince Hadiwidjojo publiait dès 1919, au Java Congres
dans les éditions du Java Institunt, une petite communication en néerlandais intitulée
De Bedojo Ketawang. Tout dernièrement il a confié au Musée Radyapusaka de Solo le
texte d'un mémoire plus développé, rédigé en indonésien et présenté au cours de la céré
monie "Pisungsun Maharsitamà" à l'université Saraswati en 1971. Il est intitulé: Bedojo
Ketawang, Hubungannja dengan ilmu perbintangan dan tarian sacraal di tjandî2; le tirage
stencilé de ce texte n'a eu malheureusement qu'une distribution limitée. Erudit passion
né, le Prince Hadiwidjojo est une autorité indiscutée pour tout ce qui concerne la
culture javanaise et plus particulièrement la tradition de la cour de Surakarta ; nous le
remercions bien vivement de nous autoriser à publier ici, en français, de larges extraits
de son étude. Nous remercions également M. Adji Damais qui s'est chargé de nous
procurer un exemplaire du texte indonésien.
Dans la mesure où l'auteur fait partie intégrante du groupe limité qui se trouve
être dépositaire de la tradition, il s'agit d'ailleurs bien plus que d'une "étude"; il
s'agit d'un témoignage. (D.L.)
AWIGNAM ASTU !
"Puisse-t-il n'y avoir aucun obstacle !"
Avant de commencer notre exposé, nous tenons à exprimer cette for
mule rituelle, car nous savons que nous allons enfreindre l'interdit et fran
chir la ligne de démarcation qui sépare le monde des hommes de celui des
esprits malins et subtils, monde obscur et angoissant où d'ordinaire person
ne se risque. Ce monde est dans la mouvance de la Roro Kidul, de la
Reine du Sud, qui a créé la danse Bedojo ketawang et qui est redoutée
et honorée sur toute la côte méridionale de Java, depuis Parang Teritis,
au sud de Djogdja, jusqu'à Banjuwangi (4). Sur toute cette côte, on lui voue
un culte, on lui fait des offrandes et on veille à ne jamais porter un vêt
ement vert-clair (hidjau gadung).
Si nous nous enhardissons à franchir cette ligne, ce n'est pas par pro
vocation, ou comme dit le dalang: ngemping tara gendjah pati(h), "pour
prendre des risques". C'est parce que nous sentons qu'il faut sauver notre
héritage culturel, notre culture, notre art, nos traditions, et que si nous ne
8) Selon l'expression même utilisée par l'auteur : melanggar aweran djanur kuning, "passer
outre à l'interdiction de la feuille de cocotier jaunie"; allusion aux palmes sèches
qu'on suspend au dessus du chemin dont on veut interdire l'accès (note du traduct
eur).
4) Le culte de la Roro Kidul se trouve également à l'ouest de Parang Teritis et l'on
sait que la Reine est également "présente" à Pelabuhan Ratu, au sud du Pays Sunda
(n.tr).
•) Mot à mot : "chercher la souffrance et chercher la mort", risquer le tout pour le
tout pour arriver le plus vite possible à ses fins. (n.tr). 119
parlons pas maintenant, le soleil qui s'incline déjà, finira par se coucher
derrière les montagnes, définitivement. En raison même de son caractère
sacré, le Bedojo ketawang n'a guère fait l'objet d'une étude véritable; c'est
de notre devoir d'en dire aujourd'hui la signification, si nous ne voulons
pas que cette signification s'obscurcisse et s'altère, comme cela s'est déjà
produit pour plus d'un autre trait de notre culture.
Citons par exemple le cas des tjantang balung, qui, à l'origine, étaient
des officiants de haut rang et qui ont fini par devenir de simples clowns,
des bouffons de cour(6); et celui du sindjang tombai, ou étoffe "rapiécée",
faite de triangles multicolores juxtaposés, dont le caractère fondamenta
lement sacré s'est oblitéré peu à peu (7). Et pourtant, les prêtres du Teng-
ger portaient un vêtement de ce genre lorsqu'ils dirigeaient la cérémonie
de kesodo autour du cratère du Bromo (8) et le Sultan de Djogdja Ha-
mengkubuwono VII portait encore en certaines grandes occasions une
veste en tambal appelée Antakusuma. A Solo, le kutang Antakusuma était
la tenue de parade d'un des corps de la garde du Susuhunan Pakubu-
wono IX.
Les représentations de Bedojo ketawang nous ont toujours fasciné et
nous nous rappelons parfaitement l'atmosphère surnaturelle qui empliss
ait alors la salle d'apparat (panangkilan). Lorsque nous étions tout jeune,
nous appréhendions quelque peu l'arrivée du jour anniversaire, car la
représentation ne durait alors pas moins de deux heures et demie et les
rites de purification auxquels nous devions nous soumettre au préalable
duraient plus longtemps encore. Nous portions les cheveux très longs et
lorsqu'ils étaient défaits, ils nous tombaient jusqu'au genou (on ne nous
les coupa qu'au moment de notre départ pour la Hollande et je me rappell
e fort bien des crissements de la paire de ciseaux..) avant chaque repré-
•) Cf. Th. Pigeaud, Java in the XlVth century, t. IV, p. 317 : "In the 19th centrury (and
probably before) the Cantang Balungs (two headmen, as usual, with subordinat

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