Des raisons d’utiliser les images pour informer sur la réalité et de la difficulté de ne pas confondre le document et le monde - article ; n°1 ; vol.80, pg 65-75

Serge Tisseron

Description

Communications - Année 2006 - Volume 80 - Numéro 1 - Pages 65-75
Nous avons besoin à la fois de mots et d’images pour penser. Mais dans les deux cas nous courons deux risques: l’emballement émotionnel et la réduction de la complexité du monde au point de vue du discours. Tout document, qu’il soit écrit ou filmé, rencontre ces deux difficultés. Mais les images contiennent encore un autre danger: confondre leur impact sur nous, étroitement tributaire de nos représentations personnelles, avec ce qu’elles contiennent en réalité.
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

• Publié par: COMMUNICATIONS
• Publié le: 01 janvier 2006
• Nombre de lectures: 9
• Langue: Français

Extrait

Serge Tisseron

Des raisons d’utiliser les images

pour informer sur la réalité

et de la difficulté à ne pas confondre

le document et le monde

Pourquoi choisit-on d’utiliser les images plutôt que l’écriture pour

mettre en forme une pensée personnelle ? Et comment une information

communiquée par le canal des images parvient-elle à son spectateur

différemment d’une information communiquée par un texte ? Ces deux

questions sont complémentaires et pourtant bien différentes.

Le choix de privilégier l’information en images a longtemps été consi-

déré comme une preuve de volonté manipulatoire. Le langage – parlé ou

écrit – susciterait des pensées alors que les images ne susciteraient que

des émotions. Mais c’est confondre ici plusieurs choses. Il y a parfois

d’excellentes raisons de préférer une image à un discours !

1. Des raisons de préférer les images.

Les graphiques et autres schémas donnent une vision synthétique de

réalités complexes difficiles à appréhender sans le rapport d’une visuali-

sation jouant sur les proportions de tailles et de volumes. Mais il y a une

autre raison de préférer les images aux mots. C’est qu’elles nous permet-

tent parfois d’échapper au choix difficile d’un langage.

Celui qui choisit de communiquer avec des images échappe en effet à

un problème que la mobilité sociale a fait connaître à un grand nombre

de nos contemporains depuis trente ans, à savoir la nécessité de choisir

une langue plutôt qu’une autre.

Dans toute culture il existe non pas une seule langue, mais plusieurs.

Dans l’Égypte ancienne, chaque langue avait d’ailleurs sa propre écriture,

et celle des prêtres devait rester opaque au peuple. Pendant très long-

temps, l’Église catholique a de la même manière privilégié le latin comme

une langue incompréhensible pour la majorité des fidèles. Et, aujourd’hui

encore, il faut bien reconnaître qu’il existe un langage populaire, qui a

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