Dévotions anciennes et nouvelles au XVIIIe siècle. A propos de l état des processions de Saint-Martin-de-Ligueil en 1777 - article ; n°2 ; vol.83, pg 359-369
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Dévotions anciennes et nouvelles au XVIIIe siècle. A propos de l'état des processions de Saint-Martin-de-Ligueil en 1777 - article ; n°2 ; vol.83, pg 359-369

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Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest - Année 1976 - Volume 83 - Numéro 2 - Pages 359-369
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Publié le 01 janvier 1976
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Langue Français

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Robert Sauzet
Dévotions anciennes et nouvelles au XVIIIe siècle. A propos de
l'état des processions de Saint-Martin-de-Ligueil en 1777
In: Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest. Tome 83, numéro 2, 1976. pp. 359-369.
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Sauzet Robert. Dévotions anciennes et nouvelles au XVIIIe siècle. A propos de l'état des processions de Saint-Martin-de-Ligueil
en 1777. In: Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest. Tome 83, numéro 2, 1976. pp. 359-369.
doi : 10.3406/abpo.1976.2818
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/abpo_0399-0826_1976_num_83_2_2818anciennes et nouvelles Dévotions
au XVIIL siècle
A propos de l'état des processions
de Saint-Martin de Ligueil en 1777
par R. SAUZET
Le 16 mai 1777, le curé de Ligueil, Corneille Clou, adressa au
doyen de Saint-Martin de Tours, seigneur du lieu, un état des pro
cessions de sa paroisse, en le priant de le transmettre à l'archevêque
qui avait entrepris une « réforme générale des processions ». La lettre
d'envoi, l'état lui-même et les décisions de l'ordinaire inscrites à sa
suite, le 25 juillet, constituent de bons documents sur les rapports
entre la mentalité de clercs formés au moule de la réforme tri-
dentine et les pratiques religieuses du peuple chrétien (1). Ces textes
sont un témoignage des efforts poursuivis, pendant toute la période
moderne et au-delà, par un clergé soucieux d'épurer le culte des
saints, au point de vue doctrinal, en luttant contre les superstitions
et au point de vue moral, en combattant les comportements jugés
répréhensibles, liés à ces cultes. A ce dernier point de vue, les pro
cessions sont particulièrement suspectes par les beuveries, les rixes,
les débordements sexuels qui parfois les accompagnent (2). La
réforme catholique a hérité, à certains égards, de la défiance de
la Devotio moderna et des protestants à l'endroit de l'errance pieuse.
Triomphe de la religion stable dans le cadre paroissial de la pra-
(1) Dossier « Procession et Messes », Arch. dép., Indre-et-Loire, G 18. Clou
était curé depuis 1770. Il prêta le serment constitutionnel en 1791, J.-X. Carré
de Busserolle, Dictionnaire géographique, historique et biographique d'Indre-et-
Loire, t. IV, p. 64.
(2) Sauvageon, prieur de Sennely, en Sologne, au début du xviir siècle, se
reprochait d'avoir toléré ce qu'il appelle « les impietez d'un certain homme
qui ne portait jamais la croix qu'estant yvre et qui, par ses démarches tortues
et ses chansons bachiques, faisait rire les fous et gémir les sages », cit. par
B. Edeine, la Sologne, t. II, 1974, p. 712. Sur les ripailles, les rixes ou la
« dissipation » des processionnaires, cf. J. Ferté, la Vie religieuse dans les
campagnes parisiennes, 1622-1695, 1962, p. 337-338 et 360. R. Sauzet, les Visites
pastorales dans le diocèse de Chartres pendant la première moitié du XVIIe
siècle, 4e part. V, Edizioni di Storia e Letteratura, Rome, 1975. J.-L. Flandrin,
les Amours paysannes, XVI'-XVII' siècles, 1975, p. 116. 360 ANNALES DE BRETAGNE
tique régulière, rigorisme moral, recul de l'eschatologie, volonté de
promouvoir un nouveau type de chrétiens, ces aspects sont bien
connus. Les perspectives d'ensemble ont été tracées tant par les
travaux de Jean Delumeau sur la « lutte (des réformateurs catho
liques) contre une mentalité païenne » que par l'enquête d'anthro
pologie religieuse d'Alphonse Dupront étudiant les prolongements
contemporains d'un combat douteux où la dévotion aux « bons
saints » l'a parfois emporté sur la religion du curé (3).
Pour nous en tenir à l'époque moderne et à la Touraine, nous
constatons que, en matière de processions, les statuts synodaux
depuis la fin du xvie siècle, s'efforcent d'établir un certain ordre par
la proscription des déplacements de plus d'une lieue, la séparation
des sexes et le retour en rang afin que ces cérémonies ne se trans
forment, comme le disait l'archevêque Victor Le Bouthillier, en
« parties de promenades criminelles » (4). C'est dans cette ligne
pastorale austère que s'inscrit le désir de Mgr de Conzié de s'info
rmer de l'état au vrai des processions de son diocèse, son interdiction
d'en mener hors de la paroisse et sa décision de renvoyer au dimanche
dans l'octave celles organisées en l'honneur des saints (5). La réponse
du curé de Ligueil nous donne non seulement un répertoire de
pratiques cultuelles mais une série de jugements sur ces pratiques.
C'est à ces deux niveaux populaire et clérical que nous devons
brièvement analyser son témoignage.
I. — LES PROCESSIONS DE LIGUEIL
Sous neuf rubriques, le curé Clou dénombre les processions qui
sont d'usage particulier à sa paroisse. Il ne tient pas compte de
celles qui sont communes à toute l'Eglise, qu'il mentionne incidem
ment (6). Il ressort de ce répertoire et de ces mentions qu'on pro-
cessionnait beaucoup à Ligueil : une trentaine de ces cortèges sont
évoqués. Les deux tiers ont lieu au printemps ou en été. Près de
la moitié sont liés au culte du Christ, les autres sont destinés à
honorer la Vierge et les saints.
a) Processions chrîstologiques
A quatorze reprises se déroulaient des processions en l'honneur
du Saint Sacrement. Il s'agit là d'une dévotion ranimée, presque
(3) J. Delumeau, le Catholicisme entre Luther et Voltaire, 1971, p. 358 sq.
A. Dupront, « De la doléance politique au pèlerinage panique », in Niveaux de
culture et groupes sociaux, 1967, pp. 144-170.
(4) Cf. J. Maan, Sancta et metropolitana ecclesia Turonensis, 1667. Le Bou-
thouillier, Ordonnances synodales, 1670, VI.
(5) Au titre des continuités, notons que, dans la préface de son Processionnal,
Conzie reprend l'exhortation du Concile provincial de Tours, en 1583, de « dévote
et modeste procedere », Processionale Turonense, Paris, 1784.
(6) Cf. le titre de son Etat des processions : « outre celles de St Marc, des
Rogations, de la Feste Dieu et son Octave » et, au titre 5, allusions aux proces
sions de la Conception, Nativité et Purification de la Vierge. ANNALES DE BRETAGNE 361
recréée par la Réforme catholique (7) et, dans le diocèse de Tours,
développée au xvine siècle par les archevêques pour lutter contre
les influences jansénistes. Aux cortèges solennels de la Fête-Dieu et
de son octave, s'ajoutait, tous les premiers dimanches du mois, une
procession organisée par la confrérie du Saint Sacrement érigée,
dans la paroisse, quarante ans au plus tôt par l'archevêque Jacques
Chapt de Rastignac.
Camille Clou ne parle pas de la participation populaire à ces
manifestations pas plus qu'aux trois processions d'actions de grâces
après la fête de Pâques (lundi, mardi de Pâques, et dimanche de
Quasimodo). D'autres documents conservés dans la liasse « Proces
sions et messes » attestent l'affluence à celle de la Fête-Dieu dont
l'itinéraire est changé afin de faciliter le croisement des participants
allant à la chapelle Sainte-Anne, dans les faubourgs de Ligueil, et
en revenant (8).
b) Notre-Dame-dès-Anges
La foule se rend également très nombreuse, le 15 août, à la
chapelle de Notre-Dame-des-Anges, à un quart de lieue de Ligueil,
puisqu'elle est « trop petite pour contenir tout le monde quoique
plus grande en elle-même que beaucoup d'églises paroissiales ». Le
succès connu au siècle précédent par ce sanctuaire où s'étaient mult
ipliés les miracles « attestez par la commune croyance du peuple
et des plus signalez de tout le pays » (9), se maintient donc au
xvme siècle. Les paroissiens y tiennent beaucoup : « le jour de
l'Assomption... occasionnera de violents murmures si les proces
sions en sont supprimées » écrit le curé au doyen de Saint-Martin.
Son mémoire est assez précis au sujet de cette solennité d'un type
fort différent des processions du Saint Sacrement : « Le jour de
l'Assomption de la Sainte Vierge on va après la sainte messe, c'est-à-
dire après six heures, processionnellement à ND des Anges, dont
cette fête est patronale. On y dit beaucoup d'évangiles jusque vers
onze heures, alors on y chante la grande mes

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