Entre la rue résidentielle et le boulevard : le cas des soi de Bangkok - article ; n°34 ; vol.14, pg 21-32
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Flux - Année 1998 - Volume 14 - Numéro 34 - Pages 21-32
On the ground that they unavoidably mix car drivers and residents, many contemporary urban planners consider that distributor and collector roads should not exist: to them, apart from expressways, an ideal street network should be made up of only residential streets and boulevards devoid of dwellings. This model is based on the assumption that traffic is not compatible with the day-today life of street dwellers. To the opinion of most planners, only dead-end streets are suitable for residential areas. This article suggests, however, that traffic externalities are not always negative. The case of Bangkok's dead-end streets opening to traffic shows that street dwellers may be satisfied with a higher-than-negligible traffic volume. This is related to the fact that more traffic generally means better accessibility and more opportunities for commerce. Even if one should be cautious in inferring general rules from particular cases, one may at least conclude that the appearance of distributor roads in the urban fabric is not necessarily pathological. The differentiation of streets must be understood as a consequence of the fact that territorial and local uses of the urban space are maintained together in a complex relationship, constituted by a dynamic mixture of repelling and attractive forces. These findings may seem of little account but, considering how urban planners work in general, they deserve to be repeated again with a certain degree of insistence.
Parce qu'elles mêlent usuellement fonction circulatoire et fonction résidentielle, de nombreux urbanistes contemporains considèrent que les voies dites « de distribution » ne devraient pas exister : si on suivait à la lettre leurs propositions d'aménagements, la trame viaire des agglomérations urbaines serait restreinte à des rues de quartier et à des boulevards commerçants d'où les habitations seraient exclues (cas des voies autoroutières urbaines mis à part). Ces conceptions s'enracinent dans une tradition maintenant ancienne, établie sur le constat d'une opposition entre les besoins de la vie locale et ceux du trafic. En témoigne le fait que la plupart des urbanistes considèrent comme acquis que l'impasse est le meilleur choix pour la localisation d'une résidence. Cet article rappelle cependant que les effets du trafic ne sont pas toujours négatifs pour les riverains. Le détour par le cas des soi (les rues) de Bangkok montre ainsi que l'ouverture d'une voie résidentielle sans issue au trafic de transit peut être appréciée par les habitants, en raison notamment de l'amélioration de l'accessibilité et des opportunités de développement commercial qui peuvent accompagner une telle transformation. Même s'il faut se garder de dériver sans précaution des conclusions générales d'un cas bien particulier, on peut en conclure que l'apparition de voies de distribution n'est pas nécessairement pathologique. La différenciation des éléments constitutifs de la trame viaire doit plutôt être considérée comme la réponse qu'apporte l'espace urbain au fait que loin d'être simplement opposées, valeur territoriale et valeur locale de la rue entretiennent une relation complexe, où les forces de répulsion n'agissent qu'en concurrence avec des forces d'attraction. Le constat peut paraître banal, mais au vu des pratiques actuelles d'aménagement viaire, il mérite d'être rappelé.
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1998
Nombre de lectures 13
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Éric Charmes
Entre la rue résidentielle et le boulevard : le cas des soi de
Bangkok
In: Flux n°34, 1998. pp. 21-32.
Citer ce document / Cite this document :
Charmes Éric. Entre la rue résidentielle et le boulevard : le cas des soi de Bangkok. In: Flux n°34, 1998. pp. 21-32.
doi : 10.3406/flux.1998.1234
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/flux_1154-2721_1998_num_14_34_1234Abstract
On the ground that they unavoidably mix car drivers and residents, many contemporary urban planners
consider that distributor and collector roads should not exist: to them, apart from expressways, an ideal
street network should be made up of only residential streets and boulevards devoid of dwellings. This
model is based on the assumption that traffic is not compatible with the day-today life of street dwellers.
To the opinion of most planners, only dead-end streets are suitable for residential areas. This article
suggests, however, that traffic externalities are not always negative. The case of Bangkok's dead-end
streets opening to traffic shows that street dwellers may be satisfied with a higher-than-negligible traffic
volume. This is related to the fact that more traffic generally means better accessibility and more
opportunities for commerce. Even if one should be cautious in inferring general rules from particular
cases, one may at least conclude that the appearance of distributor roads in the urban fabric is not
necessarily pathological. The differentiation of streets must be understood as a consequence of the fact
that territorial and local uses of the urban space are maintained together in a complex relationship,
constituted by a dynamic mixture of repelling and attractive forces. These findings may seem of little
account but, considering how urban planners work in general, they deserve to be repeated again with a
certain degree of insistence.
Résumé
Parce qu'elles mêlent usuellement fonction circulatoire et fonction résidentielle, de nombreux urbanistes
contemporains considèrent que les voies dites « de distribution » ne devraient pas exister : si on suivait
à la lettre leurs propositions d'aménagements, la trame viaire des agglomérations urbaines serait
restreinte à des rues de quartier et à des boulevards commerçants d'où les habitations seraient exclues
(cas des voies autoroutières urbaines mis à part). Ces conceptions s'enracinent dans une tradition
maintenant ancienne, établie sur le constat d'une opposition entre les besoins de la vie locale et ceux
du trafic. En témoigne le fait que la plupart des urbanistes considèrent comme acquis que l'impasse est
le meilleur choix pour la localisation d'une résidence. Cet article rappelle cependant que les effets du
trafic ne sont pas toujours négatifs pour les riverains. Le détour par le cas des soi (les rues) de Bangkok
montre ainsi que l'ouverture d'une voie résidentielle sans issue au trafic de transit peut être appréciée
par les habitants, en raison notamment de l'amélioration de l'accessibilité et des opportunités de
développement commercial qui peuvent accompagner une telle transformation. Même s'il faut se garder
de dériver sans précaution des conclusions générales d'un cas bien particulier, on peut en conclure que
l'apparition de voies de distribution n'est pas nécessairement pathologique. La différenciation des
éléments constitutifs de la trame viaire doit plutôt être considérée comme la réponse qu'apporte
l'espace urbain au fait que loin d'être simplement opposées, valeur territoriale et valeur locale de la rue
entretiennent une relation complexe, où les forces de répulsion n'agissent qu'en concurrence avec des
forces d'attraction. Le constat peut paraître banal, mais au vu des pratiques actuelles d'aménagement
viaire, il mérite d'être rappelé.Entre la rue résidentielle
FLUX
et le boulevard : п°34
Octobre - Décembre
1998 le cas des soi de Bangkok*
pp. 21 - 32
Eric Charmes
Pour les spécialistes de la gestion du trafic, les voies se divisent en quatre
grandes catégories, à savoir, par ordre d'importance pour la circulation : les
voies de desserte, les voies de distribution, les boulevards et les autoroutes1.
L'un des objectifs de cette hiérarchisation est d'éviter la multiplication des
intersections entre les voies locales et les grands axes de circulation. Les carre
fours sont en effet autant de facteurs de ralentissement du trafic et l'une des
principales options qui s'offrent aux techniciens pour réduire leur nombre est
de créer des voies intermédiaires, distribuant le trafic venu des grandes artères
vers les voies de desserte et réciproquement.
Parce qu'elles mêlent usuellement fonction circulatoire et fonction résident
ielle, ces voies dites « de distribution » constituent l'une des principales pierres
d'achoppement des débats urbanistiques contemporains. Ainsi, si l'on s'en
tenait aux modèles proposés par les urbanistes, ces rues n'existeraient pas : cas
des voies autoroutières mis à part, la trame viaire des agglomérations urbaines
serait restreinte à des rues de quartier et à des boulevards commerçants d'où les
habitations seraient exclues. Ces conceptions s'enracinent dans une tradition
maintenant ancienne, établie sur le constat d'une opposition entre les besoins de
la vie locale et ceux du trafic. En témoigne le fait que la plupart des urbanistes
considèrent comme acquis que l'impasse est le meilleur choix pour la localisa
tion d'une résidence.
Comme on va le voir cependant, les transformations d'impasses en voies
traversantes en cours à Bangkok contredisent les présupposés qui sous-tendent
ces idées. Certes, dans la capitale thaïlandaise comme ailleurs, la pollution et le
bruit engendrés par le trafic ne sont appréciés de personne, mais les gens savent
aussi que ces nuisances sont indissociables d'effets plutôt positifs, tels que
l'amélioration de l'accessibilité ou que la possibilité de développer une activité
Éric CHARMES est doctorant à commerciale. Mieux, dans certaines situations économiques et sociales, des
l'Institut français d'urbanisme. Il est riverains peuvent considérer que ces effets positifs compensent largement les membre du département CNRS Théorie désagréments du passage du trafic devant leur résidence. des mutations urbaines (UMR 7543).
Ses recherches, menées sous la
direction de M. Goldblum, portent sur Même s'il faut se garder des comparaisons hâtives, le détour par le cas des l'interaction des différents usages de la
soi (les rues ; lire soi) de Bangkok suggère ainsi que les voies de distribution ne rue. Il s 'agit notamment, à partir du
cas des soi de Bangkok, de repérer les *Cet article reprend certaines conclusions d'une recherche réalisée par l'auteur pour le conflits et les synergies possibles dans compte du secrétariat permanent du Plan urbain (voir É. Charmes, Les soi du superbloc l'utilisation de la rue comme outil de
de Lad Phrao - De la voie de lotissement à la voie de liaison : les valeurs de l'espace valorisation foncière, canal de
viaire, Paris, Ministère de l'Aménagement du territoire, de l'équipement et des transflux circulatoires et comme espace
ports, Laboratoire Théorie des mutations urbaines, 1997, 184 p.). résidentiel ou commercial.
21 n°34 Octobre - Décembre 1998 FLUX
sont pas les foyers pathogènes que les urbanistes voient Figure 1. Plan de Radburn, New Jersey, Clarence Stein &
Henry Wright, 1929 (in C. S. Stein, Towards New Towns for souvent en elles. Loin d'être opposés, les besoins de la vie
America, Cambridge, MIT Press, 1966, p. 43 ; cité par résidentielle et ceux du trafic peuvent se combiner de CL. Girling & K.I. Helphand, Yard, Street, Park, p. 61). diverses manières. La différenciation des rues ne tire donc
pas simplement sa légitimité du fait qu'elle participe à la
fluidification du trafic comme on le dit souvent : elle
répond aussi à la diversité des articulations possibles entre
les usages circulatoires et les usages résidentiels ou com
merciaux de l'espace viaire.
L'IMPASSE : LA VOIE RESIDENTIELLE
PAR EXCELLENCE ?
NOTES SUR LE STATUT DE L'IMPASSE
DANS L'URBANISME VIAIRE
Illustration non autorisée à la diffusion
Depuis les grandes enquêtes d'opinion menées dans les
années 1970 dans différents pays occidentaux, on sait
que le trafic automobile est, au delà d'un certain stade
que Donald Appleyard a fixé à 2 000 véhicules par jour,
mal accepté par les riverains2. L'impact du trafic

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